Situation économique et financière en 2025 : une transformation économique qui commence à porter ses fruits

La prévision de croissance en 2025 de l’économie saoudienne est de +3,3 %, après +1,3 % en 2024, et -0,8 % en 2023. La croissance serait principalement tirée par l’activité non pétrolière, soutenue par les réformes de la Vision 2030. En ligne avec la politique budgétaire expansionniste adoptée par le pays, le déficit budgétaire s’est élevé à 31 Md USD (-2,8 % du PIB) en 2024, après 22 Md USD en 2023 (-2,0 % du PIB). En 2024, les recettes non pétrolières se sont élevées à 126 Md USD et ont représenté 38 % des recettes budgétaires. Le déficit prévu pour 2025 s’élève à -2,3 % du PIB. Le niveau de dette publique a progressé plus rapidement que prévu, mais resterait limité à 29,3 % du PIB en 2024 (26,2 % en 2023).

  • Malgré la nouvelle contraction de l’activité pétrolière, l’économie saoudienne a bénéficié d’un regain de croissance (+1,3 %) en 2024 après une contraction (-0,8 %) en 2023

 

Selon le ministère saoudien des Finances (MoF), la croissance de l’économie saoudienne s’est élevée à +1,3 %[1] en 2024, après une contraction de -0,8 % en 2023, portée par la croissance non pétrolière (+4,6 %) et malgré la contraction de l’activité pétrolière (-4,5 %). Les prévisions de moyen terme du FMI sont optimistes, en lien avec la diversification en cours, le niveau élevé d’investissements, et le rebond attendu de la production pétrolière : 3,3 % pour 2025, 4,1 % pour 2026, puis entre 3,5 % et 4,5 % jusqu’en 2029. Le PIB de l’Arabie saoudite a atteint 1 081 Md USD en 2024. La croissance est tirée par les investissements et l’activité non pétrolière. En 2024, l’implémentation de la Vision 2030 a contribué à faire avancer le programme de diversification économique du pays. L’Arabie limite volontairement la production pétrolière dans un contexte de baisse prononcée et prolongée des prix du pétrole, sans que ces derniers ne rebondissent : le baril de Brent s’échangeait en moyenne à 81 USD en 2024, contre 82 USD en 2023 et 101 USD en 2022.

Depuis juin 2023, le royaume produit 9 M bpj, soit 3 M bpj de moins que sa capacité de production. Cette réduction volontaire s’inscrit dans les coupes de production décidée par l’OPEP+ auxquelles s’ajoutent des coupes de production unilatérales de huit pays membres de l’organisation, dont l’Arabie saoudite. Alors que le royaume avait prévu de diminuer progressivement ses coupes unilatérales en 2024, le retour à la normale a régulièrement été repoussé. Après la dernière réunion de l’OPEP+ en décembre 2024, il a été annoncé que les coupes de production multilatérales allaient se poursuivre jusqu’en décembre 2026 tandis que les coupes unilatérales étaient prolongées jusqu’en mars 2025, avec des ajustements progressifs en fonction des conditions du marché jusqu’à la fin du mois de septembre 2026.

L’amélioration du marché du travail engagée depuis 2016 semble ralentir, après avoir porté des résultats significatifs. Selon la GASTAT, le taux de chômage global a atteint 3,7 % au T3 2024, après 3,3 % au T2, son plus bas niveau historique. Fin 2015, le taux de chômage global s’élevait à 5,6 %. Quant au taux de chômage des nationaux, il a atteint son plus bas niveau à 7,1 % au T2 2024 avant de remonter à 7,8 % au T3. Fin 2015, il s’élevait à 11,5 % selon le FMI. Cette baisse du taux de chômage sur la dernière décennie est principalement portée par l’entrée des femmes sur le marché du travail. Le taux de chômage des femmes s’est élevé à 11,6 % au T3 2024, contre 34,5 % fin 2015. La Vision 2030 fixait un objectif de taux de chômage des nationaux à 7 % en 2030, objectif revu à 5 % en novembre dernier. Pour l’atteindre, le Royaume impose des règles contraignantes de « saoudisation » des emplois propres à chaque secteur, qui continuent de se renforcer.

L’inflation a été contenue à 1,7 % en 2024, après 2,3 % en 2023, synthèse d’évolutions hétérogènes selon les secteurs : les loyers ont augmenté de 10,6 % tandis que les prix des produits pharmaceutiques ont diminué de 3,9 %. Le FMI prévoit une inflation à 1,9 % en 2025. Entre septembre et décembre 2024, la banque centrale saoudienne a successivement abaissé de 50 points de base (bps) puis deux fois de 25 bps son taux directeur, répliquant les décisions de la Fed. Le secteur non pétrolier devrait tirer parti de cette amélioration des conditions de crédit. Le secteur immobilier, en particulier, pourrait bénéficier de cette baisse des coûts d’emprunt, stimulant ainsi la demande de logements.

Les indicateurs du secteur bancaire saoudien reflètent un nouveau renforcement du niveau de solidité en 2024, malgré des liquidités toujours sous pression. L’encours total des prêts bancaires a atteint 747 Md USD en 2024 (+9 % par rapport à 2023). Le crédit hypothécaire a augmenté de 13 % et représenté 20 % du portefeuille total des prêts. Les marges d’intérêt nettes des banques saoudiennes se sont élevées à 3,2 % en 2024, et devraient diminuer de 20 à 30 bps en 2025 avec les baisses des taux d’intérêt prévues par la Fed. Pour rappel, la banque centrale saoudienne suit la politique de la Fed en raison du taux de change fixe du riyal saoudien avec le dollar américain depuis 1986 (1 USD=3,75 SAR). Toutefois, la rentabilité globale du secteur demeure solide, avec un retour sur actifs stable à 2,2 %. Le secteur bancaire affiche une forte capitalisation, avec un ratio d’adéquation des fonds propres à 19,2 % en septembre 2024, largement au-dessus du seuil réglementaire de 10,5 % fixé par la SAMA. Cependant, la croissance du crédit dépasse celle des dépôts, maintenant la pression sur les liquidités et forçant les banques à rechercher des financements alternatifs, notamment les émissions obligataires.

  • Un déficit budgétaire de – 2,8 % du PIB en 2024, tiré par l’augmentation des dépenses de diversification

 

Le MoF estime le déficit budgétaire en 2024 à 31 Md USD (-2,8 % du PIB), après 22 Md USD en 2023 (-2,0 % du PIB). Le royaume poursuit sa politique budgétaire expansionniste afin de soutenir la diversification économique. Les déficits prévus pour 2025, 2026, et 2027 s’élèvent respectivement à -2,3 %, -2,9 %, et -3,0 %. Les prix relativement faibles du pétrole, couplées aux baisses de production et aux besoins de financements des grands projets du pays, ont conduit les autorités saoudiennes à revoir leurs prévisions de déficit à la hausse. Le budget 2024 prévoyait un déficit de -1,9 % du PIB en 2024 et respectivement -1,6 % et -2,3 % pour 2025 et 2026. Selon le FMI, l’équilibre budgétaire de l’Arabie saoudite aurait été atteint en 2024 avec un baril à 98 USD[1], et le serait en 2025 avec un baril à 91 USD.

Les recettes atteindraient 328 Md USD en 2024, en hausse de 1,5 % par rapport à l’exécution budgétaire de 2023 et de 4,9 % par rapport au montant qui avait été budgété pour 2024 (313 Md USD)[2], cela malgré la prolongation des réductions de la production de pétrole et un baril de Brent qui a atteint son plus bas depuis trois ans[3]. Les recettes non pétrolières s’élèveraient à 126 Md USD en 2024 (38,3 % du total des recettes), contre 122 Md USD en 2023. En 2025, le MoF prévoit des recettes de 316 Md USD, en baisse de 4,2 % par rapport à 2024, les autorités saoudiennes se voulant prudentes quant aux estimations des recettes pétrolières et non pétrolières dans le contexte actuel.

Les dépenses atteindraient 359 Md USD en 2024, en hausses respectives de 4,0 % et 15,9 % par rapport aux dépenses exécutés en 2023 et 2022. Ce niveau relativement élevé des dépenses vise à soutenir la croissance non pétrolière et la réduction progressive de l'exposition du royaume à la transition énergétique. Ainsi, les dépenses estimées pour 2024 auraient dépassé de 7,5 % le montant budgété. En 2023 déjà, l’exécution budgétaire (345 Md USD) était supérieure de 6,8 % au montant budgété (323 Md USD). Ce fût le cas en 2022 également où l’exécution budgétaire (310 Md USD) était supérieure de 18,5 % aux dépenses budgétées (255 Md USD). En 2025, le MoF prévoit des dépenses de 343 Md USD, en baisse de -4,5 % par rapport à l’estimation de 2024.

Le niveau de dette publique a augmenté plus vite que prévu et s’élèverait à 29,3 % du PIB en 2024, contre 25,9 % prévu. Il s’élevait à 26,2 % du PIB en 2023. Le MoF prévoit un niveau de dette publique pour 2025, 2026, et 2027 à respectivement 29,9 %, 32,3 %, et 33,3 % du PIB, toujours en deçà du plafond de 40 % que se sont fixé les autorités. Le niveau de dette publique reste confortable et le royaume bénéficie de conditions favorables sur les marchés internationaux grâce à sa notation souveraine solide. En novembre 2024, Moody’s a réhaussé sa note souveraine de de A1 à Aa3, soulignant les efforts de diversification économique et la politique budgétaire prudente du Royaume. En septembre 2024, S&P avait confirmé la note « A » du royaume et revu la perspective de « stable » à « positive ». En mars, Fitch avait également confirmé sa note A+ attribuée fin 2023.


[1] Quasiment au même niveau que l’estimation du FMI de 1,4 % dans le WEO de janvier 2025  

[2] Source : Middle East & Central Asia Outlook du 31/10/2024

[3] En 2023, le montant des recettes exécuté avait déjà été supérieur au montant budgété (+ 3,7 %)  

[4] Le baril de Brent s’est échangé à 69 USD le 11 septembre, son plus bas niveau depuis 3 ans, et sous la barre des 75 USD jusqu’au 31/12/2024


 Zakarya Sadmi, Attaché économique et financier
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