Fiche pays Malawi (Juillet 2025)

Avec un PIB par habitant de 504 USD en 2024, le Malawi demeure l’un des pays les plus pauvres au monde. L’économie, fortement tributaire du secteur agricole, a été durement touchée en 2024 par une sécheresse exceptionnelle liée au phénomène El Niño, limitant la croissance à 1,8 %. Les perspectives restent fragiles et largement conditionnées à la performance agricole et surtout à des soutiens extérieurs : sans réformes structurelles, le FMI estime que la croissance n’atteindra que 2,4 % en 2025 et 3,4 % à moyen terme, loin d’offrir des perspectives de développement lorsque la population croît en moyenne de 2,6% par an. La résiliation en mai 2025, après un seul déboursement, du programme de financement octroyé fin 2023 par le FMI, constitue également un important facteur d’incertitude. Sur le plan politique, la perte de la majorité parlementaire de la coalition au pouvoir en juillet 2024 fragilise encore le président Chakwera et accroît le risque de tensions sociales à l’approche des élections présidentielles du 23 septembre 2025.

1. Situation économique et politique

1.1. Situation politique

Auparavant sous protectorat britannique, le Malawi est devenu indépendant en 1964. À partir de cette date et pendant trente ans, le pays a été dirigé de façon autoritaire par le président Hastings Banda. En 1994, le pays est devenu une démocratie multipartite. En février 2020, la Cour constitutionnelle a annulé les élections présidentielles de mai 2019, qui, entachées de nombreuses irrégularités, s’étaient soldées par la réélection de Peter Mutharika, au pouvoir depuis 2014. De nouvelles élections, organisées en juillet 2020, ont consacré la victoire du chef de l’opposition, Lazarus Chakwera. Cet épisode, qui a suscité des attentes irréalistes de la part de la population, compte tenu de l’importance des défis à relever, a ensuite fait place à une certaine déception. La corruption, favorisée par la lourdeur administrative et le manque d’efficacité de l’appareil public, reste omniprésente : après une amélioration en 2021 (+19 places), l’indice de perception de la corruption s’est dégradé, et le pays figurait en 2024 à la 107ème place sur 180 dans le classement de Transparency International. À noter que le Président a limogé l’ensemble de son gouvernement en janvier 2022, en réponse à des allégations de corruption. La situation politique s’est encore fragilisée en 2024 avec le décès brutal du vice-président Saulos Chilima, personnalité centrale de la coalition au pouvoir. Le retrait de la coalition du parti UTM, fondé par Chilima, a fait perdre sa majorité parlementaire à l’Alliance Tonse, dirigée par le président Chakwera. Malgré son impopularité croissante, le président Chakwera se représente toutefois lors des élections générales prévues en septembre 2025, dans un contexte marqué par une opposition fragmentée et une recrudescence des mouvements de contestation.

1.2. Éléments structurels relatifs à l’économie

Malgré sa petite taille, le Malawi est un marché de taille moyenne : il compte 23,4 M d’habitants, soit plus que la Zambie (21,1 M) et le Zimbabwe (17 M). Son PIB ne s’élève en revanche qu’à 11,8 Mds USD, ce qui en fait l’une des économies les plus pauvres au monde (son PIB par habitant, 504 USD, est le 42ème d’Afrique subsaharienne, sur 44 pays). Plus de 70% de la population se situe en-deçà du seuil de pauvreté (au seuil de 3 USD par jour, applicable aux pays les moins avancés), et le pays se classe à la 172ème position sur 198 pays sur l’indice de développement humain (IDH). La transition démographique reste un défi majeur pour le Malawi (taux de croissance de la population de près de 2,6% par an).

L’économie du Malawi est peu diversifiée, très dépendante de l’agriculture (plus de 22% du PIB et 80% des emplois). Le secteur est caractérisé par une forte dichotomie : d’une part, un petit nombre d’exploitations commerciales, générant entre 70% et 80% des exportations du pays (tabac et noix) ; d’autre part, une agriculture vivrière et pluviale, très peu productive. La production, qui croît moins vite que la population, est par ailleurs affectée par de multiples chocs climatiques, dont la sécheresse inédite en 2024. L’agriculture est dominée par la production de tabac (près de 49% des recettes d’exportations sur la période 2020-2024, particulièrement sensible aux variations des cours internationaux), de légumes secs (7%), de thé (8%) et de noix (10%). L’économie du Malawi repose également sur les secteurs de la distribution (11,4% du PIB) et de l’industrie manufacturière (11,8%). Le secteur du tourisme représenterait environ 5,6% du PIB mais reste contraint par l’enclavement du pays et le manque d’infrastructures de qualité. 

Le développement du secteur privé est entravé par de nombreuses difficultés structurelles : le climat des affaires est mauvais, affecté par la forte intervention de l’Etat (notamment dans le secteur agricole), qui se traduit par de nombreuses distorsions sur les marchés ; les difficultés d’accès à l’électricité et aux services de base et de télécommunications ; le niveau peu développé du système financier et bancaire, et enfin la mauvaise qualité des infrastructures de transport. L’économie se caractérise ainsi par un taux d’investissement particulièrement faible, sapé par une instabilité (politique et macroéconomique) chronique.

2. Conjoncture et finances publiques

2.1. Conjoncture économique

Ces dernières années, l’économie malawite a subi une série de chocs externes comme internes : i) la crise de la Covid-19 puis la guerre en Ukraine ont notamment renchéri la facture énergétique et le coût des importations ; ii) les cyclones Idai en 2019 puis Freddy en 2022 ont occasionné des dégâts importants sur les récoltes et sur les infrastructures, notamment énergétiques et routières, entraînant depuis 2022 une épidémie de choléra. La croissance a donc significativement ralenti pour atteindre 0,9% en 2022 et 1,9% en 2023.

Plus récemment, à partir de la fin 2023, le pays a été frappé par une sécheresse inédite, liée au phénomène climatique El Nino. Le secteur agricole a été gravement touché, avec des pertes de récoltes atteignant jusqu'à 40 % pour le maïs, base de l’alimentation locale. L’insécurité alimentaire s’est donc nettement renforcée (22% de la population en insécurité alimentaire en 2024, contre 9% en 2022). Dans ce contexte, la croissance a ralenti à 1,8 % en 2024, sous l’effet conjugué de la sécheresse et de pénuries de devises et de carburant. Les perspectives économiques restent fragiles et dépendantes de la performance agricole et du soutien extérieur. Sans réformes structurelles, le FMI estime que la croissance atteindra 2,4 % en 2025 et 3,4 % à moyen terme.

La dégradation du cadre macroéconomique et notamment la situation de pénurie de devises dans lequel se trouve le pays depuis 2022 a par ailleurs renforcé l’impact de ces chocs sur l’économie. Le pays demeure en effet dans une situation de déséquilibre structurel du compte courant de sa balance des paiements, qui n’est compensé que partiellement par les flux entrants sur le compte de capital et le compte financier (provenant essentiellement des dons des bailleurs multilatéraux et bilatéraux et des transferts de la diaspora, le niveau des IDE restant très faible). Dans ce contexte, les réserves de changes se maintiennent à un niveau très insuffisant (149 MUSD fin 2024, représentant 0,4 mois d’importations). Le Malawi fait également face à des pressions inflationnistes extrêmement élevées, qui continuent de s’accentuer (+28,8% en 2023 et +32,2% en 2024), un niveau largement supérieur à la fourchette cible de la Reserve Bank of Malawi (RBM - 3 à 7 %). Face à cette inflation persistante, la Banque centrale a maintenu son taux directeur à 26 % depuis février 2024.

Sur le plan du marché des changes, bien que la valeur du kwacha se soit officiellement stabilisée autour de 1 750 MWK pour 1 USD depuis mai 2024, le taux observé sur le marché parallèle (prime de change supérieure à 100%) reflète une pression persistante sur la monnaie. Le FMI recommande l’instauration d’un taux de change unifié à un niveau de marché, afin de réduire les distorsions, restaurer la confiance et soutenir la croissance.

Pour améliorer le potentiel de croissance, le FMI conseille au gouvernement de miser sur un ensemble de réformes structurelles : continuer à investir dans la résilience face aux chocs climatiques, soutenir la diversification de l’économie en s’appuyant sur le secteur privé et le développement des secteurs tournés vers l’export (minier notamment) et le tourisme, renforcer le secteur agricole (irrigation et diversification), améliorer l’accès et l’efficacité des services clefs (secteur financier, énergie, télécommunications), lutter contre la corruption – le tout avec l’appui technique et financier des bailleurs.

2.2. Situation des finances publiques

Pour faire face aux récents chocs climatiques, aux pressions inflationnistes liées à la guerre en Ukraine et aux effets persistants de la pandémie, le Malawi a adopté une politique budgétaire expansionniste. Celle-ci s’est traduite par une aggravation continue du déficit, passé d’un léger excédent en 2010 à 10,1 % du PIB sur l’exercice 2024/25, nettement au-dessus de l’objectif fixé dans le budget de mi-parcours (6,5 %). Le solde primaire s’est établi à -3,5 % du PIB (contre -5,4 % en 2023), alors qu’un excédent de 0,2 % était prévu à mi-parcours. Cette dégradation résulte principalement de recettes inférieures aux prévisions, tandis que les dépenses ont été plus importantes que prévu. Les recettes domestiques n’ont atteint que 19,1 % du PIB (contre une prévision de 21,3 % du PIB dans le budget de mi-parcours), en raison d’un retard dans la mise en œuvre des réformes fiscales et administratives (amendement du projet de loi sur la TVA, ouverture d’un guichet de conformité volontaire pour les conducteurs de motos-taxis, etc.). Les dépenses domestiques se sont de leur côté élevées à 29,2 % du PIB (contre une prévision de 27,8 %), tirées à la hausse par les dépenses d’investissement, des obligations statutaires et des dépenses électoralistes à l’approche des élections générales de septembre 2025. La charge d’intérêts de la dette, principalement versée aux détenteurs domestiques de la dette, s’est élevée à 6,6 % du PIB (contre 5,2 % en 2023), absorbant une part croissante des ressources publiques.

Dans un contexte électoral peu favorable aux réformes, le budget 2025/26 prolonge le statu quo, retardant les ajustements budgétaires nécessaires. Le déficit public devrait atteindre 10,7 % du PIB sur l’exercice selon le FMI (9,6% du PIB selon le gouvernement), en raison d’une mobilisation limitée des recettes à (18,5 % du PIB) et de dépenses élevées (29,2 % du PIB), tirées par une charge d’intérêts croissante (8,2 % du PIB). À politique inchangée, le déficit devrait rester proche de 11 % à moyen terme selon le FMI, tandis que le solde primaire ne s’améliorerait que lentement (premier excédent primaire en 2029 à 0,4% du PIB). À noter que le retrait des programmes de l’USAID (2% du PIB en 2024) accentue la pression sur le budget public, en particulier dans les secteurs de la santé et de l’éducation.

Alimentée par les déficits publics, la dette a augmenté très rapidement ces dernières années, et le pays est désormais en situation de surendettement. Fin 2024, la dette malawite atteignait 10,3 Mds USD (soit 88% du PIB, contre 45,3% du PIB en 2019 et 20% du PIB en 2006). Elle se décompose en 58% de dette domestique (5,9 Mds USD), dont la totalité est détenue par des résidents, et 42% de dette externe (4,4 Mds USD). La majorité de la dette externe est détenue par des créanciers multilatéraux (3,1 Mds USD détenus par la Banque mondiale, la BAD, le FMI, etc.), les créanciers privés en détiennent plus d’un cinquième (955 M USD détenus par Afrexim et TDB, dont 669 M USD d’arriérés), et les créanciers bilatéraux une minorité (362 M USD détenus par Chine, Inde, KSA et Koweït). Le gouvernement antérieur aux élections de 2020 s’était notamment endetté à des taux très élevés auprès d’Afrexim et de TBD, considérés par le FMI comme des créanciers commerciaux et donc non protégés. A noter que l’endettement domestique augmente particulièrement vite, dans un contexte de tarissement des autres sources de financement, de déficits fiscaux incontrôlés, et de taux d’intérêt élevés (qui ont représenté 6,6% du PIB sur l’exercice 2024/2025).  

3. Relations avec la communauté financière internationale

Le Malawi, classé dans la catégorie des pays surendettés par le FMI, a engagé un processus de restructuration d’une partie de sa dette externe. Dans ce cadre, les autorités visaient à retrouver un « risque modéré de surendettement » sur la dette publique extérieure. Si le dialogue avec les créanciers bilatéraux se poursuit de manière satisfaisante (accords conclus avec l’Exim Bank of China et le Kuwait Fund for Arab Economic Development, discussions de bonne foi avec l’Exim Bank of India et le Saudi Fund for Development), les discussions avec Afrexim et TDB sont laborieuses et ne laissent pas présager une restructuration à court-terme : i) Afrexim (439 M USD) a toujours refusé un dialogue concernant la restructuration de ses dettes, en arguant à tort bénéficier du statut de créancier privilégié ; ii) TDB (464 M USD) conteste l’inclusion dans le périmètre du traitement de l’une de ses facilités, émise en faveur de la Banque centrale, au motif qu’il s’agit d’une dette de court-terme, traditionnellement exclue des traitements.

En parallèle, le Malawi s’est vu octroyer, le 14 novembre 2023, un programme de Facilité élargie de crédit (FEC) d’un montant de 178 MUSD sur quatre ans, visant à soutenir ses efforts en faveur de la stabilisation macroéconomique et d’une croissance durable réduisant la pauvreté. Conformément aux règles du FMI pour les pays à faible revenu, le programme a toutefois été résilié automatiquement le 14 mai 2025, en l’absence de revue conclue dans les délais. La mise en œuvre du programme a été entravée par de nombreuses difficultés, en particulier l’incapacité des autorités à rétablir la stabilité macroéconomique du pays (discipline budgétaire insuffisante en raison de fortes pressions de dépenses et d’une mobilisation limitée des recettes, difficulté à reconstituer les réserves de change, et absence de conclusion du processus de restructuration de la dette extérieure). Depuis la fin du programme, le FMI poursuit son engagement auprès des autorités malawites dans le cadre de consultations au titre de l’article IV et leur fournit une assistance technique ciblée. Par ailleurs, des instruments de financement concessionnels restent disponibles, en particulier via le Fonds fiduciaire pour la réduction de la pauvreté et pour la croissance (FRPC), sous réserve d’un engagement fort des autorités à mettre en œuvre un programme de réformes crédible et cohérent.

Le Malawi, classé dans la catégorie des pays « à faible revenu » par la Banque Mondiale, est par ailleurs éligible aux financements les plus concessionnels du guichet de l’Association Internationale du Développement (AID), principal créancier externe du pays (un tiers de l’encours). La Banque mondiale a actuellement une trentaine de projets en cours, pour un montant d’environ 3,2 Mds USD, dans des domaines variés. Le portefeuille de la Banque africaine de développement s’élève quant à lui à près de 222 MUSD, et compte une dizaine de projets actifs.

4. Aide publique au développement de la France

Entre 2021 et 2023 (dernières données disponibles), le Malawi a reçu en moyenne 633 MUSD de versements bruts d’Aide Publique au Développement (APD) par an de la part des bailleurs bilatéraux. La grande majorité de cette somme provenait des Etats-Unis (57%), de l’Allemagne (13%), du Royaume-Uni (8%) et de la Norvège (8%). La contribution de la France à l’APD bilatérale en faveur du Malawi reste modeste (0,3% soit 1,9 MEUR).

L’AFD intervient historiquement au Malawi à travers des projets régionaux en partenariat avec l’ONG française Inter Aide, portant sur l’agriculture durable, la santé et l’accès à l’eau, afin de renforcer la résilience des communautés rurales et leur accès à des services essentiels. En février 2023, l’Agence a accordé une subvention de 3 M USD au Malawi pour améliorer sa sécurité alimentaire, notamment en soutenant la production de vaccins et les services de vaccination aviaire pour les petits éleveurs ruraux. Elle a également octroyé un prêt de 6 M USD au programme TransAgri, mis en œuvre par Fert, visant à accompagner la transformation des exploitations agricoles familiales et l’organisation des agriculteurs au sein des territoires et des filières. A noter également, une contribution annuelle de l’ordre de 1,5 MEUR en faveur du Programme Alimentaire Mondial (PAM).

5. Relations économiques avec la France

5.1. Échanges commerciaux avec la France

Les échanges commerciaux entre la France et le Malawi, quoique faibles en valeur absolue, ont fortement progressé en 2024 (+19 %, à 13,5 MEUR). Cette performance s’explique exclusivement par la hausse des importations françaises en provenance du Malawi (+33 %, à 11 MEUR), tirées principalement par le tabac (85 % des flux). A l’inverse, les exportations françaises à destination du Malawi ont reculé à un niveau historiquement bas (2,6 MEUR, soit -17,7 %), pénalisées par la baisse des ventes d’équipements électriques et ménagers. La France enregistre ainsi son quatrième déficit commercial consécutif (8,4 MEUR) vis-à-vis du pays, confirmant une rupture par rapport aux excédents structurels observés au cours de la dernière décennie. Le Malawi demeure un partenaire commercial très marginal de la France (204ème client et 156ème fournisseur), en raison notamment du faible niveau de richesse de l’économie (l’un des PIB par habitant les plus bas au monde) et de difficultés financières et structurelles qui se sont nettement aggravées ces dernières années.

5.2. IDE et présence française

La présence française au Malawi est relativement réduite (stock d’IDE de 69 MEUR en 2024), mais se distingue par son empreinte multisectorielle, dans un pays où les IDE restent limités. Depuis sa reprise (2016) de l’usine de Carlsberg à Blantyre, le groupe Castel emploie près de 1500 personnes et figure parmi les premiers contribuables du pays. Dans le domaine des transports et de la logistique, African General Logistics (ex-Bolloré Logistics) gère une flotte de camions assurant la connectivité du pays avec ses voisins tandis que CMA-CGM gère deux agences à Lilongwe et Blantyre ; AGS Frasers est également présent. Total Energies dispose d’un réseau de distribution d‘une soixantaine de stations-services. Le groupe JC Decaux est également présent dans les services d’affichage publicitaire.

La présence française va toutefois se renforcer dans les prochaines années avec la réalisation (sur financement de la SFI) du projet de barrage hydroélectrique de Mpatamanga sur la rivière Shire à proximité de Blantyre. D’une capacité de 350 MW, cet ouvrage, qui doublera la production d’électricité du pays, sera réalisé par EDF, en partenariat avec plusieurs partenaires dont Total Energies. L’investissement total sera de l’ordre d’1 Md USD, dont 400 à 500 M EUR seront alloués au contrat de construction.

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