Conjoncture

Structure de l'économie

Ancienne colonie des Pays-Bas et indépendant depuis 1975, le Suriname, avec un PIB par tête de 4.200 USD (contre 6191 USD en 2019), est un pays de 604.000 habitants qui partage une frontière commune de 520 km avec la Guyane française. Son économie repose sur la production de matières premières, agricoles (riz, bananes et bois tropicaux) et surtout minières. La bauxite, l’or et plus récemment le pétrole (production actuellement relativement faible à 15K baril/jour), représentent à eux trois 30% du PIB, 80% des exportations et 35% des recettes fiscales du pays. Le secteur agricole, qui emploie un quart de la population, ne compte que pour 5% du PIB. Si l’essor économique récent du pays a permis un recul du chômage, de 11% en 2005 à 8,9% en 2019 (avec un rebond à 11,2% est prévu pour 2020 en raison de la crise économique), plus d’un quart de la population vit encore sous le seuil de pauvreté.

Le Suriname dispose d’un potentiel de développement important, handicapé cependant par la restructuration inachevée du secteur public (120 entreprises de tailles très différentes, représentant au total 55% de l’emploi formel) et la faiblesse de l’investissement domestique privé (1,3% du PIB) en raison d’un climat des affaires difficile et d’une faible compétitivité du pays (162ème place sur 190 dans le classement Doing Business 2020 de la Banque mondiale). L’informalité pèse pour 30% du PIB et le marché du travail est contraint par un droit du travail peu flexible et l’absence d’assurance chômage.

Analyse conjoncturelle

Après avoir connu une récession en 2015 et 2016 (recul du PIB de 2,7% en 2015 puis de 5,1% en 2016) suite à la baisse des cours des matières premières et à l’ajustement budgétaire de 2015-2016, le Suriname a traversé une période de croissance modérée depuis 2017, tirée principalement par les industries extractives (mise en production de la mine d’or de Merian en 2016 notamment) et l’investissement public (infrastructures avec la réparation et rénovation de routes et ponts, électrification et gestion de l’eau à Paramaribo et construction de logements). En raison des conséquences économiques liées à la crise sanitaire et à la crise politique qui a suivi les élections législatives de mai dernier, le pays connaîtra en 2020 une récession importante (prévisions du FMI à -13,1%).

Sur le plan extérieur, le compte courant s’est considérablement dégradé, passant d’un déficit de -3,4% du PIB en 2018 à -11,1% en 2019 et reste important en 2020 (-8% d’après les prévisions du FMI), en raison des prix bas des hydrocarbures et des fermetures de mines en 2020.

Les réserves internationales, déjà faibles, sont en chute depuis septembre 2019 et atteignent un niveau préoccupant (188 MUSD selon Lazard), affaiblissant la capacité du pays à effectuer des paiements à l’étranger.

La découverte récente d’importantes réserves d’hydrocarbures off-shore devrait néanmoins doper la croissance du Suriname à partir de leur mise en exploitation, à l’instar de ce qui se passe pour le Guyana. Total (actionnaire à 50% avec Apache et opérateur du bloc 58) a ainsi effectué 3 forages qui ont confirmé le potentiel des champs.

Politique économique

L’évolution sur le marché des matières premières et l’arrêt de la production d’aluminium (par Alcoa) ont entraîné une dégradation brutale du solde budgétaire, qui a atteint -8,5% en 2017, et -7,5% en 2018 alors qu’il était excédentaire en 2011. Il s’est établi à -10,4% en 2019 et devrait atteindre -13,9% en 2020 selon le FMI, dans le contexte des politiques de subventions publiques et embauches dans l’administration en période préélectorale. En juin 2020, Chan Santokhi a pris la tête du pays suite aux élections législatives, succédant à Dési Bouterse. Le 21 septembre, le nouveau gouvernement a réconcilié le taux de change officiel et du marché noir, dévaluant ainsi le dollar surinamais qui est passé de 7,52 SRD pour 1 USD à 14,29 SRD pour 1 USD (passée à 16 SRD pour 1 USD au marché parallèle malgré la dévaluation).  Ainsi, la monnaie nationale a perdu 90% de sa valeur face au dollar américain, entraînant une inflation importante, qui devrait s’établir en moyenne annuelle à +50% en 2020 (prévisions FMI) et pourrait atteindre des pics de 80% en 2021 selon les prévisions.

La situation des finances publiques est fortement dégradée et la trajectoire d’endettement public est désormais insoutenable (75,6% en 2018, 82,3% en 2019 et prévisions FMI de 145,3% pour 2020 avec effet mécanique de la dévaluation). Le Suriname travaille désormais à restructurer sa dette, en s’appuyant sur l’expertise de Lazard qui a été choisie pour accompagner le gouvernement dans cette opération de renégociation. Le pays a en effet besoin de temps et de liquidités jusqu’à la mise en exploitation des champs d’hydrocarbures.

Le Président Santhoki a annoncé des mesures fiscales : la mise en place d’un nouvel impôt sur les hauts revenus (impôt de solidarité) et une augmentation des redevances pour les petits producteurs d’or et les exportateurs de bois. L’introduction de la TVA, bien que soutenue par le nouveau président, n’a pas de calendrier à ce stade. De même, la réforme des subventions à l’électricité devrait permettre d’économiser 165 MUSD par an selon le nouveau gouvernement, dont l’objectif annoncé est d’éliminer complètement ces subventions d’ici la fin 2024 tout en augmentant les tarifs de 15 à 18% (en débutant mi-2020).

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