Indicateurs et conjoncture

La situation économique à Cuba s’est significativement dégradée depuis 2019, du fait de la pandémie, de faiblesses productives structurelles et du durcissement de l’embargo américain. Tandis que la croissance cubaine était déjà négative (-0,2%) en 2019, le choc économique lié au Covid-19 a conduit à une chute du PIB réel de 10,9% en 2020, selon The Economist Intelligence Unit. Après un retour progressif à la croissance (+2% en 2023), l’année 2024 a constitué un test de stabilisation de l’économie cubaine soldé par une légère croissance de 1,2%.

L’accès du pays aux devises étrangères est aujourd’hui limité, entrainant une réduction des capacités budgétaires de l’Etat, et une pénurie des produits alimentaires et de consommation courante principalement importés (70% des produits consommés). Le tourisme, considéré comme l’un des principaux moteurs économiques de Cuba et source de devises, peine à se relever depuis la fin de la pandémie. Cuba a ainsi accueilli 2,2 M de touristes étrangers en 2024, (-9,6 % g.a.) soit le pire chiffre depuis 17 ans (sans compter les années de covid-19). Le premier trimestre 2025 confirme qu’une reprise du secteur ne semble pas envisageable à court terme avec une chute de près du tiers de visiteurs. Si les services médicaux représentent la source majeure de devises pour Cuba (4,9 Mds USD en 2022 soit 70% du total des services exportés), les recettes enregistrées restent également inférieures au montant capté avant la pandémie (8,2 Mds USD en 2014 et 6,4 Mds USD en 2018). L’exportation de ces services a souffert de la remise en cause d’un de ses principaux débouchés au Brésil et de la crise au Venezuela. Enfin, les transferts de fonds de la diaspora cubaine (« remesas »), qui représentaient la 2nde source de devises pour l’île, ont fortement chuté avec la pandémie passant de 3,7 Mds USD en 2019 à à 1,97 Mds USD en 2023 (-3% par rapport à l’année précédente) et représente par ailleurs une chute de 47% par rapport à 2019.

Si en 2021 l’île avait engagé une réforme historique visant à mettre fin à la dualité monétaire (suppression du peso cubain convertible, ou CUC) et à la multiplicité des taux de change du pays, l’application de cette réforme a engendré une inflation hors de contrôle et a entraîné le pays dans une crise monétaire, accentuant la crise économique. L’inflation enregistrée en 2021 (152% selon the EIU) pouvait principalement être attribuée à l’unification monétaire, elle semble désormais résulter depuis 2022 d’un concours de facteurs structurels et conjoncturels : pénuries de produits alimentaires, énergétiques, d’hygiène et de santé aggravées ; crise de liquidité sans précédent ; système productif déliquescent ; guerre en Ukraine ; sanctions américaines et reprise décevante du secteur touristique. Par ailleurs, la taille du PIB a été largement revue à la baisse passant de 107,4 Mds USD en 2020 à 22,7 Mds USD en 2021 et 25,3 Mds USD en 2022 (cette division par cinq retranscrivant la surestimation artificielle précédente du PIB nominal).

Le secteur privé à Cuba a vu son développement s’accentuer avec l’adoption en août 2021 du statut des MYPIMES qui représentent le secteur des TPE/PME. Selon les sources officielles, le système entrepreneurial cubain comptait 17 427 entités à la fin de l’année 2023 (2 531 entreprises étatiques, 9 652 MIPYMES privées, 5 138 coopératives et 106 entreprises mixtes), auxquelles s’ajoutent 600 000 TCP. Ce secteur privé représenterait une part croissante du PIB (autour de 14%) et emploierait 15% de la population active du pays. Si les autorités n’ont pas pour ambition de revenir sur le statut des MYPIMES, qui a connu un franc succès, ces dernières sont régulièrement accusées par la classe politique d’alimenter l’inflation et de contribuer au développement des inégalités dans le pays.

Conscient de la situation économique et de l’urgence de la situation, le gouvernement a annoncé en décembre 2023 un changement de cap avec l’adoption de mesures d’austérité afin de limiter le déficit budgétaire, comme une augmentation du prix de l’essence à la pompe et la création d’un réseau de distribution en devises (en vigueur depuis mars 2024) ou encore une augmentation des tarifs de l’électricité pour les plus gros consommateurs. En parallèle aucune augmentation générale des salaires n’a été annoncée à l’exception de revalorisations sectorielles pour certains salariés dans le secteur de la santé et de l’éducation. Ces hausses ont alimenté l’inflation et accru les inégalités entre les cubains ayant accès à la devise et ceux n’ayant que des revenus ou des pensions en monnaie nationale (CUP).

 

 

Publié le