Seconde phase du plan de soutien budgétaire à l'économie (avril 2020)

Le président Ramaphosa a présenté le 21 avril un plan de soutien économique et d'aide sociale massif de 500 Mds ZAR (25 Mds EUR), soit près de 10% du PIB. L’objectif de ce nouveau paquet budgétaire est notamment de maintenir un niveau de revenu décent pour les ménages et de soulager le besoin de liquidité des entreprises – avec comme finalité de limiter les dégâts engendrés par la crise et de faciliter le redémarrage de l’économie. Ces dépenses additionnelles vont mener les finances publiques du pays sur un chemin de moins en moins soutenable – avant l’annonce de ce plan, le FMI estimait que la dette publique allait augmenter de près de vingt points dans les douze à vingt-quatre prochains mois, pour atteindre 80% du PIB.

 

Au 23 avril, 3 635 cas de Covid-19 et 65 morts ont été répertoriés en Afrique du Sud

 

1. Après avoir consulté largement, le président a présenté le mardi 21 avril la seconde phase de la réponse budgétaire du gouvernement à la crise. Cette réponse prend la forme d’un plan de soutien massif de 500 Mds ZAR (25 Mds EUR), soit un quart du budget 2020-2021 et près de 10% du PIB, décliné en quatre axes :

  • Un budget sanitaire extraordinaire de 20 Mds ZAR (1 Md EUR) qui vont s’ajouter aux 230 Mds ZAR votés dans le cadre du budget 2020-2021 ;
  • Un plan social de 70 Mds ZAR (3,4 Mds EUR) : (i) 50 Mds ZAR dédiés à l’augmentation, pendant six mois, des allocations sociales existantes (dont bénéficie près d’un tiers de la population) et à la création d’une allocation spéciale de 350 ZAR par mois (environ 17 EUR et un dixième du revenu minimum) pour les personnes sans emploi qui ne bénéficient d’aucune aide ; (ii) 20 Mds ZAR qui transiteront par les municipalités (accès à l’eau, protection et désinfection, aide alimentaire) ;
  • Un plan de soutien aux entreprises et aux travailleurs : (i) Doublement à 100 Mds ZAR du montant des mesures annoncées précédemment pour la protection des emplois en risque – dont le nombre est estimé entre 1 et 2 M ; (ii) Mise en place d’un dispositif de prêts garantis par l’Etat à hauteur de 200 Mds ZAR qui pourrait bénéficier à 700 000 entreprises ; (iii) Extension du champ des mesures de report des échéances fiscales de 15 Mds ZAR à 70 Mds ZAR [1].
  • Une stratégie de sortie de crise esquissée avec beaucoup de prudence par le président et qui fera l’objet d’une nouvelle allocution le jeudi 23 avril – dans la continuité de l’ouverture partielle autorisée la semaine dernière pour certains secteurs, en particulier les mines, la maintenance domestique et les télécommunications et nouvelles technologies.

2. L’objectif de ce nouveau paquet budgétaire est triple : (i) Prévenir et se préparer à faire face à la crise sanitaire ; (ii) Maintenir un niveau de revenu décent pour les ménages, notamment pour les plus défavorisés ; (ii) Soulager le besoin de liquidité des entreprises – avec comme finalité de limiter les dégâts engendrés par la crise et de faciliter le redémarrage de l’économie. Alors que près de 30% de la population active était au chômage avant le début de la crise, le mois de confinement commençait à peser fortement sur les revenus des plus vulnérables, avec l’apparition de problématiques d’accès à la nourriture et des débuts d’émeutes dans les townships. Par ailleurs, un autre objectif majeur du plan est de limiter les faillites d’entreprise et les licenciements, alors que l’arrêt presque total de l’activité pèse fortement sur la liquidité des entreprises. Ces mesures sont complémentaires avec le plan d’ampleur mis en œuvre par la banque centrale (South African Reserve Bank – SARB) : baisse de deux points du taux directeur, facilitation de l’accès à la liquidité pour les banques, assouplissement de la règlementation prudentielle, intervention sur le marché obligataire secondaire.

3. Alors que l’Afrique du Sud a abordé la crise du Covid-19 dans un contexte économique et budgétaire très dégradé, ces dépenses additionnelles vont mener les finances publiques du pays sur un chemin de moins en moins soutenable. Avant même ce nouvel effort budgétaire, sur la base d’une contraction de l’économie de 6%, le FMI tablait sur un déficit public supérieur à 13% du PIB (contre -6,8% du PIB anticipé dans la loi de finances), ce qui devait déjà porter la dette publique à 80% du PIB dans les douze à vingt-quatre prochains mois, contre un peu plus de 60% actuellement.

4. Hors réallocations sur l’exercice budgétaire entamé au 1er avril (130 Mds ZAR) et hors garanties de prêts (200 Mds ZAR), l’impact budgétaire net de ce nouveau plan sera supérieur à 3% du PIB, obligeant le gouvernement à mobiliser de nouvelles sources de financement, dans un contexte de forte augmentation des taux obligataires. En temps normal, le gouvernement aurait eu recours à l’émission de bons du Trésor domestiques pour absorber le besoin de financement additionnel, grâce à la profondeur et à la liquidité du marché des capitaux sud-africain. Toutefois, l’ampleur du montant et la dégradation des conditions de financement de l’Etat (fuite des capitaux, double dégradation de la notation souveraine par Moody’s et Fitch – malgré l’intervention massive de la SARB sur le marché obligataire) vont obliger le gouvernement à trouver d’autres moyens de financement. Pour faire face à ce besoin, le président a évoqué le recours à des sources locales comme le fonds d’assurance chômage (Unemployment Insurance Fund, dont la valeur nette des actifs est actuellement estimée à 150 Mds ZAR – 7,3 Mds EUR). Le président a également fait état des discussions en cours avec les bailleurs et les Institutions Financières Internationales (IFIs), ce qui constituerait un changement d’approche radical de la part du gouvernement sud-africain, habituellement très prudent lorsqu’il s’agit d’emprunter en souverain auprès des bailleurs et auprès du FMI et de la Banque Mondiale pour des raisons idéologique et historique. La signature d’un prêt d’1 à 2 Mds USD de la New Development Bank (banque des BRICS) serait imminente.


[1] Jusqu’à maintenant, le plan du gouvernement se résumait (i) à la mobilisation et à l’extension du fonds d’indemnisation du chômage – 40 Mds ZAR ; (ii) à des mesures fiscales en faveur des bas salaires et des PME – environ 15 Mds ZAR ; (iii) à la mise en place de plusieurs fonds de soutien financier, notamment sectoriels, en faveur des entreprises en difficulté – environ 4 Mds ZAR (voir la NDI-2020-0161224).

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