Indicateurs et conjoncture

Éléments structurels sur l’économie

Avec un PIB estimé à 56,5 Md USD en 2024, l’Ouganda est la 4e économie d’Afrique de l’Est et de l’Océan Indien (AEOI) et la 13e du continent. Le PIB par habitant atteint 1 211 USD pour 46,6 millions d’habitants, maintenant le pays parmi les PMA. Malgré les résultats du recensement 2024, révélant une population inférieure aux prévisions, l’Ouganda ne devrait pas accéder au statut de pays à revenu intermédiaire (PRITI) avant 2027. Son IDH (0,55) le classe 159e mondialement, 2e de la CAE derrière le Kenya.

L’économie est relativement diversifiée : les services représentent 45 % du PIB (26 % de l’emploi), portés par le numérique, l’immobilier, la santé et l’administration. L’agriculture, qui pèse 27 % du PIB et 66 % de l’emploi (notamment chez les jeunes), génère plus de la moitié des exportations, malgré des contraintes structurelles (accès au financement, irrigation) et conjoncturelles (climat, parasites). L’industrie (28 % du PIB, 7 % des emplois), soutenue depuis les années 1980, repose sur la construction, les mines (or) et la transformation (agroalimentaire, textile, ciment). La production pétrolière, attendue en 2026, devrait générer 1 à 1,7 pt de PIB/an et 5 pts de PIB/an en recettes fiscales sur la durée d’exploitation. Le projet pourrait créer 50 000 emplois indirects (dont 8 000 sur site), mais le pétrole sera dans un premier temps exporté brut via un oléoduc vers Tanga (Tanzanie), puis dans un deuxime raffiné localement à hauteur de 60 000 b/j à un horizon encore incertain.

Le pays fait face à une forte pression démographique : la population active devrait doubler d’ici 2035 (vs 2015) et 600 000 jeunes arrivent chaque année sur le marché du travail (1 M d’ici 2030), alors que seuls 75 000 emplois formels sont créés. Cela alimente l’entrepreneuriat et un secteur informel dominant (environ 55 % du PIB). L’Ouganda compte 800 000 entreprises, très majoritairement de très petite taille (97 % ont moins de 10 salariés). L’État cherche à formaliser l’économie via des mesures d’enregistrement, de fiscalité simplifiée et d’identification, mais ces réformes restent contestées (grève des commerçants de Kampala en avril 2024).

 Conjoncture et finances publiques

Après une forte reprise post-Covid (+5,5 % en moyenne entre 2021 et 2023), l’économie ougandaise a accéléré en 2024 (+6,3 %), portée par l’industrie, les services, les cours élevés du café et de l’or, et la hausse des investissements, notamment pétroliers. L’inflation a nettement ralenti (3,3 % en 2024, après 5,4 % en 2023), grâce à de bonnes récoltes, un taux de change stable et une politique monétaire restrictive (taux directeur entre 9,5 % et 10,25 %). Elle devrait converger vers la cible de 5 % d’ici 2027, mais reste exposée aux chocs climatiques et pétroliers. La croissance devrait légèrement ralentir en 2025 (+6,1 %), proche de son potentiel, avant d’accélérer à moyen terme (+7,6 % en 2026, +8,2 % en 2027) avec le début de la production pétrolière (août 2026), portée par le projet de TotalEnergies[1], tandis que le tourisme et l’agriculture resteraient dynamiques.

Les finances publiques restent sous tension, avec un déficit creusé à -5,8 % du PIB en 2024 (après -4,9 %), du fait d’intérêts élevés (-3,7 % du PIB) et d’une politique expansionniste. La hausse des recettes (+0,5 pt) a été limitée par des failles dans la facturation électronique. Une stratégie de mobilisation fiscale a été lancée, avec un objectif de +1,8 pt de PIB d’ici 2026, sans hausse d’impôt. Mais à court terme, le déficit devrait s’aggraver (-6,7 % en 2025), dans un contexte électoral tendu.

Le déficit courant reste élevé (-7,3 % du PIB en 2024), sous l’effet des importations liées aux projets pétroliers et aux coûts logistiques. Le shilling est resté stable, soutenu par les exportations, les IDE pétroliers, et la politique monétaire. Le retrait du pays des listes grises du GAFI et de l’UE a aussi renforcé la confiance. Le déficit se réduirait à -6,4 % en 2025, puis -4,2 % en 2026 avec les premières recettes pétrolières, qui soutiendraient le shilling.

La dette publique ougandaise a poursuivi sa hausse en 2024 (51,8 % du PIB, après 50,2 % en 2023), dépassant ainsi le seuil indicatif de prudence de 50 %. Son coût est particulièrement élevé : les paiements d’intérêts représentaient 25,2 % des recettes publiques fin 2024, soit le niveau le plus élevé d’Afrique de l’Est après le Kenya, dont l’endettement est pourtant bien plus important. Cette situation s'explique par la forte part de dette domestique (environ 50 % du total), assortie de taux d’intérêt très élevés (17,8 % à 10 ans, contre 13,7 % au Kenya et 12,6 % en Tanzanie). La vulnérabilité financière du pays s’est accentuée après la suspension des nouveaux engagements de la Banque mondiale, liée à l’adoption de la loi « anti-homosexualité » en mai 2023, et l’arrivée à échéance du précédent programme FMI. Un nouveau programme après les élections de 2026 (cf. infra) permettrait de renforcer la mobilisation des recettes fiscales, de limiter le recours à l’endettement interne coûteux, et de restaurer la confiance des investisseurs, tout en facilitant l’accès aux financements concessionnels de la Banque mondiale (qui a repris ses engagements) et des bailleurs bilatéraux comme l’AFD.


 

[1] Ce projet vise à extraire du brut pendant une quinzaine d’année (avec un pic de production à 230 000 barils par jour).

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