AZERBAÏDJAN
Le secteur viti-vinicole en Azerbaïdjan
Le secteur viticole azerbaïdjanais a fortement souffert des évènements socio-économiques et politiques de ces 25 dernières années. Grâce au soutien des pouvoirs publics, la production reprend lentement à la faveur d’une plus grande rationalisation et d’une amélioration de la qualité.
Une viticulture qui a souffert au gré des changements politiques et économiques
Bénéficiant d’un climat favorable, la culture de la vigne en Azerbaïdjan remonte aux temps les plus anciens comme en attestent les vestiges archéologiques et la littérature. À l’époque moderne, elle a poursuivi son essor, grâce notamment à l’arrivée de colons allemands dans la région de Gandja (Goygol/Helenendorf) au XIXème siècle. C’est durant la période soviétique que l’industrie du vin prendra vraiment son envol avec une production qui culminera à 1,5 M de tonnes de raisin en moyenne au début des années 1980 dont pas moins de 200 variétés différentes. Le pays deviendra même le premier producteur de raisin de l’URSS en 1984 avec une production atteignant 2,1 M de tonnes. En 1980, 12 M d’hectolitres de vin seront produits pour l’exportation vers la Hongrie, l’Allemagne de l’est, Cuba, la Bulgarie, la Pologne ou la Tchécoslovaquie. Puis elle a subi de plein fouet la campagne contre l’alcoolisme menée par Mikhaïl Gorbatchev, laquelle s’est traduite par l’arrachage de 130 000 ha de plants de vigne et la fermeture de 192 unités de transformation.
Par la suite, les réformes agricoles des années 1990 ont favorisé le développement d’une micro-agriculture : 200 exploitations collectives ont été transformées en une myriade d’exploitations privées de 1 à 3 ha. Cette politique a provoqué la désorganisation complète de la filière avec la disparition de l’intégration verticale pratiquée par les Soviétiques. Les exploitants agricoles se sont alors tournés vers des cultures plus rémunératrices comme les céréales ou les cultures maraîchères. Des 284 100 ha dévolus à la vigne en 1984, il n’en restait que 7 700 ha en 2003.
Une production qui reprend lentement et monte en gamme
Les principales régions productrices actuelles sont : Gandja, Goy-Gol, Shamkir, Tovuz, Akstafa, Kazakh, Oguz, Ismailly, Gabala, Shamakhi, Jalilabad, Shabran et Apchéron. En 2019, la superficie totale des vignobles représentait près de 16 000 ha et le volume de production de raisin 201 800 tonnes[1] (167 600 tonnes en 2018). Quant à la production de vin, elle était de 163 000 hectolitres en 2018, dont 40% exportés principalement vers la Russie et la Chine.
La privatisation des unités de production en 1998 et la mise en place d’un système de licences octroyées aux entreprises viticoles disposant d’une certaine capacité de production, a résulté dans l’apparition d’une vingtaine de grands vignerons. L’un des plus importants, créé en 2006 près de Gandja, Goygol Sharab, a repris l’usine fondée en 1860 par la colonie allemande pour relancer la production de vin en Azerbaïdjan. D’autres ont vu le jour dans la région de Shamkir (Sherg ulduzu), Tovuz (Tovuz Baltiya), Ganja (Ganja Sharab), Agsu (Azgranata) et Gabala (Aspi Winery) développant des centaines d’hectares. Un grand projet de vignoble bio est même en cours dans la région de Shamakhi (Shirvan Wines). Encouragé par le Ministère de l’économie, les vignerons se sont regroupés en une Association des Producteurs et Exportateurs de Vin créée le 31 octobre 2016.
Outre les cépages propres à la région comme le Bayanshira, le Madrasa, le Hamashire ou le Shirvanshahi, les autre variétés caucasiennes et notamment géorgiennes (Saperavi, Rkasiteli) ainsi que les variétés d’origine française (Chardonnay, Sauvignon, Cabernet Sauvignon, Merlot et Syrah) sont largement cultivées. La nouvelle génération de viticulteurs s’efforce de renouveler et de replanter les vignobles existants avec des plants de vigne plus résistants en faisant appel à des pépiniéristes étrangers. La production de vin a non seulement repris mais elle s’est bonifiée, comme peuvent l’attester les médailles remportées ces dernières années par l’Azerbaïdjan lors de compétitions internationales.
Une forte volonté des pouvoirs publics pour réanimer le secteur.
Il s’agit d’un secteur porteur qui retient toute l’attention des pouvoirs publics soucieux de diversifier une économie fortement dominée par les hydrocarbures, tout en voulant revaloriser un savoir-faire ancien. Les programmes d’État sur le développement du secteur pour la période 2012-20 et 2018-25 vise à restaurer, voire renforcer la tradition de la viticulture dans le pays.
Les autorités publiques se mobilisent pour favoriser, dans le contexte d’une stratégie de développement des exportations, la promotion des produits alimentaires et non alimentaires en fonction de leur origine. En décembre 2017, un séminaire sur les indications géographiques (IG) a été organisé par l’Agence des Marques et Patentes placée sous la tutelle du Comité d’État pour la Standardisation, la Métrologie et les Patentes de la République d’Azerbaïdjan, en partenariat avec le Service économique de Bakou, le Conseiller agricole et deux experts de l’INAO. Ce séminaire avait pour but de présenter l’expérience française dans le cadre de la coopération bilatérale soutenant le développement des IG dans ce pays. Celles-ci prennent une ampleur particulière au moment où les institutions du pays souhaitent développer les filières d’excellence et stimuler les exportations dans le cadre d’un plan de soutien décidé récemment, avec le lancement du label ‘made in Azerbaïdjan’ créé par décret présidentiel.
L’Institut viti-vinicole souhaite de son côté développer ses activités dans toutes les régions du pays, pour renforcer l’expertise nationale. L’Azerbaïdjan a adhéré en 2013 à l’Organisation internationale de la Vigne et du Vin. Tous les ans, en fin d’année, un festival du vin est organisé à Ganja par les autorités publiques où sont invitées des délégations étrangères. Ainsi les représentants de plusieurs régions françaises y ont participé (comme la Champagne-Ardenne ou la Bourgogne et même des villes ou terroirs spécifiques comme Cognac ou Chablis.)
Serge KREBS
[1] Les statistiques ne distinguent pas le raisin de table de celui de cuve