Tableau de bord de l’Afrique du Sud (janvier 2020)

  • Une contraction de l’activité qui favorise la maitrise de l’inflation

Au T3 2019, le PIB sud-africain s’est contracté de 0,6% par rapport au trimestre précédent – après -3,1% au T1 et +3,2% au T2. D’un point de vue général, l’activité est déprimée et volatile dans les secteurs minier (six trimestres de contraction sur huit) et manufacturier – ce que les bons résultats dans les services (secteur financier et secteur public) ne compensent plus. Concernant la demande interne, la consommation ne joue plus son rôle historique de moteur de la croissance du fait de la baisse du pouvoir d’achat et d’une confiance en berne. Plus alarmant, l’investissement a reculé au cours de cinq des sept derniers trimestres obérant la compétitivité et les perspectives de reprise à court voire moyen terme. Alors qu’une révision à la baisse des estimations de croissance en deçà de 0,5% pour 2019 était fortement envisagée, la reprise des délestages électriques à un niveau très élevé en décembre pourrait faire entrer l’Afrique du Sud dans une nouvelle période de récession au T4.

Des progrès sociaux importants ont été réalisés depuis la fin de l’apartheid, notamment en termes d’amélioration des conditions de vie de la population – accès à l’eau et à l’électricité, scolarisation, réduction de la pauvreté. Toutefois, ces dernières années, la croissance a été trop faible pour lutter contre les nombreux problèmes sociaux qui touchent le pays : les inégalités ont augmenté et la criminalité a atteint des niveaux record. Cela s’illustre encore par l’augmentation du taux de chômage qui atteint un plus haut depuis 2008 à la fin du T3 2019 (29,1%). Enfin, le PIB par tête a reculé cinq fois au cours des huit dernières années.

L’inflation a nettement ralenti ces derniers mois, jusqu’à 3,6% en novembre sur un an, du fait de la faiblesse de la demande interne et des prix modérés du pétrole. Toutefois, compte tenu des risques qui pèsent sur la croissance et la possible dégradation de la notation souveraine par Moody’s, la Banque centrale devrait continuer à poursuivre une politique monétaire très prudente (le taux directeur a été maintenu à 6,5% lors du dernier comité de politique monétaire au mois d’octobre), malgré les pressions politiques qui s’accroissent en faveur d’un assouplissement afin de soutenir la croissance.

  • La dégradation des finances publiques s'amplifie

Depuis 2009, l’Afrique du Sud enregistre des déficits budgétaires élevés (-4,5% du PIB en moyenne sur la période). En 2019, comme en 2018, la faiblesse de la croissance, la désorganisation de l’administration fiscale et les difficultés financières des entreprises publiques ont fortement pesé sur les finances publiques. Ainsi, selon le budget de mi-parcours (octobre 2019), le déficit devrait atteindre près de -6% du PIB (contre -4,5% du PIB prévu dans la loi de finances). Mais surtout, la trajectoire de la dette publique devrait se dégrader fortement à moyen terme – celle-ci devrait atteindre 70% du PIB d’ici trois ans, contre 60% du PIB actuellement. Toutefois, la structure de la dette présente un risque modéré car elle est peu sensible au risque de change (9% seulement de cette dette est libellée en devises) et de refinancement à court terme (maturité de près de 15 ans en moyenne) même si son exposition aux investisseurs étrangers est forte (35% de la dette libellée en rand est détenue par des non-résidents).

  • la notation sud-africaine menacée par la trajectoire des finances publiques

En 2019, les trois principales agences ont abaissé leurs perspectives sur la notation souveraine du pays à « négative ». La décision de Moody’s, qui est la seule agence à maintenir la notation souveraine du pays en catégorie « investissement », est intervenue au lendemain de l’annonce du budget de mi-parcours. Les pressions s’accroissent de toutes parts sur le gouvernement pour qu’il accélère sur le chemin des réformes afin de faire revenir la confiance, les investissements et la croissance.

  • Une dépendance accrue aux flux de capitaux etrangers (de portefeuille)

En moyenne, sur les trois premiers trimestres de 2019, le déficit courant s’est stabilisé à -3,6% du PIB après s’être creusé en 2018 (-3,5% du PIB contre -2,4% en 2017). Structurellement, le déficit de la balance des transactions courantes est alimenté par le déficit de la balance des revenus primaires qui représente en moyenne plus de 70% du déficit total ces dernières années.

Excédentaire depuis 2016, le solde de la balance commerciale se réduit toutefois d’année en année. La mise en œuvre par les Etats-Unis de droits de douane sur les importations d’acier et d’aluminium a pesé sur les exportations du pays en 2018 – excédent représentant 0,5% du PIB contre 1,4% en 2017. Sur les trois premiers trimestres de 2019, la balance commerciale affiche une nouvelle contraction de son excédent (-0,2 point par rapport à 2018) en raison d’une hausse des importations plus forte que celle des exportations – malgré la faiblesse de la demande interne et en lien avec la perte de compétitivité de l’appareil productif du pays. 

Les flux de capitaux sont donc essentiels pour combler le déficit chronique de la balance courante. Or, la modification de l’équilibre entre IDE et investissements de portefeuille observée ces dernières années (le stock des investissements de portefeuille était équivalent à celui des IDE en 2011 alors qu’il en représentait presque le double en 2018), tend à rendre l’économie vulnérable à une sortie brutale de capitaux, exacerbée par la perspective d’une dégradation de la notation souveraine du pays par Moody’s.

Le rand est une monnaie volatile voire spéculative, particulièrement sensible à l’évolution de la conjoncture internationale et dans les émergents – une partie importante des actifs sud-africains étant détenue par des investisseurs étrangers. Depuis 2014, le rand a varié face au dollar dans une fourchette comprise entre 10 et 17 ZAR pour 1 USD. En décembre 2019, le taux de change s’établissait à 14,3 ZAR pour 1 USD, un niveau proche de celui qu’il avait en début d’année – malgré des épisodes de fortes turbulences en 2019.

Fin octobre 2019, les réserves de changes s’établissaient à 45,4 Mds USD (soit une couverture d’environ six mois d’importations), en augmentation de 4,2% depuis le début de l’année 2019.

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