Situation économique et financière

En 2023, l’Albanie est le pays des Balkans qui présente la meilleure situation économique. Avec un secteur touristique en plein essor et une inflation limitée, le pays a enregistré une croissance de +3,3 % en 2023, après +4,8 % en 2022. En parallèle, le ratio d'endettement public et le déficit du compte courant ont diminué. Cependant, le pays devra faire face à d'importants besoins de financement dans la période à venir, ce qui rend nécessaire une gestion prudente des finances publiques. Le nouveau plan de croissance de l'UE devrait néanmoins créer une marge de manœuvre supplémentaire propice aux réformes structurelles et aux investissements nécessaires.

1. La croissance albanaise enregistre les meilleurs résultats de la région.

 

Avec une croissance moyenne de +3,5 % au cours des trois dernières années, l'économie albanaise a démontré une certaine résilience face aux trois chocs successifs (tremblement de terre de 2019, Covid-19 et guerre en Ukraine). En 2023, la croissance albanaise s’établit à +3,3 %, grâce au secteur du tourisme (le nombre de touristes a augmenté de +78,1 % entre 2021 et 2023, atteignant 17,1 millions de personnes), à la sécurité énergétique (production hydraulique favorisée par une bonne pluviométrie) et à une inflation limitée.

Malgré le choc des termes de l’échange, l’Albanie a enregistré une réduction du déficit du compte courant. En 2022, malgré la forte progression des importations (+ 26,7 % en g.a.) à 8,4 Mds EUR et sous l’effet principal de la hausse des exportations de services (+37,7 % à 4,8 Mds EUR – essentiellement issues des revenues du tourisme) le déficit du compte courant s’était contracté de -1 MEUR à 1,0 Mds EUR. Cette dynamique s'accélère en 2023, avec une nouvelle progression des exportations de services de +38,0 % à 6,6 Mds EUR, tandis que la hausse des importations ralentit (+11,5 % en glissement annuel à 9,6 Mds EUR). Le déficit du compte courant s'établit ainsi à -190 MEUR en 2023 et continue d'être entièrement financé par les investissements directs étrangers nets à 1,2 Mds EUR (+4,8 % en glissement annuel).

En parallèle, le pays a enregistré le taux d'inflation le plus faible de la zone. L'amélioration des comptes extérieurs a favorisé l'appréciation du LEK, de +16,5 % par rapport à l'euro depuis janvier 2022 pour atteindre 100,5 ALL/EUR en moyenne mensuelle en mai 2024t. Le taux de change flottant a ainsi amorti le choc inflationniste mondial sur l'économie albanaise, qui a enregistré des taux d'inflation respectivement à +6,8 % et +5,2 % en 2022 et 2023. Par ailleurs, après avoir atteint un pic de 8 % en octobre 2022, celui-ci a ralenti à 2,1 % en avril 2024, conformément à l'objectif de 3 % de la BCA.

Selon les prévisions du FMI, la croissance albanaise devrait s'établir à +3,3 % en 2024 puis +3,4 % en 2025.

3. L'Albanie est en mesure d'exploiter le potentiel du plan de croissance de l'UE.

Le nouveau plan de croissance (NPC) pour les Balkans occidentaux (2024 – 2027), qui vise à 1/ intégrer les marchés des BO au marché unique ; 2/ approfondir l’intégration régionale des pays des BO ; 3/ accélérer les réformes dans le domaine des fondamentaux ; et 4/ augmenter les concours financiers de l’UE, devrait être bénéfique pour l’Albanie :

L’Albanie converge vers l’Acquis de l’UE. Comme l’année précédente, la Commission a estimé au sein de rapport de progrès 2023 que le pays a été diligent dans le travail de reprise de l’acquis. Cette politique volontariste devrait faciliter l’accès aux fonds associés au NPC (6 Mds EUR prévus pour les Balkans occidentaux).

Les fonds, dirigés vers des investissements dans les infrastructures via le CIBO[1], et la mise en œuvre de réformes, devraient accélérer la digitalisation et ainsi contribuer à améliorer les capacités administratives, alors que la sous-réalisation des investissements publics est une problématique récurrente. Les investissements dans le capital humain sont également identifiés comme prioritaires, l'Albanie étant le pays des Balkans enregistrant la productivité du travail la plus faible[2], en raison notamment d'un faible niveau d'éducation. Ces concours financiers auront également pour vocation de faciliter la transition verte du pays. La vulnérabilité climatique de l'Albanie requiert en effet des actions concrètes compte tenu de la dépendance à l'hydroélectricité et au tourisme, deux secteurs exposés aux effets du changement climatique. Enfin, l'amélioration de l'environnement des affaires reste un enjeu alors que le pays occupe la 98ème place dans le classement de perception de Transparency International, en raison notamment des faiblesses constatées en matière de législation portant sur la justice pénale.

Rejoindre le système SEPA aurait un impact économique concret pour l’Albanie, dont les envois de fonds sont très élevés. D’une manière générale, une plus forte intégration des pays de l’ALECE avec l’UE[3] entrainerait un gain de croissance de +8,8 % pour l’Albanie[4] selon une étude de la Banque mondiale.

2. Les besoins de financement resteront néanmoins importants.

Après avoir culminé à 75,8 % du PIB en raison des deux chocs successifs enregistrés en 2019 et 2020 (tremblement de terre ; Covid-19), la dette publique s'est contractée pour atteindre 59,2 % à la fin de 2023, soit une baisse de -5,1 pp en g.a.. La hausse des recettes publiques, induite par l'inflation ainsi que la sous-réalisation des dépenses d'investissements, ont conduit à une réduction du déficit public entre 2022 et 2023, passant de -6,7 % en 2020 à -1,3 %. La forte hausse du dénominateur et l'appréciation du LEK (46,7 % de la dette libellée en devises) ont également contribué favorablement à la réduction du ratio d'endettement. Le budget 2024, affichant un excédent de 0,2 % du PIB, prévoit une nouvelle consolidation budgétaire malgré l'approbation d'une loi visant à augmenter considérablement les salaires du secteur public, entraînant un coût annuel estimé à 1,0 % du PIB à partir de 2023. Ainsi, la dette publique devrait s'établir à 58,7 % du PIB en 2024.

Il reste que les besoins de financement, représentant en moyenne 17,4 % du PIB pour la période 2024-2028, demeurent importants. Bien que les besoins de financement pour 2024 soient couverts grâce à l'émission d'euro-obligations de 600 MEUR en 2023, les taux d'intérêt applicables à l'Albanie ont augmenté pour atteindre 6,125 % à cinq ans. Par conséquent, la charge d'intérêt devrait progresser de 1,9 % en 2021 et à 3,5 % en 2028. En parallèle, la maturité de la dette reste faible, avec un quart de la dette arrivant à échéance à moins d'un an, tandis que près de la moitié du stock de dette est exposée à un risque de change.

 

 

[1] Cadre d’Investissement pour les Balkans Occidentaux

[2] A seulement 34,7 % de la moyenne de l’UE (34 660 USD en PPP).

[3] Subordonnée à l’intégration du marché régional commun atteignant le niveau d’intégration UE-Norvège)


 

 

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