Budget de mi-parcours pour l'exercice 2019-2020 (Octobre 2019)

Alors que la situation économique s’est nettement détériorée depuis la présentation du budget initial en février, l’intervention du ministre devant le parlement était particulièrement attendue cette année. Elle a révélé une forte dégradation de la trajectoire des finances publiques pour l’année en cours, mais surtout pour les suivantes – la dette publique devrait atteindre 70% du PIB d’ici trois ans, contre 60% du PIB actuellement. Pour remettre les finances publiques sur un chemin soutenable, le ministre a appelé à agir rapidement – traçant un chemin conjuguant des mesures purement budgétaires et des réformes structurelles visant à relancer la croissance, mais sans proposer de mesures concrètes, remettant la prise de décision au prochain budget.

1. La présentation du ministre était particulièrement attendue cette année, alors que la situation économique s’est nettement détériorée depuis la présentation du budget initial en février – avec une nette révision à la baisse de la prévision de croissance pour 2019 qui est passée de 1,5% en début d’année à 0,5%.

2. Dans ce contexte, la situation financière de l’Etat se dégrade très rapidement. Du côté des recettes, la contreperformance de l’économie va générer un manque à gagner de 53 Mds ZAR (3,2 Mds EUR, représentant une baisse de 4% par rapport à ce qui était anticipé en février). Dans le même temps, les dépenses ont augmenté de 23 Mds ZAR, cette évolution est principalement attribuable au soutien financier exceptionnel accordé aux entreprises publiques (+36 Mds ZAR – soit le double de la somme budgétée en février – dont 26 Mds ZAR en faveur d’Eskom au mois de juillet). En conséquence, le déficit devrait atteindre 5,9% du PIB pour l’exercice en cours, contre 4,5% prévu dans le budget initial. A moyen terme, la situation est encore plus dégradée, puisque selon les projections du ministère des Finances, pour les années suivantes et en l’absence de mesures correctrices, le déficit devrait être supérieur à 6% jusqu’en 2022-2023. Sur cette période, le poste qui augmente le plus rapidement est le service de la dette (+15%, pour atteindre en moyenne 13% des dépenses, soit davantage que le budget alloué à la santé). L’augmentation de cette dépense incompressible réduira d’autant les marges de manœuvre du gouvernement.

3. Compte tenu de la dégradation des équilibres comptables, le gouvernement n’a d’autre solution que de repousser son objectif de stabilisation de la dette publique initialement prévue en 2022-2023 aux alentours de 60% du PIB. Ce seuil sera atteint dès la clôture de l’année fiscale, en mars 2020. Plus alarmant, la dette devrait atteindre plus de 70% à l’horizon 2022-2023.

4. Pour remettre les finances publiques sur un chemin soutenable, le ministre a appelé à agir rapidement – il a fixé un objectif exigeant en traçant un chemin conjuguant des mesures purement budgétaires et des réformes structurelles visant à relancer la croissance, mais sans proposer de mesures concrètes, remettant la prise de décision au prochain budget. Pour ce qui concerne l’assainissement budgétaire, le ministre a annoncé que 20 Mds ZAR d’économies avaient été identifiées pour le prochain exercice, principalement sur les budgets de fonctionnement. Il a également précisé que le gouvernement souhaitait identifier des économies et ressources additionnelles pour un montant de 50 Mds ZAR par an pendant trois ans afin d’atteindre un équilibre primaire (c’est-à-dire hors service de la dette) dès 2022-2023 – ce qui représenterait une amélioration drastique par rapport à la situation telle que présentée. Sur ce point, Tito Mboweni a insisté une fois de plus sur la stabilisation de la masse salariale de la fonction publique (+63% d’augmentation en dix ans – représentant 45% des recettes fiscales) : efforts sur les hauts salaires de l’administration, des entreprises et du personnel politique, relance du plan de départs anticipés à la retraite, négociations à venir avec les syndicats, etc. Il a également proposé un effort accru visant à améliorer l’efficacité de l’administration fiscale et la lutte contre la corruption et les malversations avec un budget en hausse pour la National Prosecuting Authority (+1 Md ZAR sur trois ans) et le South African Revenue Service (SARS – + 1,3 Md sur deux ans). Enfin, il a annoncé que des mesures d’augmentation de la fiscalité étaient à l’étude sans toutefois en préciser ni l’ampleur ni la nature.

5. Pour ce qui concerne les mesures structurelles visant à relancer la croissance, le ministre a insisté en particulier sur la nécessité d’accélérer la réalisation des projets d’infrastructures – que ce soit au niveau du financement avec la création du fonds mixant des ressources privées et publiques annoncé il y a plus d’un an et qui sera hébergé par Development Bank of South Africa (DBSA), mais aussi au niveau de la rationalisation du processus – de la sélection des projets à la mise en œuvre. Tito Mboweni a aussi annoncé une version révisée du document de stratégie du National Treasury publié au mois d’août, il a appelé à la mise en œuvre rapide de certaines mesures : octroi de licences pour les petits projets énergétiques, développement de la fibre, simplifications administratives, etc.

6. Alors que la plupart des analystes attendaient des annonces d’ampleur relatives à l’assainissement financier d’Eskom, Tito Mboweni s’est peu étendu sur ce point. Il a rappelé (i) l’engagement de l’Etat à supporter financièrement l’électricien à hauteur de 230 Mds ZAR d’ici les dix prochaines années et (ii) le renforcement de la supervision de l’Etat – les décaissements du soutien financier accordé en juillet étant conditionnés à une plus grande transparence vis-à-vis du National Treasury et à la réalisation d’un certain nombre de réformes. Le ministre a tout de même annoncé que l’Etat ne procédera plus à des recapitalisations sèches, mais qu’il octroierait désormais des prêts. Il a surtout indiqué que, lorsque des progrès significatifs auront été réalisés, l’Etat négociera le montant approprié d’annulation de dette. C’est la première fois que le ministre évoque une éventuelle reprise de la dette d’Eskom par l’Etat – avant cela, il avait toujours écarté cette option. A noter qu’une reprise de la dette à hauteur de 100 Mds ZAR sur le total de 450 Mds ZAR (comme demandé à plusieurs reprises par le président d’Eskom) représente un effort correspondant à environ deux points de PIB.

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