Angola // Conjoncture économique et financière (octobre 2023)

Sous programme FMI, après plusieurs années de réformes structurelles, le pays subissait une période prolongée de récession économique, une crise de la dette et un effondrement de sa monnaie. Depuis 2021 le cadre macroéconomique et financier s'est inversé : le prix du baril est reparti au plus haut ; le kwanza s'est largement apprécié et 2022 a été l’année de la reprise, avant que la situation économique ne s'assombrisse à nouveau à la mi-mai 2023, avec une brusque dépréciation du kwanza. La situation des finances publiques en nette amélioration (avec une dette passée de 135% du PIB fin 2020 à 60% fin 2022 et un excédent budgétaire significatif) a suivi le mouvement et les prévisions les plus optimistes tablent pour 2023 sur un poids de la dette à 83 % du PIB et un déficit public à -2,1 %. Les agences principales ont toutes maintenu leur notation souveraine (Fitch a revu sa perspective de positive à stable). 

Après cinq années de récession, l’Angola a renoué avec la croissance en 2021, qui s’est accélérée en 2022, mais devrait chuter en 2023.

A partir de 2016, l’Angola a connu 5 années consécutives de récession en raison de la chute des revenus pétroliers, d’une politique budgétaire contrainte par un niveau d’endettement élevé, puis de la crise sanitaire, mettant en évidence le déséquilibre d’un modèle économique extrêmement dépendant du pétrole (un tiers du PIB, 2/3 des recettes fiscales et 95% des revenus d’exportation). Si le pays a renoué avec la croissance en 2021 +1,1 % (FMI), celle-ci s’est accélérée +3 % (FMI), grâce aux revenus pétroliers (hausse des cours, et de la production après plusieurs années de baisse, mais aussi aux effets de la transformation économique du pays, initiée par le gouvernement depuis 2018 avec l’appui du FMI (amélioration du climat des affaires, diversification, etc.)

Toutefois, l’effondrement brutal de la monnaie angolaise face au dollar (-37 % depuis mi-mai 2023), la baisse des revenus pétroliers, une diversification de l’économie trop timide et un budget 2023 basé sur des prévisions trop optimistes semblent redessiner un cadre d’instabilité macro-financière dont les premières conséquences sont une réduction de la croissance et une augmentation du poids de la dette externe. Les prévisions de croissance du PIB varient de +0,9 % à -2,7 % pour 2023 et ceux de la balance des paiements (compte financier) +1,5 % à -4,8 %.

L’Angola doit faire face à une inflation structurellement élevée (13 % en 2022, après 27 % en 2021) et qui devrait explosée en 2023, portée par les prix alimentaires (les biens alimentaires pèsent pour 65 % de l’inflation). Sachant que l’inflation est à 70 % importée, la forte appréciation des devises engendre une très forte hausse de l’inflation estimée à +40 % depuis le mois de mai 2023.

La situation des finances publiques, qui s’était très fortement dégradée durant les années de récession, s’est améliorée en 2022, mais se dégrade à nouveau en 2023.

La dette publique a culminé à 138,4 % du PIB à la fin de 2020, reflétant en grande partie les effets ponctuels de la dépréciation du taux de change et du ralentissement de la croissance. Le ratio de la dette publique au PIB a diminué rapidement en 2021-22 (60 % fin 2022) et devait continuer à diminuer légèrement sur les cinq prochaines années, pour s'établir légèrement sous les 60 % à la fin de 2027.

Cette combinaison de divers chocs macro-budgétaires – baisse de la croissance, inflation, cours du pétrole, production pétrolière, solde primaire, taux de change, etc. – conjuguée à la fin des moratoires (Chine et DSSI) insuffisamment anticipée par les autorités, a considérablement augmenté le poids de la dette publique angolaise. Il devrait être de l’ordre de 90 % du PIB à la fin de l’année 2023 (effet change), le FMI prévoit 83% dans le meilleur des cas.

Depuis la flexibilisation du régime de change en 2018, la situation des comptes externes s’est nettement améliorée mais reste tendue.

Après une dépréciation de 75% par rapport au dollar entre 2018 et fin 2020 suite à la flexibilisation du change, le kwanza s'est fortement apprecié jusqu'en octobre 2022, avant les élections présidentielles, puis a connu une forte et rapide dépréciation de 37% entre la mi-mai et la fin de juin 2023.

Le compte courant devrait se détériorer en 2023 en raison de l'affaiblissement du secteur pétrolier, mais rester excédentaire (grâce à une reprise de la production et un cours du Brent dont la courbe s'est inversée à mi-2023 avec une tendance désormais haussière). Le taux d'endettement devrait à nouveau remonter cette année en reflet de la dévaluation du kwanza pour diminuer à nouveau à moyen terme pour tendre vers un niveau équivalent à 2022 (+/- 60 %). Le solde budgétaire primaire devrait quant à lui passer en négatif à -2,1 % du PIB contre +0,7 % fin 2022. Il devrait néanmoins redevenir positif dès 2024, et permettre de contenir le ratio d'endettement et les besoins bruts de financement à moyen terme. Les autorités s'efforcent de renforcer leur stratégie de gestion de la dette dans le cadre d'un effort visant à améliorer la dynamique de la dette publique de l'Angola et devraient renouer avec une budgétisation prudente pour 2024 (le budget 2023 a été réduit de 13,5 % (en dépenses et en recettes). La dette publique interne a été lissée sur 10 ans.

Les réserves de change à fin décembre 2022 s’élevaient à 14,5 Mds USD (-7 %/ 2021), soit une couverture d’environ 6 mois d’importations de biens et de services (inférieure à la moyenne des 10 dernières années de 8,8 mois). Au 31 août 2023 elles s'élèvent à 14 Mds USD (7,5 mois, les importations sont en baisse depuis le début de l’année 2023).

Le tableau macroéconomique et financier de l'Angola s’est brusquement dégradé depuis la mi-mai 2023. Un fléchissement de la croissance paraît donc inéluctable. Les risques qui pèsent sur les perspectives restent élevés, compte tenu de la forte dépendance persistante à l'égard du secteur pétrolier, et le moyen terme dépend largement de la reprise du secteur non pétrolier et des progrès réalisés par les autorités dans le cadre du plan de diversification de l’économie.

 

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