Fiche pays Zambie (Juin 2025)

Alors que la Zambie, en défaut de paiement depuis novembre 2020, enregistrait de nouvelles avancées dans le processus de restructuration de sa dette externe (tant bilatérale que commerciale), le pays a été frappé fin 2023 par une sécheresse d’une ampleur inédite, qui a lourdement affecté son économie. La croissance s’est toutefois montrée résiliente, atteignant 4,0% en 2024. Elle devrait s’accélérer à 5,8 % en 2025, portée par la reprise du secteur agricole et la normalisation de la production énergétique. A un an d’élections présidentielles disputées (août 2026), les perspectives demeurent toutefois fragiles, en raison des incertitudes liées à la conjoncture mondiale, à l’avenir de l’accord AGOA, à la volatilité des cours du cuivre, aux chocs climatiques récurrents et à la persistance de vulnérabilités budgétaires. Dans ce contexte, le ministre des Finances a récemment demandé une prolongation d’un an, jusqu’en octobre 2026, du programme approuvé par le FMI en août 2022.

1. Situation économique et politique

1.1. Situation politique

Les élections générales d’août 2021 ont porté au pouvoir l’opposant M. Hakainde Hichilema, qui à sa sixième tentative a battu sèchement le président sortant Edgar Lungu, au mauvais bilan démocratique et économique. Il s’agit de la troisième alternance politique depuis l’indépendance du pays en 1964. Cette victoire électorale surprise, rapidement reconnue par le président Lungu, a été bien accueillie par la sphère économique et par les marchés, rassurés par le profil du nouveau président (homme d’affaires maitrisant les dossiers économiques) et le programme qu’il a porté pendant la campagne (axé sur la relance de l’économie et sur un retour à l’ordre budgétaire). La période de grâce succédant à l’élection s’est toutefois progressivement estompée, dès la fin de l’année 2022, dans un contexte marqué par une restructuration de la dette plus lente qu’initialement anticipé et une mise en œuvre laborieuse des réformes, notamment dans le secteur minier.

1.2. Éléments structurels relatifs à l’économie

Avec un PIB de 26,3 Mds USD en 2024, la Zambie est la quatrième économie d’Afrique australe après l'Afrique du Sud, l'Angola et le Zimbabwe. L’économie reste très dépendante du secteur minier (qui représente près de 17,4% du PIB et environ 67% des recettes d’exportation), en particulier du cuivre dont la Zambie est le second producteur du continent. Le secteur agricole, majoritairement composé d’exploitations vivrières, peu performantes et particulièrement dépendantes des conditions climatiques, représente environ 1,8% du PIB, mais près de 60% des emplois. L’économie est peu inclusive, centrée sur des secteurs d’activité à forte intensité capitalistique et/ou de rente (les mines, la construction et la distribution), largement contrôlés par des capitaux étrangers, dont les bénéfices sont captés par une petite partie de la population.

Avec un PIB par habitant de 1 246 USD en 2024, la Zambie fait partie des pays à « revenu intermédiaire de la tranche inférieure ». Ses indicateurs socio-économiques sont dégradés : le pays, l’un des plus inégalitaires au monde (indice de Gini de 57,1), est frappé par un taux de pauvreté élevé (64,3% au seuil international de 2,15 USD par jour). Il se situe dans le dernier tiers du classement mondial en terme d’IDH – 153ème rang sur 191 pays en 2023.

2. Conjoncture et finances publiques

2.1. Conjoncture économique

L’économie zambienne, qui avait été particulièrement affectée par la fin du super-cycle des matières premières (2000-2014), puis par la crise de la Covid-19 (croissance moyenne de 2,1% par an entre 2015 et 2020, contre près de 7% en moyenne sur la période 2000-2014), a enregistré un fort rebond à partir de 2021 (+6,2% en 2021, +5,2% en 2022 et +5,4% en 2023).  Elle s’est montrée particulièrement résiliente en 2024 (4,0%), dans un contexte pourtant marqué par une sécheresse inédite, provoquée par le phénomène El Nino. Le pays, dont le mix énergétique repose presque exclusivement sur l’hydroélectricité, a ainsi fait face à de graves difficultés d’approvisionnement en électricité (baisse de production de 29% sur l’année), dont le gouvernement a toutefois limité l’impact économique en priorisant la fourniture d’électricité aux grandes compagnies minières, au détriment des ménages zambiens. Le secteur agricole, dominé par une agriculture vivrière non irriguée, a également été touché (-9,2% sur l’année). L’activité a en revanche été tirée par le secteur de l’information et de la communication, ainsi que par les secteurs des mines, des services financiers, et de la construction.

La croissance devrait s’accélérer en 2025 (prévision de +5,8% selon le FMI), soutenue par une activité soutenue dans le secteur minier ainsi que par le rebond des secteurs de l’agriculture et de la production d’électricité dans un contexte marqué par une pluviométrie normale. Les perspectives à moyen-terme sont positives (prévisions de +6,4% et +6,5% en 2026 et 2027, puis stabilisation autour de +5% selon le FMI). Ces prévisions restent toutefois soumises à de nombreux aléas baissiers : i) un ralentissement de la croissance mondiale ; ii) l’incertitude entourant le renouvellement de l’accord AGOA (African Growth and Opportunity Act) ; iii) une variation brutale des prix des matières premières, et notamment du cuivre ; iv) l’impact des chocs climatiques.

Les pressions inflationnistes restent élevées, mais montrent des signes d’atténuation. Sous l’effet de la hausse des prix alimentaires et de la dépréciation du kwacha, l’inflation a atteint en moyenne 15 % en 2024. Depuis son pic de février 2025 (16,8 % en glissement annuel), elle suit néanmoins une trajectoire de reflux (12,6 % en août), reflétant la modération des prix des produits alimentaires. Pour contenir ces pressions inflationnistes, la Banque de Zambie (BoZ) a relevé son taux directeur de 300 points de base en 2024, avant de procéder à une nouvelle hausse de 50 points de base en février 2025, le portant à 14,5 %. Le Kwacha, qui se déprécie continûment (sa valeur a été divisée par près de quatre sur les dix dernières années, sauf en 2022, pour atteindre 23,61 ZMW pour 1 USD le 1er septembre) et avait en particulier subi une forte pression en 2024 (dépréciation de 21,5% en nominal), s’est stabilisé en 2025 (+15% depuis le 1er janvier), dans un contexte marqué par la fin de la sécheresse et une forte appréciation des prix du cuivre.

2.2. Situation des finances publiques

La crise de la Covid-19 a été le déclencheur d’une crise de la dette souveraine, qui était en gestation depuis plusieurs années. Alors que la politique de développement des infrastructures tous azimuts menée par l’ancien président Edgar Lungu, financée à taux de marché et dans une grande opacité par la Chine, avait mené le pays sur une trajectoire toujours moins soutenable (déficits publics de 8% du PIB en moyenne sur la période 2015-2019), la situation s’est encore aggravée en 2020 (déficit de près de 14% sur l’année). En novembre 2020, la Zambie a ainsi été contrainte de faire défaut sur un remboursement d’une échéance d’Eurobond, décidant de ne plus rembourser que ses créanciers multilatéraux.

La politique de consolidation fiscale poursuivie par le gouvernement zambien a permis un début de diminution du déficit public, qui a atteint 3,3% du PIB en 2024 (contre 5,5% du PIB en 2023 et 7,8% du PIB en 2022). Le solde primaire (qui avait enregistré en 2023 son premier excédent en quinze ans, à 0,6% du PIB) a poursuivi son amélioration en 2024 (excédent de 2,9% du PIB). Cette amélioration a été principalement soutenue par la réduction générale des dépenses observée depuis 2021, qui s’est poursuivie en 2024 (de 34,0% du PIB en 2020 à 25,5% du PIB en 2024), dans un contexte de difficultés persistantes de financement, qui n’ont pas permis de réaliser l’ensemble des investissements projetés. Les recettes (22,2% du PIB en 2024, contre 21,9% du PIB l’année précédente) ont également progressé, soutenues par une croissance plus importante que prévu et des recettes exceptionnelles (remboursements d’arriérés et paiement de dividendes), dans un contexte en revanche marqué par une diminution des dons des partenaires internationaux (0,3% du PIB en 2024, contre 1,1% du PIB l’année précédente).

Le déficit devrait toutefois repartir à la hausse en 2025, pour atteindre 5,3% du PIB (FMI), en raison de dépenses plus importantes qu’initialement anticipé : i) décalage d’un remboursement d’arriérés de carburant (à hauteur d’1,3 point de PIB), non réalisé en 2024 ; ii) revue à la hausse des dépenses d’intérêt de la dette (à hauteur de 0,9 point de PIB) par rapport aux prévisions de décembre 2024 (principalement liée à la reprise du service de la dette extérieure restructurée et à l’augmentation des emprunts domestiques au quatrième trimestre 2024, dont les intérêts n’ont pas été pris en compte dans le budget 2025) ; iii) remboursement de divers arriérés, notamment liés au programme de soutien à l’agriculture (à hauteur de 0,7 point de PIB) ; iv) augmentation des dépenses de santé pour prendre en compte l’arrêt des opérations d’USAID dans le pays (à hauteur de 0,2 point de PIB). Malgré plusieurs coupes dans des programmes jugés non prioritaires, et plusieures mesures en recettes annoncées par le ministre des Finances dans le budget rectificatif présenté le 3 juillet au Parlement, l’excédent primaire devrait ainsi sensiblement se réduire (prévision de 1,1% du PIB).

La dette publique zambienne a atteint 124% à la fin de l’année 2024 (30,9 Mds USD). La dette publique externe du pays représentait 21,4 Mds USD (dont 19,3 Mds USD libellés en devises), dont 13,0 Mds USD en cours de restructuration (cf. infra). Ces 21,4 Mds de dette se divisent entre créanciers bilatéraux (6,6 Mds USD), multilatéraux (5,3 Mds USD) et commerciaux (6,1 Mds USD, dont 2,7 Mds USD sous forme d’obligations internationales). A ces montants s’ajoutent des arriérés de l’Etat et de l’entreprise publique d’électricité ZESCO (1,3 Mds USD), ainsi que la dette en monnaie locale détenue par les non-résidents (2,1 Mds USD). La Zambie n’a toujours pas accès aux marchés internationaux de dette.

3. Relations avec la communauté financière internationale

La Zambie est éligible aux financements les plus concessionnels des banques multilatérales de développement. Le portefeuille de la Banque mondiale compte une trentaine de projets actifs, pour un montant total de 3 Mds USD, dont neuf projets engagés depuis le début de l’année 2023, notamment dans les secteurs de l’énergie, de la protection sociale et de la résilience climatique. Parmi les opérations récentes figurent une subvention de 208 M USD pour répondre à la sécheresse en 2024, ainsi qu’un financement de 292 M USD approuvé en janvier 2025 portant sur une interconnexion électrique avec la Tanzanie. Le portefeuille de la Banque africaine de développement (BAfD) comprend environ 15 projets actifs, pour un montant total de près de 800 MUSD.

Les relations entre le FMI et la Zambie, historiquement tendues, se sont normalisées sous l’effet de la double crise de la Covid-19 et de la dette, détente qui s’est confirmée après l’élection de Hakainde Hichilema. Après la conclusion d’un accord de principe en décembre 2021 et de longues négociations en vue de l’octroi d’assurances de financement par les principaux créanciers de la Zambie, le conseil d’administration du FMI a approuvé le 31 août 2022 un programme de financement (Facilité Elargie de Crédit – FEC). Ce programme, dont le montant initial de 978,2 M DTS (soit environ 1,3 Md USD) a été réhaussé en réponse à la sécheresse à 1271,2 M DTS fin juin 2024 (soit 1,7 Md USD), s’articule autour de trois axes : i) assainissement budgétaire ; ii) renforcement de la gestion des finances publiques et amélioration de la gouvernance ; iii) développement humain et protection sociale. La mise en œuvre du programme du FMI par les autorités est jugée globalement satisfaisante. Si le programme doit théoriquement s’achever en octobre 2025 (seul un dernier décaissement de 180 MUSD étant prévu au titre du programme), le ministre des Finances a récemment annoncé son intention de demander sa prolongation, jusqu’en octobre 2026.

La Zambie et son comité des créanciers publics bilatéraux (co-présidé par la France et la Chine, et « vice-présidé » par l’Afrique du Sud) ont finalisé la restructuration de 6,3 Mds USD de dette souveraine en 2023. La restructuration, dans laquelle la France  a joué un rôle clé, a eu lieu en deux étapes : i) accord de principe au Sommet de Paris pour un Nouveau Pacte Financier mondial en juin 2023, puis ii) finalisation d’un protocole d’accord (MoU) en octobre 2023. Le MoU a été signé par l’ensemble des créanciers publics bilatéraux entre octobre 2023 et avril 2024. Les accords bilatéraux opérationnalisant le MoU sont en cours de finalisation et de signature. Trois d’entre eux ont d’ores-et-déjà été finalisés (France, Arabie Saoudite et Inde). Un accord avec les créanciers privés obligataires (3,5 Mds USD de dette) a été conclu par la Zambie en avril 2024 et mis en œuvre en juin 2024. Le traitement, qui prévoit une réduction en valeur actualisée nette (VAN) de 45%, répond aux attentes du comité des créanciers publics quant à l’effort demandé aux créanciers obligataires au titre de la comparabilité de traitement. L’échange d’obligations a eu lieu le 11 juin 2024. Des accords ont aussi été trouvés entre la Zambie et la plupart des créanciers privés non-obligataires (2,4 Mds sur 3,2 Mds USD de dette privée non-obligataire). Ces accords ont été évalués comme « comparables » par le comité des créanciers. Les négociations se poursuivent avec les derniers créanciers privés restants, représentant environ 0,8 Md USD – dont 543 M USD pour TDB et 46 M USD pour Afrexim.

4. Aide publique au développement de la France

Entre 2021 et 2023 (dernières données disponibles), la Zambie a reçu en moyenne 669 MUSD par an de versements bruts d’Aide Publique au Développement (APD) de la part des bailleurs bilatéraux. La grande majorité de cette somme provenait des Etats-Unis (67%, de l’Allemagne (8%), de la Suède (7%) et du Royaume-Uni (4,5%). La suspension de certaines aides par Washington devrait toutefois avoir un impact marqué sur l’aide au développement reçue par la Zambie (367 MUSD engagés pour la réponse nationale au VIH en 2025 dans le cadre du programme PEPFAR) et a déjà entraîné de fortes perturbations dans les services liés au VIH.La contribution de la France a représenté 1,9% du total (12,4 MUSD par an en moyenne), malgré une baisse notable en 2023 (seulement 1,2 M USD). Pour rappel, l’encours de l’AFD dans le pays s’élevait à 92 MEUR fin 2022. La Zambie n’honorant plus son service de la dette, l’AFD a toutefois suspendu la majorité de ses activités dans le pays dans l’attente de finalisation du processus de restructuration. En parallèle, la France s’est engagée fin 2023 à déployer une aide budgétaire de 16 MEUR finançant plus de la moitié du programme national de cantines scolaires gratuites, alors que l’école primaire n’est gratuite et obligatoire que depuis 2021, montant décaissé en 2024.

5. Relations économiques avec la France

5.1. Échanges commerciaux avec la France

Les échanges commerciaux entre la France et la Zambie ont progressé pour la cinquième année consécutive en 2024 pour atteindre 54,6 M EUR (+3%), après 53,2 M EUR en 2023. Cette évolution s’explique principalement par la forte progression des exportations françaises à destination de la Zambie (+10,2 %), portée par la hausse des ventes d’« équipements mécaniques, matériel électrique, électronique et informatique » (+18,6 %, à 20 M EUR), principalement des machines industrielles et agricoles. Parallèlement, les importations françaises en provenance de Zambie (pierres précieuses, tabac et, dans une moindre mesure, produits agricoles) ont reculé pour la première fois en cinq ans (–5,5 %, à 24,7 M EUR). L’excédent commercial que la France enregistre vis-à-vis de la Zambie s’est ainsi nettement renforcé, atteignant 5,2 M EUR en 2024. La Zambie reste un partenaire commercial marginal de la France, figurant au 155ème rang de ses clients et au 137ème rang de ses fournisseurs.

5.2. IDE et présence française

Le stock d’IDE français en Zambie s’élevait à 89 MEUR en 2024. Une douzaine d’entreprises françaises est implantée en Zambie, employant plus de 1 300 personnes. Il s’agit principalement de grandes entreprises, opérant dans les secteurs énergétique (Total Energies dispose notamment d’un réseau de distribution d’une soixantaine de stations-service ; Engie et Neoen), du transport et de la logistique (AGL, CMA-CGM, AGS, Thales) et des services (Newrest, JCDecaux, Ipsos et Bureau Veritas). Plusieurs entreprises françaises sont également positionnées dans le domaine de l’économie numérique.

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