Secteur des hydrocarbures en Libye

La Libye dispose d’un secteur pétrolier à fort potentiel qui en fait un acteur majeur du marché mondial du pétrole. Le secteur pétrolier constitue le pilier de l’économie libyenne. Toutefois le déficit d’investissement public dans les infrastructures d’extraction et de stockage a freiné le développement de la production et de l’export. Les revenus pétroliers sont tributaires du prix du baril et du niveau de production - très sensible à l'évolution de la fragmentation politico-institutionnelle. Ce secteur est aussi un domaine de coopération historique avec la France, en atteste la présence continue de TotalEnergies en tant que partenaire de la NOC (National Oil Corporation).

1er poste d’importation et d’exportation avec la Libye, les échanges d’hydrocarbures restent structurants pour notre relation économique bilatérale. En 2023, 9% de nos importations de brut provenaient de Libye. L’an passé, le pétrole brut a représenté 97% de nos achats (2,36 Md€ sur 2,44 Md€), tandis que les produits pétroliers raffinés ont représenté 32% de nos ventes (98 M€ sur 301 M€). Nos échanges avec la Libye sont ainsi structurellement déficitaires (-2,1 Md€ en 2023). L’italien Eni reste historiquement le leader étranger en Libye, TotalEnergies arrive en deuxième position.

La situation économique de la Libye, pays pétrolier où les hydrocarbures représentent les deux tiers du PIB et 97% des revenus de l’État (23,3 Md$ en 2023), est particulièrement volatile. L’économie du pays, très peu diversifiée, est ainsi tributaire du cours du baril, mais également de la situation sécuritaire et de l’évolution de la fragmentation politico-institutionnelle qui influent sur le niveau de production. La capacité de production du pays à 1,3 M de baril jour (b/j) permet en théorie des revenus confortables au pays, mais reste encore bien en dessous des niveaux de 2010 (1,8 Mb/j).

La Libye dispose d’un secteur pétrolier à fort potentiel qui reste contraint par les dissensions politiques, l’insécurité et l’obsolescence des installations d’extraction et de transport. Si la Libye possède les premières réserves de pétrole d’Afrique et les 10èmes à l’échelle mondiale, elle n’est que le 4ème producteur africain et le 17ème mondial. Début 2024, la NOC a affiché un objectif de production de 2 Mb/j d’ici trois à cinq ans pour un investissement à hauteur de 18 Md$ (public et privé) dans 45 projets pétroliers et gaziers. Cet objectif apparait inatteignable en l’état des investissements publics et privés vers le secteur pétrolier.

La manne gazière reste sous-exploitée, avec des exportations de gaz en 2023-2024 au plus bas depuis 2011. Le pays possède les 5èmes réserves de gaz naturel d’Afrique et les 22èmes à l’échelle mondiale. Elle en est le 5ème producteur africain et le 39ème mondial. Des 24,3 Mds de m3 produits, seulement 3 Md m3 seraient exportés vers l’Italie alors que la capacité annuelle du gazoduc Greenstream reliant la Libye à la Sicile s’élève à environ 10 Md m3 par an. Le reste du gaz est principalement utilisé pour la génération électrique et l’industrie. En 2023, la NOC et Eni ont signé un accord pour le développement de deux champs gaziers offshore. Eni a annoncé un investissement de 8 Md$ qui permettrait de produire environ 7,5 Mds de m3/an à partir de 2026.

Le contrôle du secteur des hydrocarbures est au centre des convoitises. Alors que la plupart des champs et terminaux pétroliers sont contrôlés par l’ANL du Maréchal Haftar, les revenus en devises arrivent théoriquement sur les comptes de la Banque centrale libyenne (BCL) basée à Tripoli. Alors qu’il n’y a pas de budget national stricto sensu, c’est la BCL qui encaisse les recettes pétrolières et les redistribue aux deux gouvernements, exerçant ainsi un contrôle sur leurs dépenses. Les blocages des champs pétroliers sont ainsi régulièrement utilisés comme mesure de rétorsion politique, avec le dernier en date du 26 août au 3 octobre 2024 en réponse au limogeage du gouverneur de la BCL par le Conseil présidentiel.

Le secteur du raffinage a largement souffert de dix années de crise. Les cinq raffineries libyennes, dont la plupart sont à l’arrêt, produisent environ 90 000 b/j, soit seulement un tiers de la consommation libyenne, alors que leur capacité théorique s’élève à 250 000 b/j. La Libye est ainsi dépendante des importations pour son approvisionnement en produits pétroliers raffinés. L’essence est par ailleurs fortement subventionnée et vendue à 0,03$ le litre, favorisant la contrebande.

La NOC utilise depuis 2022 un mécanisme de swap pour s’approvisionner en produits pétroliers raffinés qu’elle distribue ensuite à la Brega Oil Compagny. En l’absence de liquidités permettant à la NOC d’acheter des produits raffinés, celle-ci demande à des traders d’échanger une partie des recettes de la vente de brut contre des produits raffinés. Le Bureau d’Audit a épinglé l’illégalité de ces pratiques.

 

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