TANZANIE
Indicateurs et conjoncture
I - La Tanzanie présente de bons indicateurs macroéconomiques.
La Tanzanie affiche une croissance dynamique supérieure à +5 % par an (+5,4 % en 2024). Les projections du FMI anticipent un taux de croissance du PIB réel de +6,0 % en 2025 et +6,3 % en 2026. La croissance tanzanienne est supérieure à la moyenne de l’Afrique sub-saharienne (+3,8 % en 2024), soutenue par l’agriculture, les mines – principalement l’or (qui représente environ un tiers des exportations avec une évolution favorable des cours depuis 2023) – et les services financiers. En 2023, le PIB par habitant tanzanien s’élevait à 1 326,6 USD. L’activité économique, parmi les plus élevées d’Afrique de l’Est, devrait continuer de se renforcer, avec une croissance d’environ +6,5 % à moyen terme selon le FMI.
L’inflation, de +3,1 % en 2023/2024, est maîtrisée par la Bank of Tanzania (BoT). L’inflation sous-jacente est également de +3,1 % sur la période tandis que les prix de la nourriture augmentent de manière contenue (+2,9 %). La maîtrise de l’inflation est également favorisée par le vaste territoire et la richesse climatique du pays, ce qui renforce sa résilience face aux aléas climatiques. En outre, en 2024, la BoT a décidé d’adopter un nouveau cadre pour sa politique monétaire afin de mieux contrôler l’inflation et gagner la confiance des investisseurs. Les politiques monétaires efficaces et la maîtrise de l’inflation ces dernières années permettent de considérer la BoT comme une institution fiable. Pour 2024/2025, elle cible une inflation inférieure à +5,0 %, puis une inflation autour de +4,0 % à moyen terme.
La Tanzanie présente le taux d’endettement public le plus faible de la Communauté d’Afrique de l’Est avec, en 2024, une dette publique estimée à 48,7 % du PIB selon le FMI (contre 45,7 % en 2023). Une prévision en baisse à 42,2 % est anticipée d’ici 2028 par le FMI. La dette extérieure, qui représente 63 % de l’encours total, reste majoritairement concessionnelle, avec un taux moyen de 1,9 %. Les principaux créanciers sont multilatéraux et bilatéraux et le service de la dette demeure stable, à environ 15 % des recettes publiques. Cette prudence budgétaire s’appuie sur une gestion rigoureuse des finances publiques, le pays s’attachant à ne dépenser que ce qu’il génère en ressources. En 2021, le FMI a cependant réévalué le risque de surendettement de la Tanzanie, le faisant passer de faible à modéré, principalement en raison de la baisse des recettes touristiques durant la crise sanitaire. Initialement perçue comme conjoncturelle, cette évaluation demeure pertinente en raison de la vulnérabilité persistante face à une baisse des exportations ou une dépréciation de la monnaie.
Dans le cadre du programme FMI, le déficit budgétaire se résorbe progressivement avec une prévision de -3,1 % du PIB en 2024 (contre -4,3 % en 2023 et -3,8 % en 2022) grâce à une légère augmentation des recettes (+0,4 point de % du PIB) et un ajustement des dépenses. Enfin, le secteur bancaire, bien qu’il soit marqué par une forte concentration (les deux principales banques détenant 50 % des dépôts, ce qui représente un risque systémique potentiel), reste solide et bien capitalisé.
II- Malgré sa stabilité, l’économie tanzanienne reste vulnérable.
Le déficit courant structurel et le marché des changes sous tension sont les principales faiblesses de l’économie tanzanienne. L’équilibre externe de la Tanzanie s’est récemment amélioré mais reste marqué par des fragilités structurelles. Le déficit courant s’est réduit à -3,1 % du PIB en FY2023/24, contre -6,5 % l’année précédente, soutenu par une hausse significative des exportations (+25,5 %). L’économie tanzanienne, encore peu industrialisée, reste toutefois dépendante des importations. Ses exportations cycliques (en particulier l’agriculture, le tourisme et l’or), exposent périodiquement le shilling à des pressions dépréciatives et favorisent l’émergence d’un marché parallèle. Depuis novembre 2024, le shilling a entamé une appréciation notable (environ -15 % entre début novembre et début décembre), aidée par une amélioration de la liquidité sur le marché des changes et l’assouplissement monétaire de la Fed. En revanche, depuis le 1er janvier 2024, le shilling tanzanien s’est déprécié de -6,5 % par rapport au dollar américain. Dans ce contexte, la BoT a amorcé une reconstitution prudente de ses réserves en devises, après 33 mois de ventes, en achetant 23 MUSD sur le marché interbancaire. La BoT entend poursuivre une gestion proactive du taux de change en adoptant un régime de flottement libre, tout en intervenant ponctuellement pour limiter la volatilité excessive. Le FMI encourage une flexibilité accrue du change pour renforcer la résilience de l’économie face aux chocs externes. Les réserves en devises couvrent 4,5 mois d’importations, d’après la Bot, en décembre 2024, un niveau jugé adéquat par le FMI.
Malgré des réformes ambitieuses saluées par les investisseurs (Investment Act, PPP Act, SMEs and Start-up Act), le climat des affaires s’est fortement détérioré suite une forte pression de la part de l’administration fiscale qui touche l’ensemble des entreprises locales et étrangères. La communauté d’affaires a déploré ce phénomène qui freine les initiatives entrepreneuriales et qu’elle décrit comme du harcèlement sans véritables moyens de recours. L’aversion au risque des autorités et des acteurs économiques locaux complique aussi la mobilisation de capitaux pour des projets d’infrastructures ou industriels de long terme. Si le cadre des partenariats public-privé affiche un potentiel prometteur, il reste encore en construction et peine à rassurer pleinement les acteurs financiers. Cette prudence, conjuguée à d’autres entraves, freine les opportunités de développement et de diversification économique, pourtant nécessaires.
III - La croissance reste peu inclusive alors que le développement est une priorité.
Bien que la Tanzanie ait obtenu le statut de PRITI en 2020, la pauvreté reste importante. La Banque mondiale souligne un déficit important d'investissements dans le capital humain et les dépenses sociales. Il s’agit d’un enjeu crucial dans un contexte de forte croissance démographique avec environ deux millions de nouveaux habitants par an et une population qui pourrait doubler d’ici 2050 pour atteindre 130 millions (même si une diminution de la natalité s’amorce depuis 2020). L’indice de développement humain reste faible, plaçant la Tanzanie au 167e rang mondial en 2022 (160e en 2010). Le taux de pauvreté est élevé, bien qu’en diminution, avec 43,5 % de la population vivant sous le seuil de pauvreté en 2023. Par ailleurs, l’investissement public dans l’éducation représente 3,3 % du PIB en 2021, en deçà de la moyenne africaine (5 % en 2020).
Le développement économique est l’une des priorités du gouvernement tanzanien. Le Troisième plan quinquennal de développement de la Tanzanie 2021/22 - 2025/26 (FYDPIII) vise à accélérer la transition vers un pays à revenu intermédiaire semi-industrialisé et compétitif. Il ambitionne de renforcer le capital humain tout en maintenant une croissance inclusive. Le plan vise à améliorer l'environnement des affaires, les recettes publiques et les exportations, l'indice de développement humain et à réduire les taux de mortalité et pauvreté.
La mobilisation fiscale semble insuffisante pour financer un développement largement dépendant des investissements publics. Le ratio taxes/PIB tanzanien de 15,3 % est parmi les plus bas de la région, inférieur à la moyenne de l’Afrique subsaharienne, d’environ 17 %. Malgré des progrès récents et une projection à 16,1 % pour 2024/25, ce niveau reste faible. Les grands projets d’infrastructure devraient, à terme, contribuer à améliorer le niveau de vie de la population. L’augmentation de l’accès à l’électricité (barrage Nyerere) et un meilleur réseau de transports (chemin de fer SGR) sont les priorités du gouvernement. Pour renforcer sa résilience et sa durabilité, la Tanzanie doit, dès lors, intensifier la mobilisation de ses recettes domestiques et mieux intégrer le secteur privé.