Climat et Energie

1 – L’Italie a atteint ses objectifs 2020 de réduction de GES essentiellement sous l’effet du ralentissement de son économie

Alors que l’objectif de -20% de GES avait été assigné à l’Italie par l’UE pour 2020, le pays a d’ores et déjà réduit ses émissions de 17,2% en 2018 par rapport à 1990.

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Total des GES en 2019, excluant LULUCF et incluant les émissions de l’aviation (Mt CO2 –eq)

L’analyse des secteurs émetteurs met en lumière l’effet décisif des deux récessions qui ont suivi les crises  économiques et financières de 2008 et de 2011-2012. Le pays a connu depuis lors une croissance inférieure d’1% par rapport à la moyenne européenne. C’est le seul pays européen qui n’a pas retrouvé son niveau de PIB prévalant avant la crise de 2008.

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Secteurs émissifs de GES en Italie, source : 4ème rapport biannuel CCNUCC[1]

  • Le secteur énergétique -transports compris- est le plus émetteur à hauteur de 80,5% des émissions nationales de GES en 2018. Les émissions ont certes baissé de 18,7% entre 1990 et 2018, toutefois, le mix énergétique demeure carboné : gaz naturel 36%, pétrole 34% et charbon 3,9%. Les énergies renouvelables représentent 21%[2] du mix, mais connaissent un essor plus lent qu’en UE avec + 7% de 2014 à 2018, contre 14% en UE en moyenne et entre 16 et 18% en France, Allemagne et Espagne.
  • Les transports qui représentent 24,4% des émissions totales du pays et 30,3% des émissions « énergie », n’ont connu qu’une légère baisse à hauteur de 2% des émissions entre 1990 et 2018. La route représente 93% des émissions du secteur des transports et 22,7% des émissions nationales totales de CO2. L’importance[3] et l’ancienneté du parc automobile italien expliquent cette part prédominante de la route dans les émissions des transports. Les distances totales (véhicules-km) pour le transport de passagers ont augmenté de 21% entre 1990 et 2018.
  • Le secteur industriel - hors énergie – représente 8,1% des émissions nationales, en baisse de 14,2% de 1990 à 2018. La principale raison réside en l’atonie de la production du pays qui n’a pas rattrapé son niveau pré-crise de 2008.
  • L’agriculture représente 7,1% des émissions de GES en 2018, suite à une baisse de 13% de 1990 à 2018.
  • Enfin, deux secteurs ont augmenté leurs émissions : Le secteur « bâtiment et tertiaire » de + 6% entre 1990 et 2008 atteignant désormais 19,5% des émissions totales italiennes, ainsi que le secteur des déchets ayant crû de + 5,7% de 1990 à 2018 et représentant désormais 4,3% des émissions nationales. L’Italie fait en effet face à un problème persistant de retraitement et de stockage.

 

2 – Au cœur des préoccupations des Italiens, la lutte contre les changements climatiques fait l’objet de nombreuses actions gouvernementales.

Le dérèglement climatique arrive en tête, devant le risque pandémique, d’après une récente étude du centre de recherche américain, Pew research center. Près de 1000 évènements météorologiques extrêmes ont frappé le pays en dix ans, dont 86 sur les dix premiers mois de l’année 2020. Le coût économique est évalué a minima à un demi- point de PIB, soit 7Md€/an et jusqu’à 8% de PIB[4] si aucune action volontariste n’est entreprise.

Mue par ces menaces et les objectifs européens, l’Italie a adopté son plan national énergie climat dit PNIEC[5] fin 2019. Le document affiche une ambition alignée sur les objectifs européens :

  • une part des énergies renouvelables de 30% dans la consommation d'énergie finale brute, en ligne avec les objectifs UE ;
  • dans les transports, une part de carburant décarboné ou partiellement décarboné de 22% (le GNL est répandu aux stations essence italiennes) ;
  • la réduction des «gaz à effet de serre» par rapport à 2005, avec un objectif pour tous les secteurs non-ETS de 33%.

De plus, des politiques volontaristes sont menées pour poursuivre la hausse significative de la part des énergies renouvelables, au premier rang desquelles figurent le photovoltaïque et l’éolien.

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  • Boost Photovoltaïque[6] : Après avoir stagné depuis 2012, l'Italie a fixé un objectif de 52 GW de capacité photovoltaïque d'ici 2030, soit près de 2,5 fois les 20,9 GW installés d'ici 2019. L’Agence internationale de l’énergie salue dans son dernier rapport de mai 2020 les bonnes performances du pays qui a su maintenir la croissance photovoltaïque de +0,8 GW en 2020, en hausse par rapport à 2019, malgré les difficultés qu’ont constituées les confinements. Cette croissance photovoltaïque est encouragée par des incitations fiscales, un système d'autoconsommation en temps réel («Scambio sul posto») pour les installations jusqu'à 0,5 MW et un FIP pour les systèmes de plus de 0,5 MW. En outre, une nouvelle réduction d'impôt de 110% pour les systèmes photovoltaïques résidentiels installés en même temps que les modernisations de l'efficacité énergétique des bâtiments a été introduite en mai 2020.
  • Fermeture des centrales à charbon : En Italie, les centrales à charbon occupent une place importante dans le débat politique et font toujours l’objet de protestations. Certaines d’entre elles sont visées par des enquêtes judiciaires pour pollution et atteinte à la santé publique. Le plan national énergie-climat italien (PNIEC), publié en 2019, fixe à 2025 la sortie du charbon pour la production électrique, mais envisage le gaz naturel comme source d’énergie de transition. Les travaux de reconversion ont débuté (ex : Vado Ligure) et deux autres centrales majeures suivront en 2021 : celle de Brindisi Sud (2,4 GW) et de La Spezia (1,6 GW).

 

3 – Les dispositifs lancés en 2020 connaissent un franc succès.

Premier pays frappé par la pandémie en Europe, l’Italie a adopté des mesures de soutien à l’économie au printemps. Parmi celles-ci, les plus populaires sont le « bonus bici » et le « superbonus » rénovation des bâtiments privés.

  • Bonus bici : Annoncé dès le mois de juin, le remboursement de l’acquisition d’un moyen de déplacement en mobilité douce a connu un succès tel que la plate-forme ouverte en ligne a dû être interrompue. Le 3 novembre, les 215M€ alloués ont été épuisés en quelques heures. Le ministre de l’Environnement, responsable de l’opération, a promis que de nouveaux subsides seraient débloqués afin de permettre aux citoyens ayant acquis un vélo, une trottinette, ou un abonnement de vélo partagé d’être en mesure d’obtenir le remboursement. Le dispositif offre un « coup de pouce » égal à 60% de la dépense effectuée, dans une limite maximale de 500 euros par citoyen. Le projet de loi de finances prévoit 20M€ par an jusqu’en 2026, en-deçà des besoins des usagers.
  • Superbonus habitat : alors que le dispositif précédent prévoyait un crédit d’impôt pouvant s’élever à 65 % du coût des travaux réalisés, le taux est désormais majoré à 110 % pour la réalisation de travaux qui permettront à l’immeuble d’avancer d’au moins deux classes d’efficacité énergétique (ou jusqu’à la classe la plus élevée actuellement existante). Les travaux qui seront financés concernent essentiellement quatre domaines : l’isolation thermique, les systèmes de climatisation et de chauffage, les bornes de recharge pour véhicules électriques et la production d’énergies renouvelables. Les bénéficiaires de ce superbonus de 110% sont les personnes physiques, les copropriétés pour les interventions dans les parties communes, les instituts publics autonomes de logement, les coopératives d'habitation, les organisations à but non lucratif d'utilité sociale, les organisations bénévoles et les associations de promotion sociale, associations et clubs de sports amateurs. Les crédits d’impôt sont cessibles (c’est-à-dire qu’ils peuvent être transférés par les particuliers aux entreprises ayant effectué les travaux ou bien à des institutions financières). Ils peuvent également être monétisés en ristourne sur la facture finale pour les services et des travaux que doit acquitter le propriétaire toutefois en cinq versements annuels.

Concernant la transition énergétique, le gouvernement italien prévoit de maintenir l’effort au bénéfice des énergies renouvelables et de lancer un plan hydrogène. A l’horizon 2030, l’objectif sera d’atteindre 2% d’hydrogène vert dans la consommation finale. En 2050, la cible fixée est 20%. Pour ce faire, un investissement de 10Md€ est prévu dont 7 Md€ pour les équipements de production et 3 Md€ pour les infrastructures et les véhicules (ferroviaires et voitures). Les entreprises sont déjà mobilisées : l’énergéticien SNAM a lancé son plan hydrogène, a noué un partenariat avec Ferrovie dello Stato et la ville de Milan a passé commande à Alstom pour six trains régionaux à hydrogène (160M€).

[1] https://www4.unfccc.int/sites/SubmissionsStaging/NationalReports/Documents/67403915_Italy-BR4-1-BR4_2019%20Italy.pdf

[2] https://dgsaie.mise.gov.it/pub/sen/relazioni/relazione_annuale_situazione_energetica_nazionale_dati_2019.pdf

[3] / 645 pour 1000 habitants, soit le premier rang des grands pays européens. Source : dernières statistiques Eurostat disponible datées de 2018 : Italien en 3ème place derrière Luxembourg et Liechtenstein.

[4] https://www.cmcc.it/wp-content/uploads/2020/09/en_EXECUTIVE_SUMMARY_CMCC_climate_RISK_in_ITALY.pdf 

[6]  https://webstore.iea.org/download/direct/4234, page 61 et s


 
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