Fiche pays (juin 2022)

Le Botswana a été un des pays d’Afrique sub-saharienne qui a le plus souffert de la crise de la Covid, compte tenu de sa forte dépendance vis-à-vis de l’industrie du diamant et du tourisme. L’économie a aussi nettement rebondi dès 2021, le pays retrouvant son niveau de PIB pré-crise dès la fin de l’année. Cela ne doit pas faire oublier les nombreux déséquilibres qui fragilisent le pays : forte dépendance au diamant, dégradation des finances publiques, environnement des affaires peu favorable, etc. Plus que jamais, le gouvernement doit mettre en œuvre les réformes présentées dans le plan de relance post-Covid, qui vise à transformer le modèle économique botswanais pour qu’il soit plus durable et plus inclusif : (i) Favoriser la diversification de la base productive en s’appuyant sur le secteur privé ; (ii) Assainir les finances publiques ; (iii) Investir dans les infrastructures, l’éducation et la protection sociale. Le Botswana reste le pays qui dispose des fondamentaux les plus solides dans la sous-région australe.

Situation Covid-19 : Pour prévenir une crise sanitaire d’ampleur, le gouvernement a mis en place un confinement particulièrement strict lors de la première vague, avec un coût très élevé pour l’économie. Pour éviter un nouveau choc trop important, les mesures mises en place pour contenir la seconde (décembre 2020-janvier 2021) et la troisième vague (juin-juillet 2021) ont été nettement moins contraignantes. Actuellement, plus de 90% de la population a reçu au moins une dose de vaccin. Le Botswana est donc le pays qui a le plus vacciné en Afrique sub-saharienne. L’efficacité de la campagne de vaccination devrait permettre de limiter l’impact de prochaines vagues dans le pays et faciliter le retour des touristes internationaux, à moins qu’un nouveau variant apparaisse dans la région, comme cela a été le cas en Afrique du Sud en novembre 2021, de nombreux pays avaient alors restreint les déplacements vers la zone, portant un coup significatif à la reprise.

1. Situation économique et politique

1.1. Situation politique

Mokgweetsi Masisi est devenu président de la République en avril 2018, après la démission de Ian Khama. Malgré de fortes contestations internes, et alors que le scrutin s’annonçait particulièrement disputé, le BDP (Botswana Democratic Party) a finalement largement remporté les élections générales d’octobre 2019 – avec un écart de plus de 15 points par rapport à son principal concurrent. Bien que le BDP soit au pouvoir depuis l’indépendance du Botswana en 1966, le pays est considéré comme une démocratie stable, avec des élections libres et régulières qui se déroulent tous les cinq ans. Il existe en revanche un sentiment d’accroissement de la corruption ces dernières années : entre 2010 et 2021, le pays a perdu 10 places au classement Transparency International, rétrogradant à la 45ième place sur 179 pays.

1.2. Éléments structurels relatifs à l’économie

Le Botswana est une petite économie de 2,3 M habitants, pour un PIB de près de 18 Mds USD en 2021. Il s’agit aussi du cinquième pays le plus riche d’Afrique sub-saharienne (PIB par tête de 7 420 USD). Alors que le taux de croissance annuel moyen du Botswana était proche de 7% dans la première moitié des années 2010, il a atteint moins de 3% lors de la seconde (hors 2020). Cela s’explique d’abord par les mutations observées sur le marché du diamant – volatilité de la demande et tendance à la baisse des prix.

L’économie du pays est largement dépendante du secteur minier (18% du PIB en moyenne ces dernières années – hors 2020, et soumis à des variations importantes). Le Botswana est le second producteur mondial de diamant, qui représente environ 35% des recettes fiscales et 90% des exportations. Bien que son exploitation ait permis au Botswana de battre des records de croissance depuis les années 1960, elle a parallèlement entretenu le sous-développement des secteurs agricole (2% du PIB ces dernières années) et manufacturier (6% du PIB). Le secteur public représente un poids non-négligeable avec 16% du PIB (seconde position), financé grâce à la rente.

Si le gouvernement affiche depuis de nombreuses années comme priorité de diversifier la base productive du pays, cette volonté ne s’est pas matérialisée – à noter toutefois, la montée en puissance du tourisme, qui représentait un peu plus de 10% du PIB avant la crise. Cette absence de diversification a été dévastatrice dans le contexte de la Covid-19. En réaction, le gouvernement a présenté en septembre 2020, un nouveau plan ambitieux (Economic and Recovery Transformation Plan – ERTP) : (i) Promotion des secteurs tournés vers l’exportation – agro-industries, services financiers, informations et télécommunication, industries manufacturières ; (ii) Investissement dans l’éducation, avec l’objectif d’améliorer le niveau des compétences et de réduire l’écart entre l’offre de travail et la demande du secteur privé ; et (iii) Développement des infrastructures (énergie, transport, télécommunications) et renforcement des services qui y sont liés pour améliorer la compétitivité de l’économie. Le principal enjeu porte aujourd’hui sur la mise en œuvre de ce plan – avec d’une part, un appel et un appui bienvenu de la part des bailleurs, mais d’autre part un momentum qui semble largement retombé. Le développement du secteur privé reste par ailleurs fortement entravé par un climat des affaires peu favorable (entre 2010 et 2020, le pays a perdu plus de 40 places au classement Doing Business – actuellement 87ième pays sur 180). Un point positif à mettre à l’actif du gouvernement est la sortie, en octobre 2021, de la liste grise du Groupe d’Action Financière (GAFI), alors que le pays était épinglé depuis 2018 pour des manquements en matière de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme.

Sur le plan social, le pays est dans une situation relativement plus favorable que ses voisins, même s’il souffre des mêmes maux. Le taux de pauvreté y est nettement plus faible (12% en 2021 comme en 2019 – au seuil de 1,9 USD par jour) – la crise de la Covid a eu un impact substantiel sur l’indicateur, mais transitoire (16% en 2020). En revanche, le taux de chômage a atteint 26% fin 2021, en progression de huit points par rapport à fin 2019, 250 000 emplois ayant été détruits depuis le déclenchement de la crise. Les inégalités sont aussi parmi les plus importantes au monde. En 2020, le Botswana était le troisième pays le mieux classé en Afrique subsaharienne en termes d’IDH et le 100ième sur 188 pays au niveau mondial.

2. Conjoncture et finances publiques

2.1. Conjoncture économique

En 2020, le PIB a chuté de 8,7%. Il s’agit d’une des pires performances au niveau du continent africain, du fait principalement de la chute de la demande mondiale de diamant, de la chute de la production domestique et de la mise en suspens des sessions de vente entre mars et juillet 2020 – et dans une moindre mesure de la mise à l’arrêt du tourisme. Cependant, la croissance a rebondi de plus de 12% dès 2021 – portée par la reprise du secteur du diamant (même si le volume de production est resté inférieur au niveau pré-crise), de la construction et de la distribution. En revanche, le secteur du tourisme est resté très sinistré et le secteur agricole s’est contracté pour la seconde année consécutive (-2,9% après -2,7% en 2020) du fait de conditions météorologiques peu favorables.

Pour 2022, les prévisions tablent sur un ralentissement de la croissance, qui devrait toutefois se placer à un niveau supérieur à ceux observés ces dernières années – aux alentours de 4,5%. Le secteur du diamant poursuit sa reprise (+6% sur un an au premier trimestre). Il devrait être un des grands bénéficiaires de la guerre en Ukraine – il l’est déjà compte tenu du niveau des prix – mais il pourrait aussi profiter du report de la demande auparavant servie par la Russie (premier producteur mondial), en particulier celle en provenance d’Europe et des Etats-Unis contrainte par les sanctions. Le secteur du tourisme devrait engager une lente remontée, les restrictions aux frontières ayant été levées pour les personnes vaccinées. Bien que la confiance des ménages et des entreprises soit actuellement orientée à la hausse, la demande interne pourrait toutefois pâtir de l’inflation (aux alentours de 10% sur un an depuis janvier) et de la remontée des taux, amorcée par la banque centrale à la mi-juin (hausse du taux directeur de 0,5 point à 2,15%). Par ailleurs, le pays va continuer à être affecté par les difficultés rencontrées par l’économie sud-africaine – un débouché important pour les produits botswanais (environ 10% des exportations ces dernières années) – et par les difficultés rencontrées par le port de Durban par où transite une partie du commerce extérieur.

2.2. Situation des finances publiques

Avant la crise de la Covid, les finances publiques prenaient déjà une trajectoire inquiétante – passant d’un léger excèdent en moyenne sur la première moitié des années 2010 à un déficit supérieur à 3% du PIB lors de la seconde – croissance en berne, baisse des revenus issus de l’industrie minière, baisse tendancielle des revenus de la SACU (Southern African Customs Union) dont le pays est très dépendant (plus de 25% des revenus de l’Etat ces dernières années), augmentation de la masse salariale de la fonction publique.

Sur l’exercice de la crise (2020-21 – clos au 31 mars), le déficit a atteint près de 10% du PIB. D’une part les revenus de l’Etat ont été inférieurs de près d’un quart par rapport à ce qui était anticipé dans le budget initial. D’autre part, les dépenses ont augmenté significativement, avec la mise en œuvre d’un plan d’urgence représentant deux points de PIB : dépenses sanitaires, mesures de soutien à l’emploi et chômage partiel, fonds en faveur des entreprises en difficulté, etc. Lors de l’exercice budgétaire 2021/2022, le gouvernement a engagé un assainissement des finances publiques : le déficit a fortement diminué, pour atteindre 2,7% du PIB, contre 2,9% anticipé dans le budget initial. Cette bonne performance s’explique avant tout par la hausse des revenus de l’Etat, portée par les surprofits réalisés par l’industrie minière et par un effort de mobilisation des ressources domestiques – hausse du taux de TVA notamment.

Pour l’exercice 2022-2023, le gouvernement a montré sa volonté de maintenir le cap, avec une prévision de déficit de 2,7% du PIB et un retour à l’excédent budgétaire à l’horizon 2023-2024. En cela, le gouvernement pourrait être aidé par la reprise du secteur minier et les surprofits à venir des entreprises du diamant. Mais il n’échappera pas à la nécessité de rationaliser les dépenses (réforme de la fonction publique ; réforme des entreprises publiques dont les renflouements successifs pèsent sur le budget ; meilleur ciblage des dépenses sociales), de renforcer l’administration fiscale et la gestion des finances publiques. Surtout si, comme il l’indique, il veut en parallèle allouer une part croissante du budget à la protection sociale et aux dépenses d’investissement. Dans tous les cas, l’objectif de réduction de la masse salariale parait hors d’atteinte dans un contexte de forte augmentation des prix.

Malgré l’importance des déficits sur une période prolongée, la dette publique est restée contenue – elle a tout de même augmenté de cinq points de PIB entre fin 2019 et fin 2021, pour atteindre 21% du PIB. En effet, ces dernières années, le gouvernement a puisé de manière quasi-systématique dans les importantes réserves de l’Etat (administrées en grande partie dans le fonds souverain Pula Fund), afin d’éviter de recourir à l’endettement. Cette stratégie s’est traduite par une forte baisse des réserves : -20% entre 2015 et 2019, puis -20% supplémentaire pour la seule année 2020. En 2020, les réserves de l’Etat représentaient environ 30% du PIB, contre plus du double cinq ans auparavant. Cette hémorragie a poussé le gouvernement à changer de stratégie à partir de 2021, avec un recours accru aux financements externes (financements des banques multilatérales de développement et crédits commerciaux garantis par MIGA). En 2021, les réserves n’ont diminué « que » de 3% et, pour le budget 2022-23, le gouvernement prévoit de financer l’intégralité de ses besoins par l’endettement (pour un tiers externe et deux tiers domestique).

3. Relations avec la communauté financière internationale

Le Botswana est classé dans la catégorie des pays à « revenus intermédiaires de la tranche supérieure ». Avant la crise de la Covid-19, les autorités n’avaient presque jamais recours à l’endettement externe, y compris concessionnel. Début 2020, la Banque Mondiale n’avait que deux financements actifs dans le pays (eau et transport pour 335 MUSD) et la Banque Africaine de Développement (BAfD) un seul, en non souverain. Suite à la crise, la position du gouvernement a beaucoup évolué, pour combler des besoins de financement en forte hausse et éviter d’assécher complètement le fonds souverain. En 2021, le Botswana a ainsi bénéficié d’un prêt d’aide budgétaire de la Banque Mondiale de 250 MUSD, pour soutenir la mise en œuvre du plan de reprise post-Covid (ERTP) – premier financement de ce genre en faveur du pays, avec une option pour un second d’un montant équivalent. La BAfD est venue compléter ce soutien quelques mois plus tard, à hauteur de 135 MUSD. Le pays n’est pas endetté auprès du FMI.

4. Aide publique au développement de la France

Entre 2018 et 2020 (dernières données disponibles), le Botswana a reçu en moyenne 70 MUSD de versement brut d’Aide Publique au Développement (APD) par an de la part des bailleurs bilatéraux. La grande majorité de cette somme provenait des Etats-Unis (75%) et du Japon (17%). La contribution de la France à l’APD bilatérale en faveur du Botswana est très faible – 220 000 USD par an, en moyenne. Suite au changement d’attitude des autorités vis-à-vis des bailleurs, l’AFD a engagé une discussion avec le gouvernement pour présenter ses outils financiers en souverain – en favorisant une approche projet dans les domaines de l’énergie, de l’eau, de l’agriculture ou encore de la transformation digitale de l’administration. Proparco est aussi actif dans le pays – ligne de crédit de 10 MUSD en faveur de la banque locale ABC, pour soutenir le financement des PME dans le cadre de l’initiative Choose Africa.

5. Relations économiques avec la France

5.1. Échanges commerciaux avec la France

Le commerce bilatéral entre la France et la Botswana a reculé de près de 10% en 2021, pour atteindre 35 MEUR. Il est désormais bien inférieur à son niveau pré-crise (73 MEUR en moyenne entre 2017 et 2019). Cette évolution s’explique notamment par une baisse de 25% de nos exportations (à 25 MEUR – fin de plusieurs gros contrats et difficultés du transport aérien), alors que nos importations ont retrouvé leurs niveaux pré-crise (+403% à 7 MEUR – reprise de l’industrie du diamant). Bien qu’il se réduise pour la seconde année consécutive, notre excédent commercial (structurel) vis-à-vis du Botswana atteint un niveau élevé si on le compare à ceux de la décennie 2010. Si le Botswana est un débouché marginal pour les produits français (il s’agit de notre 146ième client), la faiblesse du flux tranche avec le haut niveau de technologie des produits exportés.

5.2. IDE et présence française

Bien qu’il reste modeste, le stock d’Investissements Directs Etrangers (IDE) français au Botswana a beaucoup augmenté ces dix dernières années, passant de 15 MUSD en 2014 à près de 45 MUSD en 2018 (dernière donnée disponible – soit un peu moins de 1% du stock total d’IDE dans le pays), avec notamment des investissements importants d’Orange dans des infrastructures informatiques. Une quinzaine de filiales d’entreprises françaises sont installées au Botswana, représentant environ un millier d’emplois. Les secteurs des services sont largement représentés : télécommunications (Orange, opérateur mobile), audit et conseil (Mazars), distribution (Total Energies, Air Liquide) ou encore logistique (AGS, Bolloré, CMA-CGM). L’industrie est représentée par Saint Gobain (matériaux de construction) et Parmalat/Lactalis (agroalimentaire), qui disposent toutes deux d’unités de production dans le pays.

 
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