BOSNIE-HERZÉGOVINE
Situation économique et financière
L’économie bosnienne affiche une certaine résilience, après une accélération de la croissance en 2024 à 2,5%, malgré la détérioration de la situation politique. Ce niveau n’est toutefois pas suffisant pour engager la convergence avec le reste de l’UE d’autant qu’à court terme la croissance devrait ralentir. D’autres indicateurs macroéconomiques ne sont pas très bien orientés : l’inflation augmente, le déficit courant se creuse, les finances publiques se détériorent. L’économie est freinée par la crise politique et la complexité de sa gouvernance.
N.B : l’espace économique et financier en Bosnie-Herzégovine (BiH) est réparti entre deux entités autonomes, la Fédération de Bosnie Herzégovine (FBiH) et la Republika Srpska (RS). Au niveau consolidé (BiH), le PIB est estimé à 27,5 Md EUR en 2024, dont 17,5 Md EUR pour la FBiH, qui représente donc près des 2/3 de l’activité.
La croissance a légèrement augmenté en 2024 (2,5% après 2 % en 2023). Elle provient surtout du secteur privé, alors que les entreprises publiques (env. 40 % du PIB) continuent à connaitre des difficultés. Après avoir stagné en 2023, l’investissement privé a retrouvé un sentier de croissance (8,5 % sur les trois derniers trimestres 2024). La contribution du commerce extérieur à la croissance est négative (- 1,8 point de PIB), la demande européenne étant atone[i]. L’activité a toutefois trouvé des relais domestiques, avec une consommation des ménages dynamique (salaires réels en hausse de 8,3 %) ainsi qu’un rebond de la consommation publique. Dans la région, la Bosnie enregistre la croissance la plus faible, pour la deuxième année consécutive. Pour 2025, la Banque centrale (CBBH) prévoit une croissance à 2,4 %, avec un risque baissier lié à la conjoncture européenne.
L’inflation a ralenti en 2024 (1,7 % contre 6,1 % en 2023), à la faveur d’une modération des prix à l’importation et des prix alimentaires. La caisse d’émission du mark bosnien ancrée sur l’euro a joué un rôle stabilisateur. Depuis le début de l’année, les prix sont toutefois repartis à la hausse (3,3 % en moyenne au T1 2025), tirés par l’alimentaire et le secteur de la santé, et l’inflation observée dépasse l’inflation sous-jacente. Contrairement à la prévision du Programme de Réformes Economiques (PRE) (1,9 %), un retournement plus prononcé de la dynamique des prix pourrait se profiler en 2025, en raison de la revalorisation des salaires minimums dans les deux entités[iii].
Le déficit courant s’est creusé à 4,1 % du PIB, en raison de la dégradation du solde commercial. Les importations sont restées élevées en 2024 (à 51,7 % du PIB) tandis que les exportations ont chuté de 1 point de PIB (à 29,2 % du PIB), induisant un déficit commercial supérieur à 22 % du PIB, partiellement contrebalancé par le solde excédentaire des services (8,5 % du PIB). Les transferts de la diaspora demeurent élevés (8 % du PIB), en croissance sur un an (7,6 % du PIB en 2023), tandis que les IDE nets sont les plus bas de la région (3,5 % du PIB) et qu'il s’agit rarement d’investissements greenfield.
Au niveau consolidé de la BiH, le déficit budgétaire a été contenu à 1,3 % du PIB en 2024, malgré une hausse des dépenses courantes. Le déficit consolidé a été moindre que prévu (1,7 % du PIB initialement), grâce à une meilleure collecte des recettes, mais masque une disparité entre les deux entités : la Fédération enregistre un déficit dans la ligne se sa prévision (0,8 % de son PIB), tandis que la RS a manqué son objectif (2,4 % contre 1,5 % de son PIB). Depuis deux ans, les revalorisations de salaires et de prestations sociales ainsi que des mesures de soutien temporaires se sont multipliées dans les deux entités, provoquant une hausse des dépenses publiques d’environ 5 points de PIB entre 2022 et 2024 (env. 44-45 % du PIB consolidé). Le PRE définit une stratégie de consolidation des finances publiques fondée sur une hausse des recettes et une stabilisation des dépenses, alors qu’en l’état (déficit contenu, dette modérée) le pays pourrait conduire une politique budgétaire plus ambitieuse.
La dette publique est contenue à 27 % du PIB. L’endettement public agrégé a augmenté en 2023 (27,5 % du PIB fin 2024, à 76 % en devises), une rupture par rapport aux années 2015-2023 (désendettement de 41 à 26 % du PIB). Elle est uniformément répartie entre les entités (49 % en RS et 50 % en FBiH, le reste allant aux autres institutions), mais diverge grandement dans la place qu’elle tient dans les PIB respectifs : 20 % du PIB en FBiH et 40 % du PIB en RS. Après avoir accru leur endettement sur les marchés internationaux, les entités envisagent de se tourner vers les épargnants (l’émission récente de 5 M EUR auprès des particuliers par la RS avait valeur de test). La part externe de la dette publique est contenue (65 % ; soit 17 % du PIB) et largement concessionnelle. Les besoins de financements s’alourdissent (7 % du PIB en RS et 5 % du PIB en FBiH) avec de nombreuses échéances de remboursement à venir en 2025 et 2026 (notamment les Eurobonds de la RS).