CÔTE D'IVOIRE
Situation économique et financière
Éléments structurels de l'économie ivoirienne
La Côte d'Ivoire s’impose comme la première puissance économique de l’UEMOA, contribuant à 40 % du PIB de l’Union. Le pays contribue à 42% des exportations de la zone et abrite la base industrielle la plus développée. Leader mondial sur les marchés du cacao (39 % de part de marché en 2024) et de l’anacarde (40 % de la production mondiale en 2023), la Côte d’Ivoire s’appuie sur une économie diversifiée : un secteur primaire (14,8% du PIB en 2024) dominé par l’agriculture, un secteur secondaire (23,7 % du PIB en 2024) centré sur l’industrie extractive, l’énergie, l’agroalimentaire et le BTP, et un secteur tertiaire majoritaire (61,6 % du PIB), tiré par les télécommunications, les transports, le commerce et les services financiers.
Depuis 2012, l’économie ivoirienne suit une trajectoire de croissance rapide avec des signes de transformation structurelle, notamment par la montée en puissance de la transformation locale et la diversification des exportations. Le PND 2021-2025 visait à accélérer cette mutation, en ciblant une croissance annuelle moyenne supérieur à 7 % et l’accès au rang de pays à revenu intermédiaire supérieure d’ici 2030 ; en pratique, la croissance moyenne annuelle s’est établie à un niveau proche, de 6,5 %. Le plan prévoyait un volume d’investissement d’environ 59 Mds EUR, porté au ¾ par le secteur privé. À fin 2024, 45,5 Mds EUR avaient été engagés, soit un taux de réalisation de 77,1 %. Un nouveau PND (2026-2030) est en cours de préparation.
En dépit de ces bonnes performances économiques, le pays reste marqué par des disparités socio-économiques et géographiques. Il compte 32 M d'habitants en 2024, dont environ 22 % d’étrangers, majoritairement originaires de pays de la CEDEAO. L’espérance de vie s’élève à 62 ans (contre 63 ans en Afrique subsaharienne), et le pays se classe 159e sur 193 à l’IDH 2023 (0,582/1), avec un taux de pauvreté de 37,5 % en 2021. Des inégalités subsistent entre Abidjan — qui regroupe 22 % de la population et concentre 80 % de l’activité économique — et le reste du pays. L’économie demeure largement informelle, représentant plus de la moitié du PIB et plus de 90 % des emplois.
Conjoncture économique
La croissance économique demeure soutenue, s’établissant à 6 % en 2024 après 6,5 % en 2023, soit près de deux points au-dessus de la moyenne de l’Afrique subsaharienne. Selon les projections du FMI, le taux de croissance devrait atteindre 7 % d’ici 2029, tiré par l’essor des secteurs pétrolier et gazier (notamment avec la mise en production du champ Baleine en août 2023), des industries extractives, ainsi que du secteur tertiaire, porté par les transports et les communications. L’inflation poursuit sa décrue, passant de 4,4 % en moyenne annuelle en 2023 à 3,5 % en 2024, dans un contexte de modération des prix des produits de base. Elle devrait converger vers la cible de 3 % — seuil de convergence fixé par l’UEMOA — dès 2025, selon les prévisions du FMI.
S’agissant des équilibres externes, le déficit du compte courant s’est nettement réduit, passant de 8,2 % du PIB en 2023 à 4,2 % en 2024. Cette amélioration s’explique principalement par la hausse significative des prix des matières premières — en particulier le cacao (+145 %), le café (+63 %), la noix de cajou (+17,3 %) et l’or (+31 %) — ainsi que par une baisse de la valeur des importations. Cette dynamique devrait se poursuivre, avec un déficit prévu à 3,6 % du PIB en 2025, et une stabilisation autour de 3 % à moyen terme. Cette tendance favorable serait soutenue par le maintien de prix élevés pour le cacao, la diminution des coûts à l’importation, et la mise en production progressive des unités gazières et pétrolières. À moyen terme, les exportations d’hydrocarbures devraient ainsi représenter environ 4,5 % du PIB. Sur cette base, et appuyé par des flux nets de capitaux positifs, notamment une augmentation des IDE, le solde global de la balance des paiements devrait devenir excédentaire dès 2025, contribuant ainsi à la reconstitution progressive des réserves régionales.
Finances publiques et dette
Le déficit budgétaire poursuit sa baisse, atteignant 4 % du PIB en 2024 après 5,2 % en 2023.. Cette consolidation budgétaire repose principalement sur l’augmentation des recettes fiscales, conformément au programme avec le FMI, qui vise une progression de 12,8 % du PIB en 2022 à 15,9 % en 2026. En 2024, les recettes fiscales atteignent 14,4 % du PIB, encore en deçà du seuil de convergence de l’UEMOA fixé à 20 % du PIB.
La Côte d’Ivoire fait partie des rares pays d’Afrique subsaharienne ayant accès aux marchés internationaux. Premier pays d’Afrique subsaharienne à y revenir après le resserrement financier de 2022, avec l’émission d’un double Eurobond de 2,6 Mds USD en janvier 2024 à des conditions financières relativement attractives (taux d’intérêt moyen de 6,61 % au terme de l’opération de couverture de change dollar-euro). En 2025, le pays a par ailleurs continué à diversifier sa base d’investisseurs. En mars 2025, elle réalise une nouvelle opération avec un Eurobond de 1,75 Mds USD à 11 ans, au taux de 6,45 %, et une émission inédite en FCFA — une première pour un pays africain — de 220 Mds FCFA (335 M EUR) sur 3 ans, à 6,875 %, bien que le mécanisme prévoie que le service de la dette sera réglé en euros. Cette opération a permis le reprofilage de deux Eurobonds arrivant à échéance en 2028 et 2032, dans une logique de gestion active de sa dette visant à lisser le service de la dette et à réduire le risque de refinancement. En juillet, la Côte d’Ivoire a également réalisé une émission obligataire inaugurale sur le marché japonais ("Samouraï bond"). Cette émission, labellisée ESG et bénéficiant d’une garantie par Japan Bank for International Cooperation (JBIC), a permis de lever un montant de 50 Mds JPY (environ 300 M EUR) sur une maturité de 10 ans et assortie d’un coupon de 2,3 %.
La dette publique a fortement augmenté ces dernières années, passant de 37,2% du PIB en 2019 à 59,3% du PIB en 2024, soit une augmentation de plus de 20 points de PIB en 5 ans. Du fait de la consolidation budgétaire, la dette publique totale devrait entamer une tendance baissière dès 2025 pour se situer à 58,1 % du PIB, puis converger vers 53 % du PIB en 2028, selon les prévisions du FMI. Les notations souveraines se sont récemment améliorées ; en 2024, Moody’s a relevé la note du pays à « Ba2 » en mars, suivi par S&P à « BB » en octobre. En juin 2025, Fitch a maintenu la note à « BB- ». Les perspectives sont jugées « stables » par les trois agences. Le FMI juge le risque de surendettement, global et externe, de la Côte d’Ivoire modéré, cependant, les marges budgétaires limitées rendent la dette vulnérable aux chocs externes.