DJIBOUTI
Bénéficiaire mineur de l’APD malgré des vulnérabilités croissantes
Djibouti est en 2021 le 39ème bénéficiaire d’APD en Afrique sub-saharienne et le 81ème au monde, avec une APD totale nette de 175,9 MUSD. Djibouti constitue un bénéficiaire mineur de l’APD en valeur, notamment en raison de la taille de sa population (1 M d’habitants).
Un engagement des bailleurs limité et très concessionnel
Sur la dernière décennie, Djibouti a vu son niveau de réception d’APD presque doubler avec une moyenne annuelle à 180,3 MUSD entre 2011 et 2021 contre 99,1 MUSD entre 2000 et 2010. Une tendance haussière qui n’est pas spécifique à Djibouti et qui s’observe, à rythme similaire, au niveau des volumes d’APD mondiaux entre les deux décennies. Ainsi, malgré des volumes d’APD plus important, Djibouti ne progresse pas dans les classements des pays récipiendaires et reste un bénéficiaire mineur d’APD. Djibouti est le 39ème bénéficiaire d’APD en Afrique subsaharienne en 2021 (il était le 39ème en 2011) et le 81ème au monde (93ème en 2011) avec une APD totale nette de 175,9 MUSD en 2021 en provenance à part égale des bailleurs multilatéraux et bilatéraux.
Parmi ces bailleurs bilatéraux, les Etats-Unis arrivent en tête (12,3% de l’APD en 2021) suivis du Japon (6,7%), de la France (5,7%), du Koweït (2,3%), et du Qatar (1,2%). Si son aide n’est pas considérée comme concessionnelle, la Chine est également un bailleur important pour Djibouti. Entre 2000 et 2019, Djibouti aurait bénéficié de 1,5 Md USD de prêts (pour certains concessionnels) de la Chine[1] principalement dans les secteurs des transports (63,5%) et de l’eau (21,5%).
Concernant la France, elle constitue, sur la décennie, le premier bailleur du pays. Les interventions de l’AFD sont axées sur la contribution à un développement durable et inclusif de Djibouti au travers de trois objectifs : i) favoriser la diversification de l'économie, améliorer sa compétitivité et son ancrage régional (transition énergétique et numérique, transition politique), ii) contribuer au renforcement du capital humain (transition démographique et sociale) et iii) promouvoir le développement de villes durables (transition territoriale et écologique). Le secteur de l’eau et de l’assainissement est particulièrement investi par l’AFD. En 2022, le portefeuille de l’AFD comprenait 17 projets pour un montant total d’autorisations de 146 MEUR et 1 prêt actif (en non souverain) pour un total d’encours de 20 MEUR à la fin 2022.
Les bailleurs du golfe bénéficient également d’une présence importante à Djibouti. C’est le cas du Koweït sur les sujets énergie (et notamment géothermique), logement et transport ou encore de l’Arabie Saoudite sur les sujets eau et assainissement, agriculture, logement, transport.
Concernant les bailleurs multilatéraux, l’Association Internationale de Développement (AID) appartenant au groupe Banque Mondiale arrive en tête avec 22,6 % de l’APD totale à destination de Djibouti en 2021. Viennent ensuite l’Union Européenne (12,7 %), le Fonds Mondial (5,2%) et les Nations Unies (5,0%). Parmi leurs principaux secteurs d’intervention : le social (45%), la sécurité alimentaire (20%), la santé (19,5%) et l’éducation (15%).
En dépit de son statut intermédiaire entre la catégorie des pays les moins avancés (PMA) et des pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure (PRI-TI)[2], Djibouti bénéficie à 72 % d’une APD en dons. Plusieurs bailleurs, comme l’UE, les Etats-Unis ou encore la JICA limitent leurs interventions à la mobilisation de subventions en raison de la situation d’endettement du pays (en « high distress » selon la qualification du dernier rapport Article IV du FMI). C’est également le cas de l’AFD, contrainte par la doctrine Lagarde lui interdisant toute intervention de l’agence en prêt souverain. A contrario, la BM, le Fonds koweïtien, le FADES interviennent principalement en prêts.
Des fragilités persistantes et exacerbées par les chocs externes justifiant une attention des bailleurs envers Djibouti
Malgré l’engagement des bailleurs, les indicateurs de développement à Djibouti restent fragiles. La pauvreté toucherait 1 personne sur 6 (Banque Mondiale), une situation qui se serait dégradée en raison de la pandémie (estimation du taux d'extrême pauvreté à Djibouti à 23-30 % en 2020 contre 15 % en 2019). La répartition des revenus reste inégale, avec un coefficient de Gini de 0,41 en 2021. Le taux de chômage est passé de 54% de la population active en 2010 à 47% en 2017 et touche en premier lieu la population jeune. De même, les résultats en matière de développement sont faibles[1] par rapport au revenu par habitant du pays (3 760 USD en 2023 selon le FMI, montant peu significatif car porté par les investissements dans les infrastructures , avec parfois un effet-multiplicateur limité pour la population).
Les vulnérabilités structurelles de l’économie djiboutienne (dépendance aux produits alimentaires et pétroliers importés) conjuguées à une exposition croissante aux chocs climatiques (sècheresse, inondation) exacerbent les pressions de la pauvreté et de la sécurité alimentaire à Djibouti. Le pays accueille également un flux sans cesse croissant de réfugiés (Yemen, Somalie, Ethiopie). L’action des bailleurs peut ainsi être amenée à se renforcer dans ce contexte.
[1] Base de données du Boston University Global Devleopment Policy Center
[2] Le Comité des politiques de développement (CPD) réexamine la catégorie des PMA tous les trois ans. Lorsqu’un pays atteint des seuils préétablis pour deux des trois indicateurs – le RNB par habitant, l’indice du capital humain (ICH) et l’indice de vulnérabilité économique et environnementale (IVE) – ou bien lorsque le RNB par habitant est plus de deux fois supérieur au seuil (c’est le cas pour Djibouti), un certain nombre d’activités de collecte d’informations sont lancées en vue d’une deuxième évaluation trois ans plus tard. Djibouti a entamé son parcours de reclassement en 2021 et pourrait sortir de la catégorie des PMA dès 2027 selon les estimations des Nations Unies.
[3] Djibouti est classé très bas à 166 sur 189 pays par l'indice de développement humain (IDH).