Le Japon enregistre un déficit commercial de 9Mds€ après deux années d’excédent (+23Mds€ en 2017; +33Mds€ en 2016).

Sur l’année 2018, le Japon a importé davantage qu’il n’a exporté : la forte augmentation des importations (+10%) ne s’est pas accompagnée d’une hausse équivalente des exportations (+4%) générant un déficit commercial de 9 Mds € [1] [2] et interrompant sèchement deux années d’excédents (+23 Mds€ en 2017; +33 Mds€ en 2016). Pour rappel, le Japon avait connu 5 années de déficit post-Fukushima (2011-2015). La structure des exportations est restée stable, composée principalement de biens à forte valeur ajoutée : matériels de transport, appareils électriques et machines. La structure des importations a été dominée par les hydrocarbures (23% du total), également premier contributeur à la hausse. Dans le monde, la Chine est devenue le 1er client du Japon - détrônant les Etats-Unis - et est resté son 1er fournisseur. Deux accords commerciaux majeurs ont été signés en 2018, mais entrés en vigueur en 2019 : le CPTPP en mars et l’APE UE-Japon en juillet, concrétisant la politique d’ouverture commerciale souhaitée par l’administration Abe.

I. Une année ponctuée de chocs externes peu favorables au développement des échanges commerciaux

Selon le FMI, la croissance mondiale s’est élevée à +3,7% en 2018 (+3,8% en 2017) tandis que le commerce mondial a progressé de 4% en volume, décélérant légèrement par rapport à 2017 (+5,3%) sur fonds de tensions commerciales. Au Japon, le commerce extérieur a été particulièrement dégradé par la survenance de catastrophes naturelles. Une série d’inondations, tremblements de terre, vagues de chaleur et typhons se sont en effets abattus sur différentes régions du Japon durant l’été et l’automne. L’Aéroport du Kansai, hub logistique stratégique, avait été complétement bloqué en septembre suite au passage du typhon Jebi. L’impact sur l’économie japonaise s’est ressenti à la fin du troisième trimestre où le PIB a décliné de 0,7% en glissement trimestriel (-0,1pp dû au commerce extérieur). Ces catastrophes naturelles ont forcé le Japon à importer des produits habituellement produit sur son sol (ordinateurs, matériels médicaux..). Pire encore, la hausse du prix du pétrole en cours d’année (barre des 75$ [3] franchie en octobre) n’a pas aidé un pays extrêmement dépendant aux énergies fossiles (environ 90% de l’offre d’énergie) depuis Fukushima.

II. Les exportations (~ 625 Mds€) en hausse de 4% tirées par les véhicules et les machines industrielles 

En 2018, les exportations japonaises de biens comptabilisées par le ministère japonais des Finances (MOF) affichent un total de 81 480 Mds de JPY (~625 Mds €), soit une hausse en valeur de 4% par rapport à 2017 (+2% en volume). Le Japon n’a pas bénéficié d’un effet change pour renforcer la compétitivité de ses produits (appréciation moyenne de 2% du yen contre le dollar en 2018).

1) 5 économies concentrent 56% des exportations japonaises

La situation reste inchangée par rapport à 2017 : 56% des exportations japonaises de biens en valeur se sont dirigés vers 5 pays : la Chine, les Etats-Unis, la Corée du Sud, Taiwan et Hong Kong. L’Europe n’a acheté que 12% des produits exportés par le Japon (la France 1,5%), bien que ce montant croisse régulièrement depuis 2013.

  • L’Asie est restée le 1er client du Japon (+4%, 55% des exportations totales) avec cette année une progression notable de la Chine (+7%, 20% de part de marché) devenue 1er client, devant les Etats-Unis. Les Etats-Unis qui représentent 19% des exportations totales ont progressé à un rythme moins rapide (+2%) que la Chine.
  • Les exportations vers l’Europe (12% de part de marché) ont progressé de 4% et progressé moins vite qu’en 2017 où elles avaient crû de 11%.  Les trois principaux clients européens sont l’Allemagne (3% de part de marché), le Royaume-Uni (2%) et les Pays-Bas (2%). La France (1,5%) est le 4ème client du Japon en Europe.
2) Les exportations japonaises reposent sur des produits à forte valeur ajoutée

61% des exportations totales (380 Mds€) concerne les équipements de transports (23%), les appareils électriques (18% et les machines (20%). 85% [4] des appareils électriques et 50% des véhicules [5] fabriqués au Japon sont destinés à l’export. Au sein des équipements de transport, ce sont bien sûr les véhicules motorisés qui occupent la place la plus importante (58% du secteur, constitué par ailleurs de camionnettes, composants de véhicules, avions, bateaux etc.).

Les machines sont restées le 1er moteur de la croissance des exports (+5%, 20% des exportations pour 126 Mds€) contribuant pour un point de pourcentage à la hausse des exportations totales (+4%). Au sein de ce secteur, les machines génératrices de courant (23 Mds€) et les équipements de semi-conducteurs (21 Mds€) ont été dynamiques en 2018, avec tous deux une croissance de 7% en valeur. Sur les postes mineurs à l’export, on retrouve les produits chimiques (+9%, 11% du total), et les produits manufacturés (+5%, 11% du total). Les exportations de produits alimentaires, bien que représentant une portion infime du total des exportations (0,9% du total seulement) ont continué à croître en 2018 (+15%), résultat des politiques de promotion de la qualité de l’agroalimentaire et gastronomie japonaise à l’étranger.

II. Les importations japonaises (~ 634 Mds€) en hausse de 10% alourdies par la facture énergétique

En 2018, les importations ont crû de 10% en valeur (+7% en volume) pour atteindre la somme de 82 691 Mds de JPY (~634 Mds€). Cette hausse est due pour moitié à la plus forte consommation d’hydrocarbures (contribution de +5 pp) et l’autre moitié à une hausse équirépartie sur l’ensemble des secteurs (+5 pp). L’évolution du cours du pétrole sur 2018 (+32% sur un an selon le prix du pétrole produit par les membres de l’OPEP) est le facteur principal de cette hausse.

1) Le continent asiatique a consolidé sa place de 1er fournisseur du Japon (47% du total) tandis que le Moyen-Orient a vu ses exportations d’hydrocarbures vers le Japon croître significativement (+26%)

La Chine a occupé 23% des parts de marché des importations en 2018 : c’est le 1er fournisseur du Japon loin devant les Etats-Unis (11%, +11%). Dans le monde, l’Asie est le premier vivier des importations japonaises (47% du total, 24% hors Chine, +6% en valeur) suivi de l’Europe (13% du total, +10%). Les importations en provenance du Moyen-Orient ont été en progression fulgurante (13% du total, +26%). L’Arabie Saoudite est le 1er fournisseur de pétrole et produits dérivés du Japon suivi des Émirats arabes unis, du Qatar, du Koweït et de la Russie.

2) Place plus importante des hydrocarbures dans la structure des importations (23% du total) et une hausse en valeur de la plupart des autres secteurs à l’import

La structure sectorielle des importations reste dominée par les combustibles minéraux qui ont représenté 23% du total des importations contre 21% en 2017. Ces combustibles minéraux ont été constitués pour près de moitié par du pétrole, d’un quart de gaz naturel liquéfié et le reste de charbon, spiritueux et autres combustibles.

Les appareils électriques, second gros poste à l’importation (15% du total) ont progressés de 2,4% en 2018, poussés par la plus forte demande de téléphones et de semi-conducteurs (respectivement +3% et +1%, et constituant pour 40% des appareils électriques). Pour le reste, le Japon a importé davantage de produits alimentaires (9% du total, +3,3%), produits chimiques (10% du total, +13%) et matières premières (6%, +7%).

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1. La croissance japonaise reste très dépendante de sa performance à l’export (18% du PIB). Toutefois, la contribution du commerce à la croissance a été nulle en 2018 en raison d’importations trop importantes (+10%). Hors hydrocarbures (-5 pp), le Japon serait excédentaire à hauteur de 80% de l’excédent de 2017.

2. La Chine a détrôné les Etats-Unis en tant que 1er client du Japon et représente 20% des exportations (122 Mds€). À noter que les Etats-Unis ont entamé des négociations bilatérales avec le Japon (« Trade Agreement on Goods ») afin de réduire leur déficit bilatéral (le plus gros excédent du Japon dans le monde, à +50Mds€)

3. En 2018, la France n’a pas perdu de part de marché sur son premier secteur offensif, l’agroalimentaire (9ème fournisseur du Japon), et en a gagné beaucoup sur les matériels de transport en lien avec des livraisons d’Airbus (6ème fournisseur, contre 9ème en 2017). Seul bémol : les produits chimiques, dont la progression des exportations françaises (+7%) a été inférieure à la hausse des importations japonaises  (+13%). La France n’est que le 17ème fournisseur du Japon et ne représente que 1,5% des importations totales japonaises. Les perspectives sectorielles en ce début 2019 sont cependant bonnes avec l’APE UE-Japon, avec déjà des signes de tendance à la hausse dans les chiffres des douanes japonaises.


 

[1] À noter que les douanes japonaises expriment les exportations en FAB (Franco à Bord) et les importations en CAF (Coût Assurance Fret)

[2] Taux de change moyen sur 2018, 1€ = 130,4 ¥                                                       

[3] Source : Spot Price of OPEC Basket, moyenne annuelle pondérée du prix du pétrole produit par les pays membres de l’OPEP

[4] Source : JEITA (Japan Electronics and Information Technology Industries Association)

[5] Source : JAMA (Japan Automobile Manufacturers Association)

 Evolution annuelle

Répartition sectorielle