Présentation de l’économie et situation économique et financière

Structure de l’économie réelle et croissance économique

La Colombie est une république, frontalière du Venezuela, du Brésil, du Pérou, de l’Equateur et de Panama. Gustavo Petro est le premier Président de gauche du pays depuis août 2022, et a été élu au suffrage universel direct. Avec 52 M d’habitants répartis sur les 1,139 M km2, soit plus de deux fois la taille de la France, c’est le 2ème pays le plus peuplé d’Amérique du Sud, derrière le Brésil.

En 2023, les prévisions anticipent une croissance faible pour la Colombie (1,4 % selon les estimations du FMI) avant de remonter en 2024 (est. à 2%.) et 2025 (est. à 2,9 %).  L’économie colombienne a enregistré un net ralentissement de la croissance au cours de l’année 2023 (+3 % g.a. au T1 et +0,3 % g.a. au T2 et -0,3 % g.a. au T3). Ce ralentissement économique fait suite à une période de forte croissance postpandémique : avec un PIB estimé à 343,6 Mds USD en 2022, la Colombie a enregistré la 2ème meilleure croissance annuelle d’Amérique du Sud (+7,5 %) après le Guyana qui connait un boom pétrolier. Ainsi, bien que la Colombie se classe 3ème en termes de PIB en Amérique du Sud et 4ème en d’Amérique Latine, le pays est 5ème en Amérique du Sud et 8ème en Amérique Latine en termes de PIB/habitant (estimé à 6 644,5 USD/habitant en 2022).

Les services représentent, en 2023, 61 % de la génération de valeur ajoutée en Colombie. L’industrie manufacturière contribue à hauteur de 16 %. Grand secteur en termes d’exportations et d’IDE (cf. infra), le secteur extractif représente 5 % de la valeur ajoutée, vs. 8 % pour l’agriculture. Enfin, la construction et la provision de services publiques représentent 10 % du PIB.

Malgré une économie parmi les plus dynamiques des économies émergentes, la Colombie reste le deuxième pays le plus inégalitaire du continent, au sens de l’indice de Gini (coefficient à 51,5 en 2021 selon les estimations de la Banque Mondiale). Toutefois la Colombie est classée dans les pays à haut développement humain avec un IDH de 0,752 en 2021 (classé 88ème sur 192) – avec un IDH similaire à celui du Mexique. Le pays se place légèrement en-dessous de la moyenne de l’Amérique latine et des Caraïbes (0,754) mais au-dessus de la moyenne mondiale (0,732).

Equilibres externes

Les exportations colombiennes atteignent 57,3 Mds USD en 2022 et 41,4 Mds USD en 2021 (+38 %). Les produits de l’industrie extractive représentent 56 % des exportations totales en 2022. Le Gouvernement souhaite cependant mettre en place une transition économique et énergétique progressive pour limiter davantage l’industrie extractive malgré son fort potentiel économique et renforcer l’importance du secteur touristique. Ainsi, entre janvier et septembre 2023, on observe une baisse de‑15,4% des exportations (vs. même période en 2022) principalement due à l'inflation mondiale élevée, la moindre demande des consommateurs et la diminution des exportations de pétrole, de charbon et de leurs dérivés. Les produits agro-alimentaires et les boissons sont le deuxième poste d’exportations et en représentent un cinquième (20 %). Les produits manufacturiers suivent et représentent eux 18 % des ventes extérieures du pays. Les importations de la Colombie s’élèvent à 71,4 Mds USD en 2022, vs. 56,6 Mds USD en 2021 (+26 %), boostées par la demande interne. Les importations manufacturières représentent la plus large part des importations (74 % du total).Entre janvier et aout 2023 on observe cependant une baisse des importations de -20 % g.a. Cette réduction est principalement due à une baisse de la demande des ménages.

Le déficit commercial de la Colombie s’est légèrement contracté en 2022 (-14,3 Mds USD vs. -15,3 Mds USD en 2021). En 2023, la tendance à la baisse du déficit commercial se poursuit ; selon les données du DANE, le déficit commercial a atteint ‑7,1 Mds USD entre janvier et août 2023, en baisse par rapport au chiffre enregistré en 2022 (‑9,8 Mds USD). La baisse est toutefois liée à la baisse de la demande en 2023 : une hausse est à prévoir avec le retour de la croissance.

Les Etats-Unis et la Chine sont les principaux partenaires commerciaux de la Colombie en 2022 puisqu’ils représentent à eux deux 40 % du commerce extérieur du pays (resp. 25,5 % et 14,5 %). Les Etats-Unis sont à la fois le 1er fournisseur (17,9 Mds USD en 2022 – soit 25 % des importations) et le 1er client (14,8 Mds USD – soit 26 % des exportations) du pays. La Chine se place en tant que 2ème fournisseur (16,6 Mds USD) et le Brésil en 3ème (5,0 Mds USD). Le Panama voisin quant à lui s’établit en 2ème client du pays andin (5,8 Mds USD exportés). En 2022, la France est, en valeur, le 5ème fournisseur de la Colombie (3,4 % des importations, à 2,4 Mds USD) et le 36ème client (0,04 % des exportations, à 233 M USD), ce qui en fait le 12ème partenaire commercial de la Colombie (2,1 % des échanges).

Le déficit de la balance courante colombienne est en large part financé par d’importantes entrées d’IDE, à 17,0 Mds USD en 2022 (près de 5 % du PIB). Ces entrées sont en augmentation de 82 % sur l’année, et en augmentation de 22 % par rapport au niveau prépandémique (14,0 Mds USD en 2019). Le secteur financier et entrepreneurial capte près d’un tiers des IDE (5,5 Mds USD, 1ère destination) tandis que le secteur pétrolier, 2ème destination, en reçoit 16 % (2,8 Mds USD).

Les réserves internationales brutes de la Colombie s’élèvent à 57,6 Mds USD à la fin septembre 2023 et atteignent 123 % de la métrique ARA. Leur niveau est jugé adéquat par le FMI. Le FMI prévoit une augmentation de ces réserves dans les années à venir et estime qu’elles atteindront 57,8 Mds USD fin 2023 et 60,4 Mds USD fin 2026. La Colombie dispose d’une ligne de crédit modulable auprès du FMI de près de 10 Mds USD.

Politique budgétaire / équilibres financiers internes

Pour mémoire, la Colombie a perdu son investment grade fin 2021, à la suite de la dégradation de sa note par S&P et Fitch. Depuis, la note souveraine de la Colombie reste stable avec des perspectives inchangées pour les trois grandes agences de notation. Moody’s évalue la dette souveraine à Baa2 et S&P et Fitch attribuent une note légèrement supérieure de BB+. La dette publique a baissé en 2022 et a atteint 60,4 % du PIB après avoir atteint 65,7 % en 2020 et 64 % en 2021. Ce ratio devrait baisser progressivement et atteindre 55% en 2023 (estimations du FMI). La dette publique est externe pour plus de la moitié, s’élevant à 31,8 % du PIB.

L’année 2023 a été marquée par une inflation très forte en Colombie (pic à 13,3 % g.a. en février 2023), et a amené la Banque centrale à augmenter son taux directeur à 13,25 % en mai dernier (inchangé depuis), politique monétaire jugée adaptée par le FMI. Cette politique monétaire a entrainé une baisse de l’inflation à 11 % en septembre 2023. Cependant, le FMI pointe une forte adhérence de l’inflation en Colombie, qu’ils lient notamment à l’indexation des salaires et de certains prix. Ainsi, selon les prévisions du FMI, l'inflation devrait terminer à 8,8 % cette année et baisser en 2024 pour terminer l’année à 4,5 %.

Le cours du Peso colombien (COP) est flottant et connaît une dépréciation significative face au Dollar états‑unien depuis plusieurs années : le COP a perdu 19 % en 2022, après une perte de 19 % en 2021, amenant la dépréciation cumulée sur les deux années à 42 %. Début 2021, le taux était de 3 432 COP/USD et est passé à 5 061 COP/USD début novembre 2022 (son pire niveau). Depuis le début de l’année 2023 le COP semble s’apprécier : de 13,5% entre janvier et octobre 2023, le taux s’établit ainsi de 4 114 COP/USD fin octobre 2023. Le régime de change est jugé comme un facteur d’ajustement de l’économie par le FMI.

Perspectives et principaux risques

En 2023, l'économie colombienne montre clairement un ralentissement de l'activité économique. Ce processus a commencé au milieu de l'année 2022 et s'est intensifié tout au long de cette année via la modération de la consommation privée, ainsi que de la forte baisse de l'investissement. Cette réduction de la dynamique économique est principalement liée à la politique monétaire de lutte contre la forte inflation et d’ajustement des déséquilibres macroéconomiques du pays (ex. le déficit de la balance courante est passé de 6,2 % du PIB en 2022 à 3,6 % au S1 2023). La politique semble porter ses fruits : l’inflation a baissé depuis avril et devrait continuer à ralentir pour atteindre la cible de la Banque centrale (3 % ± 1pt) courant 2025. Le cycle de reprise de l'économie se consolidera à partir de 2024. Cependant, il se produira progressivement et lentement.

En outre, l'économie fait face à des défis structurels en matière de déficit extérieur. Ainsi, si la balance courante s’est modérée en 2023 du fait de la baisse de la croissance, affectant les importations, la reprise de la demande stimulera les importations, tandis que la faible demande mondiale entraînera une stabilité des exportations, aggravant le déficit commercial et courant.

La stratégie de transition énergétique et de diversification des exportations manque, selon les analystes, de clarté et a contribué à l’instabilité du taux de change et du spread depuis l’élection de G. Petro. Floue jusqu’à février 2023, le Gouvernement a clarifié sa position, et l’exploration pétrolière devrait se maintenir. Toutefois, la stratégie énergétique continue de représenter un des principaux facteurs de risque. La balance des paiements et la génération de valeur du pays restent toutes deux très dépendantes du secteur pétrolier, du charbon et des mines : une transition brusque aurait un impact sans précédent sur les exportations (dans un cadre où la Colombie enregistre un déficit commercial malgré ses exportations de pétrole) et sur les IDE qui financent le déficit de la balance courante.

Les politiques publiques prévues par le nouveau Gouvernement constituent à la fois une potentielle opportunité conséquente vers une Colombie plus sociale et inclusive, mais également le principal risque pesant sur la soutenabilité du pays. Les potentiels coûts budgétaires des réformes sociales (santé, pensions, travail) pourraient ne pas être suffisamment contrebalancés par les recettes fiscales générées par la réforme. Par ailleurs, les impacts de ces réformes pourraient limiter l’attractivité du pays sur les entreprises étrangères. Cependant, la perte de la majorité au Congrès à la suite du remaniement ministériel d’avril dernier compliquera le passage de ces réformes, qui devront être significativement modérées, voire abandonnées, pour passer le filtre législatif.

Publié le