Mise en valeur de la capacité de résilience de la croissance économique européenne, malgré le ralentissement de la croissance mondiale. Au-delà du brexit, identification des principaux défis de la zone euro : appel à une meilleure coordination des politiques monétaire et budgétaire au sein de l'Union Européenne et engagement en faveur de réformes sur le long terme.

Invité d’honneur du forum Paris Europlace à Tokyo du 28 novembre 2019, le Gouverneur de la Banque de France a mis à profit son déplacement au Japon pour tenir une conférence à l’université publique de commerce d’Hitotsubashi sur les défis européens face aux incertitudes mondiales. La conférence a rassemblé plus de 160 élèves, professeurs et représentants de banques centrales et de ministères japonais.

 salle de conférence

 

En dépit du ralentissement économique mondial, la croissance économique de l’Union Européenne se montre résiliente.

Depuis les crises économiques et financières de 2008-2009, l’économie mondiale s’est redressée progressivement mais elle n’est pas revenue à son niveau d’avant-crise. La croissance économique mondiale, y compris dans les pays émergents, atteint 3% aujourd’hui en moyenne annuelle contre 5,5% avant la crise.

Depuis fin 2018, l’environnement économique mondial est particulièrement incertain. Le recul des échanges mondiaux observé sur fond d’intensification des conflits commerciaux, explique en grand partie le ralentissement économique actuel. Toujours à l’échelle mondiale, ce ralentissement s’accompagne d’une intensification de la vulnérabilité financière des institutions financières non bancaires et des entreprises privées.

Les prévisions de croissance économique de la zone euro sont révélatrices de l’incertitude qui pèse sur l’économie mondiale : 1,1% de croissance du PIB attendus pour 2019 dans la zone euro, contre 1,8% en 2018 tandis que le taux d’inflation de la zone euro reste inférieur à la cible de 2% (headline inflation en 2019 estimée à 1,2% par la BCE). Le Brexit constitue un facteur additionnel d’incertitudes pour l’Europe.

Malgré cela, l’économie de la zone euro se montre résiliente : 11 millions d’emplois ont été créés dans la zone euro depuis 2013 et l’inflation devrait se rapprocher progressivement de la cible de 2% à moyen terme. La croissance du PIB/habitant a été similaire à celle des Etats-Unis sur la période 1999-2018 (en moyenne 1,1% contre 1,3% aux Etats-Unis). Enfin, l’Union Européenne affiche aujourd’hui un déficit public (moins de 1% du PIB) et une dette publique (moins de 90% du PIB) moins élevés qu’aux États-Unis.

L’économie française résiste encore mieux : 1,3% de croissance du PIB attendu en 2019 après 1,5% en 2018.  1 million d’emplois ont été créés en 4 ans en grande partie grâce au CICE et aux réformes menées sur le marché du travail.

  

gouverneur

 

La zone doit désormais engager des réformes pour relever les défis européens.

Le Gouverneur de la Banque de France a rappelé aux étudiants les succès de la zone euro depuis sa création en 1999. L’euro a tenu ses promesses : stabilité des prix, stabilité du taux de change, soutien grandissant pour l’union de la part des pays membres, soutien populaire de l’euro.

La politique monétaire a joué un rôle important pour soutenir la reprise dans la zone euro : on estime que les mesures non conventionnelles ont augmenté la croissance et l’inflation de près de 2 points de pourcentage entre 2016 et 2020. Celant étant, la politique monétaire ne peut pas tout faire. Une relance budgétaire par les pays disposant de marges de manœuvre pour le faire stimulerait la demande agrégée accentuerait la croissance à long terme de la zone euro. 

Au-delà de la bonne coordination entre politique monétaire et politique budgétaire, les défis de la zone restent nombreux selon le Gouverneur :

  • Assurer un meilleur partage des risques publics en renforçant le Mécanisme Européen de Stabilité.
  • Renforcer le partage des risques privés par la mise en œuvre d’une union bancaire et d’une union des marchés des capitaux. Le Gouverneur a souligné que l’épargne de la zone euro est supérieure aux investissements de 300 Mds€, mais que la bonne circulation de cette épargne est freinée par la fragmentation du secteur bancaire européen.
  • Mettre à profit les taux bas pour emprunter et créer une capacité d’investissement public à l’échelle européenne, destinée à préparer l’avenir, à condition que les dépenses générées soient des dépenses productives : domaines de l’innovation et la digitalisation, la finance verte et la transition énergétique, et en capital de PME.
  • Conforter le rôle international de l’euro,  ce qui aiderait l’Europe à davantage peser économiquement. L’euro est aujourd’hui la 2ème monnaie utilisée au monde en termes de paiements internationaux (32,8% des transactions mondiales) derrière le dollar (40,5%) et la 2ème devise de réserve (20,3% des réserves de change mondiales sont détenues en euros contre 61,7% en dollar américain).

  salle du Joui Kai