NAMIBIE
Fiche pays Namibie (Juillet 2025)
Après avoir retrouvé son niveau d’activité d’avant-crise dès l’année 2023, l’économie namibienne a connu une croissance modérée en 2024 (+3,7 %). Ce ralentissement s’explique principalement par la baisse de la production de diamants, liée au recul des cours mondiaux, et par la contraction du secteur agricole, touché par une grave sécheresse, la plus sévère enregistrée depuis un siècle (2023–2024). En 2025, la croissance devrait globalement se stabiliser (+3,8 %, FMI), soutenue par la reprise attendue de l’agriculture, la hausse des volumes d’uranium extraits et la bonne tenue du sous-secteur de l’électricité et de l’eau. Cette dynamique reste toutefois contrainte par une conjoncture extérieure incertaine et une exposition croissante aux aléas climatiques. Ces performances demeurent notables compte tenu des difficultés de l’économie sud-africaine (croissance de 0,5% en 2024), dont la Namibie reste largement dépendante. Le défi pour les autorités est aujourd’hui triple : (i) conduire les réformes structurelles identifiées de longue date ; (ii) poursuivre l’ajustement budgétaire; (iii) accompagner le développement très attendu du secteur des hydrocarbures dès 2026, et dans une moindre mesure de ceux de la logistique, des transports et de l’hydrogène décarbonée, autant de relais de croissance qui pourraient transformer l’économie à terme.
1. Situation économique et politique
1.1. Situation politique
Le régime politique namibien se caractérise par une grande stabilité. Après le décès brutal, dans l’exercice de ses fonctions, du Président Hage Geingob, qui avait passé dix ans à la tête du pays, son vice-président Nangolo Mbumba a prêté serment pour lui succéder le jour même, le 4 février, occupant le poste jusqu’au 21 mars 2025, terme du second mandat du Président Geingob. Netumbo Nandi-Ndaitwah, anciennement vice-première ministre et ministre des relations internationales et de la coopération, a alors été nommée vice-présidente. Elle a ensuite remporté les élections présidentielles de novembre 2024, en tant que candidate désignée de la South West Africa People's Organization (SWAPO), parti au pouvoir depuis l’indépendance en 1990. Les scores électoraux obtenus par la SWAPO sont toutefois en net déclin (53% des voix, contre 65% en 2019 et 87% en 2014), dans un contexte marqué par plusieurs affaires de corruption et un désaveu de la jeunesse urbaine largement désoeuvrée. Entre 2015 et 2023, la Namibie a perdu quatorze places au classement Transparency International, où elle figure à la 59ème place (sur 180 pays). Si la tendance inquiète, le pays fait toutefois figure de bon élève d’Afrique sub-saharienne, en sixième place derrière les Seychelles, le Botswana, le Cap Vert, le Rwanda et Maurice.
1.2. Éléments structurels relatifs à l’économie
Avec un PIB de 13,4 Mds USD en 2024, la Namibie est une petite économie. Néanmoins, avec une population de 3 millions d’habitants, elle se classe aussi dans le top 10 des pays d’Afrique subsaharienne les plus riches (PIB par tête de 4 470 USD). Sur le plan social, le pays se trouve dans une situation relativement plus favorable que ses voisins, même s’il souffre des mêmes maux. Le taux de pauvreté y est relativement plus faible (estimé à 19,9 % en 2024 au seuil international de 2,15 USD par jour, contre 24 % en 2010), tout comme le taux de chômage, exacerbé par un déficit de compétences, qui demeure structurellement élevé (20 % en 2024 selon la Banque mondiale). Enfin, les inégalités figurent parmi les plus fortes au monde (indice de Gini de 0,59) et la hausse de l’insécurité alimentaire, en lien avec l’impact de la sécheresse 2023/24 qui a fortement pesé sur la production agricole, reste préoccupante. En 2023, la Namibie s’est classée au 9ème rang des pays d’Afrique subsaharienne selon l’indice de développement humain, et au 136ème rang sur 191 pays à l’échelle mondiale.
Malgré la petite taille de son marché, l’économie namibienne dispose d’atouts non-négligeables : un régime politique stable, des institutions solides, un secteur financier sophistiqué (majoritairement contrôlé par des capitaux sud-africains et leurs grandes banques), un fort potentiel dans les services – logistique et numérique, ainsi que des ressources naturelles (uranium, diamants) et halieutiques abondantes. Cependant, elle est peu diversifiée, reposant en grande partie sur l’exploitation de ces ressources (le secteur minier représente ainsi environ 13% du PIB et plus de 50% des recettes d’exportation sur l’année 2024, le secteur de la pêche près de 16% des exportations) ; ainsi que sur le tourisme (environ 12% du PIB). Elle est ainsi fortement vulnérable aux chocs externes, d’autant qu’elle importe 60 à 70 % de ses besoins en électricité et environ 50 % de sa consommation céréalière. Le secteur public représente aussi un poids relativement élevé (9% du PIB), largement financé par la rente minière. Enfin, l’économie namibienne est très dépendante de son voisin sud-africain (distribution, recettes douanières et commerce extérieur), qui représente son premier débouché (25,9% de ses exportations en 2024), et son premier fournisseur (46,2% de ses importations). Les transferts en provenance de la Southern Africa Customs Union (SACU), qui constituent une source majeure des revenus budgétaires de la Namibie (11,2 % du PIB en 2024/25), accentuent cette dépendance à l’Afrique du Sud.
2. Conjoncture et finances publiques
2.1. Conjoncture économique
Après un rebond post-Covid en 2021 et 2022 (respectivement +3,6% et +5,4%, après une chute de 8,1% en 2010), la croissance de l’économie namibienne, principalement portée par le secteur minier (y compris exploration pétrolière) et les services, s’est progressivement essoufflée. Elle a ainsi ralenti à 3,7% en 2024 (après +4,4% en 2023), en lien avec les difficultés rencontrées par le secteur des diamants (contraction de 3,7 % dans un contexte de chute des prix mondiaux), et ce malgré une hausse des cours de l’or et de l’uranium. Le secteur agricole (9% du PIB), affecté par la sécheresse la plus sévère enregistrée depuis un siècle (en lien avec le phénomène El Nino), a également enregistré une contraction marquée (-2,7 %) en 2024. Si la sécheresse s’est atténuée au début de l’année 2025, elle a rapidement laissé place à des pluies torrentielles, soulignant les défis liés à une volatilité climatique accrue. Malgré des découvertes prometteuses de pétrole offshore, aucune entreprise ne s’est encore engagée à investir, en raison des caractéristiques physiques complexes des gisements explorés. L’exploration pétrolière est ainsi restée globalement stable, sans nouvelle dynamique significative, comme en témoigne la croissance modeste de 0,4 % en 2024 du sous-secteur « autres activités extractives », même si de grandes décisions sont attendues pour début 2026. L’économie namibienne a également été affectée par les difficultés persistantes de l’économie sud-africaine (croissance de +0,5 % en 2024). Elle a toutefois bénéficié d’une baisse de l’inflation à 4,2 % en 2024 (contre 5,9 % en 2023), principalement en raison de la diminution des prix des carburants. Dans ce contexte, et afin de soutenir la consommation, la Banque centrale a abaissé son taux directeur de 0,75 point, le faisant passer de 7,75 % à 7,0 % au cours de l’année 2024.
La croissance devrait se stabiliser autour de 3,8 % en 2025 (prévisions FMI et Banque centrale de Namibie), portée par des améliorations attendues dans le secteur primaire (+0,8%), notamment un rebond du secteur agricole (+2,4%) et une hausse de la production d’uranium (+7,5%). L’expansion du sous-secteur de l’électricité et de l’eau (+12,3%) au sein des industries secondaires devrait également soutenir l’activité, principalement grâce à des conditions de pluviométrie favorables, qui devraient stimuler la production électrique, notamment à partir de la centrale hydroélectrique de Ruacana. L’économie reste toutefois exposée à plusieurs risques : i) la baisse des recettes liées aux diamants, liée à la chute des prix mondiaux et à la concurrence des pierres synthétiques ; ii) les difficultés occasionnées par la politique commerciale menée par la nouvelle administration américaine. L’impact direct des nouveaux droits de douane en vigueur depuis le 7 août (15%) devrait rester limité : les exportations namibiennes vers les Etats-Unis ne représentaient que 2,7% de leurs exportations totales en 2024, et sont largement concentrées dans les secteurs taxés à taux réduit (61% des exportations namibiennes vers les Etats-Unis étaient ainsi constituées d’uranium en 2024). Certains effets indirects pourraient néanmoins survenir, comme la baisse des prix des hydrocarbures et du diamant ; iii) les risques climatiques, et notamment l’augmentation des précipitations, qui accroît le risque d’inondations et de dégâts aux infrastructures.
Si le pays affiche des perspectives de croissance modérées à moyen terme (3%), la Namibie bénéficie d’opportunités majeures pour transformer et diversifier son économie. D’une part, l’exploitation des gisements d’hydrocarbures dans le Bassin de l’Orange, dont les réserves sont estimées à 11 Mds de barils, pourrait faire de la Namibie l’un des principaux pays exportateurs de pétrole à l’échelle du continent (à titre de comparaison, les réserves du Nigéria, premier producteur africain, s’élèvent à 38 Mds de barils). D’autre part, la Namibie cherche à se positionner comme leader dans le développement de l’hydrogène vert, avec plusieurs mégaprojets à vocation exportatrice en cours d’étude (dont le projet Hyphen de 10 Mds USD, porté par le groupe allemand Enertrag), bien que leur faisabilité reste à démontrer. Le développement de ces secteurs, dont les calendriers restent incertains, devra également s’accompagner de réformes structurelles pour poser les bases d’une croissance davantage inclusive (amélioration du climat des affaires, réformes des entreprises publiques et des services clefs - énergie et transport notamment, mise en place des cadres réglementaires propres au secteur, etc.). Les autorités semblent avoir pris conscience de ces défis et ont ainsi créé, en mai 2022, le fonds souverain Welwitschia, afin d’assurer une gestion transparente de la manne pétrolière et ainsi de prévenir un phénomène de « maladie hollandaise ». Début 2025, les actifs du fonds avaient augmenté de 193 M NAD (environ 9 M EUR), atteignant un solde total de 453 M NAD (environ 21 M EUR), selon les données officielles. Une loi visant à opérationnaliser les règles encadrant les dépôts et les retraits est en cours de rédaction et devrait être présentée au Parlement d’ici la fin de l’année 2025.
2.2. Situation des finances publiques
La situation des finances publiques s’est fortement dégradée dans la décennie 2010 (qui a enregistré un déficit moyen de 6% du PIB par an). Après s’être temporairement aggravée sous l’effet de la crise de la Covid-19 (déficits budgétaires de respectivement 8,1% et 8,7% du PIB en 2020/21 et 2021/22), poussant les agences Moody’s et Fitch à dégrader leur notation souveraine du pays en avril et juin 2022 (respectivement à B1 et BB-, soit trois et quatre crans en territoire spéculatif), elle semble désormais en voie d’amélioration (déficits de respectivement 5,7% et 2,4% du PIB en 2022/23 et 2023/24, et réalisation d’un excédent primaire de 2,7% du PIB en 2023/24, le premier en dix ans).
Un léger rebond du déficit a toutefois été enregistré sur l’exercice 2024/25 (3,9% du PIB, soit une augmentation de 1,5 point de PIB), et ce malgré une augmentation des recettes publiques (36,5% du PIB, contre 35,1% du PIB l’année précédente), sous le triple effet de transferts record de la SACU (11,2% du PIB, contre 10,5% du PIB l’année précédente), de recettes élevées d’impôt sur le revenu et de TVA, et du remboursement de dettes fiscales dues par plusieurs entreprises publiques (0,5% de PIB). L’exercice a en effet été marqué par une forte hausse des dépenses (40,4% du PIB, soit une augmentation de près de 3 points de PIB), dans un contexte de levée du gel du salaire des fonctionnaires, de reprise des dépenses d’investissement (modernisation du rail et projets dans le secteur de l’eau) et de sécheresse historique (le gouvernement a alloué 0,6% du PIB sur l’exercice afin de financer le drought relief program).
Le déficit devrait encore s’accentuer sur l’exercice 2025/26 (prévision de 4,6% du PIB selon le gouvernement et de 5,7% du PIB selon le FMI), dans un contexte de forte diminution des recettes douanières en provenance de la SACU (7,7% du PIB, contre 11,2% du PIB l’année précédente), tandis que les dépenses devraient au contraire être maîtrisées (prévision de 38,8% du PIB, contre 40,4% du PIB sur l’exercice précédent). La hausse des dépenses d’investissement prévue dans le budget 2025-26 (4 % du PIB, contre 3,9 % en 2024/25) devrait en effet être compensée par une réduction des dépenses de fonctionnement.
Si le FMI table sur une diminution progressive du déficit (de 4,8 % du PIB en 2026/27 à 3,3 % en 2030/31), grâce à la poursuite des excédents primaires, (qui devraient atteindre près de 2% du PIB à l’horizon 2030), cette trajectoire reste dépendante des transferts de la SACU, et certaines mesures fiscales (baisse de l’impôt sur les sociétés hors secteur minier de 32% à 30% ; doublement du seuil d’imposition sur le revenu à 100 000 NAD ; hausse de 5% du salaire des fonctionnaires) pourraient, à moyen terme, réduire les marges de manœuvre du gouvernement.
Le poids de la dette publique, en augmentation constante ces dernières années (de 16% du PIB sur l’exercice 2009/2010 à 67,5% en 2022/23), a légèrement reflué sur les deux derniers exercices (marqués par les premiers excédents primaires en dix ans), pour atteindre 66,2% du PIB en 2024/25. La dette publique est principalement domestique (78% en 2024), ratio qui devrait encore augmenter avec l’arrivée à échéance en octobre 2025 d’un Eurobond de 750 MUSD. Selon le FMI, qui estime le risque de surendettement du pays « modéré », la dette publique devrait continuer de décroître lentement sur les prochains exercices, pour se stabiliser sous la barre des 60% du PIB à l’horizon 2030/31.Selon le FMI, qui estime le risque de surendettement du pays « modéré », la dette publique devrait continuer de décroître lentement sur les prochains exercices, pour se stabiliser sous la barre des 60% du PIB à l’horizon 2030/31.
3. Relations avec la communauté financière internationale
Si les autorités ont longtemps cherché à limiter l’endettement du pays vis-à-vis des bailleurs internationaux, la crise de la Covid-19 a marqué le début d’un changement de stratégie. Le gouvernement a ainsi fait appel, en avril 2021, à un financement d’urgence du FMI (Rapid Financing Instrument) d’un montant de 270 MUSD. Après quinze ans d’absence dans le pays, la Banque Mondiale a octroyé en 2024 un prêt en faveur de l’électricien public NamPower (pour un montant total de près de 138 MUSD) afin de financer le développement des énergies renouvelables, du réseau de transmission et des capacités de stockage par batterie. L’institution financière est également présente via l’IFC (un unique projet actif signé en 2021) et la MIGA (une dizaine de projets actifs). Enfin, la Namibie a aussi bénéficié de trois financements de la Banque africaine de développement depuis 2020 (dont un en 2023), portant à près de 560 MUSD son enveloppe de projets actifs (une dizaine) dans le pays – dont la quasi-intégralité en prêts souverains – principalement dans les domaines de l’eau, de l’agriculture et de l’éducation.
4. Aide publique au développement de la France
Entre 2021 et 2023 (dernières données disponibles), la Namibie a reçu en moyenne 221 MUSD de versements bruts d’Aide Publique au Développement (APD) par an de la part des bailleurs bilatéraux. La grande majorité provenait de l’Allemagne (près de 52%), des Etats-Unis (41%) et du Japon (3%). Sur la période, la France a été le quatrième pays contributeur à l’APD bilatérale (1,8 MUSD en moyenne par an, soit 1% du total). Les opérations de l’AFD dans le pays se concentrent notamment dans les secteurs (i) des infrastructures énergétiques et portuaires (prêt de 100 M EUR à Nampower pour la construction d’une centrale biomasse, développement des partenariats public-privé pour le port de Walvis Bay) ; (ii) la finance inclusive et durable (PostFin, Sunref) et ; (iii) la protection de la biodiversité.
5. Relations économiques avec la France
5.1. Échanges commerciaux avec la France
Après six années consécutives de croissance, les échanges commerciaux entre la France et la Namibie ont reflué en 2024 (-20%), pour atteindre 226 M€. Cette baisse s’explique principalement par une réduction des importations française en provenance de Namibie (-24 %, à 189 M€), liée à une diminution des flux d’uranium (71 % du total), dans un contexte de repli des cours mondiaux et de reprise des approvisionnements en provenance du Niger et du Kazakhstan. Les exportations françaises vers la Namibie ont en revanche progressé (+14 %, à 37 M€), portées par une augmentation des ventes de matériel de transport. Malgré cette dynamique, le déséquilibre de notre balance commerciale persiste (déficit de 152 M€). Bien que la Namibie demeure un partenaire commercial marginal en termes de volumes (145ème client, 90ème fournisseur), elle conserve une importance stratégique pour la sécurité énergétique de la France. Elle est en effet notre 3ème fournisseur d’uranium naturel (libre de droit, qui plus est), représentant 18 % de nos importations en valeur. Cette position devrait se renforcer dans les prochaines années, notamment grâce à la relance attendue de l’exploitation à la mine de Trekkopje par le groupe français Orano.
5.2. IDE et présence française
Une vingtaine d’entreprises françaises est implantée en Namibie. Elles opèrent principalement dans le secteur extractif (hydrocarbures et mines) et ceux des infrastructures afférentes (énergie, eau, transport, gestion des déchets), en fort développement dans le pays, mais aussi dans d’autres secteurs, comme le tourisme ou l’aéroportuaire. Le projet de TotalEnergies (TE) mobilise en particulier à lui-seul une cinquantaine de sous-traitants, ce qui a incité l’entreprise à subventionner une liaison aérienne vers Lüderitz, d’où des rotations de 24 personnes rejoignent quotidiennement le projet offshore. Les entreprises françaises sont réunies au sein de la Namibian French Business Association (NFBA), créée en 2017 pour succéder au French Business Club. D’autres groupes, basés en Afrique du Sud, développent leurs activités à distance, depuis leur siège régional à Johannesbourg, comme Schneider Electric, Airbus, Thalès, Saint Gobain et Sanofi. Plusieurs PME ont récemment exprimé leur intérêt pour le marché namibien dans des secteurs divers.