Le commerce extérieur du Soudan en 2021*

Résilience du commerce extérieur, qui a légèrement diminué avec un total échangé de 13,52 Mds USD, soit -1% par rapport à 2020. Cette baisse provident essentiellement d’une diminution des importations (-6%) alors que les exportations ont progressé de 13%, ce qui se traduit par une baisse du déficit commercial atteignant 5 Mds USD. Les EAU et la Chine restent les deux principaux partenaires commerciaux avec respectivement 3,8 et 2,8 Mds USD échangés, augmentant leur poids dans les échanges extérieurs, qui passe de 42% à 55%. L’or renforce sa place de premier poste d’exportation (avec 48% du total), tout comme, en termes sectoriels, les ventes agricoles et animales (49% du total). Les principaux postes d’importation restent les denrées alimentaires (21% du total) et les produits pétroliers (18%).

1. Intensification des échanges surtout vers les EUA et la Chine, malgré un tassement du déficit de la balance commerciale

La situation difficile qu’a traversée le Soudan en 2021 -fermeture pendant un mois et demi des Ports de Port Soudan (de la mi-septembre à la fin octobre), coup d’Etat du 25 octobre-, ne s’est pas traduite par une détérioration trop importante de ses échanges avec le reste du monde. En effet le montant total des échanges a seulement diminué de 1%, pour atteindre 13,52 Mds USD. Bien qu’ayant été mis au ban des nations pendant une trentaine d’années, le Soudan reste statistiquement, avec un ratio commerce extérieur / PIB  de 22%, une économie relativement ouverte[1].

Depuis la sécession du Soudan du Sud en 2012, la balance commerciale soudanaise est structurellement déficitaire, enregistrant en 2021 un nouveau un déficit de 5 Mds USD, contre 6 Mds USD en 2020. Ce déficit se situe dans la moyenne de cette dernière décennie (cf tableau 1). Ce score plutôt positif est surtout dû à la forte progression des exportations (+13%) notamment d’or, qui n’ont pas du tout été impactée par la fermeture de Port Soudan, puisque qu’elles transitent par voie aérienne et non maritime. Les importations ont été maîtrisées (-6%) dues en partie à la fermeture portuaire, à l’uniformisation des taux de change douaniers qui ont renchéri les importations, hors bien essentiels, ainsi qu’à la mise en place progressive de barrières non tarifaires.

La situation politique[2] explique que les échanges extérieurs du Soudan soient orientés principalement vers les pays asiatiques et arabes. Si les 7 principaux partenaires commerciaux restent les mêmes depuis 2018, leur ordre s’est modifié en 2021. Les Emirats Arabes Unis (3,9 Mds USD, +44%) ont détrôné la Chine (2,8 Mds USD, -7%). L’Arabie Saoudite (847 M USD, -29%) est passée de la troisième à la cinquième place, devancée par l’Egypte (1,3 Md, +45%) et l’Inde (899 M USD, -21%). Enfin la Turquie (401 MUSD, -12%) devance la Russie (220 M USD, -70%). Ces sept pays concentrent 86% des échanges réalisés par le Soudan, contre 75% l’an dernier (tableau 3 -1-). Si leur poids dans les échanges s’est renforcé ces dernières années, l’ouverture à l’international du Soudan –mais qui a été avortée dès le coup d’Etat-, a cependant permis l’arrivée de nouveaux acteurs à l’exemple des Etats Unis (174 M USD, +138%) qui sont passés de la 20ème à la 10ème place ou encore la Lybie (203 M USD), qui occupe dorénavant la 9ème place alors que les années précédentes ses échanges étaient non significatifs.  Les échanges avec la France s’élèvent, selon les statistiques de la Banque Centrale du Soudan, à 95 M USD en 2021 (-23%), soit une part de marché[3] en baisse (0,7% contre 0,9% en 2020). La France est le 17ème partenaire commercial du Soudan, soit une perte de deux places par rapport à l’année antérieure.

Tout comme avec les pays, les échanges avec les blocs régionaux ont été fortement façonnés par les relations internationales (tableau 3 -2-). Le Moyen Orient vient de reprendre la première place (5 Mds USD d’échanges, en progression de 19%) au bloc Asie (4,3 Md USD, -14%). Ensemble ces deux blocs représentent 69% des échanges. Le commerce avec les autres pays africains a fait un bond de 51% pour s’établir à 1,9 Md USD (soit 14% des échanges totaux) devançant dorénavant le bloc des pays industriels (1,2 Md USD, -11%) et autres pays européens (828 M USD, -45%).

2. Une forte concentration des exportations sur quelques matières premières  et sur quelques pays

Les exportations ont progressé de 13% pour atteindre 4,28 Mds USD, troisième meilleure performance de la décennie. Compte tenu de la faiblesse du secteur industriel, dont l’outil de production est orienté vers le marché intérieur, elles sont constituées de matières premières non ou faiblement transformées, dont les 7 principales (or, animaux vivants, sésame, arachides, coton, viande et gomme arabique) représentent 91% du total exporté (cf tableau 2), soit 2 points de mieux qu’en 2020. A noter dans ce palmarès, la montée en puissance des exportations de viande, qui dépassent celles de gomme arabique et la sortie des exportations de fourrage, directement impactées par les fortes progressions du prix de l’énergie.

Après la sécession du Soudan du Sud, l’or est devenu, avec des ventes dépassant 2 Mds USD (en progression de 39%), la principale source de devises[4]. Elles représentaient en 2021 à elles seules 48% (contre 39% en 2020, 35% en 2019 et 25% en 2018) de la valeur totale exportée[5]. Contrairement aux deux dernières années, les ventes d’animaux vivants se sont hissées au second rang, dépassant légèrement celles de sésame, qui ont vu leurs ventes chuter de 36%, due à une saison de pluie erratique. Les moutons restent le principal poste d’exportations d’animaux vivants, avec 49% du total de ventes d’animaux en valeur, suivis par les chameaux (42%), le bétail (9%) et enfin les chèvres (un peu moins de 1%). Ces exportations, à l’exception des chèvres, ont toutes connu une forte progression, les effets néfastes dus en partie à la fièvre du Rift, qui s’était déclarée au mois d’octobre 2019, s’estompant.

A noter la progression constante des ventes d’arachides (+17% en valeur et ce malgré une légère baisse des volumes de 2%, après la très forte progression de 2020 : +77% en valeur et +48% en volume). Elles représentent dorénavant le 4ème poste d’exportation avec 424 M USD, se rapprochant du sésame et des animaux vivants, et dépassant largement les deux cultures emblématiques du Soudan : le coton et la gomme arabique, dont les ventes soit stagnent (-2% pour le premier) soit augmentent légèrement (+6% pour le second). Quant aux exportations pétrolières, tout comme en 2020, elles deviennent très marginales : aucune exportation de pétrole brut n’a été comptabilisée, ce qui peut s’expliquer par le fait que l’ensemble de la production nationale –même celle entre les mains des Chinois- a dû être raffinée localement. La seule comptabilisée a été l’exportation vers l’Ethiopie de 69 400 tonnes de kérozène pour un montant de 36 M USD. Le seul pétrole, qui est dorénavant exporté par le Soudan, est le brut sud soudanais, transitant par les deux oléoducs soudanais.

En termes de clients (cf tableau 3-1), les Emirats Arabes Unis restent, et de loin, le premier acheteur du Soudan (2,2 Mds USD dont 2,06 Mds USD d’or), suivis par la Chine (614 MUSD dont 353 M USD d’arachide, 186 M USD de sésame et 37 M USD de coton), l’Egypte (496 M USD, dont 256 M USD d’animaux vivants[6], 120 M USD de sésame, 49 M USD de coton et 26 M USD de viande), suivi par l’Arabie Saoudite (356 M USD, dont 246 M USD d’animaux vivants[7], 36 M USD de viande et 35 M USD de sésame) puis enfin, à égalité, par l’Inde (86 M USD, dont 21  MUSD de sésame) et la Turquie (86 MUSD, dont 39 M USD de sésame et 30 M USD de coton). Ces 6 principaux clients absorbent 90% des ventes extérieures du Soudan, soit trois points de plus qu’en 2020.

3. Baisse sensible des importations de denrées alimentaires et de produits manufacturés

En 2021, les importations ont atteint 9,24 Mds USD, en baisse de 6% par rapport à 2020. Elles se situent dans la moyenne de cette décennie. Le pays importe la quasi-totalité de ses produits manufacturés : machines, métallurgie, équipements de transport, textiles,… Cependant ses principaux postes d’importation restent les denrées alimentaires (21% du total des importations) et les produits pétroliers (18%).

Parmi les postes d’importation, les produits alimentaires arrivent en tête, avec un montant total de 1,9 Md USD (en forte baisse de 29%), le sucre avec 486 M USD (-35% par rapport à 2020) détrônant le blé[8] (445 MUSD, soit -51% par rapport à 2020). En deuxième position figurent les produits pétroliers[9] pour 1,63Md USD (avec une progression de 30% par rapport à l’année dernière, fruit d’une libéralisation des prix des carburants, qui n’est devenue complète qu’à partir du juin 2021, et d’une augmentation des cours internationaux), suivi par les machines et équipements pour 1,6 Mds USD (+ 5% par rapport à 2020) et les produits manufacturés pour 1,54 Md USD (-19% par rapport à 2020), cf tableau 4.

Les principaux pays fournisseurs (cf tableau 3) restent la Chine (2,2 Mds USD dont 757 M USD de machines et équipements, 438 M USD de produits manufacturés et 348 M USD d’équipements de transport), les Emirats Arabes Unis (1,67 Md USD dont 1,24 Md USD –contre 584 M USD en 2020- en produits pétroliers), l’Inde (813 MUSD dont 295 M USD –contre 490 MUSD en 2020- de produits alimentaires et 152 M USD en produits chimiques), l’Egypte (qui gagne deux places avec 811 MUSD, dont 355  MUSD de produits manufacturés, 148 MUSD de produits chimiques et 138 MUSD de produits alimentaires), l’Arabie Saoudite (491 M USD, dont 88 M USD de produits pétroliers –contre 566 M USD en 2020- et 69 M USD de produits chimiques),la Turquie (315 MUSD dont 85 M USD de produits manufacturés, 82  MUSD de machines et équipements et 81 MUSD de produits alimentaires et enfin la Russie (220 MUSD, dont 141 M USD de blé, contre 558 M USD de blé en 2020 et 716 M USD en 2019). Ces 7 principaux pays fournissent 71% des besoins extérieurs du Soudan, soit un point de plus qu’en 2020.

 

Les données du commerce extérieur du Soudan pour 2022 ne seront disponibles qu’à partir de juin 2023.

 

Annexes (source Banque Centrale)

Tableau 1 Evolution de la balance commerciale entre 2010 et 2021 (en Mds  USD)


Table 1
 
 

Tableau 2 Evolution des principales exportations entre 2018 et 2021 (en Mds  USD et volume)

Tableau 2

Graphe 1

 

Tableau 3 (1) Principaux Partenaires commerciaux et évolution entre 2019 et 2021 (en M  USD)

Tableau 3

 

Tableau 3 (2) Principaux blocs géographiques commerciaux et évolution entre 2019 et 2021 (en M  USD)

Tableau 3 2

 

Tableau 4 Principaux postes d’importation et évolution entre 2018 et 2020 (en M  USD)

Tableau 4

 


[1] Ce bon résultat relatif provient du fait que le PIB, depuis une dizaine d’années décroît régulièrement.

[2] Les sanctions américaines contre le Soudan mises en place en 1997 n’ont été levées qu’en octobre 2017 et la sortie du Soudan de la liste américaine des pays finançant le terrorisme n’a été acquise qu’à la mi-décembre 2020 alors que les de les directives de  l’OFAC n’auraient été levées qu’en mai 2021

[3] la part de marché de la France représentait  0,52% du total des importations soudanaises, et 1,1% du total exporté

alors qu’en 2020 ces pourcentages étaient 0,7% du total des importations soudanaises et 1,4  % du total exporté, et en 2019 respectivement 0,9% et 1,4% et en 2018, respectivement  de 1% et 2 %.

[4] Ces exportations officielles (soit 36 tonnes en 2021 à comparer à 25,2 tonnes en 2020, 21,7 tonnes en 2019 et 20 tonnes en 2018), sont quasi exclusivement orientées vers les EUA, qui ont absorbé respectivement 99%, 95%, 78% et 98% des tonnages exportés.

[5] Cependant avec 2,1 Mds USD, en baisse de 1% par rapport à 2020, les exportations agricoles et animales confondues représentaient l’an dernier, avec 49 % des recettes, le principal secteur générateur de devises

[6] Essentiellement des chameaux

[7] Essentiellement des moutons

[8] Les importations de blé ont baissé de 51% en valeur et de 46% en volume (soit 1,5 Millions de tonnes),  dû en partie à la fermeture des Port Soudan et en partie à la fourniture d’environ 253 000 tonnes de blé américain sous forme de don dans le cadre des accords d’Abraham et de 200 000 tonnes au travers du PAM au travers d’un « swap » blé contre SDG avec les autorités soudanaises. Sur les 1,5 M de tonnes importées, la Russie a fourni 32%, suivi par la Roumanie (19%), les USA (13%) et l’Australie (12%). Pour faire face à la fermeture de Port Soudan, le Soudan a importé en septembre et octobre 2021 de la farine de blé, essentiellement d’Egypte –le corridor Nord n’étant pas bloqué- pour une quantité d’environ 294 000 tonnes (+1370%).

[9] Dont plus de 50% des besoins sont fournis par les EAU

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