Le secteur agricole en Azerbaïdjan

L’agriculture représente le premier secteur parmi ceux retenus par le gouvernement azerbaïdjanais pour diversifier l’économie du pays, encore très dépendante du secteur des hydrocarbures. Elle bénéficie d’une feuille de route spécifique accompagnée de nombreuses mesures de soutien, prêts concessionnels, subventions et aides diverses. 

1. Le pays possède des conditions climatiques favorables pour une production variée.

Avec 9 zones climatiques différentes, l’Azerbaïdjan présente des conditions climatiques et géologiques favorables pour une production agricole très variée tout au long de l’année. Les terres appropriées aux activités agricoles représentent 4,8 M hectares (ha), soit plus de 50% de la surface totale du pays, dont 2 M ha ont été cultivées en 2021. Une grande partie de ces terres (1,2 M ha) nécessite l’irrigation en raison de précipitations insuffisantes.

La production agricole connaît une bonne dynamique ces dernières années avec une croissance de 7,2% en 2019, 2% en 2020 et 3,4% en 2021. Sur les 10 premiers mois de l’année 2022, la valeur de la production agricole a augmenté de 3,2% en g.a., à 5,7 Mds USD, d’après le Comité d'État des statistiques : les productions végétales ont augmenté de 3,2% à 3,1 Mds USD, tandis que les productions animales ont cru de 3,1% à 2,6 Mds USD.

Les principaux produits récoltés en 2021 sont les céréales (3,3 M tonnes), les fruits et légumes (3,5 M t.), les pommes de terre (1 M t.), le thé (1,2 M t.), le coton (286 K t.) et le raisin (209 K t.).

L’élevage prend une place grandissante dans l’agriculture azerbaïdjanaise. On recense en 2022 2,6 M de têtes de bovins, 7,9 M de têtes d’ovins et 30 M de volailles. De même, 610 000 t. de viande, 2,2 M de t. de lait et 1,8 Mds d’œufs ont été produits en 2021.

Le degré d’autosuffisance de la production végétale et animale est respectivement 74 % et 87%. L’Azerbaïdjan est un importateur net de plusieurs produits agricoles de base. En 2021, les importations des produits alimentaires représentaient 1,9 Mds USD (17% de l’ensemble des importations). Il s’agit essentiellement de blé (332 M USD), de fruits et légumes (223 M USD), d’huile végétale et animale (222 M USD), de produits laitiers (94 M USD) et de viande (71 M USD).

Bien que la production agricole du pays soit majoritairement destinée au marché domestique, une part importante de la production à haute valeur commerciale est destinée à l’export, principalement vers la Russie et d’autres pays de la CEI. Ces exportations se sont élevées à 877 M USD en 2021 (sur un total d’exportations de 22,2 Mds USD). En détail, les principaux produits exportés étaient la fibre de coton (208 M USD), les tomates (160 M USD) et les kakis (126 M USD).

2. Largement privatisé, le secteur agricole reste très important en termes d’emploi…

Avec le rétablissement de l’indépendance en 1991, le secteur agricole, comme les autres secteurs de l’économie, s’est ouvert aux investisseurs privés. La loi sur la réforme agraire adoptée en 1996 a aboli les kolkhozes et sovkhozes et partagé les terres entre l’État, les municipalités et les propriétés privés. Depuis cette réforme, les exploitations agricoles azerbaïdjanaises se caractérisent par leur petite taille : 71% d’entre elles ne disposent que de 3 ha ou moins et 82% possèdent de 1 à 10 têtes de bétail.

Malgré la multiplicité des acteurs privés, quelques grands groupes comme Azersun, Gilan ou PMD (Groupe Pasha) occupent une place prépondérante dans la production agricole. D’autres entreprises de taille plus petite comme AZZA (production laitière), Susenagro LLC (production de céréales à Aghsu), Milk Pro et Atena (production laitière) sont également actives sur le marché.  

Si le secteur agricole ne représente qu’environ 6% du PIB (5,9% en 2021), il emploie 36% de la main d’œuvre nationale, ce qui représente un enjeu social important.

3. …et pourtant elle souffre d’un manque de financement, malgré des soutiens financiers de l’État.

L’agriculture est l’un des secteurs prioritaires de la politique de diversification de l’Azerbaïdjan. À ce titre, le gouvernement mène une politique de soutien vigoureuse via l’Agence d’État des crédits agricoles chargée de distribuer des aides directes, des prêts bonifiés ou des subventions pouvant aller jusqu’à 70% de l’investissement initial. Le budget de l’État pour 2023 prévoit 1,2 Mds AZN (705 M USD, +20% par rapport à celui de 2022) dédiés à la sécurité alimentaire et à la dynamisation du secteur agricole.

De plus, l’agriculture bénéficie d’une feuille de route stratégique adoptée en décembre 2016 couvrant la production et la transformation des produits agricoles. Composée de trois étapes (2017- 2020, 2021-2025 et au-delà de 2025), elle prévoit le développement de technologies locales propres, l’amélioration de la productivité, la simplification du crédit et des prêts, le soutien aux investisseurs privés, l’accroissement de la fertilité des sols, la promotion de l’agriculture verte, le soutien à la recherche et à la formation, la sécurité alimentaire et le développement de l’expertise.

Afin d’augmenter la productivité et la compétitivité, le gouvernement incite également les petits producteurs à se réunir en coopératives agricoles. La création des clusters agricoles et d’agro-parcs est par ailleurs devenue une priorité de l’État. Conformément au décret présidentiel de 2014, la création de 51 agro-parcs sur une superficie de 240 000 ha (1,4 Mds USD investis), se poursuit. Sur 44 agro-parcs déjà opérationnels, 25 ont bénéficié de prêts bonifiés (108 M USD) et 26 ont été exonérés de droits de douane et de TVA (24 M USD), afin de faciliter l'importation d'équipements agricoles.

La feuille de route envisage également des réformes institutionnelles. À titre d’exemple, la qualité et les normes des produits agricoles étaient de la compétence de 8 institutions administratives, ce qui freinait le processus de production, d’importation ou d’exportation. Pour faire face à ce défi, une agence unique, l’Agence de la sécurité alimentaire (AQTA) a été créée en 2017 et elle est opérationnelle depuis le 1er janvier 2018.

Afin de faciliter l’accès des agriculteurs au financement, une mesure est prévue dans la feuille de route stratégique agricole. Elle a été mise en œuvre par le décret sur les mesures supplémentaires pour le développement du secteur agricole signé le 11 avril 2017 par le Président de la République. Ce décret vise à améliorer les mécanismes de crédits et à mettre en place un système d’assurance flexible pour les entreprises agricoles, le secteur des assurances agricoles étant actuellement sous-développé.

Toutefois, le financement reste un problème majeur du secteur agricole. Au 1er septembre 2022, la part des crédits agricoles parmi la totalité des crédits accordés aux entrepreneurs (11 Mds USD) ne représentait que 3%, soit environ 353 M USD dont 86,5 M USD de prêts bonifiés. Les experts locaux estiment que ce volume annuel doit être au moins doublé.

4. L’agriculture est le principal vecteur de développement des régions recouvrées en 2020.

Les autorités azerbaïdjanaises ont pour ambition de relancer dès que possible l’activité économique dans les régions recouvrées à l’issue de la guerre des 44 jours fin 2020, représentant près de 9000 km2. L’agriculture est l’un des secteurs qui offre un potentiel important compte tenu des avantages pedo-climatiques de ces 7 districts (Agdam, Fuzuli, Djabrail, Zangilan, Goubadli, Lachin et Kelbadjar), lesquels représentaient 140 000 ha de terres cultivées en 1980. Les autorités estiment que le potentiel agricole et d’élevage dans ces régions porte sur 230 000 ha de terres, 430 000 têtes de bovins et 1,6 M de têtes d'ovins. Dans l’hypothèse où l’activité agricole reprendrait pleinement dans ces territoires, la production agricole totale du pays pourrait augmenter de plus de 8 %.

Les terres agricoles dans les territoires recouvrés n’ayant pas été partagées lors de la réforme foncière de 1996 car étant hors du contrôle de Bakou, les autorités entendent mettre en place un mécanisme temporaire pour leur exploitation. Pourtant les activités agricoles ont été lancées dès la signature de l’accord de cessez-le-feu du 10 novembre 2020, avec la culture des céréales sur 10 000 ha en 2021 et 50 000 ha en 2022. Le gouvernement envisage de doubler cette surface en 2023 pour renforcer l’autosuffisance du pays en blé.

Dans ce contexte, le groupe privé "Azersun Holding", l'une des principales sociétés agricoles a créé deux grands complexes agricoles dans les territoires recouvrés : « Suqovuşan Aqropark » et « HƏKƏRI Aqropark » dans les districts de Tartar et de Zangilan, respectivement. À ces activités s’ajoutent également le retour des éleveurs et apiculteurs dans la région de Kelbadjar, la restauration des réseaux d’irrigation dans le district recouvré de Jabrayil (765 M USD), le projet pilote de “smart village” dans la localité d’Aghali dans le district recouvré de Zangilan, doté d’un budget de 6,4 M USD, qui a accueilli ses premiers habitants en juillet 2022.  

Enfin, dans le budget 2023, 368 M USD, soit plus de 50% de l’ensemble des fonds prévus pour subventionner le secteur agricole, seront destinés aux activités agricoles dans les territoires recouvrés.

5. Coopération avec la France.

La France et l’Azerbaïdjan coopèrent dans le secteur agricole. Plusieurs sociétés françaises actives dans le domaine des serres et du machinisme agricole sont actives en Azerbaïdjan. Dans le domaine agroalimentaire, les exportations françaises vers l’Azerbaïdjan représentaient environ 10 M EUR en 2021 ; il s’agit essentiellement de produits laitiers, de plantes, d’animaux vivants, de produits de la pêche et de l’aquaculture.

Dans l’autre sens les importations françaises sont très réduites et représentaient 0,09 M EUR en 2021. Les principaux produits azerbaïdjanais importés en France sont les noisettes et les jus de fruits.

D’une manière générale, les secteurs à fort potentiel pour l’offre française en Azerbaïdjan sont les équipements agricoles, les semences et le bétail. Les entreprises françaises spécialisées dans ces secteurs ont enregistré de bons succès dans leur coopération avec le pays.

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