Fiche pays (novembre 2021)

Avec un PIB de 2 Mds USD en 2020, Le Lesotho est la plus petite économie d’Afrique australe et une des plus petites économies à l’échelle de l’Afrique subsaharienne. Si elle est relativement diversifiée (textile, diamant, eau, agriculture et tourisme), l’économie du Lesotho est fortement dépendante de l’Afrique du Sud – commercialement, financièrement, logistiquement, monétairement, etc. Déjà fragilisée par de nombreuses difficultés structurelles (instabilité politique, gouvernance défaillante, réglementation étouffante, poids de l’Etat), l’économie du pays a été particulièrement touchée par la crise du Covid-19. Le dérapage continue des finances publiques ces dernières années doit être un point d’attention. Le gouvernement devrait s’appuyer davantage sur les financements et le savoir-faire des bailleurs pour mener à bien les réformes nécessaires, seules à même de libérer l’investissement et la croissance.

Situation Covid-19 : Au 15 novembre, le Lesotho comptait un peu moins de 22 000 cas détectés et 660 morts depuis de début de la crise. Le pays semble donc relativement épargné par l’épidémie – à mettre toutefois en perspective avec les défaillances de l’appareil statistique et le fait que le pays teste peu. Pour prévenir une crise sanitaire d’ampleur, le gouvernement a mis en place un confinement très strict et très tôt lors de la première vague, sur le modèle sud-africain, avec un coût très élevé pour l’économie. Pour éviter de lui faire subir un nouveau choc trop important, les mesures mises en place pour contenir la seconde (décembre 2020-janvier 2021) et la troisième vague (juin-juillet 2021) ont été nettement moins contraignantes. A l’heure actuelle, 16% de la population a reçu au moins une dose de vaccin. L’objectif du gouvernement de vacciner deux-tiers de la population d’ici la fin de l’année est donc hors d’atteinte

1. Situation économique et politique

 1.1. Situation politique

Ancien protectorat britannique, le Lesotho est indépendant depuis 1966. Depuis cette date, le pays est une monarchie constitutionnelle. Il souffre d’une instabilité politique chronique, illustrée par les nombreuses tentatives de coups d’Etat de l’armée et la chute de trois gouvernements entre 2013 et 2017. En 2020, Tom Thabane, qui avait été nommé à la tête d’un gouvernement de coalition en 2017, a été poussé à la démission suite à des soupçons de complicité dans l’assassinat de son ex épouse. Avant d’être écarté du pouvoir, son refus de démissionner avait paralysé le pays pendant près de six mois. Une nouvelle coalition a depuis remplacé le gouvernement de M. Thabane, mais la stabilisation escomptée n’a pas eu lieu : très vite, en dépit de l’autorité morale du monarque Letsie III, les politiques ont renoué avec les réflexes habituels (délitement des partis, création incessante de nouveaux mouvements et partis, nomadisme politique, tentatives de déstabilisation, affaires de corruption, etc.).

 1.2. Éléments structurels relatifs à l’économie

Le Lesotho est une petite économie (enclavée dans le territoire sud-africain) de 2 M habitants pour un PIB de 2,1 Mds USD en 2020. Le PIB par habitant s’élève à peu plus de 1 000 USD. Alors que le taux de croissance annuel moyen du Lesotho était proche de 3% au cours de la première moitié des années 2010, le PIB s’est contracté en moyenne de 1,1% sur la seconde partie de la décennie.

L’économie du pays est très dépendante de la conjoncture dans la sous-région, en particulier de l’Afrique du Sud. Tout d’abord, parce que le pays est le débouché pour près de 50% des exportations lesothanes. Ensuite, parce que les recettes budgétaires du Lesotho proviennent en grande partie des revenus transférés par l’union douanière SACU (Southern African Customs Union – environ 40% des recettes du gouvernement en moyenne ces trois dernières années – recettes douanières qui sont elles-mêmes très dépendantes du dynamisme du commerce dans la région). Par ailleurs, le Lesotho est très dépendant des transferts de fonds des migrants, qui ont représenté plus de 20% du PIB du pays en 2020 – et dont la grande majorité provient d’Afrique du Sud (travailleurs du secteur minier). A noter également que la monnaie lesothane, le loti, est ancrée au rand sud-africain dans le cadre de la zone monétaire commune (Common Monetary Area – avec la Namibie et l’Eswatini).

L’économie du pays est relativement diversifiée. Elle repose d’abord sur les secteurs textile (10% du PIB en moyenne ces dernières années et 40% des exports – vers l’Afrique du Sud, mais aussi vers les Etats-Unis via le programme African Growth and Opportunity Act – AGOA) et diamantifère (environ 7% du PIB et 30% des recettes en devises). Le secteur de l’eau est également stratégique (6% du PIB) : le Lesotho exporte une partie importante de ses ressources aquifères vers l’Afrique du Sud, via un système de barrages et de tunnels. L’agriculture représente aussi un poids substantiel (7% du PIB et 44% des emplois), avec une forte dichotomie entre un secteur commercial qui génère le plus gros de la valeur ajoutée et une agriculture vivrière, qui emploie une partie importante de la population active. Malgré l’absence de données précises, le tourisme représente également un secteur non négligeable, évalué à environ 10% du PIB avant la crise – avec un effet d’entrainement sur les autres secteurs d’activité.

L’économie souffre de nombreuses fragilités structurelles : (i) Un modèle de gouvernance à bout de souffle,  miné par la corruption et le clientélisme ; (ii) Un modèle économique très réglementé, où l’Etat occupe une place prépondérante, entravant le développement du secteur privé ; (iii) Un modèle éducatif qui ne permet pas de développer les compétences, avec une forte inadéquation entre l’offre de formation et la demande du marché du travail. En 2020, le pays s’est classé à la 122ième place du classement Doing Business, en recul de 18 places par rapport à l’année précédente, du fait notamment de la détérioration du contexte politique – qui a eu pour effet de dégrader l’image du pays vis-à-vis des investisseurs et qui a entravé le bon déroulement des projets d’infrastructures majeurs – en particulier la phase II du Lesotho Highland Water Project (LHWP), bloquée depuis plusieurs années, représentant un investissement de plusieurs points de PIB, prévoyant le développement de capacités hydroélectriques et d’un nouveau canal d’acheminement de l’eau vers l’Afrique du Sud.

Sur le plan social, le pays souffre d’un niveau particulièrement élevé de pauvreté (31% de la population vivait avec moins de 1,9 USD par jour en 2020 – en augmentation de trois points par rapport à 2019) et d’un taux de chômage élevé (plus de 22% fin 2019 – dernières données disponibles). En 2020, le Lesotho s’est classé à la 165ième position sur 189 du classement IDH.

2. Conjoncture et finances publiques

 2.1. Conjoncture économique

En 2020, la contraction du PIB est estimée entre 5,4% (FMI et Banque centrale du Lesotho) et 11% (organisme national de statistiques – Lesotho Bureau of Statistics) – un écart qui reflète la qualité relative des travaux de l’institution en charge de la collecte et du suivi statistique. Dans le contexte de la crise, l’économie du Lesotho a été plus particulièrement affectée par les mesures de confinement très strictes et prolongées mises en œuvre par le gouvernement, calquées sur le modèle sud-africain – arrêt des activités non essentielles dans un premier temps, fermeture des frontières, puis couvre-feu, fermeture des lieux accueillant du public, etc. L’impact a été particulièrement important dans les secteurs de la construction (recul de l’activité de près de 25% en 2020), du commerce (-10%) et de l’industrie manufacturière (-8%). L’industrie du diamant a aussi été profondément touchée par l’effondrement de la demande mondiale, avec une chute de la production domestique de 55% en 2020. L’impact de la crise a été renforcé par la forte dépendance commerciale, logistique et financière de l’économie vis-à-vis de l’Afrique du Sud, qui a également particulièrement souffert de la crise (contraction du PIB de 6,4% en 2020).

Pour 2021, le FMI table sur un rebond modéré de 2,8% (contre +3,7% pour la Banque centrale), porté par la reprise du secteur du diamant (effet de rattrapage et mise en service de nouvelles capacités de production), et par la reprise des projets d’infrastructures qui avaient été mis à l’arrêt. Les services devraient également retrouver le chemin de la croissance – en lien avec la reprise de la demande interne et un certain retour à la normale des transferts de fonds des migrants. Ainsi, après quatre trimestres consécutifs de contraction, l’économie lesothane a finalement rebondi au second trimestre 2021 : le PIB a crû de 12,7%, comparativement à la même période l’an passé, après -11,1% au trimestre précédent. Toutefois, la reprise de l’économie reste sujette à l’évolution de l’épidémie, alors que le gouvernement a dû prendre de nouvelles mesures de confinement en janvier et en juin, qui ont nécessairement affecté l’économie. Compte tenu de la progression de la campagne de vaccination, le pays pourrait être affecté par une nouvelle vague épidémique avant la fin de l’année.

 2.2. Situation des finances publiques

La situation des finances publiques s’est significativement dégradée ces dernières années, avec un déficit public annuel moyen représentant 5% du PIB sur la période 2016-2019. Cette évolution s’explique d’une part par la progression substantielle des dépenses publiques (+10% en moyenne par an), portée par le poids croissant de la masse salariale de la fonction publique (plus de 40% des dépenses publiques au dernier pointage) et l’augmentation des dépenses d’investissement (+4%). D’autre part, dans le même temps, les revenus de la SACU (premier poste avec 40% du total) ont diminué de 3% par an. A ces fondations déjà fragiles, s’est ajoutée la crise du Covid-19, qui a eu un impact massif. Pour l’exercice 2020-2021, le déficit a atteint près de 9% du PIB. D’une part, les revenus de l’Etat ont été inférieurs de plus de 10% par rapport à ce qui était anticipé dans le budget initial. D’autre part, les dépenses ont augmenté significativement, avec la mise en œuvre d’un plan d’urgence budgétaire représentant deux points de PIB. Sur l’exercice 2021/2022, le déficit devrait continuer à se creuser pour atteindre plus de 10% du PIB. Cette détérioration s’explique d’abord par une nouvelle baisse des revenus – le gouvernement anticipe en particulier une diminution des revenus de la SACU de 20%, reflétant l’impact de la crise sur le commerce de la région, avec un décalage d’un an, compte tenu du système de calcul retenu par l’union douanière. Par ailleurs, le gouvernement table sur une augmentation des dépenses publiques de 22% – dépenses de santé et de protection sociale, lancement de nouveaux projets d’infrastructures.

La dette publique est jugée soutenable par le FMI. Fin 2020 elle représentait 50% du PIB. Plus des trois quarts de l’endettement est libellé en devises, mais octroyé par les bailleurs internationaux à des conditions avantageuses – les financements de la Banque Mondiale représentent 40% de la dette publique extérieure, la Banque Africaine de Développement 20% et la Banque Européenne d’Investissement 11%. A noter que l’endettement domestique a plus que doublé entre 2015 et 2019, le gouvernement faisant de plus en plus appel aux banques implantées localement (filiales de banques sud-africaines) pour financer le déficit croissant.

3. Relations avec la communauté financière internationale

Le Lesotho est classé dans la catégorie des pays à « revenus intermédiaires de la tranche inférieure » par la Banque Mondiale. Le portefeuille de projets actifs de cette dernière s’élève à 140 MUSD, pour une douzaine de projets dans des domaines aussi variés que l’éducation, les énergies renouvelables, l’agriculture, la nutrition ou encore le développement du secteur privé. Depuis 2020, le pays a par ailleurs bénéficié de deux financements de la Banque Mondiale, pour soutenir sa réponse face au Covid, pour un montant total de 30 MUSD. Le portefeuille de la BAfD s’élève à 70 MUSD pour sept projets : renforcement du système éducatif, promotion du secteur privé, développement des infrastructures, digitalisation des services publics.

En juillet 2020, le pays a bénéficié d’un financement d’urgence du FMI (mix Rapid Credit Facility et Rapid Financing Instrument) de 50 MEUR pour faire face aux besoins de financement découlant de la crise. Toujours au titre des instruments financiers exceptionnels décidés dans le cadre de la crise, le pays bénéficie également de l’initiative de suspension du service de la dette (Debt Service Suspension Initiative – DSSI) mise en œuvre par les pays du G20 – les reports de remboursements devraient représenter 0,2% du PIB du pays pour la période allant de mai 2020 à fin 2021.

4. Aide publique au développement de la France

Entre 2017 et 2019 (dernières données disponibles), le Lesotho a reçu en moyenne 80 MUSD de versement brut d’Aide Publique au Développement (APD) par an de la part des bailleurs bilatéraux. La grande majorité de cette somme provenait des Etats-Unis (plus de 90%) et dans une moindre mesure du Japon (4,1%) et de l’Allemagne (1,3%). La contribution de la France à l’APD bilatérale en faveur du Lesotho est marginale – 230 000 USD par an en moyenne. L’AFD n’a pas d’activité au Lesotho.

5. Relations économiques avec la France

 5.1. Échanges commerciaux avec la France

Le commerce bilatéral entre la France et le Lesotho a atteint 3,8 MEUR en 2020, en baisse de près de 90% par rapport à l’année précédente. Dans le contexte de la crise, les importations de la France en provenance du pays, presque exclusivement composées de diamant, ont chuté de 95% pour atteindre 1,3 MEUR. En revanche nos exportations ont progressé de 340%, pour atteindre 2,5 MEUR – portées par les ventes d’équipements mécaniques, électriques et électroniques – équipements médicaux en particulier. En conséquence, la France a enregistré un excédent commercial de 1,2 MEUR vis-à-vis du Lesotho, après un déficit inédit de 30 MEUR en 2019. Le Lesotho est classé à la 185ième place des débouchés pour les produits français.

 5.2. IDE et présence française

D’après l’UNCTAD, les Investissements Directs à l’Etranger (IDE) ont atteint 100 MUSD au Lesotho en 2020 (dernier chiffre disponible), en recul de 15% comparativement à l’année précédente. Le stock total d’IDE est de 925 MUSD – principalement en provenance des Etats Unis et dans l’industrie du textile. Le stock d’IDE français est insignifiant dans le pays et aucune grande entreprise n’est implantée.  

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