Les nouvelles pratiques commerciales dans la vente en ligne
L’essor du commerce électronique contribue à l’animation concurrentielle du secteur de la distribution.
Le commerce électronique a crû à un rythme plus élevé que le commerce de détail physique ces dernières années, pour atteindre en France 8 % de la valeur des ventes de l’ensemble du commerce de détail. La hausse de la demande pour les produits en ligne s’accompagne d’une plus grande diversité des offreurs, le nombre de sites de vente en ligne augmentant de l’ordre de 20 % par an.
Selon l’avis 12-A-20 du 18 septembre 2012 de l’Autorité de la concurrence portant sur le fonctionnement concurrentiel du commerce électronique, les prix en ligne apparaissent sensiblement inférieurs à ceux de la distribution physique pour certains types de produits comme l'électrodomestique et la parapharmacie. Le commerce en ligne semble présenter d’autres avantages, en termes de variété des produits proposés et de disponibilité 24h sur 24, susceptibles d’animer le secteur de la distribution.
La vente en ligne a fait apparaître de nouveaux modèles de distribution et de nouveaux acteurs.
La vente en ligne est réalisée aussi bien par des opérateurs qui effectuent l’essentiel de leurs ventes sur Internet (les « pure players ») que par des distributeurs traditionnels qui diversifient leurs modes de distribution (distributeurs dits « click&mortar »). Certains fabricants utilisent Internet afin de vendre directement leurs produits aux consommateurs.
En outre, de nouveaux acteurs sur Internet tels que les places de marché, qui mettent en relation vendeurs et consommateurs, et les sites comparateurs de prix, sont susceptibles d’améliorer la transparence et l’information du consommateur.
Face au développement du commerce en ligne, certains fabricants développent des pratiques commerciales différenciées selon la nature des distributeurs.
L’essor de la vente en ligne amène parfois les fabricants à restreindre la liberté de commercialisation de leurs produits en ligne afin de mieux maîtriser le mode de distribution de leurs produits. Par exemple, les accords d’exclusivité ou de distribution sélective, qui préexistaient à la vente en ligne, ont été étendus à cette dernière, tandis que des restrictions à la distribution en ligne ont pu être mises en oeuvre.
Ces pratiques sont justifiées par certains acteurs au titre de la garantie de la qualité de service, améliorée en boutique grâce au contact direct entre le vendeur et le client et à la possibilité d’essayer les produits sur place, ou de la lutte contre le parasitisme de certains consommateurs, qui viendraient en boutique essayer les produits avant d’acheter en ligne.
La pratique décisionnelle et la jurisprudence précisent le niveau de liberté commerciale et tarifaire dont disposent les fabricants vis-à-vis de leurs distributeurs en ligne.
Le règlement (UE) d’exemption n°330/2010 sur les accords verticaux traite de manière uniforme l’ensemble des relations entre fournisseurs et distributeurs, sans analyser séparément les spécificités de la vente en ligne. Néanmoins, la pratique décisionnelle et la jurisprudence communautaire et interne d’une part, et les textes de « soft law » tels que les lignes directrices de la Commission européenne sur les restrictions verticales (2010/ C 130/01) et l’avis 12-A-20 de l’Autorité de la concurrence d’autre part, permettent de préciser l’application du règlement (UE) à la distribution en ligne.
Par exemple, les lignes directrices de la Commission européenne délimitent le champ des ventes en ligne actives par la mise en place par le distributeur de promotions ciblées sur une clientèle déterminée. Ainsi, l’interdiction à un revendeur de proposer ses produits en ligne sans action de promotion ciblée est constitutive d’une restriction de vente passive. En cohérence avec cette délimitation des ventes actives et passives en ligne, la pratique décisionnelle française considère l’interdiction de revente en ligne comme une restriction de concurrence par objet.
Les questions-clés de la séance
Comment respecter la liberté d’organisation de la distribution pour les fabricants sans compromettre l’exercice de la concurrence entre distributeurs ?
Certaines spécificités de la vente en ligne peuvent-elle être mises en avant pour justifier leur restriction ?
Discussion de cas :
À titre d’exemple, les intervenants ont commenté l’avis de l’Autorité de la concurrence n° 12-A-20 du 18 septembre 2012 relatif au fonctionnement concurrentiel du commerce électronique. Le débat a été animé par Emmanuel Combe, Vice-président de l’Autorité de la concurrence.
Intervenants:
- Patrick Rey, Professeur d'économie, Université de Toulouse (TSE)
- Laurence Idot, Professeur de droit, Université Paris II-Panthéon Assas, Membre de l’Autorité de la concurrence