CANADA
Le commerce extérieur canadien redevient déficitaire au premier semestre 2023
Le commerce extérieur canadien: une reprise dynamique, quoique freinée par les tensions sur les chaînes d’approvisionnement
NB : cette fiche s’appuie sur les données canadiennes de Statistique Canada.
Le Canada avait renoué avec une position excédentaire en 2021 et en 2022, à la grâce d’une demande d’hydrocarbures dynamique en sortie de pandémie et du fait de la guerre en Ukraine. Las, l’essoufflement de la demande mondiale, notamment américaine, depuis fin 2022 et la normalisation du cours des produits de base depuis le second semestre 2022 ont provoqué une stagnation des exportations au 1er semestre 2023 (380 Md CAD ; -2% par rapport au 1èr semestre 2022). En parallèle, la vigueur inattendue de la demande intérieure, notamment industrielle, a soutenu les importations (385 Md CAD/ +4%), plongeant de nouveau la balance commerciale en déficit (-4,5 Md CAD/3 Md€).
Les exportations stagnent après une année 2022 record en raison du recul du cours des produits de base, en partie compensée par la hausse des ventes dans les autres secteurs
La dynamique positive des exportations canadiennes[1] observée depuis 2021 marque un coup d’arrêt au premier semestre 2023. Les exportations canadiennes se sont légèrement contractées de 2%, après une année 2022 record (779 Md CAD/526 Md€ ; +22% par rapport à 2021 (Annexe I). Les Etats-Unis, premier débouché du Canada (76%), expliquent largement cette évolution : le recul du prix des matières premières depuis le second semestre 2022 a entraîné la baisse du montant des exportations d’hydrocarbures vers le voisin du Sud (70 Md CAD/50 Md€ ; -19% sur un an) ; celles-ci ont toutefois été en partie compensées par l’augmentation des exportations de produits agricoles (7 Md CAD/5 Md€ ; +7%), de produits manufacturiers (191 Md CAD/130 Md€, +6%) et de minerais (8 Md CAD/ 6 Md€ ; +47%). Au total, les exportations canadiennes vers les Etats-Unis s’élèvent à 294 Md CAD (200 Md€), en baisse de 1% sur un an. Une dynamique positive se dessine en faveur de la Chine (+24% entre le S1 2022 et le S1 2023 ; 15,8 Md CAD/10,7 Md€), et l’Inde (+8% ; 2,6 Md CAD/1,8 Md€), contrairement aux autres grands pays de l’Indopacifique comme le Japon (-8% ; 8,6 Md CAD/5,9 Md€), la Corée du Sud (-24% ; 3,7 Md CAD/2,5 Md€), l’Indonésie (-18% ; 1,2 Md CAD/800 M€) et Taïwan (-27% ; 1 Md CAD/700 M€). Si les exportations vers l’UE stagnent, (+1%, 17,5 Md CAD/11,8 Md€), celles vers la Russie s’effondrent (-83% ; 30 M CAD/20 M€), conséquences des sanctions. Le commerce avec l’Arabie Saoudite a rebondi au S1 2023, en lien avec la normalisation des relations diplomatiques en mai 2023 (+114%, 1,2 Md CAD/810 M€). Plus largement, aucun pays hors Etats-Unis ne capte plus de 5% des exportations canadiennes, situation inchangée par rapport à 2022 : l’UE et la Chine, en 2ème et 3ème position, comptent respectivement pour 4,6% et 4,2% des exportations, suivis par le Royaume-Uni (7,2 Md CAD/4,9 Md€) et le Mexique (4,8 Md CAD/3,2 Md€), qui comptent pour 1,9% et 1,3% (Annexe II et Annexe III).
Les exportations augmentent dans tous les secteurs, à l’exception des industries extractives et des produits chimiques. Premier poste d’exportation du Canada (21% du total), les produits énergétiques ont connu la plus forte chute entre le S1 2022 et le S1 2023 (- 26%) en raison de la normalisation du prix des produits de base, revenus à leur niveau d’avant-guerre en Ukraine ; ils s’élèvent à 81 Md CAD (55 Md€). Les autres industries extractives comme les produits forestiers (24,5 Md CAD/16,5 Md€) et les minerais (14,6 Md CAD/10,2 Md€) ont respectivement connu une baisse de 19% et de 8% en glissement annuel au S1 2023. Hors les produits chimiques (-6% ; 21,8 Md CAD/14,8 Md€), tous les autres secteurs ont enregistré une augmentation des montants, notamment l’automobile (+26% ; 50 Md CAD/30 Md€) qui a enfin dépassé son niveau du S1 2019, l’agriculture (+31% ; 31,1 Md CAD/21 Md€), l’industrie des machines et autres pièces industrielles (+18% ; 25,4 Md CAD/17,2 Md€) et l’industrie aérospatiale (+30% ; 14,5 Md CAD/10,2 Md€) qui a aussi dépassé pour la première fois son niveau pré-pandémique (Annexe II ; Fig. 1).
L’Ontario reste le moteur des exportations (36%) du pays tandis que l’Alberta (24%) est affectée par le repli du cours des hydrocarbures. Avec plus d’un tiers des exportations canadiennes (127,2 Md CAD/86 Md€), l’Ontario[2] (40% du PIB et de la population du pays) demeure le centre de gravité des exportations du pays (36%), grâce notamment à son industrie automobile (29,1 Md CAD/19,7 Md€ ; 29,4% des exportations de la province) en hausse de 28% sur la période, aux produits en métal et produits minéraux non métalliques (25 Md CAD/17 Md€ ; 20%) et aux biens de consommation (21,3 Md CAD/14,4 Md€ ; 17%). L’Alberta, deuxième province la plus exportatrice du pays (24% du total au S1 2023) mais qui tire les trois-quarts de ses revenus extérieurs des exportations de produits énergétiques (62,4 Md CAD/42,2 Md€, 77% des exportations d’hydrocarbures du pays), accuse le contre-coup de la chute des cours avec une baisse de 20% en valeur entre le S1 2022 et le S1 2023. Le Québec a exporté pour 55 Md CAD (37 Md€) de marchandises (16% des exportations totales), en légère hausse par rapport au S1 2022 (+2%), à raison de 11,1 Md CAD (7,5 Md€) de produits en métal et produits minéraux non métalliques (-10% par rapport au S1 2022), 8,5 Md CAD (5,7 Md€) de biens de consommation (+15%) et 6,7 Md CAD (4,5 Md€) de produits forestiers (-14%) (Annexe IV Fig.1).
[1] Sauf indication contraire, tous les chiffres cités reposent sur les données de « balance des paiements » et sont désaisonnalisées. Ces données sont celles qui sont les plus communément reprises par les économistes, experts et politiciens canadiens.
[2] Pour ce paragraphe, les données utilisées sont celles en base douanière du Canada, qui peuvent légèrement varier par rapport aux données de balance de paiement de Statistique Canada.
Les importations canadiennes ont continué à croître, tirées notamment par le secteur secondaire
Les importations canadiennes progressent par rapport à l’an dernier, notamment en provenance d’Amérique du Nord et d’Europe. Les importations canadiennes ont augmenté de 6% entre le S1 2022 et le S1 2023, représentant au total 385 Md CAD (260 Md€). Les Etats-Unis, premier fournisseur du Canada (63%), expliquent 60% de la croissance des importations du Canada (+6% ; 241 Md CAD/163 Md€). Les principaux postes à la hausse pour les importations sont les matériels industriels (+19%), l’industrie automobile (+15%) et les machines et pièces industrielles (+26%). Hors Etats-Unis, les dynamiques haussières les plus importantes sur la période concernent l’Union européenne (+13% ; 37,9 Md/25,6 Md€), désormais 2ème fournisseur du Canada (9,8% des importations totales), le Mexique (+20% ; 13,7 Md CAD/9,3 Md€) et le Royaume-Uni (+9% ; 5,9 Md CAD/4 Md€). A contrario, les volumes d’importations ont reculé dans les pays de l’Indopacifique comme la Chine (-11% ; 31,3 Md CAD/21,1 Md€), qui recule au 3ème rang des fournisseurs, la Corée du Sud (-7% ; 5,1 Md CAD/3,4 Md€) et l’Inde (-8% ; 2,8 Md CAD/1,9 Md€). Logiquement, les importations continuent de s’effondrer depuis la Russie du fait des sanctions (-97% ; 9 M€/6 M€) (Annexe V, Fig.1).
Les importations de produits industriels ont progressé, notamment le matériel de transports, tandis qu’elles ont reculé pour les produits du secteur primaire et des industries extractives. Les biens de consommation, à 76,1 Md CAD (51,4 Md€), demeurent le premier poste d’importation de l’économie canadienne (20% du total des importations), mais ont reculé de 2% entre le S1 2022 et le S1 2023, premier signe d’un ralentissement de la consommation canadienne. Les importations de pièces et véhicules automobiles ont augmenté de 23% pour atteindre 65,5 Md CAD (44,3 Md€) et ont enfin dépassé leur niveau pré-pandémique, suivies des produits de l’industrie aérospatiale qui, en augmentation de 17%, à 13,2 Md CAD (8,9 Md€), restent toutefois en dessous de leur niveau de 2019. Enfin, les importations de machines et autres pièces industrielles ont progressé de 16%, à 46,4 Md CAD (31,4 Md€). Parmi les baisses les plus notables, les importations de produits chimiques ont diminué de 11%, à 30,1 Md CAD (20,3 Md€) au S1 2023, suivies des produits énergétiques, qui ont reculé de 10% (22,2 Md CAD - 15,1 Md€ ; Annexe II, Fig.2).
L’Ontario capte 60% des importations canadiennes, très loin devant les autres provinces. Au S1 2023, l’Ontario a importé pour 225 Md CAD (152 Md€), notamment des biens de consommation (47,4 Md CAD/30,7 Md€ ; 21% du total des importations de la province), des véhicules et autres pièces automobile (52,6 Md CAD/35,3 Md€ ; 23%) et du matériel électrique et électronique (28,8 Md CAD/19,5 Md€ ; 13%). Le Québec représente 14% des importations canadiennes (51,4 Md CAD/34,7 Md€), devant la Colombie-Britannique, à 10% (37,6 Md CAD/25,4 Md€). Les provinces des Prairies (Alberta, Manitoba, Saskatchewan) importent peu, respectivement 5%, 4% et 2% des importations du pays, soit 44 Md CAD à elles trois (29,6 Md€). Enfin, les provinces atlantiques comptent pour un peu plus de 1% des importations totales du pays, soit 6,1 Md CAD (4,1 Md€) (Annexe IV, Fig.2).
Le premier semestre 2023 est marqué par le retour à un déficit de la balance commerciale
La baisse des revenus des hydrocarbures met fin à la dynamique excédentaire engagée depuis 2021. Au premier semestre, le déficit commercial atteint 4,5 Md CAD (3 Md€), soit une dégradation de 28,8 Md CAD (19,5 Md€) sur un an. Au S2 2021, le Canada avait enregistré son premier excédent commercial (5,3 Md CAD/3,6 Md€) depuis le S2 2014, dans un contexte de reprise post-pandémie (+16,9% au total entre 2020 et 2021) qui avait été confirmé en 2022 grâce à l’augmentation de 50% du prix des produits de base sur les marchés mondiaux suite notamment au conflit russo-ukrainien ; le Canada avait ainsi affiché un excédent de 36,2 Md CAD (24,5 Md€) en 2022. La correction des prix des produits de base, revenus à leur niveau pré-invasion de l’Ukraine, et la baisse du montant des produits énergétiques exportés expliquent pour l’essentiel le retour à une position déficitaire : 70% de la baisse des exportations canadiennes entre le S1 2022 et le S1 2023 trouve sa source dans la baisse des exportations de produits énergétiques (Annexe I & Annexe II, Fig. 2).
Le déficit commercial recoupe deux dynamiques de sens contraire : un excédent en baisse vis-à-vis des Etats-Unis et un déficit croissant à l’égard de la plupart de ses autres partenaires commerciaux. Au S1 2023, la balance commerciale du Canada avec les Etats-Unis atteint 48,5 Md CAD (32,8 Md€), en baisse de 21,5 Md CAD (14,5 Md€) par rapport au S1 2022, un montant similaire à la baisse des exportations d’hydrocarbures sur la même période (-27,7 Md CAD/18,7 Md€). La balance commerciale totale s’élevait à 123 Md CAD (83 Md€) en 2022, année record. En dehors des E-U, le Canada entretient un déficit commercial de 53 Md CAD (35,8 Md€), qui s’est creusé entre le S1 2022 et le S1 2023 (+16%). Ce déficit hors E-U au S1 2023 s’est accentué, notamment envers l’UE (20,3 Md CAD/13,7 Md€ ; +26% par rapport au S1 2022) et le Mexique (8,9 Md CAD/6 Md€ ; +48%) tandis qu’il a reculé pour la Chine (15,5 Md CAD/10,5 Md€ ; - 30%). L’excédent commercial avec le Royaume-Uni (1,4 Md CAD/1 Md€) et le Japon (1,7 Md CAD/1,1 Md€) a fortement diminué sur la même période, respectivement -75% et -50% (Annexe III, Fig. 4).
L’Union européenne est le 2ème partenaire commercial du Canada. La balance des paiements de Statistique Canada place l’UE devant la Chine aussi bien dans les importations (9,8% du total des importations canadiennes depuis l’UE contre 8,1% depuis la Chine) que les importations (4,6% contre 4,2%), avec un total de 55,4 Md CAD (37,4 Md€) échangés entre l’UE et le Canada contre 47,2 Md CAD (80 Md€) pour la Chine, soit une différence de 8,3 Md CAD (5,6 Md€) en faveur de l’UE au S1 2023. En 2022 cet écart était évalué à 3 Md CAD (2 Md€), soit une augmentation de 5 Md CAD (3 Md€) sur un an (Annexe III, Fig. 1).
Les chiffres-clés de (premier semestre 2023)
- Balance commerciale de biens: -4,5 Md CAD (-3 Md €).
- Exportations totales: 380,2 Md CAD ; 256,8 Md € (-2 %).
- Importations totales: 384,7 Md CAD ; 260 Md € (+4 %).
- Principaux partenaires commerciaux :
1. Etats-Unis : 7,6% des exportations - 63% des importations.
2. Chine : 4,2% des exportations - 8,1% des importations.
3. Union Européenne (UE27*): 4,6% des exportations - 9,8% des importations
- Principaux fournisseurs du Canada dans l’UE (données Eurostat et Douanes françaises) :
1. Allemagne (2,6 Md €)
2. Pays-Bas (2,3 Md €)
3. France (2,3 Md €)
4. Belgique (2,2 Md €)
5. Espagne (1,3 Md€)
6. Italie (700 M€)
- Principaux clients du Canada dans l’UE (données Eurostat et Douanes françaises):
1. Allemagne (6,5 Md €)
2. Italie (3,1 Md €)
3. France (2,1 Md €)
4. Belgique (2,1 Md €)
4. Pays-Bas (2 Md €)
5. Espagne (1,1 Md€)
- Rang de la France (données des Douanes françaises et Statistique Canada):
0,6% des exportations totales du Canada : 13ème client du Canada et 3ème client au sein de l’UE.
0,7% des importations totales du Canada : 11me fournisseur du Canada et 3ème fournisseur au sein de l’UE.
La France est au premier semestre 2023 le 3ème partenaire européen du Canada et le 13ème partenaire commercial du Canada