Situation économique et financière de la Serbie

 

La croissance enregistrée par la Serbie sur la période récente, impactée par plusieurs chocs successifs, n'a pas permis un rattrapage économique suffisant avec les pays de l’UE. Le pays est néanmoins sur le point de s’ouvrir à un nouveau cycle d’investissement, porté notamment par de grands projets en relation avec l'EXPO 2027 ainsi que par la mise en œuvre du nouveau plan de croissance de l’UE.

1.La croissance serbe devrait accélérer ces prochaines années.

 

 En 2023, la croissance serbe s'est établie à +2,5 %. Ce résultat, identique à celui enregistré l'année précédente, intervient alors que la Serbie continuait à enregistrer une forte inflation, à +12,1 % en moyenne sur l'année (dont un pic à +16,3 % en mars 2023) après +11,9 % en 2022. Cette hausse des prix, induite par la hausse des prix énergétiques et alimentaires au niveau mondial, a diminué le revenu réel des ménages, tandis que la hausse des taux d'intérêt de la Banque centrale (de 1,0 % en janvier 2022 à 6,5 % actuellement) a pesé sur l'investissement. Pour 2024 et 2025, le FMI anticipe que la croissance s'accélère à +3,5 % puis 4,5 % et que l'inflation, qui ralentit désormais à +5,0 % en avril, retrouve la cible d'inflation de la NBS[1] d’ici mi-2024.Haut du formulaire

La dette publique s’est contractée de -7,6 pp en g.a. pour s’établir à 47,5 % du PIB, soit un niveau inférieur à celui enregistré avant la crise sanitaire (57,0 % du PIB en 2020). La baisse des prix énergétiques mondiaux a participé à cette amélioration, permettant la suppression des subventions énergétiques et la réduction des aides budgétaires aux entreprises publiques d’électricité (plus de 2,0 % du PIB en 2022). Dans le contexte inflationniste, le déficit public a été réduit à -2,2 % du PIB, après -3,3 % en 2022. Le budget 2024, qui prévoit des dépenses d’investissements à hauteur de 7,0 % du PIB - y compris celles liés à l'Expo 2027 -, anticipe également un déficit public de -2,2 % du PIB. Le plan de développement « Saut dans l’avenir – Serbie 2027 » prévoit par ailleurs une forte augmentation des investissements dans les infrastructures publiques. La dette publique devrait continuer sa trajectoire descendante malgré la hausse des charges d’intérêt (+23,4 % en g.a. à 1,6 Md EUR en 2024).

En parallèle, la Serbie a enregistré un déficit de la balance courante historiquement bas en 2023 à -2,6 % du PIB. L’année 2023 a en effet été marquée par une forte hausse des exportations de biens (+3,7 % à 27,9 Mds EUR) et de services (+18,1 % à 13,1 Mds EUR) tandis que les importations ont légèrement diminué à 44,6 Mds EUR (-1,0 % en g.a.). La Serbie est notamment devenue exportatrice nette d’électricité en 2023 (+490 MEUR), alors qu’elle était importatrice nette en 2022 (-742 MEUR). Par ailleurs, depuis 2015, les flux d’IDE nets financent entièrement le déficit du compte courant et atteignent 4,2 Mds EUR en 2023, soit 6,1 % du PIB (après 7,1 % en 2022). Les réserves de la Banque centrale s’établissent ainsi au niveau confortable de 25,0 Mds EUR. Si le déficit du compte courant devrait s’accroître de nouveau en 2024 puis 2025, à -3,5 % puis -4,0 % du PIB respectivement, cette dégradation serait le reflet de la reprise de la consommation et le marqueur d’un nouveau cycle d’investissement, en lien avec EXPO 2027 et la baisse attendue des taux d’intérêt de la NBS.

Malgré la résilience de l’économie serbe, les résultats devraient amener la Serbie à enregistrer une croissance annuelle moyenne de 3,3 % par an sur la période 2020-2025, insuffisante pour assurer un rattrapage rapide de l’économie. Or, avec un PIB par habitant établi à 25,5 % (USD courant) de la moyenne de l’UE en 2023, le besoin de rattrapage économique de la Serbie reste important.

2.Le nouveau  plan de croissance de l’UE pour les Balkans occidentaux pourrait soutenir la convergence de l’économie, sous certaines conditions.

 

Le nouveau plan de croissance (NPC) pour les Balkans occidentaux (2024 – 2027), qui vise à 1/ intégrer les marchés des Balkans occidentaux au marché unique ; 2/ approfondir l’intégration régionale des pays des Balkans occidentaux ; 3/ accélérer les réformes dans le domaine des fondamentaux ; et 4/ augmenter les concours financiers de l’UE, devrait être bénéfique pour la Serbie :

Selon la clef d’allocation du plan[2], la Serbie serait le premier bénéficiaire des fonds associés. Les fonds, dirigés vers des investissements dans les infrastructures, via le CIBO[3], et la mise en œuvre de réformes, devraient permettre de combler le manque d’infrastructure du pays, notamment relatifs aux énergies vertes et d’améliorer l’environnement des affaires. Ils réduiraient ainsi l’impact de la mise en œuvre de la taxe carbone aux frontières de l’UE (qui absorbe 63,0 % des exportations du pays) sur l’économie serbe, alors que le pays enregistre une intensité énergétique près de 4 fois supérieure à celle de la moyenne de l’UE. Ces concours financiers devraient également contribuer au développement du capital humain serbe alors que le pays enregistre un déficit de main d’œuvre et fait face à un déclin démographique induit par le vieillissement de la population et un taux d’émigration élevé.

Les 1er et 2ème piliers du plan de croissance de l’UE devraient également être favorables à la Serbie. Une étude de la Banque mondiale estime qu’une plus forte intégration régionale des pays de l’ALECE[4] pourrait se traduire par un gain de croissance de +3,5 % pour la Serbie. Cette même étude estime qu’une plus forte intégration des pays de l’ALECE avec l’UE (atteignant le niveau d’intégration UE-Norvège) entrainerait un gain de croissance plus importants encore, à +11,2 % pour la Serbie[5].

Il reste néanmoins que la mise en œuvre du NPC est conditionnée au bon déroulement du dialogue Belgrade – Pristina. Le décaissement des financements est par ailleurs subordonné au respect des droits fondamentaux, tandis que l’intégration graduelle au marché de l’UE sera concédée seulement si des efforts sont réalisés en termes d’intégration régionale.

A noter néanmoins que la Serbie perd 8 places par rapport à 2021 au sein de l’indice de perception de la corruption internationale 2023 pour s’établir au 104ème rang mondial. Elle n’est pas alignée sur la politique extérieure de l’UE, tandis que l’accord de libre-échange signé avec la Chine en octobre 2023 devra être annulé le jour de l’adhésion de la Serbie à l’UE, alors qu’il prévoit un certain nombre de concessions tarifaires à horizon 10/15 ans.



[1] 3 % avec une marge de + ou - 1,5 %

[2] La clef d’allocation dépend à 60 % de la part de population et à 40 % du PIB par habitant.

[3] Cadre d’Investissement pour les Balkans Occidentaux

[4] Accord de Libre Echange Centre Européen, dont les pays des Balkans occidentaux sont parties.

 


 

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