Situation économique et financière / Indicateurs conjoncturels

Avec un PIB de 267,6 Md USD en 2023, le Pérou est une économie de taille moyenne, la 5ème en Amérique latine, qui se place dans le premier tiers des économies de la planète en termes de PIB (48e place en 2023 selon le Fonds Monétaire International) mais à la 90e place en termes de PIB/habitant avec 7 933 USD en 2023 (pour 34,5 millions d’habitants). Le Pérou dispose d’importantes ressources naturelles, dans le domaine minier (2ème producteur de cuivre, producteur également d’argent or, étain, gaz), mais également dans le secteur agricole et de l’énergie.  

L’économie péruvienne devrait se redresser et croître de 2,5 % en 2024, après une légère contraction de 0,6 % en 2023, attribuée à des conflits sociaux, à des conditions météorologiques défavorables (phénomènes El Niño et El Niño costero), et à une baisse de la confiance des entreprises. Selon la Banque centrale du Pérou, ces facteurs ont contribué respectivement à hauteur de 40 %, 30 % et 11 % à la réduction de l'activité économique. Ce rebond de croissance en 2024 s'explique par la dissipation des phénomènes climatiques et une reprise du secteur privé, soutenue par des conditions monétaires plus accommodantes, et à une reprise des exportations issue de nouveaux projets miniers[1]. Ce rebond a également rehaussé les estimations de croissance potentielle du FMI, désormais chiffrée à 2,5 %. Le secteur du tourisme, fortement affecté par la crise, poursuit sa dynamique de reprise : au cours de l'année 2023, le Pérou a accueilli près de 2,5 M de touristes internationaux, soit 20 % de plus qu'en 2022.ce qui , reste toutefois très inférieur aux niveaux pré-COVID (- 44% par rapport à 2019).

Dans le sillage de la crise multifacettes liée au COVID, le taux de pauvreté monétaire, qui avait fortement baissé au cours des 25 dernières années a augmenté significativement. Ainsi, il était passé de 59 % à 20 % sur les dernières décennies, mais il est remonté à 30 % en 2020, soit le niveau de 2010. En 2023, la pauvreté monétaire a touché 29 % de la population, augmentant de 3,1 points de pourcentage par rapport à 2021 (26 %). Le taux de chômage s’est dégradé, à 6,7 % en 2023 (soit une augmentation de 3,4 pt% par rapport à 2022) et a marqué une rupture avec son niveau pré-pandémique (3,9 % en 2019). Néanmoins, quoique son niveau reste substantiel (71,6 % en 2023), le taux d’emploi informel a diminué de 2,7 pt% par rapport à l’année précédente.

En mai 2024, l'Indice des Prix à la Consommation (IPC) a poursuit sa décélération, à 2 % g.a. en mai, se situant dans la fourchette cible fixée par la Banque Centrale (2 %, +/- un point de pourcentage), une situation qui n'avait pas été observée depuis 2020. L’inflation baisse en termes mensuels, (-0,09 % par rapport au mois précédent) une performance nettement en-deçà des prévisions des analystes de marché qui prévoyaient une augmentation de 0,12 %. Cette diminution s'explique principalement par la réduction des prix des aliments (notamment des légumes, des fruits et des produits avicoles) ainsi que des tarifs électriques. Dans ce contexte de stabilité des prix, le taux d’intérêt directeur a diminué d’un point de pourcentage depuis décembre 2023 et s’établit à 5,75 % en juin 2024.

Le Pérou conserve des fondamentaux macroéconomiques solides, fruits de la prudence budgétaire et monétaire de ces 3 dernières décennies et d’une économie ouverte aux IDE et au commerce international. Après la « décénie perdue » des année 1980  (hyperinflation, défaut souverain et terrorisme du « sentier lumineux »), le Pérou a mis en place un cadre de politiques monétaire, budgétaire et commerciale permettant la forte croissance et la baisse de la pauvreté notamment à compter des année 2000.  Le Pérou a également su se doter d’un cadre macrobudgétaire et monétaire particulièrement solide, permettant d’assurer la crédibilité du pays sur les marchés et de protéger le Sol péruvien (PEN). Ainsi, le Pérou peut compter sur une Banque centrale et un Ministère de l’Economie et des Finances composés de techniciens et dont la qualité est reconnue internationalement. Le Pérou peut également compter sur un conseil budgétaire autonome et indépendant, entré en fonction en 2016 :

  1. Appuyée par ce cadre, la dette publique péruvienne est faible, à seulement 32 % du PIB en 2022, soit plus de 30 pts PIB de moins que le reste de la zone : cette faible dette est permise par plusieurs années de faibles déficits budgétaires et inférieurs à la croissance du PIB, voire d’excédents. Les mesures prises pour relancer l’économie après la contraction de 2023, ont entrainé une augmentation du déficit public à 2,8 % en 2023, soit 0,4 % de plus que la cible prévue par la règle budgétaire. Selon la Banque centrale Péruvienne, cette hausse est due à une baisse de la perception de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) en raison de la réduction des importations et de l'impôt sur le revenu. En outre, les recettes courantes des administrations publiques ont diminué de 13,3 % d'une année sur l'autre, après une baisse de 14,3 % des recettes fiscales. Toutefois, les services du FMI se montrent favorables à une « pause » dans le respect de la règle budgétaire tout en rappelant un nécessaire ajustement à moyen terme.  La dette publique est ainsi passée de 27 % du PIB en 2019 à 35 % en 2020, et est redescendue à 32 % en 2023, ce qui reste soutenable. Elle est notamment la plus basse de la région. 
  2. Si l’économie péruvienne reste dollarisée, elle ne l’est plus qu’au ⅓ pour les dépôts et à hauteur de 23 % pour les crédits. Elle était dollarisée à hauteur de ⅔ des dépôts et 76 % des crédits en 2000 : la politique monétaire péruvienne – permettant de redonner de la crédibilité – a ainsi permis une baisse significative de la dollarisation. Le pays bénéficie également de réserves internationales substantielles, s'élevant à 75 Md USD à la fin de mai 2024 (environ 2,3 % de la métrique ARA du FMI), soit une légère diminution par rapport à l'année précédente. Il est à noter que le Pérou a mis fin en mai 2024 à la Ligne Flexible de Crédit dont elle disposait auprès du FMI. Cette décision fait suite à une évaluation des risques externes qui ont diminué, conduisant les autorités péruviennes à ne pas renouveler cet arrangement avec le FMI.
  3. Le secteur bancaire s’est fortement développé depuis 2001, et la solvabilité et la capitalisation du secteur bancaire apparaissent appropriées, même si le secteur des caisses municipales reste problématique, sans poser cependant de risque macroéconomique. La régulation du secteur bancaire péruvien avance vers un respect de critères de Bâle III, et est même plus exigeante pour certains champs. Le système bancaire présente des ratios de liquidité et de capitalisation supérieurs à ceux requis par le régulateur.

Enfin, le potentiel de croissance du pays demeure important : l’économie est très intégrée, comme en témoignent ses 24 accords de libre-échange, dont un avec l’Union Européenne. Les exportations sur les deux premiers mois de 2024 ont atteint 10,3 Md USD, soit une augmentation de 9,1 % par rapport à la même période en 2023. Cette performance robuste est principalement attribuée à la hausse des ventes de minéraux (20 %), de produits agricoles (13 %), et de produits chimiques (5 %). L’un des catalyseurs de cette performance serait l'augmentation des prix des métaux tels que le cuivre. Le Pérou devrait par ailleurs bénéficier du développement de la nouvelle économie numérique et de la transition énergétique, très consommatrice des métaux dont elle dispose.  

A noter toutefois que si le Pérou affiche le 2e risque-pays de la région derrière le Chili, sa note souveraine a été dégradée à BBB- par S&P Global en avril 2024 en raison d’une instabilité politique entravant l’investissement privé et d’un faible espace budgétaire. Toutefois, les perspectives stables reflètent une anticipation de croissance et de déficits budgétaires modérés, maintenant la dette publique nette à un niveau proche de 30 % du PIB sur les trois prochaines années.



[1] Mine de Quellaveco et expansion de Toromocho.

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