Situation économique et financière

Éléments structurels sur l’économie

Le Rwanda, 8e économie de la zone AEOI et 33e en Afrique (PIB de 14,3 Md USD en 2024), affiche un parcours économique impressionnant. Deuxième pays d’Afrique – après l’Éthiopie – en termes de croissance sur la période 2000–2019 (+7,7 %/an), il a vu son PIB/habitant en PPA être multiplié par plus de cinq, contre deux pour l’Afrique subsaharienne. Le taux de pauvreté a reculé (de 59,2 % en 2000 à 47,4 % en 2022), et l’espérance de vie a progressé de 20 ans, atteignant 67,1 ans. Ce développement repose sur plusieurs facteurs : gouvernance centralisée mais efficace, stabilité sécuritaire, faible corruption, fort soutien des bailleurs (Banque mondiale, BAD), investissements massifs dans les infrastructures, et diplomatie d’influence active (sécurité, intégration régionale, événements internationaux). Ce positionnement a attiré les IDE, notamment dans le tourisme (nature, mémoire, sport) et les services.

Portée par la « Vision 2050 », l’ambition est claire : devenir un pays à revenu élevé d’ici 2050. Les services (51 % du PIB en 2024), en particulier numériques et touristiques, sont au cœur de la stratégie de diversification. L’agriculture reste essentielle (27 % du PIB, 56 % de l’emploi) mais vulnérable aux aléas climatiques et peu productive. L’industrie (22 % du PIB) demeure limitée, freinée par l’enclavement, des infrastructures encore insuffisantes et une forte dépendance aux importations. Les transferts de la diaspora, désormais supérieurs aux IDE, constituent une source majeure de financement.

Mais le modèle économique présente des fragilités : un chômage élevé (16,8 % au T2 2024), un déficit de compétences, un faible capital humain (indice à 0,38 en 2020 contre 0,56 en moyenne régionale), un secteur privé local encore marginal et un accès au crédit restreint malgré une forte inclusion financière (96 % via le mobile money). La microfinance et les crédits digitaux progressent, mais leur part reste limitée (<1 % des prêts). L’enclavement du pays, dépendant des corridors logistiques de ses voisins (Tanzanie, Ouganda, Kenya), renchérit les coûts et rend indispensable le maintien de relations régionales stables. Enfin, le pays reste exposé aux chocs climatiques, comme les inondations de 2023 et 2024, qui ont gravement affecté l’agriculture et les infrastructures.

Conjoncture économique

L’économie rwandaise a conservé une croissance robuste malgré des chocs multiples (Covid-19, hausse des prix mondiaux, aléas climatiques). Entre 2021 et 2023, la croissance a atteint en moyenne +9,1 % par an, bien au-delà du potentiel estimé (+6,5 %), tirée par les services (transports, tourisme) et l’industrie, compensant la faiblesse agricole. En 2024, la croissance s’est encore accélérée (+8,9 %), portée par l’agriculture, les services (commerce, transports) et la construction. La demande intérieure est restée vigoureuse et les exportations ont progressé. Le chômage a reculé à 14,9 %, mais reste élevé chez les femmes (17,6 %) et les jeunes (18,5 %). En 2025, la croissance ralentirait à +7,1 %, du fait de la consolidation budgétaire et d’un effet de normalisation, tout en restant soutenue par l’agriculture et les services. À moyen terme, elle se stabiliserait autour de +7,0 %, portée par la demande intérieure et de grands projets comme le nouvel aéroport de Kigali. L’inflation a nettement diminué en 2024 (+4,8 %, après +14,0 % en 2023), grâce à la reprise agricole, au recul des prix mondiaux et au resserrement monétaire. En réponse, la Banque nationale du Rwanda (BNR) a engagé un cycle d’assouplissement, abaissant deux fois son taux directeur à 6,5 %. Toutefois, des tensions sont réapparues début 2025 (inflation à +7,7 % en mai), liées à la hausse des prix alimentaires, ce qui pourrait porter l’inflation annuelle à +7,1 % selon le FMI.

Les finances publiques restent sous pression : le déficit public s’est creusé à -6,6 % du PIB en 2024 (après -5,0 % en 2023), en raison du contexte électoral, des aléas climatiques et de recettes toujours faibles (sous les 15 % du PIB). Le déficit se réduirait progressivement (-6,3 % en 2025, -3,3 % en 2026), sous l’effet de la réforme des retraites (doublement des cotisations à 12 %) et d’un ambitieux programme de réformes fiscales soutenu par le FMI (élargissement de l’assiette, réforme de la TVA, verdissement, rationalisation des incitations). Le retrait de l’USAID pourrait exercer des pressions indirectes si l’État devait compenser ses financements, notamment dans la santé.

Le Rwanda est classé à risque modéré de surendettement extérieur et global, bien que les vulnérabilités à court terme se soient accrues. Depuis 2011, la dette publique suit une trajectoire haussière, passant de 18,7 % à 67,2 % du PIB en 2024, en raison de déficits primaires répétés liés à de lourds investissements publics et à des chocs exogènes (cf. supra). Majoritairement extérieure (80,2 %), la dette a mécaniquement augmenté en raison de la dépréciation du franc rwandais, mais reste en grande partie concessionnelle (60,1 %), ce qui en atténue le coût. La dette devrait atteindre 77,6 % du PIB en 2025 selon le FMI, portée par des projets prioritaires, notamment la construction du nouvel aéroport international de Kigali.

Sur le plan extérieur, le déficit courant s’est aggravé en 2024 (-12,7 % du PIB, après -11,5 %), en lien avec la hausse des importations (infrastructures, alimentation), malgré la reprise agricole et la hausse du prix du café. Les réserves de change restent jugées adéquates (4,7 mois d’importations), soutenues par les transferts de fonds de la diaspora, le tourisme, les IDE et les dons. En 2025, le déficit atteindrait -13,8 %, les importations restant dynamiques malgré un léger ralentissement de la demande. Les exportations seraient freinées par le ralentissement en zone euro (7,6 % des débouchés) et les barrières commerciales américaines (impact limité, les États-Unis pesant 2,9 % des exportations), tandis que la réduction de l’aide extérieure (USAID, Belgique) pourrait accentuer les tensions.

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