Mines : Un patrimoine minéral peu développé et documenté, malgré un rôle supposé dans la diversification de l’économie de Djibouti

La variété et la quantité des ressources minières à Djibouti restent encore à qualifier. Outre l’exploitation des salines du lac Assal, moteur historique des exportations de biens djiboutiennes, le pays n’exploite pas, à ce jour, de ressources minières ou minérales. Dans sa stratégie de diversification économique, l’État mise sur l’or, le minerai le plus prometteur selon lui, pour développer une exploitation minière à une échelle industrialisée. Cet effort de valorisation de la ressource aurifère s’est accompagné d’une réforme du code minier en 2016 pour encourager les investissements privés et étrangers dans le secteur minier.

L’industrie extractive du pays est uniquement centrée sur l’exploitation des ressources salines du lac Assal

L’unique industrie extractive de Djibouti consiste en l’exploitation des ressources salines du lac Assal, ce dernier disposant d’une salinité de 35g/litre soit 10 fois plus que la teneur en sel de la mer Rouge. L’exploitation du sel est passée d’une production artisanale à une production semi-industrielle assurée par la seule société Salt Investment, joint-venture sino-djiboutienne et bénéficiant d'un contrat exclusif sur la concession du lac.  L’entreprise produit du sel industriel et également du bromure de sodium grâce à son usine (80 MUSD) implantée aux abords du lac depuis 2019. L’exploitation du gisement naturel d’Assal produit environ 110 000 tonnes de sel par an, employant 2000 personnes, soit 0,08% de l'emploi total[1]. Cette production représente une part non négligeable des exportations totales du pays. En effet, le bromure de sodium est le deuxième poste d’exportation du pays en 2021 (56 MUSD, soit 15 % des ventes djiboutiennes à l’international). Les exportations de sel, elles, s’élèvent à 478 kEUR en 2021 (0,1 % des exportations totales,). Les ventes sont, en grande majorité, dirigées vers la Chine (à 96 %) pour le bromure de sodium et l’Éthiopie (à 97 %) pour le sel.

Figure 11 : Localisation du lac Assal et du port de Goubet

 Localisation du lac Assal et du port de Goubet 

La construction du port minéralier au sud du golfe de Goubet pour un coût total de 64 MUSD (prêt de l’EximBank of China), fait partie de la stratégie du gouvernement pour valoriser les ressources salines d’Assal. En effet, l’infrastructure portuaire a pour objectif de faciliter l’exploitation et l’export chaque année de 6 Mt de sel, puis après transformation, de 52 000 t de bromure de sodium et 60 000 t de soude caustique. Toutefois, malgré une inauguration en 2017, le port du Goubet est aujourd’hui non opérationnel, le détroit n’étant pas assez profond pour permettre à des bateaux d’une taille adéquate d’accéder au port.

Djibouti dispose d’un potentiel minier limité et encore peu documenté

La stratégie nationale « Vision Djibouti 2035 », établie en 2013, mentionne la présence de ressources minières dans le pays avec, notamment, des indices de perlite, de bauxite, de gaz naturel, de cuivre[2] , de zinc, de fer, d'aluminium, d'or et de pétrole. Toutefois, aucune donnée n’est encore disponible pour qualifier précisément la variété et la quantité des ressources potentielles.

Parmi ces potentialités, Djibouti fonde ses espoirs de développement économique sur l’or. Le pays a accordé 11 permis à l’entreprise Thani-Stratex, joint-venture entre le britannique Stratex International et l’émirien Thani Resource pour explorer l’or djiboutien. Les résultats des forages menés par cette dernière sur ses 11 permis auraient été concluants d’après le gouvernement.  La viabilité économique de l’exploitation de ces gisements serait en cours de détermination par l’entreprise. 

Afin de valoriser son patrimoine minéral et offrir un cadre plus favorable à l’investissement étranger, le pays s’est doté d’un nouveau code minier

Djibouti s’est doté, en 2016, d’un nouveau code minier pour encadrer les activités minières dans la perspective de la mise en valeur à terme de ses ressources. Le code conditionne la délivrance des titres miniers, aussi bien pour l’exploration que l’exploitation de mine et de carrière, à la création d’une société de droit djiboutien (pouvant être détenue à 100% par des investisseurs étrangers). Le permis d’exploitation artisanale est, lui, réservé aux citoyens djiboutiens et aux étrangers résidant à Djibouti depuis plus de 5 ans. Enfin, le permis de ramassage ou de récolte[3] ne peut être obtenu que par un citoyen djiboutien. La principale innovation introduite par le code de 2016 par rapport à celui de 1994 réside dans la suppression de l’attribution obligatoire à l’État de parts ou d’actions d’apports de la société d’exploitation. Par ailleurs, le code minier de 2016 ne fait pas mention d’un seuil déterminé pour garantir le contenu local d’un projet minier. Le gouvernement précise toutefois que le recrutement de djiboutiens et la sollicitation de sous-traitants locaux, quand cela est possible, est fortement encouragée. Les redevances perçues par l’Etat djiboutien grâce aux activités minières sont liées à l’octroi et aux renouvellements des différents droits miniers ainsi qu’à la récolte des redevances superficiaires annuelles (proportionnelles à la superficie du titre minier) et des redevances minières (calculées au prorata de la production commercialisable).

Au travers de ce nouveau code minier, Djibouti tente de lever les barrières normatives pouvant freiner l’investissement privé et étranger dans le secteur minier djiboutien. Cependant, le développement de l’exploitation minière, à une échelle industrialisée, est encore contraint par plusieurs obstacles dont l’accès à suffisamment d’énergie et d’eau. En effet, Djibouti demeure un pays aride avec de faibles ressources en eau, fortement amoindries par des périodes de sécheresses successives depuis 2009. S’agissant des capacités installées énergétiques du pays, elles atteignent 135 MW en 2022 et sont marquées par une sous-production domestique en raison d’importations en provenance de l’Éthiopie. A titre de comparaison, la puissance installée requise pour exploiter une mine d’or à ciel ouvert s’échelonne généralement entre 20 et 60 MW, et peut atteindre les 80 MW pour une mine d’or souterraine[4].


[1] Annuaire statistique 2022 de l'Institut national de statistiques de Djibouti (INSTAD)

[2] Les données TradeMap recensent des exportations djiboutiennes de cuivre en 2021 (2 MUSD). Il pourrait s’agir de cuivre éthiopien réexpédié via les ports de Djibouti.

[3] L’activité de ramassage/récolte de produits marchands en l’état et se trouvant à la surface du sol

[4] Banque mondiale, 2015Le potentiel transformateur de l’industrie minière, une opportunité pour l’électrification de l’Afrique subsaharienne

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