LIBAN
Présence économique des acteurs chinois, russes et turcs au Proche-Orient
La Chine, la Russie, la Turquie possèdent des intérêts et des stratégies d’interventions diversifiées et hétérogènes au Proche-Orient. Ces pays ont d’une part une influence commerciale importante avec des volumes d’exportations vers le Proche-Orient conséquents (Chine, Turquie), et d’autre part une influence économique ciblée tant au point de vue des géographies que des secteurs stratégiques. De manière générale, les cadres de coopération économique ont néanmoins des difficultés à se traduire par des investissements concrets et illustrent des partenariats asymétriques.
1/ Au plan commercial, la Chine et la Turquie sont des partenaires importants, figurant en tête des fournisseurs de nombreux pays du Proche-Orient, ce qui génère le plus souvent une relation asymétrique, avec des importations bien plus élevées que les exportations.
La Chine est dans le top 4 des fournisseurs de tous les pays du Proche Orient, et le premier client pour le pétrole irakien et iranien.
La Turquie est elle aussi particulièrement présente sur le plan commercial en Syrie, au Liban, dans les Territoires palestiniens, en Irak, en Égypte et en Israël.
Les échanges de la région avec la Russie sont en revanche en perte de vitesse, mais le pays reste positionné sur des secteurs essentiels (en particulier, 86% des importations de blé en Égypte sont d’origine russe).
2/ Les entreprises de ces pays sont souvent en compétition sur les mêmes marchés stratégiques, principalement l’énergie, les infrastructures de transports et la (re)construction.
Les entreprises turques sont très présentes dans les secteurs agroalimentaires, du textile, de l’électroménager, de l’ameublement et, en Jordanie, de l’approvisionnement en eau.
Les entreprises chinoises sont impliquées sur les segments de l’énergie, les télécommunications et l’industrie extractive, et se positionnent plus récemment en Égypte sur les marchés du ferroviaire, de l’automobile, de l’électricité et de l’aménagement urbain.
Les entreprises russes privilégient le positionnement sur des chantiers énergétiques et d’infrastructures (Syrie, Irak, Égypte).
Tandis que les zones industrielles et marchés de la reconstruction sont des espaces de compétition spécifiques, la Syrie, l’Irak, et peut être prochainement les Territoires palestiniens et le Liban représentent des « marchés de la reconstruction » et font l’objet de discours et d’investissements conséquents.
3/ Les niveaux de formalisation de la diplomatie économique et financière varient selon les structures et ambitions de la coopération.
La multiplication des accords de coopération produit peu d’effets économiques et de pénétration financière sur le long terme, notamment à cause du climat des affaires dégradé. Spécifiquement, les accords de libre-échange mettent du temps à être approuvés et appliqués, et actent souvent de l’asymétrie de la relation commerciale. Le manque de formalisation ou de clarté du cadre d’intervention permet aussi d’adapter les opérations au gré des évolutions économiques et politiques. La Chine et la Turquie mobilisent particulièrement les leviers de dette et des outils de coopération assimilables à de l’aide au développement.
La Turquie finance des projets de développement principalement par le biais de son agence de coopération TIKA et des lignes de prêts budgétaires (Liban, TP, Irak).
La Chine, qui devient par ailleurs un créancier considérable, notamment en Égypte, intègre de plus en plus le Proche-Orient dans sa matrice des nouvelles routes de la soie (« Belt and Road Initiative »), notamment auprès de ses membres affiliés : Irak (adhésion en 2015), Égypte (2015), Territoires Palestiniens (2022), Jordanie (2023), et Syrie (2023).