INDE
Indicateurs et conjoncture
Ralentissement de la croissance indienne au T4 2021/22
La croissance du PIB s'est établie à 4,1 % en g.a. au T4 2021/22 (janvier à mars), confirmant l’affaiblissement de la dynamique de croissance et la dissipation de l’effet de base entrevus dès le T3 après un premier semestre marqué par un fort effet de rattrapage. Les secteurs manufacturier et de la construction ont constitué les principaux moteurs de la reprise du côté de la production. La consommation et l’investissement publics ont soutenu la croissance du côté des dépenses.
Malgré une reprise économique forte consécutive à la pandémie (8,7% sur l’ensemble de l’exercice 2021/22), les indicateurs annoncent un ralentissement plus important que prévu, du fait d’une croissance affectée de déséquilibres de structure, de perturbations liées à l’invasion russe de l’Ukraine et de la hausse des cours mondiaux des produits de base. Les prévisions de croissance se situent désormais à 7,2%, 7,5% et 8% pour 2022/23 selon la RBI, la Banque asiatique de développement et la Banque mondiale respectivement.
Poursuite du ralentissement de la croissance après la dissipation de l'effet de base
L’exercice budgétaire 2021/22 s’achève sur un quatrième trimestre en croissance à 4,1% en glissement annuel, en phase avec les prévisions des économistes. Le ralentissement semble en partie lié à la dissipation de l’effet de base, entrevue dès le T3, et dont l’incidence favorable avait largement profité aux deux premiers trimestres de l’exercice (respectivement +20,1 et +8,4%). La valeur ajoutée (VA) augmente de 3,9% en g.a. (après 18,1 % au T1, 8,3 % au T2 et 4,7% au T3).
Comme à l’accoutumée, ces annonces s’accompagnent de révisions. Le T1 2021/22 a ainsi été revu à la baisse de 25 points de base, à 20,1% (après une révision à la hausse dans les mêmes proportions il y a trois mois) tandis que la croissance du T2 2021/22 est désormais évaluée à 8,4%, soit 10 pdb de moins que l’estimation initiale.
Sur l’ensemble de l’exercice échu au 31 mars, le PIB a crû de 8,7 % (estimations du CSO : 8,9 %) après une contraction de 6,6 % enregistrée au terme de l’exercice précédent. Les secteurs manufacturier et de la construction ont constitué les principaux moteurs de la reprise du côté de la production. La consommation et les investissements publics ont soutenu la croissance du côté des dépenses.
L'agriculture et l'industrie pallient en partie les résultats en berne des services
Du côté de l’offre, la croissance de la valeur ajoutée poursuit son ralentissement entamé depuis le T1 pour s’établir à 3,9% en g.a. au terme du T4 2021/22 (après 4,7% au T2) et 5,2% en g.t. Les activités de services, qui représentent 52,5% de la VA, enregistrent une expansion de 5,5% et restent tirées par leur composante publique, pourtant en ralentissement (+7,7% contre +16,7% au T3). L’immobilier et les activités financières progressent légèrement par rapport au T3 (+4,3%), principalement grâce à une bonne croissance du crédit bancaire (+9,7%) au cours de ce trimestre. Enfin, les services de « contact » (activité commerciale, touristique, de transport), fortement impactés par la crise sanitaire poursuivent leur reprise et dépassent pour la première fois les niveaux qui prévalaient avant la crise sanitaire (+1,7% par rapport au T4 2019/20).
L’expansion du secteur industriel hors construction (23% de la VA) est légère sur une base annuelle (+1% après 1,4% au T3) – mais beaucoup plus marquée sur une base séquentielle (+14,4%) – freinée par l’activité manufacturière qui se contracte au T4 (-0,2% après 0,3% au T3), alors que l’indice de production industrielle croît de 0,9% dans le même temps, ce qui suggère une compression des marges due à la hausse des coûts des intrants. Cela a affecté les performances du secteur, notamment automobile (-19,2% pour les ventes de véhicules privés après -23,2% au T3). L’activité minière (+6,7%) affiche également des résultats en ralentissement par rapport au T3. Elle pourrait rebondir dès le trimestre prochain à la faveur d’une production de charbon de nouveau en expansion (+4,5%), conséquence probable des mesures incitatives récemment prises par le gouvernement.
A l’inverse, la construction (9,1% de la VA) enregistre de meilleurs résultats au T4, avec une expansion de 2% après une contraction de 2,8% au T3 grâce à la reprise de l'approvisionnement et de la consommation d'acier (+0,2% après -4,6% au T3) et de ciment (+9,3%), principaux intrants du secteur. Enfin, la production d’électricité suit la même trajectoire avec une accélération (+4,5%).
Le secteur agricole (15,3% de la VA au T4) voit sa croissance accélérer, à 4,1% en g.a. au T4 après 2,5% au T3, grâce à une bonne pluviométrie et une bonne récolte des cultures de mousson (mil et riz). Toutefois, l’impact de la vague de chaleur enregistrée à partir de mars pourrait se répercuter sur les prochaines récoltes et le trimestre en cours.
La composante publique soutient la consommation et l'investissement
Selon l’optique des dépenses, le PIB a augmenté de 4,1% en g.a. au terme du T4 2021/22. Les dépenses de consommation privée, dont la pondération dans le total du PIB est de 55,5%, ont sensiblement ralenti (+1,8% au T4 après 7,4% au T3), conséquence de l’impact du variant Omicron et de la pénurie de certains intrants traditionnellement importés de Chine. La croissance de la consommation publique (11,3% du PIB) a en revanche bien rebondi au T4 (+4,8% en g.a.). Pour les 19 gouvernements des États pour lesquels des données sont disponibles, la croissance des dépenses a atteint 13,4 % au T4, contre 11,8 % au troisième trimestre de l'exercice 2022.
La croissance de l'investissement a augmenté à 5,1% en g.a. au T4 après 2,1% % en g.a. au T3, là encore fortement soutenue par sa composante publique. Les dépenses d'investissement du gouvernement ont augmenté de 73,6% en g.a. lors du T4 après une forte baisse enregistrée au trimestre précédent (-32,7%). L'investissement privé est resté faible, les niveaux d'utilisation des capacités n'ayant pas été entièrement recouvré leur niveau de plein emploi, à quelque 72%. Le taux d’investissement a été porté à 33,6 % du PIB au T4 2021/22, contre 30,1 % au T3 2021/22.
L'effet négatif des importations nettes sur la croissance a été plus faible, reflétant la modération de la croissance des importations (+18% après +33,6% au T3). Le ratio des exportations nettes est passé de -6 % au T3 à -5 % du PIB au T4 de l'exercice en cours.
Les perspectives de reprise économique restent soumises à de nombreux aléas
Malgré une reprise économique forte suite à la pandémie (8,7% sur l’ensemble de l’exercice 2021/22), les indicateurs annoncent un ralentissement plus important que prévu, du fait d’une croissance affectée de déséquilibres de structure, de perturbations liées à l’invasion russe de l’Ukraine et de la hausse des cours mondiaux des produits de base. Les prévisions de croissance se situent à 7,2%, 7,5% et 8% pour 2022/23 selon la RBI, la Banque asiatique de développement et la Banque mondiale respectivement.
Néanmoins, ces estimations restent soumises à des aléas. Ainsi, les marges des entreprises sont susceptibles d'être comprimées, dans un contexte de répercussion incomplète des pressions sur les prix des intrants, tandis qu'une inflation plus élevée limiterait la croissance de la demande. La prolongation de la gratuité des céréales alimentaires dans le cadre du PMGKAY[1] jusqu'en septembre 2022 et la récente réduction des droits d'accise sur l'essence et le diesel devraient soulager quelque peu les budgets des ménages les plus modestes. Dans les segments des revenus moyens à élevés, la normalisation des comportements après la troisième vague devrait entraîner une réorientation de la consommation vers les services à forte intensité de contact qui avaient été évités pendant la pandémie.
Après le fort rebond enregistré lors du premier semestre de l’exercice 2021/22, à quelque 14% de croissance, le second semestre a davantage été marqué par un essoufflement de l’effet de base très favorable avec un dernier trimestre dont l’expansion atteint difficilement les 4%. La reprise économique est ainsi marquée (8,7% sur l’ensemble de l’exercice 2021/22) après la forte contraction enregistrée à l’exercice précédent. Surtout, les niveaux qui prévalaient avant la crise du covid ont été rattrapés pour l’ensemble des sous-composantes de la croissance.
Toutefois, la vague Omicron, le contexte géopolitique et les perturbations de l’offre ont maintenu les prix des produits de base à un niveau élevé et empêché une véritable reprise de l’activité économique. Si le risque sanitaire semble aujourd’hui davantage maîtrisé notamment en raison d’une campagne de vaccination efficace[2], les perspectives pour l’exercice à venir restent incertaines et surtout sujettes à de nombreux aléas. Enfin, la poursuite de la hausse des taux d’intérêt à court terme par la RBI et la dérive des taux à long terme devraient peser sur la FBCF privée.
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20/21 |
21/22 |
||||||
|
T1 |
T2 |
T3 |
T4 |
T1 |
T2 |
T3 |
T4 |
Agriculture |
3 |
3,2 |
4,1 |
2,8 |
2,2 |
3,2 |
2,5 |
4,1 |
Industrie |
-33,7 |
0,6 |
6,3 |
13,4 |
46,6 |
7 |
0,3 |
1,3 |
Extraction |
-17,8 |
-7,9 |
-5,3 |
-3,9 |
18 |
14,5 |
9,2 |
6,7 |
Manufacturier |
-31,5 |
5,2 |
8,4 |
15,2 |
49 |
5,6 |
0,3 |
-0,2 |
Electricité |
-14,8 |
-3,2 |
1,5 |
3,2 |
13,8 |
8,5 |
3,7 |
4,5 |
Construction |
-49,4 |
-6,6 |
6,6 |
18,3 |
71,3 |
8,1 |
-2,8 |
2 |
Services |
-20,8 |
-10,8 |
-0,9 |
2,1 |
10,5 |
10,2 |
8,1 |
5,5 |
Commerce, tourisme et transports |
-49,9 |
-18,8 |
-10,1 |
-3,4 |
34,3 |
9,6 |
6,3 |
5,3 |
Immobilier et activités financières |
-1,1 |
-5,2 |
10,3 |
8,8 |
2,3 |
6,1 |
4,2 |
4,3 |
Administrations publiques et défense |
-11,4 |
-10,2 |
-2,9 |
1,7 |
6,2 |
19,4 |
16,7 |
7,7 |
VA |
-21,4 |
-5,9 |
2,1 |
5,7 |
18,1 |
8,3 |
4,7 |
3,9 |
|
20/21 |
21/22 |
||||||
|
T1 |
T2 |
T3 |
T4 |
T1 |
T2 |
T3 |
T4 |
Conso. privée |
-23,7 |
-8,3 |
0,6 |
6,5 |
14,4 |
10,5 |
7,4 |
1,8 |
Conso. publique |
13,6 |
-22,9 |
-0,3 |
29 |
-4,8 |
8,9 |
3 |
4,8 |
FBCF |
-45,3 |
-4,5 |
-0,6 |
10,1 |
62,5 |
14,6 |
2,1 |
5,1 |
Exportations |
-25,5 |
-6,4 |
-8,6 |
3,7 |
40,8 |
20,7 |
23,1 |
16,9 |
Importations |
-41,1 |
-17,9 |
-5,2 |
11,7 |
61,1 |
41 |
33,6 |
18 |
PIB |
-23,8 |
-6,6 |
0,7 |
2,5 |
20,1 |
8,4 |
5,4 |
4,1 |
[1] Pradhan Mantri Garib Kalyan Anna Yojana est un programme de sécurité alimentaire annoncé par le gouvernement indien le 26 mars 2020, qui vise à fournir des céréales par le biais du système de distribution publique, à tous les ménages prioritaires. Le PMGKAY fournit 5 kg de riz ou de blé par personne et 1 kg de dal à chaque famille éligible.
[2] 64% de la population totale (et 80% de la population adulte) aurait reçu les deux doses de vaccin.