SEYCHELLES
Situation économique et financière en 2025
L’économie seychelloise a retrouvé son niveau pré-crise Covid-19 dès 2022, portée par le rebond rapide du tourisme, malgré des arrivées touristiques encore inférieures à la période prépandémique, et le dynamisme des secteurs de la pêche, du numérique et de la construction. Depuis, la croissance est restée assez faible (+2,9 % en 2024, après +2,3 % en 2023) au regard du rythme prépandémique (+6,5 % en moyenne par an entre 2010-2019). En 2025, l’activité devrait légèrement s’accélérer (+3,2 %) grâce aux contributions du tourisme et aux projets portuaires, avant de se stabiliser à moyen-terme à niveau relativement faible. La gestion des finances publiques reste prudente, avec un excédent public (+0,9 % du PIB en 2024) et une baisse de la dette (59,6 % du PIB en 2024, après 62,6 % en 2022). La position extérieure demeure fragile, avec un déficit courant élevé (-7,9 % du PIB) et une forte dépendance aux importations.
1. Le rebond économique post-crise covid-19 est en perte de souffle, pénalisé par la lente reprise de l’activité touristique
L’économie seychelloise a poursuivi sa reprise post-Covid, affichant une croissance estimée à +2,9 % en 2024 (après +2,3 % en 2023). Si ce rythme reste inférieur à la moyenne prépandémique (+6,5 % sur 2010–2019), il s’inscrit cependant dans une trajectoire de reprise plus rapide que celle observée dans l’île voisine de Maurice : les Seychelles ont retrouvé leur niveau d’activité d’avant-crise dès 2022, grâce à la résilience du tourisme et au dynamisme de secteurs tels que la pêche, la construction et les technologies de l’information. En 2024, les arrivées touristiques ont cependant peu progressé (+0,5 % en glissement annuel) et les dépenses par visiteur ont reculé (-7,4 %), notamment du fait d’un ralentissement de l’activité en Europe, marché émetteur principal. Hors tourisme, les performances sont contrastées : les secteurs de l’agriculture, du numérique, de la construction et de l’énergie solaire enregistrent une croissance soutenue, contrebalancée par un ralentissement dans l’immobilier, l’éducation et l’industrie manufacturière, cette dernière ayant souffert d’inondations et d’une explosion industrielle à Mahé en décembre 2023[1].
Si la croissance est attendue en légère augmentation à court-moyen terme, celle-ci devrait rester contenue (+3,2 % attendu en 2025 et 2026). Cette hausse serait tirée par la reprise progressive des flux touristiques et la normalisation des dépenses par visiteur. Cette trajectoire reste toutefois conditionnée à la résilience du tourisme face aux chocs climatiques, aux tensions géopolitiques affectant le transport maritime, et à la capacité du pays à diversifier ses moteurs de croissance. Les efforts en cours en faveur de l’économie bleue, de la transformation des produits halieutiques et des infrastructures portuaires (extension du port de Victoria, projet de hub à l’Île du Port) s’inscrivent dans cette stratégie de diversification, mais leur avancement reste à consolider.
L’inflation a connu un rebond ponctuel fin 2024 (+1,7 % en décembre, après 0,2 % en moyenne en 2024) en lien avec la hausse des tarifs des services publics (+9 %). À moyen terme, l’inflation devrait se stabiliser autour de +3 %, mais reste exposée aux chocs extérieurs, compte tenu de la forte dépendance du pays aux importations et aux conditions globales de fret maritime. Sur le plan monétaire, la Banque centrale des Seychelles (BCS) a maintenu un taux directeur inchangé à 1,75 % depuis mars 2023. La transmission aux prix hors alimentation est toutefois restée limitée, et l’inflation a diminué dès le début de 2025 (+0,1 % en avril), permettant à la BCS de préserver une orientation monétaire favorable à l’activité. L’efficacité de cette politique reste toutefois freinée par un excès structurel de liquidités dans le système bancaire, limitant la transmission aux taux de crédit, qui demeurent élevés (9,9 % en moyenne fin 2024).
Le secteur bancaire reste bien capitalisé et rentable. Le taux de prêts non performants a diminué à 5,5 % fin 2024 (après 8,1 % fin 2023), grâce à une amélioration du suivi des portefeuilles risqués et à une dynamique soutenue du crédit au secteur privé (+12,1 % en 2024 après +7,4 % en 2023), tirée par le tourisme, l’immobilier et la consommation des ménages. La BCS poursuit sa stratégie de modernisation : adoption du cadre Bâle II, amélioration de la transparence par les bulletins trimestriels sur la dette, soutien aux banques digitales. Elle finalise aussi un cadre pour les fintechs et prépare une loi sur les crédits non bancaires, en vue de dynamiser l’intermédiation financière.
2. La consolidation budgétaire engagée permet une réduction progressive de la dette, mais les Seychelles restent exposées à des vulnérabilités extérieures persistantes
La situation budgétaire en 2024 a été plus favorable qu’anticipée par le FMI, avec un excédent primaire de +3,2 % du PIB (contre +1,1 % prévu lors de la 3ᵉ revue du programme), dans un contexte la consolidation engagée depuis 2022. Cette performance s’explique principalement par une forte sous-exécution des dépenses (-3,1 pts de PIB), en particulier sur l’investissement, les salaires et les achats courants, en lien avec des capacités limitées et la réaffectation de ressources à la reconstruction après l’explosion industrielle de fin 2023 (cf. supra). Malgré un léger manque à gagner sur les recettes (-0,5 pt de PIB) et des subventions extérieures inférieures aux attentes, les recettes publiques ont fortement progressé (33,4 % du PIB, après 30,9 % en 2023), permettant une nette amélioration du solde global (+0,9 % du PIB, après +0,2 % en 2023).
Le risque lié à la dette publique seychelloise s’est réduit, illustré par la décision du FMI en mai 2023 de reclasser le risque de surendettement comme modéré en mai 2023. Le niveau de dette publique est en forte baisse (59,6 % en 2024, contre 71,2 % en 2021), sous l’effet de la reprise économique et de la consolidation budgétaire (cf. supra). Celui-ci devrait temporairement augmenter en 2025 (61,2 % du PIB), en raison de l’octroi de nouvelles garanties publiques pour deux projets d’infrastructure critiques (remblaiement foncier et extension portuaire). La dette publique est à moitié externe, dont la majeure partie est multilatérale. Le coût élevé du service de la dette (12,8 % du PIB en 2024) s’explique notamment par le statut de pays à revenu élevé, qui restreint l’accès aux financements très concessionnels auprès de bailleurs multilatéraux (Banque mondiale, FMI, BAD). En parallèle, Les autorités poursuivent le développement du marché domestique de la dette, avec des émissions régulières d’obligations à plus long terme. Cette stratégie vise à allonger la maturité moyenne des emprunts afin d’échelonner les remboursements dans le temps, réduisant ainsi les risques de refinancement liés à une concentration des échéances à court terme, bien que les émissions locales contribuent à maintenir un niveau élevé du service de la dette.
Malgré des réserves en devise en augmentation, la position extérieure des Seychelles demeure fragile. Le déficit courant s’est détérioré en 2024 (-7,9 % du PIB, après -7,4 % en 2023), en raison d’une demande touristique relativement faible et d’une baisse des dépenses par visiteur. Les entrées d’IDE ont été inférieures aux attentes, du fait du report du projet de développement d’Assumption Island[1] à 2025-2026. Ce projet est crucial pour le logement, mais soulève également des enjeux environnementaux. Le déficit courant devrait rester important à moyen terme (-8,8 % du PIB en moyenne entre 2026 et 2030). Néanmoins, un excédent global de la balance des paiements est attendu, grâce aux IDE et à une légère amélioration du solde des biens et services. Les réserves de change ont augmenté, atteignant 774 M USD fin 2024 (soit 3,8 mois d’importations, après 3,4 mois fin 2023), tout juste au-dessus du niveau recommandé par le FMI.
[1] L’explosion a eu lieu dans un dépôt d’explosifs à Providence, sur l’île de Mahé, causant de lourds dégâts industriels. L’origine exacte reste indéterminée.
[2] Le projet d’Assumption Island prévoit la construction d’un complexe hôtelier haut de gamme dans les îles extérieures des Seychelles, actuellement en attente d’approbation.