Indicateurs, conjoncture et fiche pays

Données économiques pour l'année 2022 : (Commission Européenne, Institut National des Statistiques, Banque Nationale de Roumanie, Douanes françaises)

  • PIB : 286 Mds EUR
  • PIB réel par habitant : 10 110 EUR
  • PIB par habitant en base 100 moyenne UE 27 : 77
  • Taux de croissance : +4,7 % (prévisions de la Commission pour 2023 : +3,2 %)
  • Taux de chômage : 5,5 %
  • Taux d'inflation moyen (IPC) : +13,8 %
  • Solde courant : -9,4 % du PIB
  • Dette publique : 47,3 % du PIB
  • Déficit public : -6,2 % du PIB
  • Echanges de biens et services : 263,4 Mds EUR (92 % du PIB)
  • Solde commercial : -11,9 % du PIB
  • Principaux clients : Allemagne (19,8 %), Italie (10,1 %), Hongrie (7,4 %)
  • Principaux fournisseurs : Allemagne (17,8 %), Italie (8,2 %), Bulgarie (7,0 %)
  • Exportations françaises vers la Roumanie : 4,9 Mds EUR
  • Importations françaises depuis la Roumanie : 5,8 Mds EUR

 

L’économie roumaine a affiché une forte croissance en 2022 (+4,7 %) mais devrait voir son activité ralentir en 2023 en raison de l’accumulation des tensions. L’inflation se maintient à un niveau élevé (+ 15,5 % en février), alors que le marché du travail demeure sous tension. En portant son taux directeur à 7,0 %, la Banque Nationale de Roumanie semble avoir achevé son resserrement monétaire. De son côté, le gouvernement doit combler le retard accumulé en terme d’investissement et protéger les populations vulnérables, tout en réduisant un déficit public structurellement élevé. Enfin, le pays doit accélérer la conduite des réformes structurelles comprises dans le PNRR afin de bénéficier des fonds européens.

 

1.Une croissance soutenue qui devrait ralentir sous l’effet du choc inflationniste

 

La Roumanie a parcouru un chemin significatif en matière de convergence réelle, avec un PIB/habitant qui atteint 77 % de la moyenne UE27 en SPA en 2022 (+41 pt. depuis 2006). L’attraction soutenue de capitaux étrangers[1], un tissu productif diversifié et solide et la mise en œuvre de réformes (bien qu’encore partielles) constituent autant de facteurs favorables à la convergence.

Avec une croissance de +4,7 % en 2022, l’économie Roumanie a démontré sa résilience face à l’accumulation des crises. L’économie roumaine a été la troisième économie la plus dynamique de l’UE en 2022, notamment en raison de la résilience de la consommation des ménages et du secteur privé, principaux moteurs de l’économie. Le taux de chômage a diminué de -0,4 pp au cours de l’année écoulée, à 5,6 %, alors que le taux d’emploi a progressé de +0,7 pp, à 62,8 % de la population active. La tension accrue sur le marché du travail et les fortes pressions inflationnistes ont créé un climat favorable aux revendications salariales. En janvier 2023, le salaire net moyen a progressé de +15,0 %, en glissement annuel, pour atteindre 4 254 RON, limitant à -0,1 % la baisse du salaire réel. A partir du 1er janvier 2023, le salaire minimum a été revalorisé de +17,6 %, pour atteindre 3 000 RON.    

Un ralentissement de l’économie est désormais attendu pour 2023. Le pays connait une forte inflation (+13,8 % en 2022 et +15,5 % en février 2023, en g.a.) provoqué initialement par l’envolée des prix de l’énergie. Le choc inflationniste s’est propagé à l’ensemble des produits et est désormais portée par la forte hausse du prix des produits alimentaires (+22,4 % en février, en g.a.) ainsi que par l’inflation sous-jacente (+14,9 % en janvier). L’économie roumaine pourrait néanmoins profiter de la baisse des prix de l’énergie observée depuis le début de l’année pour enclencher une dynamique désinflationniste en 2023[2]. Les pressions sur les prix ont cependant fragilisé la compétitivité des entreprises. Le coût du travail a augmenté de +11,2 % en 2022, alors que les prix à la production industrielle ont progressé, en moyenne, de +45,1 %. Enfin, la dégradation de la conjoncture en Europe de l’Ouest, principal partenaire commercial de la Roumanie, impacte négativement la demande adressée aux entreprises du pays. L’accumulation des tensions a provoqué un ralentissement de la croissance au quatrième trimestre 2022[3] qui devrait persister en 2023. Si la Roumanie doit rester la 3ème économie la plus dynamique de l’UE, la croissance devrait tomber à +2,5 % cette année, selon la Commission européenne.



[1] Le stock d’IDE, qui s’élève à 106,5 Mds EUR fin 2022, a presque doublé en 10 ans, alors que les flux d’IDE ont atteint un niveau record de 10,7 Mds EUR.

[2] Au cours des deux premiers mois de l’année, le prix de l’énergie a reculé de -8,7 %, portée par la forte baisse du prix de l’électricité (-15,9 %). La BNR considère que l’inflation pourrait retomber à +7,0 % à la fin de l’année.

[3] Au T4, la croissance a été de +1,0 %, contre +1,3 % au T1 et +1,2 % au T2 et au T3.

 

2.Des politiques économiques aux marges de manouvres limitées en 2023

 

Le gouvernement sera limité dans la conduite de sa politique budgétaire en 2023. Toujours ciblée par une Procédure pour Déficits Excessifs (PDE)[1] déclenchée en  avril 2020 par la Commission, la Roumanie peine à présenter une trajectoire budgétaire soutenable à court-terme. Le déficit budgétaire a atteint -6,2 % du PIB en 2022 et pourrait atteindre -5,7 % en 2023, selon le Conseil fiscal[2]. Par ailleurs, la politique budgétaire expansionniste du gouvernement, qui souhaite soutenir la consommation et accroitre l’investissement, a provoqué une hausse de la demande en produits d’importation, à l’origine d’une augmentation du déficit courant. Ce dernier atteint -9,4 % du PIB en 2022 et devrait se maintenir au-delà des -8,0 % en 2023. Générant structurellement de faibles recettes fiscales[3] en raison d’une fiscalité avantageuse et d’une capacité limitée à percevoir l’impôt, le gouvernement sera contraint dans la conduite de sa politique budgétaire en 2023, d’autant que le pays doit faire face à la remontée des taux souverains renchérissant le coût de la dette[4]. En 2022, le niveau de dette publique a cependant reculé de -1,7 pp, à 47,2 %, en raison de la forte croissance.

La Banque Nationale de Roumanie a resserré sa politique monétaire afin de lutter contre l’inflation, en augmentant son taux directeur de +525 pdb, (à 7,0 %) depuis début 2022. Cette politique limite la création monétaire et réduit l’activité de crédits[5]. En outre, si le gouvernement semble avoir abandonné son objectif d’adhésion à la zone euro à l’horizon 2024, la BNR assure la stabilité du taux de change EUR/RON[6], car 46,2 % de la dette publique et une partie non-négligeable de l’endettement privé[7] est souscrit en EUR. Le renchérissement des prêts en RON a d’ailleurs accéléré l’ « euroïsation » de l’économie roumaine, à rebours de la tendance observée ces dernières années. Enfin, la BNR bénéficie d’une ligne d’accès à des liquidités en euros auprès de la BCE, pour un montant de 4,5 Mds EUR, jusqu’au 15 janvier 2024.



[1] Le 18 juin 2021, le conseil européen a prolongé le délai accordé à la Roumanie pour corriger son déficit public, à 2024, afin de ne pas compromettre la reprise.

[2] -4,4 % selon la loi de finance, mais les objectifs présentés par le gouvernement en la matière sont très rarement atteints.

[3] Les recettes fiscales roumaines étaient limitées à 26,2 % du PIB en 2022. En Europe, seule l’Irlande perçoit moins d’impôts.

[4] De 5,3 % au 01/01/2022, les taux souverains à 10 ans atteignent 7,7 % au 15/03/2023.

[5] En terme réel, la masse monétaire (M3) a reculé de -7,1 % en un an en février 2023, l’endettement en RON de -9,7 %.

[6] Du début de l’année 2022 au 22 mars 2023, le RON s’est apprécié de 0,5 %, contre 4,4 %% pour la couronne tchèque, tandis que le forint hongrois s’est déprécié de 5,7 % et le zloty polonais de 2,0 %.

[7] L’endettement privé en EUR représente, en février 2023, 13 % et 44 % de l’encours de crédits des ménages et des entreprises.

 

3.L’absorption des fonds européens et l’application du PNRR sont cruciales pour l’avenir

 

L’ampleur des fonds européens que la Roumanie peut percevoir jusqu’en 2027 est considérable, atteignant 80 Mds EUR, soit 33 % du PIB. Au titre du PNRR, la Roumanie bénéficie d’une dotation de 29,2 Mds EUR (soit 13% du PIB), dont 14,2 Md€ de subventions. En septembre, la Commission européenne a rendu un avis favorable pour le versement de la première tranche du plan, d’un montant de 2,6 Mds EUR, alors que le pays a déjà pu bénéficier d’un préfinancement de 3,7 Mds EUR.

Le pays accumule les retards pour l’application et le décaissement du PNRR. Alors que la deuxième demande de décaissement est en cours d’examen par la Commission, le gouvernement peine à conduire les projets et réformes compris dans le plan de relance. Les travaux d’infrastructures accumulent les retards, alors que le PSD, qui doit prendre la tête de la coalition gouvernementale en mai, s’oppose à la réforme des retraites et souhaite négocier des exceptions dans le cadre de la réforme sur la gouvernance des entreprises publiques. Par ailleurs, les échéances électorales de 2024 pourraient limiter le volontarisme du gouvernement à conduire rapidement ces réformes, structurellement nécessaires mais socialement sensibles.   

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