Assainissement : un secteur prioritaire porteur pour l’offre française

En moyenne relativement développé à l’échelle nationale, l’accès à l’assainissement à Djibouti se caractérise toutefois par des disparités marquées entre les territoires ruraux et urbains mais aussi au sein de la capitale où les quartiers populaires à forte densité humaine sont dépourvus d’infrastructures d’assainissement à défaut de solutions collectives offertes. Le gouvernement, qui associe lutte contre la pauvreté et accès à l’assainissement, mobilise les bailleurs pour raccorder ces quartiers (à la croissance démographique dynamique), mais aussi développer les réseaux d’assainissement et les infrastructures de traitement des eaux usées à l’échelle de Djibouti-ville. Le secteur de l’assainissement reste très porteur pour les entreprises françaises qui se positionnent sur des projets de construction d’infrastructures de grande envergure mais également sur le développement de solutions autonomes.

 

Un accès à l’assainissement amélioré mais délaissant les zones les plus défavorisées du pays

En 2020, 66,7 % de la population djiboutienne avait accès à des services basiques d’assainissement ; un taux en constante progression depuis vingt ans (presque 10 points de pourcentage de plus qu’en 2000) et supérieur à la moyenne de la région AEOI. Toutefois, l’atteinte de l’accès universel à l’assainissement reste ardue puisque cet accès est fortement disparate entre les territoires à l’image des inégalités de richesses dans le pays. En effet, le taux d’accès à des services basiques d’assainissement est considérablement plus bas en milieu rural (21,9 %) qu’en zone urbaine (79,3 %). La pratique de la défécation à l’air libre se maintient en zone rurale et concerne 64,1% de la population rurale contre 2,7% chez celle urbaine. 

S’agissant de Djibouti-ville, les infrastructures d’assainissement sont restreintes et inégalement réparties. La capitale dispose d’un réseau d’assainissement collectif vétuste et limité puisque seulement 16 à 25 % des ménages de la capitale seraient raccordés directement à ce dernier. L’assainissement dans la capitale est alors principalement individuel et plus ou moins rudimentaire (latrines ou fosses septiques). La vidange des fosses est réalisée par des entreprises privées pour un coût élevé ce qui incite aux rejets sauvages. Dans la commune de Balbala (territoire de croissance privilégié de la capitale dans lequel se concentre les situations de pauvreté de la ville), l’essentiel du ruissellement a lieu sur la chaussée, exposant les populations à des risques sanitaires importants.

 

Un secteur priorisé par le gouvernement mais dont le développement est pris en charge par les bailleurs

Le secteur de l’eau et de l’assainissement a été et reste un des axes d’intervention majeurs du gouvernement djiboutien dans sa politique de réduction de la pauvreté à Djibouti. Cela s’est traduit notamment par l'adoption en 2006 d'une politique nationale intégrée de l'eau et de l'assainissement, centrée sur la création de l’Office National de l’Eau et de l’Assainissement de Djibouti (ONEAD), opérateur public unique[1], et par l’intégration de l’accès universel à l’eau et l’assainissement dans les priorités de l’Initiative Nationale pour le Développement Social (INDS) lancée en 2007 puis à nouveau (faute d’atteinte des objectifs) dans le plan stratégique Vision 2035 initié en 2014.

L’objectif prioritaire du gouvernement est la réduction du risque sanitaire à Djibouti-ville en particulier qui connaît une forte croissance. Il a donc concentré ses interventions sur l’évacuation et le traitement des eaux usées hors du centre urbain de Djibouti-ville via le renforcement du réseau d’assainissement collectif de Djibouti-ville (construction de la station d’épuration de Douda – capacité de 40 000 EH - sur financement UE-FED, Projet d’Assainissement Liquide de Balbala financé par l’AFD en délégation de fonds FED, comprenant la réalisation d’un collecteur principal entre Balbala et la station d’épuration ainsi que le raccord de plusieurs quartiers de Balbala à ce réseau).

Le gouvernement s’appuie donc intégralement sur les bailleurs de fonds pour le financement de ses projets d’assainissement, l’ONEAD n’ayant pas les capacités financières de construire des nouvelles infrastructures sur fonds propres. L’UE et l’AFD sont les principaux bailleurs du secteur et mettent en place les initiatives suivantes à l’échelle de Djibouti-ville :

  • Le Projet d’Extension et de Renforcement du Réseau d’Assainissement de Djibouti lancé en 2019 pour une durée de 8 ans (phase I, II et III cumulées) prévoit le raccordement de cinq nouveaux quartiers de la ville au réseau collectif ainsi que le doublement de capacité de la station d’épuration de Douda avec, pour cela, un budget total alloué de 47,5 MEUR (27 MEUR AFD et 20,2 MEUR UE). Les études et la supervision des travaux sont assurés, pour les réseaux comme pour l’extension de la station d’épuration, par Egis. Les travaux de cette dernière ont été attribués au consortium Vinci/Stereau et ont débuté en avril dernier.
  • Vinci assure également depuis 2021 la construction d’une deuxième station d’épuration des eaux usées située à Balbala (capacité de 30 000 EH) sur financement UE, à laquelle sera associé un nouveau collecteur d’eaux usées à Balbala (10 MEUR délégués par l’UE à l’AFD). La passation de marché pour la maîtrise d’œuvre ainsi que l’appel d’offres pour la construction du collecteur constituent deux opportunités sur lesquelles des entreprises françaises peuvent se positionner.
  • Enfin, l’AFD (10 MEUR) ainsi que l’UE (5 MEUR) co-financent un projet d’appui stratégique à l’ONEAD visant à améliorer les performances et les conditions d’exploitation du service d’eau de l’ONEAD dans le cadre d’un contrat de performance. Celui-ci sera mis en œuvre avec l’aide d’un assistant-exploitant, présent pour une période de 5 à 7 ans, et rémunéré en partie sur l’atteinte d’objectifs liés à l’amélioration de la qualité du service et à l’amélioration des résultats financiers de l’ONEAD.

En outre, quelques entreprises privées françaises accompagnées par le Cluster Djibouti, Territoire d’Innovations sont actives dans le secteur. C’est le cas de la société Big Wata Solutions (système containerisé de traitement des matières de vidange), SD-EAU (microstations d’épuration modulaires) et SOC (système d’assainissement sous vide installé dans le quartier d’Haramous à Djibouti).

 

Mai 2023.


[1] Le secteur de l’assainissement relève du ministère de d’Agriculture, de l’Eau, de la Pêche, de l’Elevage et des Ressources halieutiques (MAPE-RH) qui a délégué à l’Office National de l’Eau et de l’Assainissement de Djibouti (ONEAD) la gestion de l’approvisionnement en eau potable, de la collecte et du traitement des eaux usées en milieu urbain. Le MAPE-RH conserve la responsabilité du service d’eau aux populations rurales à travers la Direction de l’hydraulique rurale.

Publié le