LETTONIE
Lettonie : La reprise économique se fait attendre
La Banque de Lettonie a abaissé en octobre ses prévisions de croissance à 0,6% en 2024, en diminution de 1,2 point par rapport à celles de juin, en raison de la baisse de confiance des ménages et des entreprises et de la dégradation de la compétitivité de l’économie lettone. La croissance économique sera plus lente que prévue également en 2025 et, à moyen terme, le développement économique du pays sera freiné par la baisse de la compétitivité. Les dépenses supplémentaires pour la défense et le changement de la politique fiscale en faveur des ménages dans un contexte de ralentissement de l'activité économique, vont contribuer à l’augmentation du déficit budgétaire et de la dette publique.
La reprise de la croissance de l’activité économique est lente
Après une récession de -0,3% en 2023, le PIB letton a légèrement progressé en glissement annuel de 0,1% au 1er trimestre 2024 et de 0,5% au 2ème trimestre 2024. Cette croissance modeste est principalement due à la détérioration de la confiance des consommateurs et des entreprises et la baisse du volume des investissements (prévision de -4,2% sur l’année), compte tenu du contexte géopolitique.
Par secteur, la croissance la plus importante a été observée dans les secteurs liés à l’éducation (+6,5%) et la santé (+6,5%), ainsi que le secteur des services TIC (+5,6%) et la production agricole et forestière (+3,2%). Cependant, les activités du secteur de la banque et des assurances et des transports et de la logistique ont fortement chuté, de 8,2% et de 7,8% respectivement. La production industrielle a baissé de 2,5%.
Depuis le début de l’année, l’inflation est restée faible (1,4% en septembre). La croissance des salaires est toujours forte, +9,6% en variation annuelle au 2ème trimestre, avec un salaire moyen de 1 671€. Le taux de chômage est stable depuis juin autour de 6,8%.
Des prévisions de croissance du PIB revues fortement à la baisse pour l’année 2024
La Banque de Lettonie a revu fortement à la baisse ses prévisions de croissance pour l’année 2024, à 0,6%, contre 1,8% dans les prévisions de juin, en raison de la croissance plus faible que prévu au 1er premier semestre, la prudence des consommateurs et des entreprises et la détérioration de la compétitivité de l'économie lettone. Les exportations devraient ainsi diminuer de 2,1% sur l’année, et les importations de 2,5%.
Les principales banques du pays, comme Swedbank et SEB, sont plus optimistes quant au développement économique de la Lettonie en 2024, mais estiment néanmoins que la croissance du PIB restera en-dessous de 1% (+0,8% selon SEB et +0,9% selon Swedbank).
L'inflation en Lettonie demeure faible depuis le début de l'année et les taux des derniers mois étaient légèrement inférieurs aux prévisions. La Banque de Lettonie estime que les prix de certains produits énergétiques et agricoles pourraient encore diminuer et a revu à la baisse ses prévisions d’inflation pour 2024 à 1,3% contrairement à 1,5% prévus en juin.
Alors que le faible taux de chômage, la forte croissance des salaires et la baisse continue de l'inflation renforcent progressivement le pouvoir d'achat de la population, la confiance des consommateurs s’est détériorée considérablement et la Banque de Lettonie ne prévoit pas de reprise significative de consommation privée en 2024 (0,2% sur l’année contrairement à 2,3% prévus en juin).
Selon la Banque de Lettonie, le déficit budgétaire atteindra 3,1% du PIB en 2024. Les prévisions du déficit pour 2024 ont été revu à la baisse par rapport aux projections macroéconomique de juin (-3,8%) en raison de la hausse des recettes générée par la collecte de l’impôt sur le revenu, stimulée par une croissance substantielle des salaires.
Les perspectives de croissance du PIB à moyen terme sont devenues plus pessimistes en raison de la détérioration de la compétitivité de l’économie lettone
En raison du ralentissement de la consommation privée et la baisse des investissements, la Banque de Lettonie a revu à la baisse ses perspectives de croissance du PIB pour 2025 à 2,6%, contre 3,3% prévus en juin. Malgré la forte croissance des salaires réels, la consommation privée est actuellement limitée par un niveau élevé d’épargne après une période de forte inflation et motivé par les inquiétudes des ménages quant à leur niveau de vie futur. L'investissement, quant à lui, est entravé par des retards dans la mise en œuvre de projets liés à l'utilisation des fonds de l'UE, par une baisse de la rentabilité dans un certain nombre de secteurs et par la prudence des établissements de crédit. La baisse des taux d’intérêt d’une manière plus substantielle devrait favoriser la croissance du crédit bancaire. Pour l’année 2026, la Banque de Lettonie prévoit une croissance du PIB de 3% (contre 3,8% prévus en juin).
Les prévisions d'inflation pour les deux prochaines années ont également été revues à la baisse : 1,5 % en 2025 (contre 2,1% prévus en juin) et 1,6 % en 2026 (contre 1,8%). Toutefois, les risques qui pèsent sur les perspectives d'inflation sont soutenus par l'incertitude géopolitique, qui n'exclut pas des fluctuations importantes des prix de l'énergie et des matières premières sur les marchés mondiaux.
La hausse des salaires continue de dépasser celle de la productivité, ce qui nuit à la compétitivité. La part de marché à l'exportation de la Lettonie sera affectée non seulement par la capacité à s'adapter aux changements structurels sur le marché extérieur, mais aussi, de plus en plus, par la dynamique des coûts. Selon la Banque de Lettonie, à moyen terme le développement économique de la Lettonie sera freiné principalement par la baisse de la compétitivité.
La défense et la sécurité intérieure sont les priorités du plan budgétaire de moyen terme pour les années 2025 – 2028 (les dépenses de défense militaire doivent représenter au moins 3% du PIB à partir de l’année 2027). Pour financer ces priorités, plusieurs mesures d’augmentation de recettes fiscales sont envisagées à partir de l’année prochaine, comme l’augmentation de la taxe sur les véhicules routiers de 10%, des droits d’accise sur les carburants et les boissons sucrées, « taxe de solidarité » appliquée aux établissements de crédit, etc. Il est envisagé également de réduire les coûts du secteur public de 1,5Mds EUR (économies des établissements publics, plafonnement de la hausse des salaires dans la fonction publique à 2,6%, révision des budgets des collectivités locales, etc.)
Dans le même temps, le gouvernement a préparé un programme d’augmentation des revenus et du pouvoir d’achat des ménages. Dans le cadre de ce programme, une augmentation progressive du salaire minimum, actuellement fixé à 700 €, est prévue à partir de l’année prochaine, soit 740€ en 2025, 780€ en 2026, 820€ en 2027 et 860€ en 2028. Le seuil du revenu non imposable passera de 510€ en 2025 à 570€ en 2027 (500€ actuellement). En ce qui concerne l’impôt sur le revenu, deux tranches d’imposition seront appliquées : 25,5% pour les revenus annuels bruts jusqu'à 105 300 € (8 775€/mois) et 33 % pour les revenus bruts supérieurs à ce niveau. Pour compenser la baisse des recettes publiques liées au changement de la politique fiscale au profit des ménages, qui pourrait dépasser 1Md EUR au cours des quatre prochaines années, le gouvernement propose de réorienter 1% des cotisations sociales versées au second pilier complémentaire du système de retraite vers le premier pilier de base.
La Banque de Lettonie estime que le déficit public atteindra 3,3% en 2025 et 3,2% en 2026. La Lettonie sera obligée d’emprunter au moins 3 Mds € par an au cours des prochaines années pour refinancer les euro-obligations, ainsi que financer le déficit budgétaire et les prêts aux gouvernements locaux. La dette publique devrait donc s’approcher de 50% du PIB en 2026 (contre 41% du PIB en 2023 ; estimation de 47% pour 2024).
ANNEXE 1 : prévisions macroéconomiques de la Banque de Lettonie (Octobre 2024)
2024 |
2025 |
2026 |
|
Croissance du PIB (%) |
0,6 |
2,6 |
3,0 |
Inflation (%) |
1,3 |
1,5 |
1,6 |
Croissance de l’investissement (%) |
-4,2 |
3,4 |
4,9 |
Croissance des exportations (%) |
-2,1 |
1,2 |
2,8 |
Croissance des importations (%) |
-1,5 |
3,0 |
3,2 |
Chômage (%) |
7,1 |
6,8 |
6,5 |
Evolution salaire brut (%) |
9,7 |
6,7 |
7,3 |
Equilibre budgétaire (% du PIB) |
-2,9 |
-4,5 |
-4,8 |
Déficit public (% du PIB) |
-3,1 |
-3,3 |
-3,2 |
Dette publique (% du PIB) |
47,0 |
48,4 |
49,0 |