Le secteur bancaire djiboutien, un secteur compétitif

Le gouvernement ambitionne de faire de Djibouti un centre financier régional mais il y a de nombreux défis à relever : étendre l’accès aux services financiers (26 % d’inclusion financière), développer et assainir le portefeuille de prêts (crédit au secteur privé 20,8 % du PIB ; 16,3 % de PNP), mettre en place une réglementation BC/FT adéquate. La Banque Centrale de Djibouti, avec le soutien d’organisations travaille en ce sens. Comme ses paires, elle a mis en place un certain nombre de mesure pour limiter l’impact économique de la crise.

 Le système financier djiboutien est dominé par le secteur bancaire (94,0 % des actifs). Il repose sur 10 banques commerciales, 3 banques islamiques[1] actives, 17 sociétés de transfert et 3 institutions de microfinance.[2] Le marché se structure autour de trois banques principales qui concentrent 70 % des actifs : la Banque pour le Commerce et l’Industrie Mer Rouge (BCI-MR), la Bank of Africa (BOA) et la Exim Bank of Djibouti, autour desquelles gravitent une multitude d’acteurs. Depuis 2006, le secteur bancaire s’est ouvert aux banques étrangères (11). Les banques islamiques occupent une place importante sur le marché (23 % de l’actif bancaire total en 2018 ; 73 000 clients contre 20 000 pour la BCI-RM et la BOA).

Depuis 2014, le gouvernement ambitionne de faire du pays un hub financier régional afin d’accompagner le développement du hub commercial et logistique. Ainsi, le gouvernement se prépare à une validation de son cadre réglementaire et institutionnel par le GAFI (prévue en 2024), à développer une stratégie d’assainissement et renforcement du secteur bancaire (traitement des prêts non performants, renforcement des fonds propres, introduction d’un taux de réserves obligatoires) et à améliorer la mobilisation de l’épargne : le loans to deposits ratio atteint seulement les 43,0 % à fin septembre 2020.

A fin décembre 2019, l’actif bancaire total s’élevait à 458, 4 Mds FDJ (2,6 Mds USD) soit 78,2 % du PIB. Entre 2017 et 2019, les engagements des banques ont progressé de 151,0 %. Cette augmentation s’explique par l’octroi de crédits importants à des organismes semi-publics dans le cadre de grands projets dans les infrastructures portuaires et dans les télécommunications. En revanche, la part du crédit au secteur privé reste bas (20,8 % du PIB à fin 2019)  en raison d’une faible offre d’outils de prêts adéquats pour les ménages ou les PME (seulement 5 % des entreprises formelles disposent d’un financement bancaire). Les prêts se concentrent essentiellement sur les secteurs des transports, de la logistique, des travaux publics et de l’immobilier.  Le taux de prêts non-performants (PNP) reste élevé à 16,3 % à fin 2019 et est concentré à 92,0 % sur les deux premières banques (BCI-RM et Bank of Africa). Un plan d’assainissement de ces PNP est en cours, avec une sortie des bilans des créances douteuses de plus de 5 ans à dater du 1er janvier 2020. La BCD estime que d’ici 4 ans, la part des PNP sera ramenée à 8,0 %. À fin 2020, la part des PNP est passée à 13,8 %.

La réglementation de la BCD est conforme aux accords de Bâle III depuis mars 2019. Le Capital Adequacy Ratio doit être supérieur à 12,0 % et le ratio de liquidité à 100,0 % (Liquidity Coverage Ratio). Le secteur bancaire reste capitalisé avec un ratio de solvabilité consolidé à hauteur de 15,7 %. Djibouti lutte également contre les acteurs de l’économie parallèle afin d’assurer une meilleure traçabilité, avec l’aide de l’assistance de la Banque Mondiale et du Fond Monétaire International dans ce domaine.

Avec un taux de bancarisation 26,0 % (contre 49,7 % dans le reste de l’Afrique subsaharienne) l’inclusion financière reste embryonnaire. Le PNUD et les autorités djiboutiennes ont élaboré La Stratégie Nationale pour l’Inclusion Financière 2021- 2026, qui a pour objectif de : moderniser le système national de paiement, fournir des produits financiers simplifiés, améliorer les connaissances financières, renforcer l’accès aux instruments financiers des PME. Néanmoins, la faible rentabilité des banques (rendement des actifs de 1,1 % en 2019) ralentit le processus.

La Banque centrale mise sur le digital banking et le mobile-money pour moderniser la structure bancaire du pays même si la demande est encore faible. Malgré le retard cumulé par le gouvernement djiboutien dans le domaine des Fintech en raison de barrières réglementaires, le secteur du mobile-money est en plein essor avec la création en 2020 par Djibouti Telecom de D-Money, venu concurrencer le seul acteur existant dans le domaine à ce jour : Nomadecom.

Djibouti a peu été affecté par la pandémie lors du 1er trimestre 2020 mais la BCD a pris plusieurs mesures en faveur des particuliers et des entreprises à partir de juin 2020 : report de 3 à 6 mois des échéances sur les engagements, suppression des frais annexes, intérêts et pénalités sur les remboursements des crédits de 3 à 6 mois, mise en place de lignes de crédit additionnelles pour les entreprises à un taux d’intérêt modéré, flexibilité sur le niveau de ratio de solvabilité réglementaire.

 

      Table 1 : Ratios réglementaire et indicateurs de stabilité                

Ratios réglementaire et indicateurs de stabilité             

Table 2 : Banques présentes à Djibouti

Banques présentes à Djibouti
 

Graphique 1 : Évolution de la part des PNP depuis la crise de 2013

Évolution de la part des PNP depuis la crise de 2013


[1] La Saba African Bank, la Salaam African Bank et la East Africa Bank. Des mesures ont été prises pour encadrer leur activité (Comité National de la Charia au sein de la BCD).

[2] Ces 3 institutions –CPEC Djibouti, CPEC Sud et CPEC Nord – enregistrent 33 728 membres et clients en 2019 dont 73,5% sont des femmes En 2019, l’encours des crédits accordés s’élevait à 764 k USD.

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