CAMEROUN
Indicateurs et conjoncture
Structure de l'économie
L’économie camerounaise reste la plus importante et la plus diversifiée de la région, représentant près de 43 % du PIB de la CEMAC en 2024 selon le FMI. Le secteur primaire a contribué à hauteur de 19 % du PIB en 2023, essentiellement porté par l’agriculture (13 % du PIB), avec des filières clés telles que le cacao, le coton, la banane, l’huile de palme et le caoutchouc. La filière cacao connaît une dynamique positive, soutenue par une offre mondiale contrainte, notamment au Ghana et en Côte d’Ivoire, ce qui a hissé le Cameroun au 4ème rang mondial des exportateurs en 2024 avec 7,6 % des parts de marché. Cette conjoncture favorable a permis de presque doubler les prix, atteignant plus de 4 000 FCFA/kg fin 2024 contre 2 300 FCFA un an plus tôt. À l’inverse, la filière café décline, fragilisée par l’insécurité dans les bassins de productions situés dans les régions anglophones, tandis que le secteur bois, très dépendant de la demande chinoise, connait un ralentissement en raison du relèvement des droits de sortie sur le bois brut.
Le secteur secondaire représente près de 27 % du PIB. Les hydrocarbures, bien que toujours stratégiques, voient leur part dans le PIB décliner, passant de 6,7 % en 2015 à environ 4 % en 2023. La production pétrolière, qui s’élevait à près de 180 000 barils/jour en 1985, s’est réduite à environ 65 000 barils/jour en 2023. L’incendie de la SONARA survenu en 2019 a mis un coup d’arrêt au projet d’augmentation de capacités de la raffinerie nationale, obligeant le Cameroun à s’approvisionner en carburants importés. En revanche, le secteur gazier connaît une forte croissance, stimulé par la mise en service en 2015 par Perenco d’une unité de liquéfaction : la production annuelle de gaz naturel liquéfié (GNL) est passée de 9,7 à 80,4 Mds de pieds cubes entre 2015 et 2023. L’industrie manufacturière reste concentrée sur des segments traditionnels (boissons, sucre, huile, ciment, bois, cacao, café) et souffre d’un manque de compétitivité lié aux coûts de production élevés et à un accès insuffisant à l’électricité. Des améliorations sont attendues grâce aux projets hydroélectriques en cours, notamment les barrages de Memve’ele, Lom Pangar et Nachtigal. A l’instar des années précédentes, le secteur du BTP a connu une croissance soutenue, principalement grâce à la demande privée, alors que la demande publique, qui avait soutenu la croissance les années précédentes, décroit.
Le secteur des services (54 % du PIB) est dominé par les télécommunications, les transports, le commerce, l’hôtellerie et la restauration et les services financiers. La solidité du système bancaire demeure relative, avec un taux de créances brutes en souffrance qui reste élevé à 13 % à fin 2023. Le ratio de solvabilité a nettement progressé pour atteindre 15,3 % en 2023. Des injections de capital récentes dans deux banques sous-capitalisées (UBC et CBC) ont substantiellement renforcé la capitalisation du secteur.
Malgré des avancées modestes dans les exportations de produits transformés, notamment dans la filière cacao, les exportations restent largement dépendantes des matières premières. Environ 85 % des exportations du pays sont constituées de produits peu ou pas transformés — pétrole brut, cacao, bois, gaz naturel liquéfié, coton, aluminium — ce qui contribue à un déficit commercial structurel. Sur le plan des échanges, la Chine demeure le principal fournisseur du Cameroun en 2023 avec 19 % de parts de marché, devant l’Inde (11,6 %) et la France (7,6 %).
Conjoncture économique
La croissance économique du Cameroun a progressé de 3,5 % en 2024 contre 3,2 % en 2023. Cette croissance a été portée par le dynamisme des activités non-pétrolières grâce à l'essor des services, de l'agriculture, de l'élevage et du secteur manufacturier. Parallèlement, les activités pétrolières ont affiché une baisse d’environ 9,2 % du PIB. Pour 2025, la croissance est projetée à 3,8 %, en en-dessous de l’ambition affichée dans la Stratégie Nationale de Développement (croissance moyenne de 8 % sur la décennie 2020–2030).
Les pressions inflationnistes s’estompent progressivement. D’après les dernières estimations du FMI, la politique monétaire stricte, la consolidation budgétaire, l'appréciation du taux de change et la baisse de l’inflation des prix alimentaires ont permis d'atténuer les pressions inflationnistes. Ainsi, le taux d'inflation a été réduit à 4,5 % en 2024, en baisse par rapport au taux 7,4 % observé en 2023. Pour l’année 2025, les services du FMI anticipent un niveau d’inflation à 4,3 %.
En 2024, le déficit budgétaire (dons inclus) a atteint -1,5 % du PIB, dépassant largement la cible de -0,4 % fixée dans le budget 2024, tandis que le déficit primaire non pétrolier est passé de 2,5 % du PIB en 2023 à 2,4 % en 2024. Sur la période 2021-2024, le déficit primaire hors pétrole a enregistré une réduction cumulée de 1,8 point de PIB, soit un ajustement légèrement inférieur à l’objectif initial de 1,9 point. Cette performance s’explique par un gain de 1,0 point sur les recettes non pétrolières et une maîtrise des dépenses, celles-ci ayant été inférieures de 0,2 point au niveau prévu, alors qu’une légère hausse de 0,1 point était anticipée. La mobilisation des recettes non pétrolières a progressé à un rythme plus lent que prévu, en raison notamment du manque d’avancées sur les réformes fiscales structurelles, telles que la révision de la loi de 2013 sur les incitations à l’investissement et la rationalisation des exonérations de TVA.
Le budget 2025 prévoit une diminution quasi-totale des subventions aux hydrocarbures à la pompe (-94 %), dont le montant chute à 15 Mds FCFA après 263 Mds FCFA en 2024 et 640 Mds FCFA en 2023. Cette prévision repose sur l’hypothèse d’une baisse suffisante des prix du baril de Brent sur le marché international, permettant d’éviter toute nouvelle hausse des prix des carburants à la pompe après celles opérées en 2023 et 2024.
Selon les données de la Caisse Autonome d’Amortissement (CAA), à fin 2024, l'encours de la dette publique s’est élevé à 14 237 Mds FCFA, soit 45,6 % du PIB, en augmentation de 7,8 % en glissement annuel. Une dynamique qui s’explique en grande partie par l’incorporation du stock résiduel des arriérés de dette flottante, estimé à 672 Mds FCFA (soit 1,3 % du PIB), correspondant aux engagements de l’Etat — engagements pour lesquels des prestations ont été rendues par un partenaire public ou privé, mais n’ayant pas fait l’objet du programmation budgétaire — non réglés sur la période 2000-2019. Bien que la trajectoire d’endettement reste conforme à la Stratégie d’Endettement à Moyen Terme (SEMT 2024-2026) — qui vise à contenir le ratio dette/PIB en dessous du seuil communautaire de 70 % du PIB avec une cible de 50 % à l’horizon 2026 — les analyses de la viabilité mettent en évidence un risque élevé de surendettement à long terme.
La dette extérieure, représentant 66,4 % du portefeuille de la dette, s’est établie à 8 757 Mds FCFA (soit 28,1 % du PIB) à fin 2024, en hausse de 9,4 % en glissement annuel et illustrant le recours accru aux financements extérieurs. Elle reste dominée par la dette multilatérale (49,4 %), contractée auprès d’institutions comme la Banque mondiale, le FMI ou la BAD, offrant des conditions financières avantageuses. La dette bilatérale, représentant 34,9 % de l’encours extérieur, enregistre un léger recul de 1 % en glissement annuel à 3 055 Mds FCFA. Elle est détenue à 70 % par des pays non-membres du Club de Paris, notamment la Chine qui détient 67,1 % de la dette bilatérale. La France reste le deuxième créancier bilatéral avec 24,2 % de l’encours. Enfin, la dette commerciale, issue d’instruments de marché tels que les Eurobonds et les financements de banques privées, représente 15,7 % du total de la dette extérieure.
En 2024, le service de la dette s’est élevé à 1 378,1 Mds FCFA, dont 68,4 % consacrés à la dette extérieure et 31,6 % à la dette intérieure. Selon la LFI 2025, ce poste absorberait près de 37 % des recettes budgétaires, dons compris, pour un montant total de 2 065,5 Mds FCFA, soit 6,1 % du PIB, en hausse de plus de 50 % par rapport à 2024.
Relations avec la communauté financière internationale
Après l’expiration de son précédent programme en 2020, le Cameroun a conclu en juillet 2021 un nouvel accord triennal avec le FMI dans le cadre des dispositifs de Facilité Elargie de Crédit (FEC) et de Mécanisme Elargi de Crédit (MEDC), pour un montant de 689,5 M USD sur 2021-2024, axé sur l’élargissement de la base fiscale, la réforme des entreprises publiques, la maîtrise de la dette et l’amélioration du climat des affaires.
Les autorités ont convenu d’une prorogation du programme jusqu’en juillet 2025, avec un financement additionnel de 145 M USD. Par ailleurs, le FMI a approuvé en janvier 2024 l’accès du Cameroun à la Facilité pour la résilience et la durabilité (FRD), pour un montant de 185 M USD sur 18 mois, en complément de l’accord en cours. Malgré un calendrier perturbé, les autorités sont parvenues, en juillet 2025, à la validation des dernières revues des programme, notamment la 8ème revue des programme FEC\MEDC et de la 3ème revue pour le programme FRD. La validation de ces revues a permis un total de décaissements de 593,4 M DTS (soit 793,8 M USD) pour les programmes FEC/MEDC, et de 120,75 M DTS (soit 162,3 M USD) pour le programme FRD. Nonobstant une relative préservation de la stabilité macroéconomique et l’appui technique soutenu du FMI, la mise en œuvre du programme au Cameroun a révélé des fragilités.
Des chantiers majeurs tels que la restructuration de la SONARA ou la rationalisation des dettes croisées des entreprises publiques restent inachevés, limitant l’impact transformateur du programme et son appropriation nationale.
Outre le FMI, le Cameroun bénéficie de l’appui de nombreux partenaires techniques et financiers (Banque mondiale, Banque africaine de développement, Union européenne, France, etc.) dans de nombreux domaines : infrastructures (transport, énergie, télécommunications, eau et assainissement, etc.), secteurs sociaux (éducation, santé, etc.), développement du secteur rural, gouvernance, etc.