Indicateurs et conjoncture

  2020 2021 2022 2023 2024 2025(p)
PIB nominal (milliards USD) 385 486 632 646 632 684
Population (millions) 45,3 45,8 46,2 46,7 47,1 47,6
PIB par habitant (USD) 8 489 10 610 13 676 13 836 13 415 14 362
Croissance du PIB réel (%) -9,9 10,4 5,3 -1,6 -1,7 5,5
Inflation (fin de période, %) 36,1 50,9 94,8 211,4 117,8 20,0
Chômage (moy. annuelle, %) 11,6 8,8 6,8 6,1 7,2 6,3
Solde budgétaire (% du PIB) -8,7 -4,3 -3,8 -5,4 0,3 0,4
Dette publique (% du PIB) 103,8 81,0 84,5 155,4 85,3 73,1
Solde courant (% du PIB) 0,7 1,4 -0,6 -3,2 1,0 -0,4
Dette extérieure (% du PIB) 69,8 55,0 58,8 121,6 49,2 45,8
Perception de la corruption (rang du classement Transparency International) 78 96 94 98 99 /

Source : FMI, INDEC, Banque centrale, Transparency International

 

L’Argentine est le 8ème pays du monde par sa superficie (2,8 millions de km², soit plus de 5 fois la France), et compte la 4ème plus grande population d’Amérique latine avec près de 47 millions d’habitants, derrière le Brésil, le Mexique et la Colombie.

Avec un PIB nominal de 632 Mds USD en 2024, l’Argentine est la 3ème plus grande économie d’Amérique Latine, après le Brésil et le Mexique, et la 24ème économie mondiale. Le pays se positionne en outre dans le peloton de tête des pays d’Amérique du sud avec le revenu par habitant le plus élevé, derrière le Guyana, l’Uruguay et le Chili en 2024 selon les données du FMI (ajusté en parité de pouvoir d’achat). Au-delà de son revenu par habitant élevé, l’Argentine fait partie des rares pays de la région à se classer dans la catégorie « très haut niveau de développement humain » de l’ONU, avec un IDH de 0,865 en 2023.

Pays riche en ressources naturelles et agricoles, l’Argentine est un des principaux exportateurs mondiaux de soja, maïs, blé et viande. Le secteur de l’agroalimentaire (incluant les produits transformés) constitue le principal poste d’exportations du pays (3/5ème du total) et une source majeure d’entrée de devises. Le pays est aussi doté d’abondantes ressources énergétiques, avec des sols riches en lithium (4ème producteur mondial et 3ème en termes de réserves) en cuivre, et du gaz (2ème plus grand gisement de gaz de schiste dans le monde). Malgré ce potentiel, le développement de l’Argentine a pâti de plusieurs crises économiques au cours de son histoire (9 défauts de paiement, 23ème programme FMI en cours) : le pays, qui représentait 35% du PIB sud-américain dans les années 1960, n’en représente désormais plus que 15%.

 

Avec l’arrivée au pouvoir de Javier Milei, 2024 a été marqué par un tournant en matière de politique économique

Javier Milei a été élu en novembre 2023, dans un contexte économique extrêmement dégradé. En 2023, l’Argentine avait été touchée par sa plus grave crise économique depuis 2001, avec une récession (-1,6%), une inflation hors de contrôle (211% g.a en décembre 2023), une pénurie de devises, et un creusement des déficits jumeaux (atteignant 5,4% du PIB pour le solde budgétaire et 3,2% pour le solde courant) et de la brèche cambiaire (écart entre le cours officiel du Peso et les cours sur les marchés parallèles, à 200% fin 2023).

La thérapie de choc menée par l’exécutif a produit des résultats notables, même si certains indicateurs ont connu une évolution contrastée. Bien qu’en situation de minorité parlementaire, et fonctionnant sur la base de décrets et d’annonces de la Banque Centrale, le gouvernement a réussi au bout de 6 mois à faire voter ses premières lois, notamment la Ley de Bases et la loi fiscale, qui visent à déréguler l'économie, flexibiliser le marché du travail, augmenter les recettes et attirer les investisseurs étrangers par un régime plus favorable pour les grands investissements (RIGI).

Le plan d’ajustement du Président Milei repose sur 3 piliers essentiels :

  • Un assainissement drastique des finances publiques : en 2024, le solde budgétaire a affiché un excédent historique de 0,3% du PIB (1,8% du PIB pour l’excédent primaire), en grande partie via une baisse des dépenses publiques de 27%, adossée essentiellement à la réduction des retraites et de l’investissement public.
  • Une politique monétaire restrictive pour combattre l’inflation : sous l’effet de la dévaluation de décembre 2023, l’inflation avait dans un premier temps connu une forte hausse, à 25,5% v.m en décembre 2023. Puis, le quasi gel de la quantité de Pesos en circulation, l’appréciation des taux de change parallèles sur le S2 2024 freinant l’inflation importée et la baisse des dépenses des dépenses publiques ont permis de réduire l’inflation à 2,7% v.m en décembre 2024
  • Un ajustement en matière de politique cambiaire pour rétablir l’équilibre externe : la dévaluation massive (54%) dès le mois de décembre 2023, a été suivie par la mise en place d’un régime de parité glissante (crawling PEG) avec un rythme de dépréciation mensuelle de 2% face à USD (réduit à 1% en février 2025). Couplé à la normalisation des conditions climatiques (grave sécheresse en 2023), le solde courant est redevenu excédentaire en 2024 (+1,0% du PIB). La brèche cambiaire avait également largement reculé, à moins de 10% fin 2024, contre 200 % en novembre 2023.

Si dans un premier temps, ce plan d’ajustement a pesé sur l’activité et les indicateurs sociaux, en particulier au S1 2024, ceux-ci se sont progressivement rétablis au cours de la seconde partie de l’année 2024. Alors qu’elle était déjà en recul en 2023, l’activité s’est de nouveau contractée en 2024 (-1,7%), suite à l’ampleur du plan d’ajustement, mais à un niveau nettement moindre qu’escompté (les analystes tablaient initialement sur un recul de l’activité de 3 à 4%). L’investissement et la consommation privée ont ainsi nettement reculé (-17,4% et -4,2%). Un rebond de l’activité s’observe néanmoins depuis le T3 2024 et s’est confirmé au T4. Parallèlement, le taux de pauvreté, qui s’était envolé au S1 2024, à 52,9% après 41,7% au S2 2023, a depuis nettement reculé au S2 2024, à 38,1%. De plus, la priorité donnée à la lutte contre l’inflation par les autorités, ainsi que la reprise de l’activité, via la hausse des importations, entravent l’accumulation de réserves. Fin 2024, les réserves de change ne s’étaient que faiblement reconstituées, atteignant 33 Mds USD fin 2024.

 

La signature d’un 23ème programme FMI en avril 2025 permet de compléter le plan de stabilisation en renforçant l’équilibre externe du pays

L’Argentine a conclu en avril 2025 avec le FMI le 23ème programme de son histoire, pour un montant de 20 Mds USD sur 4 ans, avec un décaissement initial de 12 Mds USD. Le précédent programme, de 44 Mds USD sur 4 ans, avait pris fin en décembre 2024. En effet, le plan de stabilisation de l’exécutif n’avait pas permis l’accumulation de réserves de change. Ces dernières étaient même en forte baisse depuis début 2025, passant de 33 Mds USD en janvier à 24 Mds USD avant l’accord selon la BCRA. En termes nets, elles avaient ainsi poursuivi leur chute en territoire négatif, pour atteindre environ -7 Mds USD. Cet amenuisement des réserves de change s’explique essentiellement par le creusement du déficit courant lié à l’appréciation réelle du taux de change, du rebond de l’activité et de mesures favorables aux importations, et de comportements d’anticipations des exportateurs conduisant au report des ventes en attendant un taux de change plus rémunérateur.

Dans la lignée du programme FMI, l’Argentine a flexibilisé son régime de change et partiellement levé le contrôle des changes. Le régime de change est ainsi passé d’une parité glissante à une bande glissante : le cours officiel du Peso fluctue désormais dans une bande comprise entre 1000 ARS/USD et 1400 ARS/USD, avec un élargissement de la bande à hauteur de 1%/mois. Le contrôle du change, a également été largement assoupli, avec en particulier la fin du plafond à 200 USD d’achat mensuel de devises pour les personnes physiques, la facilitation des importations, et la possibilité pour les entreprises étrangères de rapatrier les dividendes réalisés depuis le 1er janvier 2025.

Cet accord et la levée partielle du contrôle du change, ainsi qu’une inflation qui demeure contrôlée (2,8 % v.m en avril) devraient permettre d’accélérer la reprise économique : le FMI table ainsi sur une croissance de 5,5 % en 2025. Cependant des vulnérabilités économiques demeurent : les réserves de change restent à un niveau faible, le niveau du risque pays ne permet pas encore à l’Argentine de retourner sur les marchés de capitaux internationaux et le Peso parait encore surévalué, pénalisant la compétitivité d’une partie de l’économie, notamment le secteur industriel.

Une prochaine étape clé résidera dans les élections de mi-mandat d’octobre 2025. La moitié des sièges (127) de la Chambre des députés et un tiers du Sénat (24) y seront mis en jeu. Alors que le parti de J.Milei (La Libertad Avanza) ne dispose à date que de 16 % des sièges à la Chambre et 8 % au Sénat, il ne remettra en jeu que deux députés. Ses marges de manœuvre pour accroître son poids au Congrès sont donc élevées, ce qui lui permettrait de poursuivre les réformes structurelles entamées au début de son mandat.

 
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