Secteur de l'eau en Bosnie-Herzégovine

Résumé : Le secteur de l’eau en Bosnie-Herzégovine, qui souffre d’un manque d’investissement ancien, est en retard par rapport à la norme européenne avec 65% de la population connectée à un réseau de distribution d’eau public et seulement 3% à un système de traitement des eaux usées. C’est un secteur privilégié pour les investissements des IFIs, des institutions européennes et des agences de développement. Dans le cadre des fonds IPA et de plans « Watsan » menés entre autres par la BEI et le CIBO, certaines villes comme Banja Luka ont rénové leurs infrastructures et vont continuer à le faire.

 

1. La Bosnie-Herzégovine (BiH) bénéficie d’une grande richesse en eau, mais le pays connaît des difficultés dans sa gestion de la ressource, expliquant le retard accumulé dans ce domaine

La BiH dispose de ressources renouvelables en eau considérables, estimées à 10 000 m³/an par habitant, qui font du pays un des mieux dotés en Europe centrale où la moyenne est de 2 400 m³. Malgré cette richesse en eau, le manque d’infrastructures fait que seulement 65% de la population bosnienne est connectée à un réseau de distribution d’eau public, contre 90% en moyenne dans l’UE, et la vétusté des infrastructures en place cause des pertes de distribution qui atteignent 50%.

L’acquis communautaire en matière de traitement des eaux est exigeant : la directive de 1991 sur les eaux résiduaires urbaines stipule que toute agglomération de plus de 2 000 habitants doit disposer d’un réseau de collecte et de traitement de type secondaire pour toute sa population. En BiH, seulement 3% des eaux usées sont traitées par une station d’épuration contre une moyenne de 85% dans l’UE.

Le retard accumulé par la BiH dans le secteur de l’eau a tendance à être renforcé par la lenteur de la prise de décision issue de la complexité institutionnelle qui caractérise le pays, divisé en trois entités : la Fédération de Bosnie et Herzégovine (FBiH), la République Serbe (RS) et le district de Brčko (DB), qui ont chacune le contrôle de la politique environnementale de leur territoire en matière de gestion de l’approvisionnement en eau et du traitement des eaux usées. De ce fait, il n’existe pas de loi nationale sur la gestion de l’eau en BiH.

Pour l’intégrer l’acquis communautaire le pays s’est doté fin 2017 d’un plan d’action pour rapprocher la législation environnementale bosnienne de celle européenne. Il précise l’investissement nécessaire dans chaque sous-secteur, dont celui de l’eau. Les entités se sont aussi dotées de stratégies propres, à l’image de la Stratégie de gestion de l’eau 2012-2022 en FBiH et de la Stratégie intégrée de gestion de l’eau 2014-2024 en RS.

Le principal problème du secteur de l’eau est le manque d’harmonisation entre les différents niveaux de législation nationale, aussi bien entre les trois entités qu’entre les cantons de FBiH. Les variations de normes entre les différentes strates politiques empêchent une application harmonisée de l’acquis communautaire lié à l’environnement, ainsi qu’une utilisation optimale des fonds européens en BiH sur des projets d’envergure nationale. Un autre problème à souligner est l’absence de décrets d’application des lois liées à l’eau dans les entités, entraînant souvent leur absence de portée pratique.

  

2. Le secteur de l’eau en Bosnie-Herzégovine est un des secteurs prioritaires pour les investissements des IFIs et les aides européennes

Le secteur de la gestion de l’eau est éligible aux aides communautaires de l’instrument de pré-adhésion (IPA), ainsi que la cible privilégiée des investissements infrastructurels de la part du Cadre d’investissement pour les Balkans occidentaux (CIBO) et des IFIs comme la BEI, la BERD et la Banque Mondiale.

La BEI participe ainsi à de grands programmes « Watsan » dans ce secteur comme avec la FBiH en 2008 pour des projets de 120 M EUR, dont 60 M EUR de prêts, et avec la RS en 2010 pour des projets de 100 M EUR, dont 50 M EUR de prêts. La BERD est aussi très active dans le domaine de l’eau et accorde des prêts souverains à de nombreuses sociétés municipales gestionnaires de l’eau. De plus, à la suite des inondations de la Bosna en 2014, des fonds supplémentaires ont été débloqués par les IFIs dans la prévention. Ainsi, la Banque Mondiale a participé à l’élaboration d’un plan d’action contre les inondations et la gestion des rivières pour 2014-2017 et vise avec ses projets un taux de retraitement secondaire des eaux usées de 30% au lieu de 3% actuellement.

Les fonds européens participent aussi à l’amélioration de la gestion de l’eau en BiH. Les fonds IPA I (2007-2013) ont ainsi consacré une enveloppe de 60 M EUR d’aides pour la réhabilitation des réseaux de distribution et de traitement de l’eau à la suite des inondations qu’a connu la BiH en 2014.  De même, les fonds IPA II (2014-2017) disposent d’une enveloppe de 51 M EUR allouée à la Protection de l’environnement. Pour les fonds IPA II en 2018, la Commission prévoit une enveloppe de 20 M EUR consacrée à l’environnement pour financer, entre autres, des projets dans la gestion de l’eau. Cette proposition doit encore être confirmée par le gouvernement de BiH d’ici à octobre 2018.

Les principaux projets ayant bénéficié de fonds et de financements européens ou des IFIs concernent la rénovation du réseau de distribution d’eau et la construction de réseaux de traitement des eaux usées en ville, aussi bien en RS qu’en FBiH. Le grand projet actuel en BiH, signé en avril 2018, est la rénovation du système de distribution d’eau de Sarajevo pour un montant total de 38 M EUR, dont 25 M EUR prêtés par la BERD dans le cadre de son programme « Green cities framework ».

 

3. Les acteurs du secteur de l’eau en Bosnie-Herzégovine restent surtout des acteurs locaux et des pourvoyeurs d’aide internationaux

D’après la Constitution issue des accords de Dayton, la gestion de l’eau en BiH est de la responsabilité des entités. Les autorités compétentes sont : pour la FBiH, le ministère de l’agriculture, de la gestion de l’eau et des forêts ; pour la RS, le ministère de l’agriculture, des forêts et des eaux et ; pour le DB, le département de l’agriculture, de la forêt et de gestion de l’eau. Au niveau de la FBiH, ce sont les dix cantons qui sont responsables de la gestion de l’eau, quand en RS ce sont les municipalités directement. Les agences qui s’occupent de la gestion des eaux sont Vode Srpske en RS, et  les agences des eaux du bassin de la Save et celle du bassin de l’Adriatique en FBiH. La gestion de l’eau est ensuite déléguée à des régies locales, propres à chaque municipalité en RS et à chaque canton en FBiH, qui gèrent les réseaux et l’entretien des infrastructures.

La BiH étant considérée comme un pays en développement par de nombreuses IFIs et agences de développement, ces dernières sont très présentes dans le secteur de l’eau. Parmi les agences de développement les plus actives, on trouve la banque de développement allemande KfW, la banque de développement du Conseil de l’Europe, l’Agence suédoise pour le développement et la coopération internationale SIDA et le programme néerlandais ORIO.

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