Pollution de l’air en Bosnie-Herzégovine

Résumé : La Bosnie-Herzégovine souffre d’un niveau de pollution élevé à cause de l’utilisation d’énergies fossiles pour sa production énergétique et son chauffage, comme le charbon (55% du total), et de la vétusté de son parc automobile, constitué à 70% de voitures âgées de plus de quinze ans. La complexité institutionnelle du pays et la faible prise de conscience politique des risques liés à la pollution de l’air font que peu d’initiatives locales ont été prises. Ce sont essentiellement les IFIs et les agences de développement qui luttent contre cette pollution via le financement de projets de rénovation du chauffage urbain et de surveillance de la qualité de l’air.

 

1. La Bosnie-Herzégovine (BiH) connaît une pollution de l’air importante sur son territoire

Les émissions de gaz polluants sont particulièrement élevées en BiH, en particulier le dioxyde de soufre (SO2) avec 109,11 kg/hab contre 2,1 kg/hab en France, principalement en raison du chauffage qui s'appuie sur les énergies fossiles, majoritairement du charbon de faible qualité. Une des particularités du pays est qu’une grande partie de la population dépend de chauffages individuels alimentés au bois ou au charbon, particulièrement polluants. La production d’énergie est aussi très polluante en BiH puisque ses principales sources sont le charbon (55%) et le pétrole (18%). Par contre, le niveau d’émissions de CO2 (5,34 tonnes/hab) reste faible et  représente 54% de la moyenne européenne.

En 2016, une étude d’une ONG indiquait que les principaux pollueurs du pays étaient l’aciérie d’ArcelorMittal à Zenica, les cinq centrales thermiques du groupe public Elektroprivreda BiH et la cimenterie de la compagnie allemande Heidelberg Cement à Kakanj, et qu’ils ne respecteraient pas la législation européenne sur les limites d’émissions. La pollution de l’air est la plus forte dans la ville de Bosanski Brod où une raffinerie très polluante impacte directement la santé des locaux et a déclenché des mouvements de protestation dans la ville jumelle croate de Slavonski Brod. C’est pourquoi les gouvernements de Croatie et de Republika Srpska ont signé un protocole en octobre 2017 pour que la raffinerie s’alimente désormais en gaz naturel en provenance de Croatie, et non plus en mazout.

Les émissions des automobiles représentent une des principales sources de pollution de l’air en BiH avec 40% des émissions et un état du parc automobile préoccupant. En 2017, 70% des voitures avaient plus de 15 ans et 70% avaient un moteur diesel, faisant peser des risques importants liés à la pollution aux particules fines. De plus, 27 000 des nouvelles voitures du parc bosnien sont des voitures d’occasion  importées de l’Union Européenne (UE) et qui ne sont donc plus souvent aux normes européennes.

 

 2. La législation relative à la réglementation des émissions polluantes est encore embryonnaire

La complexité institutionnelle qui caractérise la BiH entraîne souvent une lenteur accrue de la prise de décision lors des projets décidés au niveau national. En effet, le pays est divisé en trois entités : la Fédération de Bosnie et Herzégovine (FBiH), la Republika Srpska (RS) et le district de Brčko (DB), qui ont chacune le contrôle de la politique environnementale de leur territoire en matière de pollution de l’air. Il n’existe donc pas de législation nationale au sujet de la lutte contre la pollution de l’air, mais la FBiH a légiféré sur ce point avec sa loi sur l’air de 2003 qui instaure le principe du pollueur-payeur et se fixe l’objectif d’améliorer la qualité de l’air sur son territoire. L’initiative reste pour l’instant isolée comme la RS n’a pas adopté de législation équivalente.

Malgré cette complexité et ce manque de législation, la BiH a signé la COP 21 le 22 avril 2016 et l’a ratifiée le 16 mars 2017. Les accords de Paris sont entrés en vigueur dans le pays le 15 avril 2017. La BiH s’engage ainsi à réduire l'ensemble de ses émissions de dioxyde de carbone, sans toutefois se fixer d’objectif chiffré. Aujourd’hui, la BiH n’a pas entièrement intégré l’acquis communautaire et les stratégies européennes relatifs à la qualité de l’air. En effet, il n’y a pas eu d’adoption d’une législation harmonisée au niveau national, ni de volonté nationale affichée d’atteindre les objectifs européens de réduction drastiques des émissions de gaz polluants prévus à l’horizon 2020 ou 2030, comme une baisse de 79% des émissions de dioxyde de soufre en 2030.

 

3. Une lutte dans laquelle les acteurs locaux sont peu présents et où l’investissement des IFIs et des agences de développement est déterminant

Les acteurs locaux de la lutte contre la pollution de l’air en BiH sont les ministères des entités responsables de l’environnement : le Ministère de l’environnement et du tourisme en Fédération de BiH, le Ministère de l’aménagement du territoire, des travaux publics et de l’écologie en Republika Srpska et le Ministère de l’aménagement du territoire et du droit foncier dans le district de Brcko. La législation permettant de lutter contre la pollution de l’air se décide donc à leurs niveaux, mais aucun plan d’ampleur nationale n’a pour l’instant été acté.

Ce sont donc les IFIs et les agences de développement, traditionnellement présentes en BiH, qui sont en pointe dans la lutte contre la pollution de l’air, principalement via la rénovation de système de chauffage urbain pour diminuer les émissions polluantes et la surveillance de la qualité de l’air. Ainsi, à la sortie de la guerre, la Banque Mondiale a financé à hauteur de 40 M EUR la réhabilitation d’urgence du système de chauffage de Sarajevo. Aujourd’hui, la BERD a pris le relais au sein de son programme « Green cities framework » (GrCF) et participe au projet de construction d’un système de chauffage urbain dans plusieures villes  aux côtés de l’agence de développement suédoise SIDA et du CIBO. La SIDA est aussi présente dans les programmes de surveillance de la qualité de l’air et est actuellement en train d’identifier des projets potentiels dans ce secteur en FBiH. De leur côté, les fonds européens IPA n’ont pour l’instant pas participé à de projet en lien avec la pollution de l’air à cause de l’absence de stratégie nationale énergétique.

 

 

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