DJIBOUTI
Les solutions d’électricité hors-réseau
Un secteur électrique djiboutien lacunaire qui appelle intrinsèquement des solutions d’électricité hors-réseau
En matière d’électrification, Djibouti se situe dans la tranche supérieure des pays d’Afrique subsaharienne (taux d’accès à l’électricité de 61,8% en 2020 contre 48,4% pour l’Afrique subsaharienne) mais accuse une forte disparité entre les zones urbaines (taux d’électrification de 72,2% en 2020) et les zones rurales du pays, isolées du réseau électrique national (24,8% en 2020). Cet écart est le reflet de la répartition spatiale de la population djiboutienne : 70% des djiboutiens vivent à la capitale et 11% dans les villes régionales. Par conséquent, les réseaux de distribution au-delà de Djibouti et des grandes villes sont quasiment inexistants. En réponse, le gouvernement djiboutien s’est fixé pour objectif d'assurer l'accès universel à l'électricité d'ici à 2035. Les investissements visent notamment à l’extension des lignes électriques jusqu’aux régions intérieures les moins développées (l’entreprise nationale d’électricité, Electricité de Djibouti, EDD, connecterait entre 1 500 et 2 000 nouveaux clients au réseau chaque année en ciblant les tranches les plus pauvres de la population).
Autre barrière empêchant un accès plus généralisé à l’électricité à Djibouti : le prix de détail élevé de l’électricité. Djibouti a des tarifs résidentiels parmi les plus élevés du continent (0,15 USD/kWh pour les plus pauvres[1] et 0,31 USD/kWh pour les clients résidentiels) pour les raisons suivantes : (i) les coûts importants et la taille modeste des vieux générateurs HFO/diesel d’EDD (100% de la production nationale et 30% de l’approvisionnement ; le reliquat étant importé depuis 2011 via la ligne d’interconnexion reliant Djibouti à l’Ethiopie souvent congestionnée), (ii) la faiblesse des subventions nationales pour l’électricité et (iii) les coûts d’exploitation élevés d’EDD compte tenu de la petite taille du système (ne disposant pas des capacités de stockage nécessaires, EDD est contraint de rationner sa production d’électricité). Le prix de l’électricité à Djibouti constitue alors un frein à l’attractivité et à la diversification économique du pays.
Des pénuries d’alimentation occasionnelles et des coupures (en saison des pluies particulièrement) sont constatées par ailleurs au niveau du réseau électrique national djiboutien.
Un développement des solutions hors-réseau porté par un usage industriel
Certains bailleurs se sont saisis de la problématique d’accès à l’électricité à Djibouti et ont permis la mise en place de solutions off-grid. C’est par exemple le cas de l’USAID qui a accordé une subvention à l’entreprise américaine Liquidstar pour la mise en œuvre d’un projet pilote visant à permettre à 100 ménages ruraux de bénéficier de l’électricité grâce à une station de recharge de batteries intelligentes qui, une fois déployées, permettent une distribution d’électricité au-delà du réseau national.
Malgré quelques initiatives à caractère « social », les solutions d’électricité hors-réseau à Djibouti sont majoritairement mises en place pour un usage industriel en raison du manque de fiabilité du réseau et de son coût très élevé pour les clients industriels. De nombreuses entreprises commerciales et industrielles, mais aussi des bases militaires (comme la France, les Etats-Unis et la Chine selon la Banque Mondiale) disposeraient de leurs propres générateurs pour suppléer l'approvisionnement d'EDD en cas de délestage de la charge ou bien encore pour s’auto-approvisionner en électricité et ainsi contourner le coût élevé de l’énergie à Djibouti (il s’agit alors de circuits fermés, la réinjection du surplus dans le réseau n’est pas possible). Par exemple, l’extension de l’usine de dessalement de Doraleh (phase financée par un prêt de la Banque Européenne d’Investissement) comprendra également la réalisation d’une ferme photovoltaïque de 12 MW afin d’alimenter l’usine en électricité.
Un environnement réglementaire en évolution malgré des réalités politiques plus figées
Historiquement, le secteur de l'électricité à Djibouti est centré autour de l’entreprise publique monopolistique EDD. La loi 88-AN-15-7 de 2015 a ouvert le marché du côté de la production, EDD restant le seul acheteur, transporteur et distributeur d’électricité. Dans la pratique, le gouvernement impose l’obtention d’une autorisation auprès du ministère de l’Energie et des Ressources Natures afin de pouvoir développer sa solution d’autoconsommation ; ceci permettant à l’Etat de maintenir et renforcer son droit de regard sur la production d’électricité malgré la libéralisation du segment.
S’agissant de la gestion des déchets électroniques, Djibouti n’a pas de loi ou réglementation spécifique en la matière.
Présence des entreprises françaises dans le secteur
Le secteur des solutions d’électricité hors réseau à Djibouti présente de belles opportunités pour les entreprises françaises, notamment grâce au fort potentiel solaire du pays. L’entreprise Akuo Energy via sa filiale et accompagnée par le Cluster Djibouti, Territoire d’Innovations, a fait le choix de Djibouti pour un premier démonstrateur africain de sa technologie SunStyle, solution française de peinture isolante et de tuiles solaires. L’entreprise a signé un contrat avec la banque BICMR pour l’équipement en tuiles solaires du toit terrasse de son siège à Djibouti-Ville. D’autres bâtiments (publics notamment) dans la capitale seraient étudiés par l’entreprise pour le déploiement de sa technologie.
Décembre 2022.
[1] Tarif subventionné pour une consommation inférieure à 200 kWh/mois.