ÉTHIOPIE
Le commerce bilatéral France-Éthiopie structurellement rythmé par les livraisons d’Airbus
Partenaire commercial majeur de la France en Afrique de l’Est (432 MEUR échangés), l’Éthiopie représente le 8ème excédent commercial de la France en Afrique (solde de 265 MEUR en 2023). Le commerce bilatéral de biens entre les deux pays a connu une baisse en 2021, qui s’est poursuivie en 2022 (-14,5 % après 6 %), reflétant la sévère crise de disponibilité du change consécutive à l’inflation mondiale et la guerre au Tigré. La reprise de 2023 (+6,9 %) peut surprendre alors que les paramètres objectifs de l’économie éthiopienne ne se sont pas améliorés, avec un accès toujours plus difficile aux devises pour les importateurs et en particulier les distributeurs partenaires de groupes ou de marques français. La hausse des exportations françaises en 2023 (+8,5 %) est d’autant plus remarquable qu’elle se répartit de façon assez homogène entre principaux produits d’export et ne dépend pas du seul secteur aéronautique, qui apporte structurellement plus de deux tiers de nos ventes et bénéficie du dynamisme d’Ethiopian Airlines. Parmi les produits qui résistent étonnamment bien à la tendance générale défavorable, peuvent être notés l’agroalimentaire et les produits chimiques.
Résilience des exportations françaises dans une conjoncture difficile
Dans une conjoncture éthiopienne difficile, marquée par un accès aux devises en dégradation constante malgré une croissance toujours élevée (+6,1 % selon le FMI), nos exportations ont enregistré une hausse relativement surprenante (+8,5 %, 348,9 MEUR). Elle est d’autant plus remarquable qu’elle se réalise de façon relativement bien distribuée entre différentes secteurs et ne repose pas uniquement sur l’aéronautique, pilier de nos exportations grâce à la bonne santé du géant africain Ethiopian Airlines. Elle suggère une certaine vitalité du marché éthiopien, en dépit des vents contraires multiples, notamment politiques et sécuritaires.
L’aéronautique conserve sa position traditionnelle. Les matériels de transport ont progressé de 3,4 %, à 234,4 MEUR (67,2 % du total, contre 70,5 % un an plus tôt). En leur sein, les avions ont baissé de 8,3 %, à 147,7 MEUR. Seul un Airbus, A350-900, a été livré (mai). C’est la motorisation qui a propulsé les exports en 2023, avec en particulier l’apparition dans nos ventes de certains types de turboréacteurs, liés à la JV Safran/GE CFM, dont une catégorie de puissance qui passe de 0 à 50,5 MEUR d’exportations. Les « parties de turboréacteurs » ont été multipliées par près de 6 et ont atteint 12,7 MEUR. Autre spécificité de la relation d’Ethipoian Airlines avec Safran, les trains d’atterrissage ont progressé de 19 %, à 10,3 MEUR et une catégorie d’alternateurs, absente des exports les deux années précédentes, a atteint 9,9 MEUR. A l’inverse, Thales, autre partenaire important de la compagnie aérienne éthiopienne, a enregistré une performance en retrait : les ventes de « centrales inertielles pour la navigation aérienne ou spatiale » ont connu un recul de 88 %, à 3,1 MEUR.
La dynamique du poste des produits des industries agroalimentaires est particulièrement significative (38,2 MEUR, +70,3 %). Ce sont non pas les produits finis – et notamment pas les vins et spiritueux qui font l’objet de sévères restrictions d’importations depuis octobre 2022 – qui ont prévalu mais certains types de préparations alimentaires à base de produits laitiers (21,9 MEUR, +87,1 %) qui ont connu la progression la plus notable. Les préparations à base de farines ont pour leur part doublé, à 9,1 MEUR, manifestement des intrants pour l’industrie agroalimentaire. Le champagne a résisté néanmoins et a doublé à 1,2 MEUR.
Les équipements électriques et ménagers se portent également bien (+172,8 %, 15,3 MEUR). L’explication semble devoir résider dans les financements AFD en cours, dont le centre national de contrôle du réseau électrique est partiellement équipé par GE France. Le groupe GE, toujours, a fourni deux des turbines du Grand barrage de la renaissance. Bien qu’elles soient sourcées en Chine par le groupe, d’autres équipements annexes liés au barrage, ex-Alstom, viennent de France.
La bonne tenue des « produits chimiques, parfums et cosmétiques » (25 MEUR, +7,9 %) a été une autre indication de la résilience du marché éthiopien. En leur sein, notons le poids de certains herbicides (10,7 MEUR, +1 %). Les cosmétiques ont connu une progression encore timide, mais présentent un potentiel élevé. Les eaux de toilette ont près de doublé en deux ans, atteignant 2,8 MEUR. Les parfums ont augmenté de 75 % sur un an, à 2,8 MEUR également. Les dépilatoires et autres parfums et eaux de toilettes ont bondi de 144 % pour s’établir à 2 MEUR. L’Oréal a récemment établi un partenariat de distribution et d’autres produits cosmétiques français sont visibles sur le marché éthiopien (bien qu’ils le pénètrent souvent de façon informelle, en général depuis Dubaï).
Pour de moindres volumes, les « produits en caoutchouc et en plastique, produits minéraux divers » (2,9 MEUR, +139 %) et les produits métalliques et métallurgiques (4,4 MEUR, +96 %) sont favorablement orientés, possiblement pour l’industrie éthiopienne. Le lin a fait son apparition et a atteint 2 MEUR, venant alimenter l’industrie textile.
A contrario, les produits informatiques, électroniques et optiques ont vu leurs ventes se réduire de moitié, à 12,2 MEUR. Les produits pharmaceutiques ont également reculé de près de moitié, à 1,6 MEUR.
Les ventes vers l’Éthiopie représentent 0,06 % des exportations françaises, en lien avec le poids du pays dans l’économie (0,1 % du PIB mondial). Elles ont représenté 3,2 % de nos exportations vers l’Afrique subsharienne. Hors matériels de transport, nos exportations se sont établies à 114,5 MEUR, contre 95 MEUR un an plus tôt. Le fait que cette hausse intervienne dans une conjoncture difficile, marquée par les conflits et l’extrême rareté des devises, rappelle le potentiel important du marché éthiopien.
Des importations françaises depuis l’Ethiopie modestes mais qui poursuivent leur hausse, dominées par le café et dynamisées par le textile
Les importations françaises depuis l’Éthiopie ont progressé de 0,8 %, après deux années exceptionnelles (+27,1 % en 2022 et +50,8 % en 2021). De 83,2 MEUR, elles sont composées très majoritairement de produits agricoles. A 59,7 MEUR, ce poste essentiel a enregistré néanmoins une baisse sérieuse en 2023 (-7,4 %). Il s’agit pour l’essentiel de café, les « cafés non torréfiés et non décaféinés » représentant 50,8 MEUR d’importations (-6,4 %) qui se dirigent principalement vers les spécialistes français de la torréfaction. Leur dynamique a été handicapée par les cours internationaux du café, très nettement baissiers en 2023, après une année 2022 particulièrement favorable.
L’autre poste agricole prépondérant est constitué par les fleurs, deuxième produit d’exportation éthiopien. Il s’agit de roses pour l’essentiel (6,7 MEUR, -15 %), l’Ethiopie étant le 4ème exportateur mondial de fleurs.
Les achats de textiles provenant des nouveaux parcs industriels ont connu une dynamique tout à fait notable. Ils ont débuté en 2016 et ont été récemment propulsés par la stratégie de Decathlon dans le pays. Le groupe français fait déjà produire diverses catégories de vêtements en Ethiopie et s’apprête à l’élargir aux chaussures notamment, en s’appuyant sur une vingtaine d’employés sur place, en charge du contrôle qualité et des achats. Les importations de produits du « textile, habillement, cuir et chaussures » ont ainsi bondi de 56 %, à 21,6 MEUR, après +95,7 % en 2022. En leur sein, les shorts pour femmes (4,9 MEUR, multipliés par 2,5), les pantalons pour femmes (2,9 MEUR, multipliés par 2,8), les t-shirts en coton (2,7 MEUR, multipliés par deux) ou encore les pulls pour femmes (2,4 MEUR, multipliés par 2,1) sont les articles à la dynamique la plus notable.
L’Ethiopie représente le 8ème excédent commercial de la France en Afrique
Le total des échanges entre la France et l’Ethiopie a atteint 432,1 MEUR en 2023, contre 404,2 MEUR en 2022, soit une hausse de 6,9 %. La France enregistre un excédent commercial structurel avec l’Ethiopie, en hausse en 2023 à 265,7 MEUR contre 239,2 MEUR en 2022. La moyenne des échanges bilatéraux s’élève à 569,2 MEUR depuis 2016 avec un pic historique à 872,7 MEUR en 2017, chiffres attribuables pour une très grande part à l’aéronautique.
L’Ethiopie représente ainsi le 38ème excédent commercial de la France et le 8ème en Afrique. Il est à noter que l’année 2024 s’annonce d’ores et déjà exceptionnelle et pourrait tutoyer le pic de 2017, Ethiopian Airlines attendant la livraison de trois des quatre A350-1000 commandés à Airbus pour le dernier trimestre de l’année.
Selon la Banque centrale d’Ethiopie (NBE), la France était le 20ème fournisseur du pays sur l’année fiscale 21/22 (derniers chiffres en date) et son 18ème client. L’Ethiopie est le 85ème client de la France, le 12ème en Afrique subsaharienne et son 107ème fournisseur, le 19ème en Afrique subsaharienne.