Situation économique et financière

1er semestre 2023

 

16ème économie mondiale et 1ère économie de l’ASEAN, l’Indonésie affiche une croissance de long terme de +5,3 % depuis la crise asiatique de 1997. Avec une croissance démographique moyenne de 1,25 %, le PIB par habitant (4 800 USD en 2022) a été multiplié par six, de 2000 à 2022 et la classe moyenne a pris un essor significatif (+10 % par an) d’après la Banque Mondiale, qui a reclassé l’Indonésie comme dans la catégorie des PRITS (pays à revenu intermédiaire, tranche supérieure).

 

 

La croissance retrouve son niveau historique

En 2022, l’Indonésie a retrouvé son niveau de croissance de long-terme avec une croissance de 5,3 %, portant le PIB à 1 320 Mds USD, soutenu par la hausse du prix des matières premières. 

Au second trimestre 2023, le PIB a augmenté de 5,2 % par rapport au T2 2022, portant la croissance du S1 2023 à 5,1 % en ga. La croissance des six premiers mois de l’année s’explique à 40 % par le commerce extérieur. La progression semestrielle des exportations de +4,4 % en valeur, est supérieure aux importations qui enregistrent une augmentation de +0,3 % au S1 2023. Cependant, les exportations sont impactées par la baisse des prix mondiaux : en effet, après une croissance de +12,2 % au T1 2023, elles ont diminué de -2,8 % au T2 2023.

Entre-temps, la consommation publique a connu une croissance à deux chiffres, pour la première fois depuis la dernière décennie (+10,62 % au T2 et +7,53 % au S1 2023), dans un contexte pré-électoral. Par ailleurs, la consommation privée (+4,9 % au S1 2023) est stimulée par la baisse des pressions inflationnistes.

Les prévisions de croissance pour 2023 sont généralement légèrement inférieures à 5,0% :

Tableau avec les prévisions de croissance

 

 

 

Bons résultats de la balance des paiements

Au T2 2023, la balance courante a enregistré un déficit de -1,9 Md USD (0,5 % du PIB annualisé) après avoir dégagé un excédent de +3,0 Mds USD (0,9 % du PIB) au cours du trimestre précédent. Les résultats du compte courant ont été impacté par la diminution de l’excédent commercial, de 7,81 Mds USD au T2, contre 12,11 Mds USD au T1 2023 en raison de la réduction de l’avantage des termes de l’échange – attendue par les autorités indonésiennes.

Ces dernières anticipent un compte courant proche de l’équilibre, à ±0,4% du PIB (contre +1,0 % du PIB en 2022) pour l’année 2023 et la Banque mondiale table sur un compte courant nul.

Ainsi, avec le déficit du compte de capital et financier de -4,96 Mds USD (1,4 % du PIB) (contre +3,69 Mds USD au T1 2023), le solde de la balance des paiements a enregistré un déficit de -7,4 Mds USD (contre +6,52 Mds USD au T1 2023).

 

Fin juin 2023, la position des avoirs de réserve en Indonésie reste élevée, à savoir 137,5 Mds USD (contre 145 Mds USD à la fin mars), soit l’équivalent de 6,1 mois d’importations de biens et services, ce qui est supérieur à la norme internationale d'adéquation de 3 mois.

Enfin, la dette extérieure, dominée par de la dette à long terme à 87,7 %, s’élevait à 396,3 Mds USD au T2 2023 (29,3 % du PIB), contre 403,2 Mds USD (30,1 % du PIB) au trimestre précédent. Elle était de 397 Mds USD en 2022 (30,1 % du PIB) et de 437 Mds USD en 2021 (37 % du PIB).

 

 

 

Le déficit public est revenu dès 2022 sous la limite légale de 3,0% du PIB

En 2022, l’Indonésie a enregistré un déficit budgétaire de 2,4 % du PIB, contre une prévision initiale du gouvernement de -4,9 % du PIB, abaissée à -4,5 % dans le budget révisé. Pour rappel, le déficit public avait culminé à -6,1 % du PIB en 2020 puis -4,7 % en 2021 (avec un déficit primaire de -2,6 %). Cette consolidation budgétaire est due à la forte augmentation des recettes (+30,6 %), stimulée par la hausse des prix des matières premières exportées. Le poids des matières premières dans l’économie indonésienne, qui est une faiblesse structurelle, a ainsi eu un effet positif conjoncturel sur la croissance, la balance des paiements et sur les finances publiques. Malgré leur hausse, la part des recettes budgétaires dans le PIB reste faible (12,5 % du PIB en 2022) par rapport à d’autres pays émergents. Les dépenses ont également augmenté, mais à un rythme moins important (+11 %). La politique de contrôle de certains prix à la consommation pèse sur les finances publiques : en 2022, les subventions et compensations sur les prix du carburant et les tarifs de l’électricité représentaient 31 Mds USD (2,6 % du PIB et 17,8 % des dépenses publiques). L’augmentation des paiements d’intérêts de la dette publique freine également la maîtrise budgétaire. En effet, si la dette publique indonésienne a diminué après une hausse significative liée au Covid (39,5 % du PIB en mars 2023, contre 40,7 % du PIB en 2021 et 30,2 % du PIB en 2019) et reste largement inférieure au plafond légal de 60 % du PIB (40,9 % du PIB en 2022), les paiements d’intérêts représentent une part croissante des recettes budgétaires : le ratio « paiements d’intérêts / recettes budgétaires » est passé de 14 % en 2019 à 17 % en 2021.

 

L’Indonésie est ainsi parvenue à revenir dès 2022 sous le plafond légal de déficit budgétaire de -3,0 % du PIB, qui avait été suspendu de 2020 à 2022 du fait de la crise sanitaire. Le respect de cette norme légale, instituée en 2003, constitue un facteur d’influence sur la notation du pays investment grade » depuis 2017) et l’allocation de financements extérieurs – dont le pays reste dépendant, malgré leur recul (90 Mds USD en 2019 contre 68 Mds USD prévisionnels en 2022).

Dans un contexte préélectoral (élections générales en février 2024), la fin du financement monétaire, partiel et temporaire, du déficit public (mesure non conventionnelle mais qui n’avait pas été critiquée par les agences de notation) a été actée en 2023. Cet engagement est un gage de crédibilité de l’indépendance opérationnelle de la Banque centrale, sachant que la part des titres détenus par celle-ci dans la dette publique en monnaie locale est passée de 9,9 % fin 2019 à 26,1 % fin 2021.

Au regard du poids des entreprises publiques dans l’investissement de l’Etat, et par conséquent le risque global – jugé modéré par le FMI et la Banque mondiale – qu’elles constituent en raison de leur endettement important (souvent envers les banques publiques indonésiennes) car sous-capitalisées, les autorités indonésiennes ont entrepris des réformes: feuille de route 2020-2024, appuyée en partie par la Banque asiatique de développement (BAsD), avec la restructuration de certaines d’entre elles, l’entrée en bourse d’autres (notamment de la filiale de géothermie de Pertamina) et la diminution de leur nombre (passé de 114 à 41 entre 2019 et 2022).

 

Au cours du S1 2023, l’Indonésie a enregistré, selon les premières données, un excédent budgétaire d’environ 10 Mds USD (0,8 % du PIB annuel). Le gouvernement a dépensé 82,6 Mds USD mais ses recettes ont été plus importantes que prévues, atteignant 92,6 Mds USD. Les autorités prévoient que les recettes annuelles atteindront 175,6 Mds USD, soit une progression de 7,1 % par rapport à 2022.

Dès lors, la ministre des Finances, Sri Mulyani Indrawati, a amélioré ses prévisions concernant le déficit budgétaire 2023 à 2,28 % du PIB, contre une projection initiale de 2,84 %. En raison de cette bonne performance budgétaire, l’Indonésie peut réduire ses emprunts sur le marché et également moins faire appel aux bailleurs internationaux.

Le 4 juillet, la ministre des Finances a présenté devant l’assemblée nationale le cadre macroéconomique du projet de budget de l’Etat (RAPBN) pour l’exercice 2024 :

cadre macroéconomique du projet de budget de l’Etat (RAPBN) pour l’exercice 2024

 

 

 

Une décélération de l'inflation

Sur l’année 2022, l’inflation moyenne a été de +4,2 % en g.a., et s’est établie à +5,5 % en g.a. en décembre, après avoir atteint son plus haut niveau depuis 7 ans en septembre (+5,95 %). La transmission de l’inflation a été ralentie par des politiques de contrôle des prix, des subventions, ainsi que des restrictions à l’export (exemple : huile de palme entre fin avril et fin mai).

Cette décélération en fin d’année se poursuit au S1 2023, avec une inflation de l’IPC de 3,52 % en g.a. fin juin 2023. Dans ce contexte, le taux directeur est inchangé depuis la fin janvier 2023 (5,75 %). En effet, les six révisions à la hausse du taux directeur, entre août 2022 et janvier 2023 (225 points de base en tout), sont effectivement parvenues à ramener l’inflation dans la cible de 2 % - 4 %. Bank Indonesia prévoit que l’inflation restera stable, dans le corridor cible, pour le reste de l’année 2023, comme c’est le cas pour l’inflation sous-jacente depuis le premier trimestre 2023 (2,58 % en g.a. fin juin). Pour 2023, la Banque mondiale et la BaSD prévoient, respectivement, une inflation moyenne de 4,1 % et 4,2 %. Les autorités indonésiennes, quant à elles, ont pour cible une inflation dans les limites de la fourchette 1,5 % - 3,5 % en 2024 (plus haute de 0,5 point par rapport à celle de 2023).

Enfin, après une dépréciation de -8,6 % enregistrée fin décembre 2022 par rapport à celui de 2021, la roupie indonésienne bénéficie d'une appréciation de +4,17 % au S1 2023 (1er janvier - 21 juin). La rupiah s’est d’abord stabilisée grâce à la balance des paiements et a bénéficié des mesures mises en place par la Banque Centrale pour favoriser le rapatriement en Indonésie des flux de devises provenance des exportations (DHE).

Le 1er mars, Bank Indonesia a créé des dépôts à terme (1, 3 et 6 mois) en devises rémunérés aux conditions de marchés pour les DHE. Cet instrument a attiré un montant cumulé de 1,2 Mds USD jusqu’à présent. Un chiffre qui reste relativement faible par rapport à la valeur des exportations mensuelles de l’Indonésie, qui s’élève à 21 Mds USD. Cette mesure a été renforcée le 1er août par l’obligation pour les exportateurs de placer 30 % des devises provenant de leurs exportations de ressources naturelles, lorsque celles-ci sont d’une valeur égale ou supérieure à 250 000 USD, dans le système financier indonésien pour une durée minimum de 3 mois (sans obligation de conversion en roupie).

 

 

Au premier semestre 2023, l’Indonésie a maintenu son niveau de croissance historique, soutenu par la demande extérieure.

La Banque mondiale, se fondant sur les données 2022, a d’ailleurs reclassé l’Indonésie dans la catégorie des PRITSS (pays à revenu intermédiaire, tranche supérieure) alors que le revenu national brut par habitant a progressé, en USD, de 9,8 % par rapport à l’année précédente, dépassant le chiffre seuil de 4 466 USD (4 560 USD).

Grâce à l’amélioration du bilan extérieur de l’Indonésie en 2022 – avec une balance courante excédentaire, soutenue par un solde commercial record – la première économie de l’ASEAN devrait résister à la normalisation des prix des produits de base. Et, malgré une base de revenus toujours étroite, l’assainissement budgétaire rapide de 2022 devrait se poursuivre et permettre à l’Indonésie de conserver un déficit inférieur à 3 % du PIB.

Ainsi, en juillet 2023, Standard and Poor’s (S&P) a confirmé la notation de crédit souverain de l’Indonésie à BBB (long terme) / A-2 (court terme) avec une perspective stable.

Dans ce contexte, le pays, qui est déjà un « partenaire clef », a demandé officiellement, le 14 juillet dernier, à adhérer à l’OCDE.

 

FMI (Article IV, mars 2023) :
FMI (Article IV, mars 2023)

 

Banque Mondiale (Indonesia Economic Prospects, mars 2023) :

Banque Mondiale (Indonesia Economic Prospects, mars 2023) :

 
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