Le secteur du numérique au Congo-Brazzaville

Le secteur des Nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC) au Congo-Brazzaville a connu une importance avancée. D’importants investissements ont été réalisés par l’État durant les deux dernières décennies pour doter le secteur d’infrastructures. Le cadre juridique a par ailleurs été renforcé pour réguler ce secteur très compétitif. La téléphonie mobile au Congo affiche un bon taux de pénétration (103% de la population en octobre 2023 pour un total de 5,8 millions d’abonnés) tandis que le marché de l’internet mobile affiche un taux de pénétration plus bas (59,7% en 2023) mais génère des revenus importants (56,8 Mds FCFA en 2023 dont plus de 40 Mds générés par la 4G). Le marché des services est très dynamique avec notamment les transactions Mobile Money qui ont atteint plus de 238 Mds FCFA de transactions en janvier 2024. La couverture du pays à l’internet mobile s’accroit et doit se poursuivre pour réduire la fracture numérique. De même, la digitalisation des services publics doit être accélérée pour développer davantage le secteur. Cela nécessite de renforcer les compétences numériques au sein de la population.

Plusieurs infrastructures construites pour développer le secteur des télécommunications

Le Congo a lancé plusieurs projets nationaux et régionaux d’infrastructures de fibre optique afin d’améliorer l’accès à internet sur l’ensemble du territoire national grâce aux infrastructures de proximité, et positionner le Congo en tant que plateforme tournante du trafic internet à haut débit dans la sous-région.

  • Le réseau national de fibre optique :

Le Projet de couverture nationale (PCN) est un projet de modernisation du réseau national de télécommunications financé par le Congo. Il a permis de déployer environ 3 000 km de fibre optique reliant Pointe-Noire, Dolisie, Brazzaville, Oyo et Ouesso et plusieurs boucles optiques métropolitaines ont été construites à Brazzaville, Pointe-Noire, et Oyo pour un total de 700 km. Le réseau PCN est exploité et commercialisé par Congo Telecom.

Le Congo dispose d’un réseau secondaire de fibre optique de 1 100 km construit sur les infrastructures aériennes de la société Énergie Électrique du Congo (E2C). La capacité inutilisée de ce réseau d’E2C a été concédée en septembre 2020 au Groupe YAO CORP à travers sa filiale dédiée Silicone Connect, pour son exploitation et sa commercialisation pour une durée de 10 ans. Une autre partie des capacités est utilisée par Congo Télécom. Les deux opérateurs exploitent ce réseau.

 

  • Le réseau transfrontalier de fibre optique :

Le Congo est interconnecté à la République démocratique du Congo (RDC), via un câble sous-fluvial de Congo Telecom reliant Brazzaville à Kinshasa depuis 2017. D’autres opérateurs privés, Airtel et Silicone Connect, ont également des câbles sous fluviaux reliés à Kinshasa.

Dans le cadre du projet régional Central African Backbone (CAB), dont la première phase a été financée par la Banque mondiale (BM), le Congo est interconnecté au Gabon depuis 2018. Cette infrastructure est exploitée et commercialisée depuis 2019 par Mambs Services, une entreprise congolaise, dans le cadre d’une délégation de service public de sept ans. Le Congo est également connecté au Cameroun depuis 2022, et le sera dans un futur proche avec la République centrafricaine, dans le cadre de la phase 2 du projet CAB financée par la Banque africaine de développement (BAfD).

 

  • Le réseau international de fibre optique :

Le Congo est connecté au premier câble sous-marin du pays dénommé West Africa Cable System (WACS), avec une station d’atterrage située à Matombi dans le département du Kouilou. Sa gestion technique et commerciale est assurée par l’opérateur public Congo Telecom. Cette station est la principale sortie du trafic international (voix et données). Le WACS est un câble sous-marin à fibre optique tiré depuis l’Afrique du Sud jusqu’au Royaume-Uni et longeant les côtes congolaises, et qui permet au Congo de pouvoir bénéficier d’une entrée numérique internationale depuis mai 2012.

Par ailleurs, depuis août 2023, le Congo est connecté au câble sous-marin 2 Africa, initié par le géant des réseaux sociaux Meta. Il s’agit du deuxième câble sous-marin auquel le pays a accès et qui permet de décharger le câble WACS.  Les travaux de construction, de maintenance et d’exploitation du nouveau réseau national issu de la connexion du Congo au câble 2 Africa ont démarré en septembre 2023. Ils ont été confiés à Congo Câbles, une entreprise de droit congolais.

 

Un maillage du marché par plusieurs opérateurs

Le marché de la téléphonie fixe au Congo est géré exclusivement par l’opérateur public Congo Telecom.  Ce marché est quasiment inexistant. Il compte moins d’une centaine de lignes téléphoniques. La téléphonie fixe s’appuie sur les systèmes mobiles.

Le marché très compétitif de la téléphonie mobile compte actuellement deux opérateurs, MTN Congo (capitaux sudafricains) et Airtel Congo (capitaux indiens). Le taux de pénétration de la téléphonie mobile au Congo est de 103% de la population à octobre 2023 pour un total de 5,8 millions d’abonnés. Sur ce marché qui totalise un revenu global de 11,7 Mds FCFA à octobre 2023, MTN est leader avec une part de marché (en valeur) de 74,5% contre 25,5% pour AIRTEL. En termes d’abonnés, MTN et Airtel comptent respectivement 3,5 millions et 2,3 millions d’abonnés en octobre 2023.

Les deux opérateurs MTN et Airtel se partagent par ailleurs le marché de l’Internet mobile. Ils ont totalisé plus de 3,4 millions d’abonnés en 2023 et ont généré un revenu total de 56,823 Mds FCFA, dont plus de 40 Mds proviennent du trafic issu de la technologie 4G et 16 Mds de la technologie 3G. Sur une population totale estimée par le régulateur à 5,752 millions d’habitants en 2023, le marché de l’internet affiche un taux de pénétration de 59,7% en 2023 (contre 55,7% en 2022 et 41,4% en 2019). MTN est leader sur ce marché avec une part de marché en 2023 de 67,2% contre 32,8% pour Airtel.

Les deux opérateurs ont obtenu des licences pour la technologie 5G. Un lancement imminent est prévu à Brazzaville pour des services.

Cinq principaux opérateurs sont présents sur le marché de l’internet fixe : Congo Télécom, le Groupe Vivendi Africa (GVA) avec sa marque Canal Box, MTN, Airtel et SOFIA encore peu connu, qui couvre une partie du marché de l’internet fixe aux entreprises à Pointe-Noire. D’autres opérateurs tels que Alink Telecom, PI Service/Sky TIC et AMC Telecom, seraient également présents sur ce marché.

En ce qui concerne les services, le marché du Mobile Money est également dynamique. La valeur totale des transactions Mobile Money a atteint plus de 238,236 Mds FCFA en janvier 2024 pour un total de plus de 79 millions de transactions.

 

Une gouvernance et un cadre juridique renforcés

Le secteur des télécommunications est régi par la loi n° 9-2009 du 25/11/2009 portant réglementation du secteur des communications électroniques, qui s’aligne sur les normes internationales afin d’assurer aux opérateurs un environnement propice. La gouvernance de ce secteur est pilotée par le Ministère des Postes, des télécommunications et de l’économie numérique qui s’appuie sur les structures placées sous sa tutelle, à savoir le régulateur, l’Agence de régulation des postes et des communications électroniques (ARPCE), l’Agence de développement de l’économie numérique (ADEN) qui met en œuvre la politique du secteur, et la Direction générale des postes et télécommunications (DGPT) en charge de la réglementation du secteur.

Par ailleurs, une Commission nationale des données à caractère personnel, qui a fait l’objet d’un projet de loi approuvé en Conseil des ministres début juillet 2024, devrait être créée. Elle aura pour missions de veiller à la mise en œuvre du traitement des données à caractère personnel et d’informer de leurs droits et obligations les personnes concernées et les responsables du traitement.

Plusieurs lois viennent renforcer le cadre réglementaire du secteur. Il s’agit notamment de la loi n°30 du 11/10/2023 relative à l’ouverture du canal USSD aux services à valeur ajoutée et leur interopérabilité au Congo, de la loi n°71 du 16/08/2022 portant attribution du label start-up du numérique et de l’innovation technologique, ainsi que des lois sur la cybersécurité et contre la cybercriminalité en vigueur depuis juin 2020. La loi sur la cybersécurité régit le cadre juridique national de sécurité des systèmes d’information et des réseaux de communications électroniques et celle sur la cybercriminalité définit les infractions et la procédure judiciaire en la matière, en complément des dispositions du code pénal. D’autres lois de 2019 renforcent l’arsenal législatif du secteur, notamment la loi n°29 du 10/10/2019 sur la protection des données à caractère personnel et la loi n°37 du 12/12/2019 relative aux transactions électroniques.

 

La couverture du pays à l’internet mobile s’accroit et doit se poursuivre

Selon le Système mondial de communications mobiles (GSMA), le Congo est placé parmi les pays qui ont la plus faible connectivité à l’internet mobile à haut débit avec un score de 34,4 points en 2023 (sur une échelle de 100 qui représente la note la plus élevée). Le Congo a toutefois progressé positivement si l’on se réfère à son score il y a dix ans (24,2 points en 2014) et atteint la moyenne de la zone CEMAC. Parallèlement à la progression de la connectivité, le prix du haut débit a considérablement baissé ces dernières années mais cette technologie est encore peu accessible pour une grande partie de la population.

 

Le FASUCE : un instrument d’exécution de la politique d’accès et de service universels

Afin de réduire la fracture numérique et permettre à tous les Congolais d’accéder à un minimum de services de communications électroniques à des tarifs abordables, l’État a créé le Fonds pour l’Accès et le Service Universels des Communications Électroniques (FASUCE). Instauré par la loi n°9 du 25/11/2009 et ses décrets d’application de 2019, ce fonds est opérationnel depuis 2020. Il a déjà permis l’incorporation au réseau téléphonique mobile de plus de 33 000 citoyens en couvrant plus de 173 localités et l’installation de 183 sites de réseau mobile.

 

La digitalisation des services publics doit être accélérée pour développer l’industrie du numérique

Le développement des services publics numériques au Congo est timide, avec seulement quelques services numérisés en lien avec les fonctions gouvernementales de base. Les efforts de numérisation du secteur public se sont principalement concentrés sur les principaux systèmes administratifs du gouvernement et les portails d’information en ligne du gouvernement.

Différents chantiers d’informatisation ont néanmoins progressé ces dernières années, mettant à profit les NTIC pour améliorer la gouvernance des finances publiques. Plusieurs réformes ont été lancées dans les régies financières du ministère de l’Économie et des Finances afin de mieux collecter et sécuriser les recettes publiques. Il s’agit en particulier du Système intégré de gestion des finances publiques (SIGFIP), du Système de gestion des impôts et taxes (E-TAX) réalisé en interne par les équipes de la direction des systèmes d’information du ministère, et du Système douanier informatisé (E-DOUANES). Une poignée de services publics ont été créés pour permettre d’effectuer des formalités administratives en ligne, avec toutefois une disponibilité limitée de l’information. Des plateformes numériques transactionnelles ont par ailleurs été créées, en lien avec les opérateurs de téléphonie mobile, pour permettre le paiement dématérialisé des factures de télécommunications (internet fixe et télévision), d’électricité et tout récemment des taxes de transport terrestre.

Le Projet d’accélération de la transformation numérique (PATN) offre un levier de digitalisation des services publics

Pour relever le défi de la digitalisation des services publics, les autorités congolaises ont lancé en 2023 le Projet d’accélération de la transformation numérique (PATN) avec l’appui de la Banque mondiale qui finance ce projet à hauteur de 100 M USD. Le PATN vise globalement à accroître l’accès à Internet à haut débit pour les populations mal desservies et à améliorer la capacité de l’administration congolaise à fournir des services publics numériques.

 

Les compétences numériques doivent être renforcées pour favoriser la création de contenus et faciliter l’adoption des services digitalisés

Dans un contexte ou le système d’éducation ne dote pas encore les jeunes de compétences techniques adéquates pour répondre à la demande du secteur privé local, il existe une opportunité encore peu exploitée de former les jeunes, et notamment les jeunes chômeurs sur des compétences numériques avancées qui répondent aux besoins actuels.

 

ANNEXE

 

Le marché de la téléphonie mobile à octobre 2023

 

Le marché de la téléphonie mobile à octobre 2023

 

 

Le marché de l’Internet mobile en 2023

Le marché de l’Internet mobile en 2023

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Le marché du Mobile Money

Le marché du Mobile Money

 

Source : ARPCE

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