DJIBOUTI
L’accès aux engrais à Djibouti : un levier mineur de la lutte contre l’insécurité alimentaire à Djibouti, en l’absence de potentiel agricole
Compte tenu d'un contexte climatique et pédo-hydrologique défavorable, le secteur agricole est très peu développé ; il représenterait, en moyenne, entre 1% (Banque Mondiale) et 2% (FAO) du PIB[1]. La production agricole ne couvre que 10% de la consommation alimentaire nationale. Au total, seules 9 896 tonnes de végétaux auraient été produites en 2019/2020, selon les données de l’Institut de la Statistique de Djibouti. La production se limite à la pratique ponctuelle du maraichage et de l’arboriculture le long des cours d’eau. Le manque d'eau (taux de précipitations annuel de 13 cm), les limitations en terre arable (1000 km2 soit 4,3% du territoire) et la salinité des sols rendent difficile le développement de céréales.
La très faible disponibilité des intrants agricoles au niveau national compte parmi les principaux (mais pas unique[2]) facteurs contraignant le développement de l’agriculture. Le niveau de fertilisation s’établit à 17 kg/ha/an[3], un niveau très en-deçà de l’objectif de 50 kg fixé par la déclaration d’Abuja sur les engrais de 2006 et de la moyenne mondiale à 146 kg.
En synergie avec sa politique de lutte contre l’insécurité alimentaire, le gouvernement vise le développement de l’agriculture commerciale via notamment l’augmentation de la production maraichère (objectif également cité dans la feuille de route issue du Sommet de Dakar de janvier 2023[4]). L’accès aux engrais n’est pas identifié comme principal levier pour augmenter les rendements agricoles à Djibouti : la priorité est donnée à l’accès à l’irrigation et au développement de l’industrialisation.
Djibouti sert de principale plateforme de transit pour les importations d’engrais éthiopiennes. En 2022, le pays réceptionnait 579,3 MUSD[5] d’engrais, la quasi-totalité de ce volume étant réexporté vers le marché éthiopien. Le monopole de Djibouti sur ces flux pourrait être menacé à court terme, le gouvernement éthiopien ayant communiqué en mars 2024 son souhait de voir une partie de ses importations d’engrais transiter par le port de Lamu en accord avec sa stratégie globale de diversification des corridors d’approvisionnement de l’Éthiopie. Notons la construction du port minéralier à Tadjourah en 2017 pour les exportations de minerais éthiopiens (notamment de potasse issue du Nord de l’Ethiopie) qui pourrait également avoir vocation à servir la production d’engrais régionale.
[1] L’élevage, lié à la culture nomade, représente la principale activité agricole du pays (3/4 du PIB agricole).
[2] Sont à lister également le faible niveau de structuration des agriculteurs, les difficultés d’accès aux services (vulgarisation, finance, commercialisation), la non-maîtrise des nouvelles techniques culturales, l’absence d’infrastructures de stockages (chambre froide) des produits périssables, la concurrence des produits des pays limitrophes où les facteurs de production coûtent moins cher qu’à Djibouti.
[3] Banque Mondiale, 2021
[4] Production de 55 000 T pour couvrir 90% des besoins au niveau national.
[5] Base de données UN COMTRADE.