Fiche pays (juin 2025)

L’économie du Botswana, longtemps considéré comme le bon élève d’Afrique australe, repose sur un système à bout de souffle. Très dépendante du secteur du diamant (90 % des recettes d’exportation du pays et entre 30 % et 40 % des recettes de l’État), elle est particulièrement exposée aux chocs externes. Le net ralentissement du marché du diamant pèse ainsi lourdement sur l’activité : l’économie devrait ainsi se contracter de 0,4% en 2025, après un premier recul de 3,0 % en 2024.  Sur le plan socio-économique, le Botswana continue de faire face à un chômage structurel élevé, notamment chez les jeunes, en raison de formations peu adaptées aux besoins du marché du travail. Le pays se caractérise également par un emploi public important et un niveau d’inégalités parmi les plus élevés au monde. Les besoins de financement de court et moyen-terme sont élevés pour enfin mettre le pays sur la voie d'un développement égalitaire, soutenable et diversifié, et le nouveau gouvernement, pétri de bonnes intentions, a du mal à traduire dans les faits ses ambitions. La mise en œuvre de véritables réformes structurelles apparaît plus nécessaire que jamais pour engager une transition vers un modèle économique plus diversifié, durable et inclusif.

1. Situation économique et politique

1.1. Situation politique

Le Botswana a connu un tournant politique majeur lors des élections générales du 30 octobre 2024. La Coalition Umbrella for Democratic Change (UDC), principal parti d'opposition de centre-gauche, a remporté à la surprise générale la majorité absolue au Parlement (36 sièges sur 61), permettant à son chef, Duma Boko, d'accéder à la présidence. Cette alternance historique, qui a mis fin à 58 ans de règne sans partage du Botswana Democratic Party (BDP) dans un contexte de forte lassitude à l’égard du pouvoir sortant, ne reflète toutefois pas une progression nette du score électoral de la coalition (37,22% en 2024) par rapport à 2019 (35,9%), mais est d’abord une conséquence du mode de scrutin (système uninominal majoritaire à un tour). Cette alternance politique historique ne s’accompagne par ailleurs pas d’un mandat économique clair. Le programme électoral de la coalition, qui réunit trois partis aux orientations idéologiques diverses, présente un catalogue hétérogène de mesures parfois contradictoires, et des tensions internes sont déjà perceptibles au sein du gouvernement d’alliance. Le Botswana reste par ailleurs confronté à des défis structurels de long terme : chômage élevé, inégalités marquées, persistance de la pauvreté. Le pays est également miné par l’accroissement d’un sentiment de corruption, bien qu’il ne figure qu’à la 39ème place sur 180 pays du classement Transparency International en 2023.

1.2. Éléments structurels relatifs à l’économie

Doté d’un PIB de 19 Mds USD et d’une population de 2,7 M habitants en 2024, le Botswana est une petite économie. Mais il s’agit aussi d’un des cinq pays les plus riches d’Afrique sub-saharienne (PIB par habitant de 7 117 USD), classé par la Banque mondiale dans la catégorie des pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure. Le pays, qui ambitionne de devenir un pays à hauts-revenus d’ici 2036, est néanmoins en perte de vitesse. Alors que son taux de croissance annuel avoisinait 7 % dans la première moitié des années 2010, il est retombé à moins de 3 % au cours de la seconde moitié, une tendance qui s’est maintenue entre 2020 et 2024, avec une croissance d’environ 2 %. Cette évolution s’explique par les mutations du marché du diamant, caractérisées par une forte volatilité de la demande et une baisse progressive des prix.

L’économie du pays, caractérisée par un secteur public hypertrophié (plus de 30% des emplois formels), est en effet largement dépendante du secteur minier (environ 20% du PIB). Le Botswana est le deuxième producteur mondial de diamant en volume (premier en valeur), une ressource qui a représenté, au cours de la dernière décennie, près de 90 % des recettes d’exportation du pays et entre 30 % et 40 % des recettes de l’État. Dans ce contexte, le gouvernement et le conglomérat De Beers ont renouvelé en février 2025 leur accord sur la vente de diamants bruts pour une durée de dix ans, intégrant de nouvelles concessions d’exploitation de gisements (d’une durée de 25 ans), assorties de conditions plus favorables à l’Etat botswanais.

Bien que l’exploitation du diamant ait permis au Botswana de battre des records de croissance depuis la fin des années 1970, elle a parallèlement entretenu le sous-développement des secteurs agricole (moins de 2% du PIB ces dernières années) et manufacturier (moins de 6% du PIB). Cette dépendance au diamant rend par ailleurs l’économie très vulnérable aux chocs externes (retournement des cours dans un contexte d’incertitudes géopolitiques). Conscient du caractère limité de cette ressource (20 à 30 ans de réserves estimées), les gouvernements successifs ont affiché depuis de nombreuses années comme priorité la diversification de la base productive et multiplié les initiatives pour faire la promotion du pays auprès des investisseurs étrangers. Les différents plans stratégiques du gouvernement (Vision 2036, Reset Agenda, Economic Recovery and Transformation Plan, ainsi que le futur 12ème Plan national de développement – NDP 12 – qui devrait en principe être publié au mois d’octobre prochain), identifient les principaux freins structurels à la croissance (dépendance excessive au diamant, faible industrialisation, inadéquation des compétences) et proposent des réformes ambitieuses : (i) développement de secteurs alternatifs tournés vers l’exportation – agro-industrie, services financiers, technologies de l’information et de la communication, tourisme et industries manufacturières ; (ii) renforcement du capital humain, notamment via un investissement dans l’éducation et la formation technique, dans l’objectif de faire mieux correspondre l’offre de compétences et les besoins du marché du travail ; (iii) amélioration des infrastructures productives (énergie, transport, télécommunications) grâce à des partenariats public-privé ; et iv) attraction des investissements étrangers, notamment via la création de zones économiques spéciales. Malgré des avancées ponctuelles, notamment dans les énergies renouvelables, la digitalisation de l’administration et le lancement de projets miniers stratégiques, la mise en œuvre globale de cette stratégie reste peu avancée, limitant son impact sur la croissance, l’emploi et la résilience de l’économie. Le développement du secteur privé reste par ailleurs fortement entravé par un climat des affaires peu favorable (entre 2010 et 2020, dernières données disponibles, le pays a perdu plus de 40 places au classement Doing Business – 87ème pays sur 180).

Sur le plan social, le pays souffre des mêmes maux que ses voisins. Le taux de chômage (23,1% en 2024) et le taux de pauvreté (61,5% au seuil de 6,85 USD par jour, applicable aux pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure) sont particulièrement élevés. En dépit d’un niveau élevé de dépenses sociales, qui sont inefficaces et mal calibrées, les inégalités restent parmi les plus importantes au monde (indice de GINI de 53,3). En 2023, le Botswana était le cinquième pays d’Afrique subsaharienne en termes d’IDH (le 111ème pays au niveau mondial).

2. Conjoncture et finances publiques

2.1. Conjoncture économique

Alors qu’elle avait crû de 3,2% en 2023, l’économie botswanaise s’est contractée de 3,0 % en 2024, touchée de plein fouet par les difficultés du secteur minier (-27,2% en 2024), dans un contexte marqué par un ralentissement de la demande mondiale et une baisse des cours du diamant. L’économie a également pâti de la sécheresse sévère due du phénomène El Nino, qui a fortement touché le secteur agricole (-2,1 %). Seul le dynamisme du secteur des services (+4,4 %) a permis de limiter la contraction.

À court terme, les difficultés du secteur minier devraient persister. Le secteur fait en effet face à des conditions de prix défavorables dans un environnement international incertain (International Diamond Index Price en recul de 4% sur le premier semestre 2025, et de près de 42% depuis le point haut de mars 2022). Les mesures de traçabilité mises en place par le G7 depuis le 1er mars 2024 pour exclure du marché les diamants russes semblent par ailleurs pénaliser l’activité botswanaise. Dans ce contexte, Debswana (coentreprise entre le gouvernement botswanais et De Beers) a réduit sa production de 27 % en 2024 à 17,93 millions de carats, et prévoit une nouvelle baisse de 16 % à 15 millions de carats en 2025. Le FMI anticipe ainsi une nouvelle contraction de l’économie en 2025 (prévision de -0,4 %), avant un rebond à +2,3 % en 2026.

L’inflation moyenne s’est établie à 2,8 % en 2024 (après 5,1 % en 2023). Elle se maintient en-deçà de sa fourchette cible (3% à 6 %) depuis septembre 2024, s’etablissant à 1,9% sur un an en mai 2025 . Cette évolution reflète principalement des effets de base favorables (notamment sur les carburants et le transport) et une hausse modérée des prix alimentaires et des services. La Banque centrale, citant la nécessité de soutenir la croissance, a maintenu sa politique d’assouplissement monétaire : son taux directeur, de loin le plus faible de la sous-région australe, atteint 1,9% en nominal (-0,75 point de base depuis septembre 2022). Le secteur financier reste solide (taux de prêts non performants de 3,2 %, bien en deçà du seuil réglementaire de 5,0 %).

 2.2. Situation des finances publiques

Après avoir retrouvé un quasi-équilibre budgétaire en 2022/23 (-0,0% du PIB), grâce à une stratégie d’assainissement des finances publiques engagée à l’issue de la crise sanitaire (marquée par des déficits de 8,5 % du PIB en 2019/20, puis de 10,9 % en 2020/21), le Botswana a renoué avec les déficits en 2023/24 (déficit de 4,2% du PIB), et 2024/25 (-8,9 % du PIB selon le gouvernement, -10,3% du PIB selon le FMI). La forte dégradation des finances publiques enregistrée en 2024, bien plus marquée qu’anticipée (le déficit initialement projeté s’élevait à 3,2 % du PIB), s’explique principalement par l’effondrement des recettes minières, révisées à 8,7 Mds BWP contre 25,2 Mds dans le budget initial. Malgré une hausse des recettes douanières en provenance de la SACU, les recettes totales ont ainsi reculé de 7,5 % sur un an, pour s’établir à 68,7 Mds BWP. Dans le même temps, les dépenses publiques ont fortement progressé (+11 %), alimentées notamment par les surcoûts liés à l’organisation des élections générales d’octobre 2024, dans un contexte de faible croissance et de fortes tensions sur les finances publiques.

Le gouvernement table sur une réduction du déficit sur l’exercice 2025/26 (-7,6 % du PIB), grâce à des dépenses maîtrisées (33% du PIB, en hausse de +4,0 % par rapport à l’exercice précédent), inférieures à la croissance attendue des recettes (25,8% du PIB, en hausse de +10,0 % par rapport à l’exercice précédent). Ces prévisions de recettes apparaissent toutefois particulièrement optimistes dans un contexte de faible croissance et de recul des recettes liées au secteur du diamant, le FMI anticipant quant à lui des déficits bien plus importants, de 11% en 2025/26 et de 9,3% en 2026/27.

Alors que le gouvernement a puisé de manière quasi-systématique ces dernières années dans les importantes réserves de l’Etat (notamment administrées dans le Pula Fund) pour financer ses déficits sans recourir à l’endettement, cette stratégie, qui s’est traduite par une forte baisse des réserves (23% du PIB en 2024/25, contre 91% du PIB en 2007/08) et des dépôts du gouvernement à la Banque centrale (0,4% du PIB en 2024/25 contre 50% du PIB en 2007/08) n’est désormais plus soutenable. La dette publique, qui ne représentait que 21% du PIB en 2022, aurait atteint 25,75% du PIB à la fin de l’année 2024 selon le gouvernement (32,6% du PIB selon le FMI), et dépasserait le seuil légal de 40% du PIB dès 2025 selon l’institution monétaire internationale (prévision de 43% du PIB). Dans ce contexte, les agences de notation S&P (BBB+) et Moody’s (A3) ont révisé le 14 mars et le 4 avril leur perspective de la dette souveraine botswanaise, de « stable » à « négative », maintenant toutefois leurs notations (respectivement BBB+ et A3, dans la catégorie d’investissement) inchangées à ce stade. La dette botswanaise est majoritairement domestique, dynamique qui devrait se maintenir à moyen terme.

Sur les recommandations du FMI, le gouvernement envisage désormais de mettre en place un véritable fonds souverain (en lieu et place du Pula Fund, dont la principale fonction est d’absorber les chocs externes), visant à préserver la richesse du pays pour les générations futures et à financer de manière durable les infrastructures du pays. La réalisation de cet objectif nécessiterait toutefois, selon le FMI, une consolidation fiscale soutenue caractérisée par des excédents budgétaires d’au moins 2 à 4 % du PIB par an.

3. Relations avec la communauté financière internationale

Le Botswana est classé dans la catégorie des pays à « revenu intermédiaire de la tranche supérieure ». Avant la crise de la Covid-19, les autorités n’avaient presque jamais recours à l’endettement externe, y compris concessionnel. La crise a fait évoluer la position du gouvernement, pour combler des besoins de financement en forte hausse et éviter d’assécher complètement le Pula Fund. En 2021, le Botswana a ainsi bénéficié d’un prêt budgétaire de la Banque Mondiale de 250 MUSD (premier financement de ce genre en faveur du pays), pour soutenir la mise en œuvre du plan de reprise post-Covid (ERTP). Ce prêt a été complété par un second prêt budgétaire (150 MUSD), octroyé en juin 2023. La Banque Mondiale compte deux autres financements actifs dans le pays, dont un don pour soutenir le développement des énergies renouvelables (3,5 MUSD - juillet 2024). Plus largement, le groupe Banque Mondiale est présent dans le pays via la MIGA et la SFI, qui disposent de respectivement deux et trois projets actifs (pour environ 135 MUSD et 60 MUSD). En parallèle, la BAfD a accordé trois prêts de politique publique au Botswana (135 MUSD en septembre 2021 ; 180 MUSD en novembre 2022 ; 304 MUSD en mai 2025, afin de soutenir la stabilité économique du pays et accompagner les réformes engagées).

Si les autorités affichent toujours publiquement une réticence à recourir à l’endettement externe (annonçant privilégier des financements domestiques, notamment via le rapatriement des actifs des fonds de pension nationaux), elles sont en réalité en contact avec de nombreux bailleurs internationaux (Banque mondiale, BafD, AFD, BEI, JICA, etc.), à qui elles ont d’ores-et-déjà formulé des demandes de financement (nombreuses et peu préparées).

Le pays n’est pas endetté auprès du FMI.

4. Aide publique au développement de la France

Entre 2021 et 2023 (dernières données disponibles), le Botswana a reçu en moyenne 106 MUSD de versement brut d’Aide Publique au Développement (APD) par an de la part des bailleurs bilatéraux. La grande majorité de cette somme provenait du Japon (40%) et des Etats-Unis (56%). La contribution de la France à l’APD bilatérale en faveur du Botswana est très faible (1,4 M USD en moyenne), et en baisse (2,3 MUSD en 2022 et 0,3 MUSD en 2023). La présence de l’AFD reste modeste (prêt de 18 MUSD en 2019 à la Botswana Development Corporation et deux projets régionaux dans le domaine de la biodiversité). Proparco est également actif dans le pays, depuis 2020 (ligne de crédit de 10 MUSD en faveur de la banque locale ABC, pour soutenir le financement des PME dans le cadre de l’initiative Choose Africa). Il a récemment octroyé, en novembre 2024, un prêt de 15 M€ à l’institution de microfinance Letshego Botswana afin de faciliter l’accès aux produits financiers pour ses clients et de répondre aux besoins des populations défavorisées du pays.

5. Relations économiques avec la France

5.1. Échanges commerciaux avec la France

Le commerce bilatéral entre la France et le Botswana a enregistré une forte croissance en 2024 (+64 % sur un an, atteignant 55 M EUR), soit son niveau le plus élevé depuis 2019 (141 M EUR). Cette hausse s'explique en principalement par l'augmentation de nos importations (+83 % à 46,4 M EUR), en quasi-totalité constituées de diamants. En regard, nos exportations se sont stabilisées (+2 %, à 8,6 M EUR), sous le double effet de la reprise des ventes de « matériel de transport » et du net repli des ventes d’«équipements mécaniques, électriques, électroniques et informatiques». La France enregistre ainsi pour la troisième année consécutive (mais la quatrième seulement depuis 2010) un déficit commercial vis-à-vis du Botswana ( - 38 M EUR). Le Botswana reste un partenaire commercial marginal pour la France (189ème client et 123ème fournisseur).

5.2. IDE et présence française

Bien qu’il reste modeste, le stock d’Investissements Directs Etrangers (IDE) français au Botswana a beaucoup augmenté sur la dernière décennie, passant de 14 MEUR en 2014 à 89 MEUR en 2023 (soit près de 2% du stock total d’IDE dans le pays). Le groupe a notamment annoncé en décembre 2023 l’ouverture d’un centre de données d'une valeur de 5,2 M USD à Gaborone, où l’entreprise dispose depuis 2022 d’un digital center pour accompagner l’écosystème numérique local. Une quinzaine de filiales d’entreprises françaises sont installées au Botswana, représentant près d’un millier d’emplois. Le secteur des services est largement représenté : ICT (Orange, Dassault Systèmes, Idemia), audit et conseil (Mazars), énergie (Total Energies, Air Liquide, Akuo), eau et assainissement (Veolia) ou encore logistique (AGS, CMA-CGM). L’industrie est représentée par Saint Gobain (matériaux de construction) et Parmalat/Lactalis (agroalimentaire), qui disposent toutes deux d’unités de production dans le pays.

Publié le