Indicateurs, conjoncture et fiche pays

Données économiques pour l'année 2023 : (Commission Européenne, Institut National des Statistiques, Banque Nationale de Roumanie, Douanes françaises)

  • PIB : 323 Mds EUR
  • PIB réel par habitant : 10 250 EUR
  • PIB par habitant en base 100 moyenne UE 27 : 78
  • Taux de croissance : +2,1 % (prévisions de la Commission pour 2024 : +3,1 %)
  • Taux de chômage : 5,8 % (T4)
  • Taux d'inflation moyen (IPC) : +10,4 %
  • Solde courant : -7,1 % du PIB
  • Dette publique : 49,3 % du PIB
  • Déficit public : -5,7 % du PIB
  • Echanges de biens et services : 268 Mds EUR (83 % du PIB)
  • Solde commercial : -9,0 % du PIB
  • Principaux clients : Allemagne (20,8 %), Italie (10,2 %), France (6,3 %)
  • Principaux fournisseurs : Allemagne (19,4 %), Italie (8,7 %), Hongrie (6,5 %)
  • Exportations françaises vers la Roumanie : 5,2 Mds EUR
  • Importations françaises depuis la Roumanie : 6,4 Mds EUR

 

Demeurée résiliente en 2023, l’économie roumaine devrait retrouver une dynamique de croissance en 2024 et 2025 grâce à l’amélioration de la conjoncture dans ses principaux marchés clients, à une consommation solide des ménages dont les revenus continuent de progresser ainsi qu’au dynamisme des investissements, soutenus par le déploiement des grands projets d’infrastructure compris dans le Plan National de Relance et de Résilience (PNRR). Cependant, la conduite des politiques économiques devrait rester contrainte par un déficit public toujours élevé ainsi que par le maintien d’importantes tensions sur les prix, qui éloignent à nouveau la perspective d’un assouplissement de la politique monétaire.

 

1. Résiliente en 2023, l’économie roumaine devrait rebondir en 2024…

 

L’économie roumaine a ralenti en 2023 mais est restée relativement performante en dépit d’un environnement dégradé. Après une année 2022 dynamique (+4,1%), l’économie roumaine a ralenti en 2023, avec une croissance de +2,1%, soit sa plus faible performance depuis 2013[1]. L’année a été marquée par le recul de l’activité au 1er trimestre, notamment en raison de la forte hausse des prix de l’énergie consécutive au déclenchement de la guerre en Ukraine, et au 4ème trimestre.  L’économie a par ailleurs été pénalisée par la mauvaise orientation des principaux marchés clients du pays : l’atonie des économies allemande (-0,3%), italienne (+0,9%), française (+0,7%) et hongroise (-0,9%), qui absorbent 43% des exportations roumaines, a pesé sur la demande adressée aux entreprises roumaines. Dans ce contexte, la production industrielle a reculé de -4,9% et est restée inférieure à son niveau pré-pandémie. Cependant, l’activité a été portée par les bonnes performances du secteur de la construction (+11%), soutenu par les grands projets d’infrastructure lancés dans le cadre du PNRR, de l’agriculture (+10,2%), portée par un rebond de la production après de mauvaises récoltes en 2022, ou encore des TIC (+5,1%). Par ailleurs, la résilience du marché du travail a favorisé d’importantes augmentations salariales, lesquelles ont soutenu une consommation des ménages dynamique (+3,1 %)[2]. Dans ce contexte, la Roumanie a enregistré la 6ème plus forte croissance de l’UE.

Une accélération progressive de l’activité est attendue en 2024 et 2025 en raison de l’amélioration de la conjoncture européenne, du maintien d’une importante consommation des ménages, de la bonne tenue des investissements directs étrangers et de la croissance des investissements dans un contexte de forte disponibilité des fonds européens. Ainsi, la Commission européenne estime que la Roumanie devrait être la 2ème économie la plus dynamique de l’UE[3] en 2024, avec une croissance de +3,3%, en phase avec le consensus des prévisionnistes. L’activité devrait croître à un rythme similaire en 2025 (entre +3,1% et +3,6%), horizon auquel l’inflation devrait retrouver un niveau conforme à la cible de la banque centrale (2,5 % ± 1pp). Au 1er trimestre 2024, l’activité a progressé de +0,5% par rapport au T4 2023 et devrait renouer avec une croissance plus dynamique ces prochains mois. De leur côté, les IDE ont atteint 3,2 Mds EUR au 1er quadrimestre (+34% en g.a.). La reprise devrait toutefois être marquée par une certaine progressivité liée au maintien de pressions inflationnistes en raison du dynamisme du prix des services[4], ce qui illustre la constitution d’une boucle prix-salaires.

La Roumanie profite de solides perspectives à moyen-terme, malgré la persistance de déséquilibres. La Roumanie est le pays ayant convergé le plus rapidement vers les standards européens, avec un PIB / habitant atteignant 78 % de la moyenne UE27 en SPA en 2023 (+38 pt. depuis 2006).  Elle conserve la confiance des agences de notation, lesquelles ont confirmé la note « BBB- » assortie de perspectives stables sur sa dette souveraine. Son économie devrait continuer de profiter, à l’horizon 2030[5], de la hausse rapide du niveau de vie de sa population et du maintien d’importants flux d’investissements étrangers et de fonds européens. Cependant, pour conforter ses perspectives de croissance à plus long-terme, le pays devra notamment poursuivre le renforcement de son environnement des affaires[6] et accroitre ses dépenses de R&D afin de favoriser l’innovation et la hausse de la productivité tout en réduisant ses déséquilibres extérieurs[7].


[1] Hors 2020, marquée par la crise sanitaire (-3,7 %).

[2] Le salaire net réel, qui avait reculé en 2022, a progressé de +6,3 % en 2023, soutenant ainsi la consommation des ménages, qui demeure le principal moteur de la croissance roumaine.

[3] Derrière Malte et à égalité avec la Croatie.

[4] Le prix des services a progressé de +10, % en un an, en mars 2024, après avoir augmenté de +11,3 %, en moyenne, en 2023.

[5] Le FMI anticipe, par exemple, une croissance de +3,7 % en 2028. 

[6] En renforçant notamment la prévisibilité réglementaire et fiscale.

[7] En Roumanie, les dépenses de R&D représentent 0,46% du PIB soit le plus faible niveau européen.

 

2. … mais les politiques économiques disposent de marges de manœuvre de plus en plus contraintes.

 

Le maintien d’une inflation élevée éloigne la perspective d’un assouplissement de la politique monétaire à court-terme. En mars 2024, la Roumanie a enregistré la plus forte inflation de l’UE (+6,6 %, en g.a), alors que l’inflation sous-jacente atteignait +7,1%. Par ailleurs, la résilience de la croissance limite la nécessité d’assouplir la politique monétaire afin de soutenir l’économie, alors que l’activité de crédits a rebondi malgré le maintien de taux élevés. Entre le T1 2023 et le T1 2024, l’encours des prêts aux ménages et aux entreprises a ainsi progressé de 3,3% et 5,1%, respectivement. Dans ce contexte, la Banque nationale de Roumanie (BNR) maintient son taux directeur à 7% depuis janvier 2023. Parallèlement, les agents économiques ont considérablement renforcé leur épargne (+12,1%), notamment en RON, afin de profiter de rémunérations attractives.

Alors que les banques centrales européennes ont enclenché leur cycle de baisse des taux, le maintien d’une politique monétaire restrictive en Roumanie devrait soutenir l’objectif de stabilité du RON[1] poursuivi par la BNR.

L’accroissement du déficit public limite les capacités de la politique budgétaire. Malgré l’adoption de nouvelles mesures fiscales fin 2023 devant générer 4 Mds EUR de recettes supplémentaires en année pleine, la Roumanie a connu un nouveau dérapage budgétaire en 2023, avec un déficit public estimé à -6,6 % par la Commission européenne[2], un niveau bien supérieur à l’objectif initial de 4,4 %. Par ailleurs, à l’approche de nombreuses échéances électorales[3], le gouvernement s’est engagé à ne pas augmenter les impôts en 2024, alors qu’une nouvelle méthode de calcul des retraites devrait entrer en vigueur au 1er septembre 2024 et accroitre fortement les dépenses de pension. Par conséquent, le déficit public devrait rester élevé en 2024 (entre -6,4 et -6,9 %), ce qui limite la capacité de l’Etat à engager certains investissements considérés comme stratégiques. A noter que l’accumulation des déficits a conduit à une rapide augmentation de la dette publique : limitée à 35,1% du PIB en 2019, celle-ci a atteint 52,4% en février 2024, alors que le maintien de taux souverains élevés accroît le poids des intérêts de la dette[4].

Le maintien d’une bonne dynamique de croissance dépendra en partie de la capacité de la Roumanie, qui connaît une sous-exécution de ses dépenses d’investissement retardant la conduite des projets[5], à bénéficier pleinement des importants fonds européens mis à sa disposition. Alors que la Roumanie devrait percevoir jusqu’à 80 Mds EUR de fonds européens au titre de la période 2021 – 2027, soit environ 33 % du PIB 2021, le pays doit actuellement décaisser les fonds prévus dans le cadre de son PNRR, doté de 28,5 Mds EUR sous forme de prêts et de subventions mais conditionné à la conduite de réformes. Ainsi, la Commission européenne n’a pas encore validé le décaissement de la troisième tranche du PNRR (2,7 Mds EUR répartis entre 1,9 Md EUR de subventions et 0,8 Md de prêts), déposée en décembre 2023, estimant notamment que des jalons liés à la réforme de la gouvernance des entreprises publiques n’ont pas été atteints. Les fonds du PNRR devant impérativement être décaissés avant 2026, ces retards risquent d’entrainer la perte de financements destinés notamment à la construction d’infrastructures modernes de transport, d’éducation et de santé.

 

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[1] A noter qu’entre le 1er janvier 2023 et le 10 mai 2024, le RON s’est déprécié de seulement 0,7 %, alors que la couronne tchèque s’est dépréciée de 3,1% et que le forint hongrois et le zloty polonais se sont respectivement appréciés 3,3 % et 8,2 %.

[2] La Roumanie enregistre ainsi le troisième déficit public de l’UE, derrière l’Italie et la Hongrie.

[3] Les élections locales et européennes se sont tenues le 9 juin 2024, et les élections législatives et présidentielles auront lieu au S2.

[4] Le 2 avril 2024, les obligations roumaines à 10 ans émises en RON et échangées sur le marché secondaire affichaient un rendement de
6,61 %, contre 8,38 % fin 2022 et 5,23 % fin 2021. 

[5] Sur les 9,4 Mds EUR décaissés dans le cadre du PNRR, seulement 1,9 Mds ont été dépensés. Par ailleurs, le gouvernement a limité ses dépenses d’investissement à 5,9% du PIB en 2023, un niveau en deçà de l’objectif affiché de 7,2%.

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