CANADA
Terre-Neuve-et-Labrador
En bref
Rassemblant 1,3 % de la population et 1,3 % du PIB canadiens en 2023, Terre-Neuve-et-Labrador est une province de l’Est du Canada dont les principales activités économiques, notamment à l’export, relèvent de la mer (pétrole offshore, pêche). La façade maritime constitue ainsi un atout économique important tout comme son sous-sol, riche en minerais.
Dépendante des redevances pétrolières et victime des problèmes financiers de la construction du barrage hydroélectrique de Muskrat Falls, la province connait toutefois une situation financière difficile depuis plusieurs années. Le gouvernement provincial garde comme objectif d’établir des budgets permettant un assainissement des finances publiques avec un retour à l’équilibre budgétaire dès 2024-2025.
Chiffres clés
Présentation générale
Terre-Neuve-et-Labrador (TNL) est une province de l’Est canadien, limitrophe du Québec et du Nunavut, d’une superficie de 405 720 km2. Le détroit de Belle-Isle sépare la province en deux territoires, le Labrador et l’île de Terre-Neuve où est concentrée la majeure partie de l’activité et 92 % de la population. La province comprend un archipel de plus de 7 000 îles.
La population terre-neuvienne s’élève à 540 552 au premier trimestre de 2024. Terre-Neuve-et-Labrador est l’avant-dernière province canadienne par sa population (devant l’Ile-du-Prince-Edouard). La population de Terre-Neuve-et-Labrador était tendanciellement en baisse depuis 2016 (-10 000 habitants entre 2016 et début 2021).Toutefois, la population de la province a augmenté de 2,2 %, entre 2022 et 2024, soit plus de 11 000 habitants en deux ans. La capitale, St John’s, est la ville la plus peuplée de la province (agglomération de 215 000 habitants), suivie de Conception Bay South (26 000), de Mount Pearl (23 000 habitants) et de Paradise (21 000 habitants). Malgré la proximité géographique de la France (Saint-Pierre-et-Miquelon) et du Québec, le français n’est la langue maternelle que de 0,5 % de la population. La population autochtone représente une part importante de la population (4,7 %).
La façade maritime de Terre-Neuve-et-Labrador constitue un atout économique majeur. Cependant, l'économie de la province dépend de moins en moins de la pêche. En effet, bien que la pêche ait connu un fort rebond en 2021 après des années de déclin, ce secteur ne représente plus la principale source de revenus pour la province.
Terre-Neuve-et-Labrador exploite son potentiel fluvial pour produire de l'électricité en grande quantité, notamment grâce au barrage de Churchill Falls. Avec une puissance installée de 5 428,5 MW, Churchill Falls est la deuxième plus grande centrale souterraine au monde, juste après la centrale Robert-Bourassa située au nord du Québec.
Les gisements d'hydrocarbures off-shore représentent également une source de revenus importante pour la province. L'augmentation des prix du pétrole en 2021 a entraîné une hausse significative des revenus issus de ces exploitations. En 2023, les recettes liées à l'exploration pétrolière ont continué de croître, bien que la production globale de pétrole ait légèrement diminué.
En outre, Terre-Neuve-et-Labrador est riche en ressources minérales, comprenant le fer, le cuivre, le zinc, l'argent et l'or. Ces ressources continuent de jouer un rôle crucial dans l'économie provinciale, avec des investissements significatifs dans l'extraction et la production minière
Andrew Furey (parti libéral) est Premier ministre de la province depuis août 2020.
Perspectives économiques
La Province tente de faire face aux défis économiques importants
En 2023, Terre-Neuve-et-Labrador est la seule province du Canada qui n’a pas vu son PIB augmenter. Les baisses enregistrées dans les industries de l'extraction de pétrole et de gaz par des méthodes classiques (-13,3 %) et de l'extraction de minerais métalliques (-11,1 %) ont contribué au recul de 2,5 % de la production économique de la province cette année-là.
Le taux de chômage demeure nettement supérieur à la moyenne nationale : il atteint 9,1% en avril 2024 (contre 5,8% au Canada), en baisse de 0,7 points par rapport à avril 2023. L’indice des prix à la consommation a augmenté de 3,3 % entre 2022 et 2023.
Finances publiques
Un retour à l'équilibre budgétaire prévu à horizon 2025-2026
Un déficit budgtaire est à prévoir pour l’exercice 2024-2025. La province de Terre-Neuve-et-Labrador a connu il y a plusieurs années une crise de ses finances publiques. La pandémie a aggravé cette situation en raison de la baisse drastique du prix du pétrole. Pour éviter une possible faillite de Terre-Neuve-et-Labrador, le gouvernement fédéral est intervenu pour permettre à la province de remplir ses obligations financières. Si le budget 2023-2024 prévoyait un déficit de 160 M CAD, l’exercice s’est achevé avec un déficit de 433 M CAD (1,1% du PIB). Un nouveau déficit de 152 M CAD est prévu pour 2024-2025 et le retour à l’équilibre ne devrait avoir lieu qu’en 2025-2026.
Un budget axé sur la santé, le logement et les aînés. Le budget comprend des investissements records pour la santé ; ils représentent 40% des dépenses, soit 4,1 Md CAD. De cette somme, 30 M CAD seront utilisés pour l’embauche des travailleurs de la santé dans les cliniques (médecins, spécialistes, infirmières), 10 M CAD seront consacrés au recrutement de professionnels de la santé et 2 M CAD permettront d’augmenter le nombre de places à la faculté de médecine. Concernant l’aide aux aînés, 10 M CAD sont prévu pour un nouveau plan de bien-être du troisème âge (Senior Well-Being Plan) et 70 M CAS seront utilisés pour proposer des prestations aux aînés. Côté logement, un programme de 50 M CAD sera dédié à la construction de logements locatifs ; 100 logements seront en particulier construits à Corner Brook.
Un ratio dette nette / PIB qui doit s’améliore. Le ratio de la dette nette au PIB diminuera de 45,1% en 2023-2024 à 44,1% en 2024-2025. Pour l’exercice 2024-2025, la province prévoit d’émettre 2,8 Md CAD d’obligations, après un programme d’emprunts bruts de 2,2 Md CAD en 2023-2024. A la fin de cette exercice financier, la dette de la province s’élevera à 17,8 Md CAD, soit 1,6 Md CAD de plus que le montant prévu dans les projections financières du budget de l’an dernier.
Aspects sectoriels
L’économie de Terre-Neuve-et-Labrador repose essentiellement sur une économie de services (63 % du PIB) mais l’extraction de produits minéraux (pétrole, minerai de fer) demeure très importante (23 % du PIB en 2023).
Services
L’économie de la province s’appuie avant tout sur les services, qui représentent environ 38 % de son PIB en 2023. Le secteur des services immobiliers et le secteur de la santé et des services sociaux sont les secteurs les plus importants d’un point de vue économique. Ils représentent respectivement 11 % et 10 % du PIB en 2023.
Hydrocarbures
L’exploitation des hydrocarbures a permis la restructuration d’une économie auparavant fortement dépendante des recettes provenant de la pêche. La province de Terre-Neuve-et-Labrador est la troisième province productrices de pétrole du Canada (4,4% en 2022) : elle concentre plus de 80 % des ressources pétrolières en mer et produit 24 % du pétrole brut léger classique du pays en 2020 ; le secteur de l’extraction pétrolière représente plus de 20% du PIB en 2023, une proportion plus élevée qu’en Alberta et en Saskatchewan. Dans la province, les redevances pétrolières représentaient 12% des revenus du 2023-2024.
Il y 4 grands projets offshore au large de la province : Hibernia, Terra Nova, White Rose et Hebron.
Tandis que l’exploitation du champ Terra Nova a été interrompue en 2019, un retour en service a eu lieu en novembre 2023. Six nouveaux champs de pétrole ont été découverts au large de Terre-Neuve-et-Labrador ces dernières années, parmi lesquels le site de Bay du Nord. Le projet d’Equinor, qui consiste en l’exploitation de 60 puits d’extraction pétrolière, a obtenu l’autorisation d’exploitation du gouvernement fédéral en avril 2022, malgré les nombreuses controverses autour de ce projet ; les réserves récupérables sont supérieures à 500 millions barils selon Equinor. Equinor a toutefois annoncé le 31 mai 2023 reporter son projet pour une période pouvant aller jusqu’à trois ans afin de vérifier sa rentabilité économique.
Saint John's est la plaque tournante de l'exploration, de la mise en valeur et de la production du pétrole sur la côte Est canadienne.
Mines
Le secteur minier représente l’une des principales et des plus anciennes industries de Terre-Neuve-et-Labrador, employant plus de 8 000 personnes en 2023. Les mines actives produisent du fer, nickel, cuivre, zinc, cobalt, antimoine et de l’or alors que de nombreuses carrières exploitent des produits non-métalliques. L’extraction minière, l’exploitation en carrière et l’extraction de étrole et de gaz atteint 6,5 Md CAD en 2023, en baisse de 11,9% par rapport à 2022, principalement en raison de la baisse du prix du minerai de fer et d’un production moins importante de nickel. Les exportations de minerais ont diminué en 2023 pour atteindre environ 4 Md CAD (2,7 Md EUR) contre 4,5 Md CAD (3 Md€) en 2022.
Parmi les principaux projets en cours, on peut mentionner l’extension du projet de mine souterraine de nickel de Voisey’s Bay (Vale), dont la construction a débuté en 2018 pour une entrée en production initialement prévue en 2023. En février 2023, 81 % des travaux étaient achevés.
La production de minerai de fer devrait augmenter avec la croissance de la production à la mine Scully dans l'ouest du Labrador. Les activités de construction associées aux deux principaux projets de mines d'or du centre de Terre-Neuve devraient commencer en 2023 : le Projet Valentine Gold (de Marathon Gold) et la mine d'or Hammerdown (de Maritime Resources Corp.). L'exploration aurifère et les investissements devraient rester importants dans l'année à venir. Les dépenses pour l’exploration minière (surtout l’or) ont encore augmenté en 2022 pour atteindre 243 M CAD (177 M EUR) (contre 66,8 M CAD en 2020). Outre l’or à Terre-Neuve, les terres rares disponibles dans le sous-sol du Labrador commencent à attirer de nouveaux investissements. Dans son budget 2023-2024, le gouvernement de la province a renouvelé le financement du programme financier d’assitance à l’exploration minière (1,7 M CAD (1,2 M EUR)) pour encourager et accompagner les entreprises dans leurs activités d’exploration géoscientifique.
Energie électrique
L’un des grands projets en développement concerne la centrale hydroélectrique Lower Churchill, considéré comme le principal potentiel hydroélectrique en Amérique du Nord (plus de 3 000 MW). Ce projet est développé en deux phases : Muskrat Falls (824 MW), autorisé en 2012 par le gouvernement de TNL, dont la mise en service a eu lieu mi-2023 après des retards dus à la pandémie, à des soucis techniques et à de nombreux surcoûts (de 7,4 à 13,5 Md CAD (9,22 Md EUR)), puis Gull Island (2 250 MW). Plus de 1 600 kms de lignes de transmission devraient également être construites. 40 % de l’énergie produite est utilisée à TNL, 20 % sera vendue à la Nouvelle-Ecosse. Les 40 % restants pourraient être exportés vers le Nouveau-Brunswick, l’Ile-du-Prince-Edouard et la Nouvelle-Angleterre (Etats-Unis d’Amérique) ou utilisés pour répondre à l’augmentation de la demande locale en électricité.
Ce mégaprojet hydroélectrique, en grande partie responsable de l’explosion de la dette provinciale, était géré par la société d’état Nalcor, établie par le gouvernement provincial en 2007 pour développer de nouveaux projets énergétiques. Le gouvernement de TNL a indiqué en juin 2021 que Nalcor sera intégrée à Hydro Terre-Neuve-et-Labrador, principal fournisseur d’électricité de la province pour économiser des fonds publics. Le gouvernement fédéral a annoncé le 28 juillet 2021 une contribution fédérale de 5,2 Md CAD (3,8 Md EUR) pour aider Terre-Neuve-et-Labrador à couvrir les coûts de ce projet hydroélectrique et ainsi éviter une hausse des tarifs d’électricité. En sus, depuis l’achèvement du barrage de Muskrat Falls, l’infrastructure n’a eu de cesse d’être confrontée a des problèmes de fonctionnement (remplacement nécessaire d’une unité de production sur 4 et une production en conséquence inférieure à la capacité de la centrale, panne régulières des lignes de transmission - la ligne de transmission avec la Nouvelle-Ecosse a ainsi été coupée pendant plusieurs semaines en avril 2024 etc.).
Suite à la signature en août 2022 à Terre-Neuve-et Labrador d’une déclaration d’intention conjointe concernant la création d’une alliance entre le Canada et l’Allemagne pour l’hydrogène, la province souhaite développer des projets éoliens pour produire de l’hydrogène vert. L’objectif est de produire de l’hydrogène à Stephenville. L’Allemagne devrait se charger de construire un corridor maritime pour la transporter de l'autre côté de l'Atlantique. Le gouvernement de TNL a levé le moratoire sur le développement de l’éolien dans le Province et a lancé en décembre 2022 un appel d’offres pour les projets éoliens. Il a également publié en février 2023 un nouveau cadre fiscal qui fixe précisément les frais et impôts applicables pour ces projets éolien-hydrogène. La société World Energy GH2, filiale de World Energy, fondée en 2022, s’est ainsi vu octroyée les autorisations pour son projet « Nujio'qonik » (nom autochtone de la baie St. George, à l’ouest de Terre-Neuve) qui pourrait être un des premiers producteurs à l’échelle commerciale d'hydrogène/ammoniac vert du Canada. Le projet prévoit l’installation de 3GW (164 éoliennes), de 1,5 GW d’électrolyseurs, fournis par Siemens et Thyssenkrup afin de produire environ 250 000 tonnes métriques par an d’hydrogène et 1,1 tonne métrique par an d’ammoniac.
Agriculture et pêche
L’activité agricole de la province est assez modeste en raison notamment des défis liés à sa géographie et à son climat. La production est dominée par les produits laitiers (49 M CAD), les œufs (21 M CAD) et la floriculture (9 M CAD). Particularité économique de la province en matière agricole, Terre-Neuve et Labrador est la province qui a affiché le taux de ventes directes le plus élevé parmi les provinces du Canada, avec près de la moitié des exploitations agricoles qui y ont recourt. La province connaît également un secteur halieutique fort, avec une production de 1,4 Mds CAD en 2022 (pêche et aquaculture), représentant plus du quart des pêches de poissons de fond du Canada (115 M CAD dont 53 de flétan et 24 de morue) et plus du quart des pêches de mollusques et fruits de mer. La province pêche plus de la moitié des crabes des neiges du Canada (plus de 756 M CAD) et se classe deuxième, après la Nouvelle-Ecosse, pour l’ensemble des pêches du Canada. Le secteur de la pêche emploie 17 000 personnes dans la province et les produits de la pêche issus de la province ont été exportés en 2022 vers plus de 40 pays pour une valeur de 1,4 Mds CAD (en baisse néanmoins de 14% par rapport à 2021). Les Etats-Unis sont le principal partenaire à l’export de la province pour les produits de la mer et représentent 64% de la valeur totale exportée par la province (vient ensuite la Chine avec 17%).
Recherche et développement, technologies marines, experise arctique
L'abondance des ressources naturelles en organismes aquatiques cultivés et sauvages et des connaissances spécialisées de longue date dans les eaux océaniques ont favorisé les activités de recherche et développement de premier plan sur la vie marine. Par la mise en place du Fonds d’Innovation de l’Atlantique (FIA), l’agence de promotion économique du Canada atlantique (APECA) a largement accru les capacités de la province pour mener des travaux de recherche et développement de pointe en favorisant une économie axée sur le savoir et l’émergence de marchés nouveaux. Le Centre de recherche en génie océanique, côtier et fluvial, du Canada se situe à St-John’s et est un chef de file dans la création et l’évaluation de technologies pour les conditions marines difficiles grâce aux laboratoires, aux bassins d’études et au programme de recherche Océans. A noter également l’expertise arctique dans de nombreux secteurs d’activité : exploitation pétrolière, gestion des glaciers et icebergs, design d’oléoducs…
Terre-Neuve-et-Labrador est également, avec Halifax en Nouvelle-Ecosse, le siège de la supergrappe fédérale de l’économie océanique, qui vise à favoriser l’innovation, à améliorer les connaissances et la protection de l’océan et de ses ressources. Cette supergrappe, qui regroupe des acteurs privés, publics et académiques, ambitionne de devenir un centre d’innovation de pointe dans les industries du secteur maritime.
Relations économiques bilatérales
Les échanges de biens entre la France et Terre-Neuve-et-Labrador en 2023
Le commerce bilatéral de biens entre la France et Terre-Neuve et Labrador s’est établi à 179 M CAD ( €) en 2023, en baisse de 43% par rapport à 2022. Selon Statistique Canada, ils représentaient moins de 2% des échanges totaux entre la France et le Canada.
Les exportations françaises vers Terre-Neuve et Labrador se sont établies à 7 M CAD (5 M €) en 2023, soit 0,1% des exportations françaises au Canada. En baisse très sensible de 83% par rapport à 2022, les exportations françaises étaient composées essentiellement de machines matériel et pièces industriels (36%), de produits forestiers et matériaux de constructions et d’emballage (25%), ainsi que de matériel et pièces électroniques et électriques (14%). La baisse des exportations s’explique par le quasi arrêt des exportations d’aéronerfs et pièces de transport (35 M CAD en 2022 contre 51 00 CAD en 2023).
Les importations françaises en provenance de Terre-Neuve et Labrador s’élevaient à 172 M CAD ( 116 M€) en 2023, soit 4,5% des importations françaises en provenance du Canada. Elles ont connu une baisse de 43% par rapport à 2022 et étaient essentiellement composées de produits énergétiques (68%), de minerais et minéraux non métalliques (24%) et de produits agricoles et de la pêche (7%).
La France a une balance commerciale déficitaire vis-à-vis de la Province (-166 M CAD).
Les échanges de biens France - Terre-Neuve-et-Labrador en 2023 (source : Statistique Canada)
Une présence française discrète
La présence française dans la province est limitée. On peut citer :
- la ville de St John’s abrite le siège social de la filiale canadienne de Technip : Technip Canada Ltd.
- Air Liquide possède une unité de conditionnement de gaz spéciaux près de St John’s.
- Vallourec produit des connexions premium VAM filetées et offre des services de réparation de puits à des entreprises des secteurs pétrolier et gazier. La capacité de production de l’usine a été doublée en 2015.
- Veolia réalise des missions temporaires de nettoyage industriel au Labrador.
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